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Critiques de Mariam Petrosyan (163)
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La Maison dans laquelle

La maison dans laquelle est une plongée dans la psyché des enfants et des adolescents, rendue extrême par l'enfermement des protagonistes dans leur pensionnat.

Il ne faut tout d'abord pas croire,impression première et contresens à mon avis, que les jeunes de cet institut sont livrés à eux-mêmes, que les adultes ne font que passer. Ils sont perpétuellement là, professeurs, éducateurs, directeur, et même, on le comprend peu à peu, parents. Ce n'est pas un orphelinat à la Dickens, c'est juste que, dans l'esprit des enfants et des jeunes adolescents, ils ne comptent pas, ils n'existent pas. Seuls importent leur monde, leurs chambres, leurs couloirs, les salles de classes, abandonnées la nuit, la salle des professeurs, tout l'espace leur appartient, la maison leur appartient, dans leur galaxie parallèle, elle est entièrement à eux.

Dans ce monde, nul adulte ne peut pénétrer, et l'irrationnel, la violence, les sentiments forts d'appartenance à un groupe, la colère,la soif de pouvoir, l'amitié indestructible, la loyauté, les allégeances éternelles, l'amour, règnent en maitre sans aucun frein.

Dans ce monde, vous perdez votre identité civile, et vous gagnez un nouveau nom, vous renaissez, pour le meilleur ou pour le pire. Vous étiez Érik Zimmerman ( le seul personnage dont on connaitra l'État civil, il me semble), vous devenez Fumeur. Il y a aussi Sphinx, l'Aveugle, Chacal Tabaqui, ex Putois, Vautour, GrosLard, Sirène, Rousse, Roux, Loup ... à la mode indienne, votre parrain ou marraine vous rebaptise pour votre existence dans ce huis-clos de plus en plus étouffant.

L'auteure nous entraine et nous enferme dans la maison à la suite de Fumeur, projection du lecteur innocent et ignorant dans ce monde étrange, régi par des lois non écrites, au passé lourd et secret.

Comme Fumeur, nous ne comprenons rien, nous découvrons, nous voudrions poser des questions, mais on ne nous répond pas, ou de façon oblique, en mode Pythie de Delphes. Il faut décrypter les messages cachés des anciens, détecter les anciens, les reconnaitre à leurs dix-huit ans par rapport aux flash-backs d'une histoire plus ancienne, où les personnages principaux ( Aveugle, Sphinx, Noiraud, Vautour, Roux, Rousse) étaient des enfants âgés de 5, 6,7 ans occupés à poser les fondements de l'histoire principale.

L'histoire principale est la marche chaotique vers la sortie, vers l'extérieur, le monde réel. C'est là que le récit prend une dimension universelle et initiatique.

Le roman demande au lecteur une immense participation. Il faut du temps pour le lire, on ne peut pas survoler. Toutes les scènes, les dialogues, sont énigmatiques, et demandent interprétation. Car, j'ai oublié de le dire, ces enfants ne sont pas " normaux", ils sont handicapés moteurs, malades, et pour certains très déséquilibrés psychologiquement...D'où cette impression de perte de contrôle par les adultes. Et cela arrive parfois...Mais il faut voir les gonz auxquels ils ont affaire...

Le secret et la folie forment les fondations de la Maison. Les adolescents vivent une Maison qui n'est pas forcément la réalité, mais une projection de leurs fantasmes, voire de leur folie pour certains ( l'aveugle, le Macédonien, Lord...) le lecteur, comme son guide le pauvre Fumeur, doit constamment démêler le vrai du faux, la réalité des contes que l'on se raconte, et la mort omniprésente, due à quoi ?

Les adolescents vivent dans un univers fantastique. À chacun d'essayer de comprendre ce qu'est un Log ( un messager ? Un attardé léger ? ...) un sauteur ( à mon avis, un capable de sauter dans un monde encore plus lointain, qui n'est ni l'extérieur ni la Maison) un tombant ( ça, j'ai pas compris, peut-être un apprenti sauteur qui n'y arrive pas) ...Mais de nombreuses énigmes demeurent.

Le texte est remarquablement bien écrit. Il est d'une pureté granitique. Tout est en focalisation interne, à quelques passages près, et au lecteur de se débrouiller. Pas une trace de mièvrerie, d'incohérence, tout se répond, sans forcément s'expliquer.

Le handicap n'est pas le sujet du livre. Il est une métaphore de nos faiblesses structurelles, et de la capacité que nous aurons ou non de nous fondre, avec notre folie, notre Maison, notre enfance, dans l'extérieur où nous ne serons plus le prince ou la princesse de notre royaume, où nos lois ne seront plus les lois, et nos vassaux et nos seigneurs des gens rangés- ou pas.

Désolée d'avoir été longue, mais c'est un livre remarquable, rare, et sur lequel je n'ai pas dit le quart de ce que j'aurais voulu.
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La Maison dans laquelle

Rarement l’expression « livre-monde » n’aura aussi bien collé à un roman, cochant toutes les cases de cette catégorie finalement assez rare lorsque l’on sort du fantastique ; bien que ce roman en comporte certains aspects, on reste loin de la Fantasy, du Gothique ou autre S-F, même si les éditeurs jouent la confusion, sans doute afin de vendre plus facilement un livre qui sinon aurait tout pour faire peur ; le registre onirique a bien son importance, mais n’est en aucun cas central ; il reste une hypothèse, de par sa construction polyphonique, laissant le lecteur circonspect devant cette vidéo de présentation reprise au bas de la page Babelio du livre.



Sans trop vouloir s’attarder dessus, disons simplement qu’en plus d’être d’un goût graphique à la limite du possible ( mon dieu cette illustration de l’Aveugle… et le conteur façon Harry Potter… au secours ! ) elle frise allègrement la publicité mensongère… évident pléonasme… médiocrité des vendeurs de papier… frilosité du public… tout ça pour dire que ce livre n’avait en aucun cas besoin de toutes ces broderies étrangères à son univers si particulier, et dans lequel on entre sur la pointe des pieds…



C’est un monde duquel son auteure n’est jamais vraiment ressortie, tout comme un très grand nombre de lecteurs à travers notre monde, créant des communautés d’initiés de façon plus évidente que les romans de Thomas Pynchon, manifeste conséquence de cette expérience de lecture marquant durablement quiconque s’y essayant…

Imaginons ceux pour qui la vie a changé après cette lecture…



Sombre sans jamais tomber dans le glauque, son univers se découvre sans réellement se livrer ; les nombreuses références revêtent plus ou moins d’importance dans la compréhension globale de l’intrigue, et s’il en est une qu’il faut connaitre et à laquelle se reporter, c’est bien « Le Livre de la Jungle » de Rudyard Kipling, comme le souligne admirablement Anne Veslin-Gourdain, dont vous retrouverez un lien en bas de cette critique vers son blog « textualités » proposant — en dehors de l’usuelle boue post-moderne accompagnée de sa très politique et inquiétante préoccupation pour la littérature « jeunesse » ( on se réjouira que Mariam Petrosyan soit une femme, sans cela pas d’article… ) — bon nombre d’analyses littéraires pertinentes et fouillées qu’il faudra, comme celle-ci, lire seulement après en avoir terminé avec ce monde, évident appel à le prolonger, lui si difficile à quitter…



On remarquera au passage, sans mauvais esprit, qu’une des artificielles et partiales constructions intellectuelles de notre temps, le « validisme », est heureusement laissé au placard du roman ; on parlera ici de « roulants » et de « marchants », organisant même entre eux des concours de grimpe à l’échelle, et dont la récompense n’est pas du chocolat…



Au rayon plus personnel, ou s’interrogera sur le farouche matérialisme, voire le suréquipement ménager, de ces enfants, vus à travers les yeux d’une citoyenne arménienne de l’URSS… parmi tant d’autres étrangetés…



Livre unique donc, auquel donner une note relève de la gageure, surtout à considérer la place qu’il peut prendre dans une vie, comme dans celle-ci :

« Je pense que je ne pourrai pas donner un avis objectif sur la Maison, tant en fin de compte elle est le témoin de notre propre histoire. Point de passage entre un avant et un après, entre notre réalité et nos fantasmes, elle a fait bugger le temps en y ajoutant une nouvelle boucle . . . Elle a agi comme un révélateur, nous a poussé à sauter/ tomber dans cet inconnu qu'on connaissait pourtant déjà. Dans la douce folie qui y régnait, on a eu moins peur d y dévoiler nos sentiments, quelques unes de nos failles et le fond de nous même . Elle nous a autorisé le rêve et veille désormais sur les mythes que nous nous sommes créés à deux. »



Exactement le genre de livre qui fait la réputation d’un « petit » éditeur comme Monsieur Toussaint Louverture… mais attention aux récentes tentations commerciales ( au mauvais sens du terme ) …à trop vouloir vendre de papier, on fini par s’en étouffer…
Lien : https://textualites.wordpres..
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La Maison dans laquelle

L’histoire d’un abandon, voire d’une fuite…



Très peu d’étoiles associées à cette critique mais si je n’ai pas aimé du tout lire ce livre au point de ne pouvoir le terminer, cela parle davantage de moi que de ce roman initiatique, livre-monde aux indéniables qualités.



Je suis entrée dans la Maison, impatiente et curieuse, il faut dire qu’après une telle présentation, on ne peut résister s’attendant à ne jamais pouvoir lâcher le livre et à être transformé par cette immersion :

"Dans la Maison, vous allez perdre vos repères, votre nom et votre vie d'avant. Dans la Maison, vous vous ferez des amis, vous vous ferez des ennemis. Dans la Maison, vous mènerez des combats, vous perdrez des guerres. Dans la Maison, vous connaîtrez l'amour, vous connaîtrez la peur, vous découvrirez des endroits dont vous ne soupçonniez pas l'existence, et même quand vous serez seul, ça ne sera jamais vraiment le cas. Dans la Maison, aucun mur ne peut vous arrêter, le temps ne s'écoule pas toujours comme il le devrait, et la Loi y est impitoyable. Dans la Maison, vous atteindrez vos dix-huit ans transformé à jamais et effrayé à l'idée de devoir la quitter."



Je suis entrée dans la Maison après qu’elle m’ait fait l’honneur de m’ouvrir ses portes en étant persuadée de m’y sentir bien, de m’y sentir un peu comme chez moi et de vivre une véritable aventure avec mes autres co-locataires, Sandrine, Bernard, Diana et Doriane. J’aime les expériences de littérature, aucun doute cette Maison étrange, qualifiée parfois d’OVNI littéraire, d’OLNI, saurait m’enchanter et me fasciner le temps de quelques longues heures. Certaines critiques magnifiques et dithyrambiques, je pense entre autres à celle d’Onee, m’ont de plus tellement plu et convaincue.



C’était hélas sans compter sur ma claustrophobie, réelle, et mon caractère solitaire…Après une immersion enchanteresse, la Maison m’a peu à peu engloutie, asphyxiée, étouffée de ses odeurs, de sa promiscuité, de ses nuits interminables et de ses aubes pisseuses, de ses poussières et de son manque de lumière, de son étrangeté, au point de me sentir mal à chaque fois que j’en ouvrais la porte, et de ne plus pouvoir en franchir le seuil. Ce fut physiquement impossible, en proie à des maux de tête, presque des nausées, un quasi-dégout, procrastinant chaque poursuite pour finir par abandonner, penaude et confuse. Pour finir par la fuir, sortir en courant, sans me retourner. Abandonnant lâchement mes co-locataires qui, eux, y ont vu des choses que je n’ai pas vu, qui ont pris un réel plaisir à l’habiter, à s’y couler, à s’y intégrer et à aller butiner dans chaque alcôve présente au sein de la Maison, telle une ruche vivante, foisonnante.



Cette Maison dans laquelle il se passe en effet tant et tant de choses. Multiples événements qu’il est délicat de résumer facilement, si ce n’est qu’il s’agit d’un institut pour enfants et adolescents souffrants tous de handicaps différents. Certains sont handicapés des jambes, d’autres n’ont pas de bras, certains sont aveugles, d’autres ont des problèmes psychologiques, tels que paranoïa, schizophrénie…Cette Maison, ce foyer, est dédié à ces enfants. La Maison est située aux confins d’une ville, dans un quartier délabré, comme pour bien souligner la mise à l’écart de ces jeunes marginaux. Chaque enfant a un surnom et vit au sein d’un groupe, chaque groupe ayant à sa tête un chef et des caractéristiques qui lui sont propres. Chaque groupe a ses lois, ses rites, ses légendes et réinvente l’ordre et la hiérarchie. Chaque groupe a ses ambitions, ses coups du sort, ses ratés, ses succès. Ses alliés et ses ennemis. Une mini société à chaque chambrée. Obéissante pour certaine, anarchiste, écologique ou gothique pour d’autres. Cet aspect sociétal est envoutant je dois bien le reconnaitre. Envoutant et fascinant également la Maison en tant que telle sur laquelle je me suis d’abord concentrée, cette maison que l’on voit de l’extérieur, c’est-à-dire du point de vue des adultes, et surtout de l’intérieur, adoptant de ce fait de le point de vue de ces adolescents. Des mondes intermédiaires semblent surgir, telle que la Forêt, sorte d’imaginaire initiatique du passage au monde adulte.



Je savais certes que l’expérience allait être pour le moins étrange, le livre nous le signale à maintes reprises, si singulière au point d’être accepté ou rejeté par le livre lui-même :

« La maison exige une forme d'attachement mêlée d'inquiétude. Du mystère. Du respect et de la vénération. Elle accueille ou elle rejette, elle gratifie ou dépouille, inspire aussi bien des contes que des cauchemars, tue, fait vieillir, donne des ailes... C'est une divinité puissante et capricieuse, et s'il y a quelque chose qu'elle n'aime pas, c'est qu'on chercher à la simplifier avec des mots. Ce genre de comportement se paie toujours ».



Mais le scénario avait tout pour me plaire, ce roman initiatique, véritable éloge de la différence, avait tout pour me porter, traitant d’un sujet universel, celui des affres de l’adolescence. Ces enfants éclopés éprouvent ce que tout adolescent éprouve : la peur de devenir adulte, de ne pas être à la hauteur en devenant adulte, c’est-à-dire ici en sortant de la Maison. La façon de traiter ce sujet m’a même fait penser au réalisme magique de la littérature sud-américaine. Sans parler de la plume de Mariam Petrosyan, magnifique, comme l’indique le nombre incroyable de passages surlignés dans mon livre, et de l’humour qui vient réchauffer cette ambiance aux tonalités souvent sombres et froides :



« Au moment où je lui retournai sa gifle, les filles exultèrent ; je compris tout de suite que c’était précisément ce qu’elles attendaient. Gaby rejeta la tête en arrière et poussa un hurlement plus perçant que le foret d’une perceuse dans un mur de béton. Les autres donnèrent de la voix à leur tour et se laissèrent tomber du comptoir – une, puis deux, puis trois, puis dix – telles des prunes trop mûres, à cette différence près que des prunes ne se seraient pas jetées sur moi ».



Alors pourquoi une telle sensation physique de lassitude dans un premier temps, puis de rejet total ?



La longueur du livre tout d’abord, aux environs de 1000 pages, 1070 pages exactement, une brique. Un pavé uniquement centré sur la maison, ses habitants, ses mystères, ses rituels. Une lecture stagnante…J’ai eu l’impression de déguster tout d’abord un plat succulent, un plat centré sur un seul met, dont le goût absolument unique a fini par devenir de plus en plus écœurant. Jusqu’à l’indigestion. Ce que j’ai préféré dans le premier tiers du livre fut précisément les rares moments où nous voyons la Maison de l’extérieur, cela apporte des respirations bienvenues et un certain recul pour mieux se replonger dans la Maison ensuite.



L’ambiance ensuite, certes onirique, envoutante, captivante, voire ensorcelante, fantastique, mais une ambiance saturée, un huis-clos sentant le renfermé, le jus de chaussettes, la sueur froide et le café bouilli, une atmosphère poussiéreuse, poisseuse, qui a fini par me mettre mal à l’aise, à venir titiller ma claustrophobie et à venir réveiller l’aiguillon de la saudade, cet aiguillon qui me pique si souvent lorsque je n’ai pas ma dose de solitude et d’air libre, sans parler de ces enfants cabossés dont on ne cesse de regarder les déambulations, leur façon de ramper, de se mouvoir, de se chercher, de se battre…je ne me sentais pas à ma place et ne désirais qu’une chose : en sortir. La galerie des personnages est riche mais je n’ai pas réussi à m’attacher à ceux-ci, restant observatrice, extérieure dans cet intérieur…enfermée tout en étant tenue à distance. Ce qu’il y a de pire pour moi pour me mettre mal à l’aise.



Enfin, une lecture tellement énigmatique qu’elle m’a perdu. On sent qu’il y a de multiples références, à chaque page, à chaque citation postée en début de chapitre, des failles temporelles, des failles spatio-temporelles même, des boucles de temps circulaires, des références à de grands classiques tel que Alice au pays des merveilles (la seule que j’ai vraiment réussi à appréhender mais il y en a plein d’autres manifestement à côté desquelles je suis passée). Je suis consciente de sa richesse, consciente d’être passée à côté d’un phénomène, d’un livre qu’il est possible de relire de multiples fois en découvrant à chaque lecture des pépites, des clins d’œil. J’en suis consciente mais je n’ai pas réussi à accrocher.



Cet abandon m’a posé question. Aurais-je perdu mon âme d’enfance et l’adolescente ? Ai-je oublier la magie et l’univers propre à cette période de la vie au point de m’en lasser lorsqu’un livre tel que celui-ci propose une immersion jusqu’au-boutiste dans cet âge d’or dont on ne veut jamais sortir, tel Peter Pan ? Pourquoi cet OVNI n’a pas fonctionné sur moi ? Pourquoi n’ai-je pas ressenti à la lecture de ce livre la nostalgie de l’adolescence ? Pourquoi ne me suis-je pas reconnu dans les tourments de ces adolescents ? Le fallait-il d’ailleurs ?

Et puis je me suis dit qu’une expérience de littérature ne fonctionne pas avec tout le monde et c’est ce qui en fait sa richesse. Pour moi ce fut un sacré raté que je ne suis pas prête d’oublier, un raté si étrange, le livre étant riche de nombreuses et magnifiques fulgurances, de beautés incroyables, notamment dans la Forêt, sorte d’’endroit imaginaire, qui comporte des passages merveilleux, Mariam Petrosyan a réellement une écriture fluide et intelligente, mais le tout m’a provoqué un malaise que je n’ai jamais éprouvé auparavant en lisant. Et c’est sans doute en cela que le livre est magistral, certains ont envie de s’y perdre et de se laisser porter, d’autres d’en comprendre toutes les facettes et d'intellectualiser l'expérience, certains comme moi sont tout simplement rejetés et vivent ce rejet non sans un certain malaise. Pas étonnant qu'il existe des forums, des groupes de discussions dans le monde entier à propos de ce livre…C’est exceptionnel d’avoir des ressentis si variés, des discussions si poussées, des analyses si fines, d’autant plus qu’il s’agit du premier roman de Mariam Petrosyan, premier roman qu’elle a mis dix ans à écrire.



Lors de notre lecture commune je fus la seule à avoir abandonné et à n’avoir pas aimé. Aussi je vous invite à découvrir les critiques de mes ami.e.s Babeliotes, @HundredDreams, @Berni29, @DianaAuzou et @Yaena, qui, comme de nombreux autres lecteurs, sauront vous convaincre de rentrer dans la Maison et de l’aimer à sa juste valeur !

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La Maison dans laquelle

" Salut à vous les avortons, les prématurés et les attardés. Salut les laissés-pour-compte, les cabossés et ceux qui n'ont pas réussi à s'envoler salut à vous les enfants - chiendent".

Bienvenue dans " La maison dans laquelle" durant 1 mois j'ai déambulé dans cette maison pas comme les autres, une maison immense faite de couloirs et de chambres et surtout peuplés d'enfants.

Dans " La maison dans laquelle" il y a des groupes, les chiens, les oiseaux, les rats, les faisans et le groupe quatre. La maison est une micro société avec ses règles et ses chefs. Dans " La maison dans laquelle " tout est fait pour oublier la vie d'avant, oublier le monde extérieur. On vous choisit un surnom en rapport avec votre physique ou vos habitudes de vie.

Dans " La maison dans laquelle" il y a des roulants, des marcheurs… les plus forts s'occupent des plus faibles.

Dans " La maison dans laquelle" il y a la nuit des contes où l'on aime se faire peur, ou parler des disparus bref inventer des histoires.

Le livre de Mariam Petrosyan est tellement dense que l'on s'y perd, et moi j'ai aimé m'égarer dans ce labyrinthe de couloirs. J'ai découvert le groupe quatre, peut-être le groupe le plus sain et le plus intéressant. L'aveugle Sphinx, Chacal Tabaqui, Noiraud, Bossu, Lord, Larry, le macédonien, Gros lard, Fumeur.

Ce livre a de quoi intimider mais quelle aventure

Entrer dans " La maison dans laquelle" et perdez-vous.

Joyeux Noël à toutes et tous
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La Maison dans laquelle

FAS-CI-NANT ! Il y a des romans qui vous habitent, et puis il y a ceux que vous devez vous-même habiter, investir totalement pour les appréhender, les faire vôtres, vous y sentir comme chez vous et prendre plaisir à explorer leurs moindres recoins. Clairement, La Maison dans laquelle vous vous apprêtez à pénétrer est de ceux-là ! Elle héberge déjà un certain nombre de jeunes pensionnaires éclopés et de personnel d'encadrement. Mais de ces derniers nous parlerons peu, tellement l'exploration de l'enfance nous occupera tout entiers. Et désormais, la Maison vous a vous aussi : lecteur, voyeur, explorateur de l'imaginaire sans bornes d'une enfance abimée, bousculée, à reconstruire sur des ruines, des exemples. Des mythes.





Elle semble d'abord accueillante, cette maison. A sa manière. « J'avais encore le dépliant sur lequel on pouvait lire : ‘' Les élèves l'appellent tout simplement La Maison. Ce mot révèle tout ce que notre école représente pour eux : une famille, le réconfort, la compréhension mutuelle, l'attention bienveillante.'' Une fois que j'aurais quitté cet endroit, j'avais bien l'intention de le faire encadrer. » Il faut dire qu'elle accueille un drôle de public : des aveugles, des bossus, des roulants, des manchots… Très vite, La Maison dans laquelle nous entrons nous ensorcelle gentiment, nous laissant entrevoir, de ses pas de portes entrebâillés, les clans qui se forment, les chambrées improbables, les jeux de rôles et les affrontements, les rituels, les alliances et mésententes, les lieux communs et ses recoins les plus secrets… Puis bientôt, La Maison dans laquelle il se passe des choses étranges et fantastiques commence à vous laisser entrevoir sa magie blanche, mais aussi sa magie noire. Tout décor a son envers, tout jour a sa nuit. Et toute nuit, ses monstres.





Vous l'aurez compris, on entre dans ce chef-d'oeuvre comme dans un roman-maison. Avec sa porte d'entrée officielle, ses couloirs secrets, ses escaliers dérobés… et ses fenêtres condamnées : celles qui donnent sur l'Extérieur, l'inconnu, là où ceux qui sortent d'ici disparaissent, comme morts à jamais pour ceux qui restent, les survivants, les habitants. Eux continuent d'y vivre avec cette force et cette résilience propre aux enfants, qu'ils puisent en grande partie dans cette magie de l'enfance où tout est possible, crédible, imaginable. du moment qu'on y croit, que ça nous protège, que ça nous permet de fuir, littéralement, les difficultés que la vie a placé trop tôt sur nos chemins. C'est pourquoi La maison dans laquelle vous allez vous inviter ne se visite que de l'intérieur, à travers les yeux de ses habitants nous plongeant dans leur univers de contes, rêves et cauchemars qui fondent les mythes de ces enfants, que nous avons tous été un jour. C'est ce qui rend cette lecture palpable et universelle, gommant les différences apparentes. Cette lecture nous fait retrouver le chemin de ces mondes parallèles que nous nous sommes créés ou avons explorés, que ce soit dans nos lectures, nos amitiés, nos refuges, nos nuits ensorcelées… Comme tout groupe d'enfants, celui-ci s'invente son propre univers qui l'occupe tout entier, et qui relègue les adultes au rôle de figurants. Chaque personnage est attachant car profondément humain, avec ses qualités et ses défauts, parfois cette cruauté propre à l'enfance. Mais toujours, la maison leur fait prendre conscience que leur complémentarité transcende leurs difficultés et notamment leurs handicaps. Plus qu'un refuge, elle est donc aussi une ode à la tolérance.





Grâce à différents narrateurs, nous aurons diverses entrées dans la maison : Tout d'abord, celle des nouveaux arrivants qui, comme nous, débarquent dans ce lieu mystérieux, peuplé d'inconnus, obéissant à ses lois propres. Fumeur, par exemple, nouveau roulant, aura les mêmes réactions et questionnements que le lecteur sur tout ce qui se passe et se dit ici ; il nous permettra de nous intégrer, d'essayer de comprendre ; Sceptique, il gardera les pieds sur terre.

Ensuite, nous verrons aussi la maison avec les yeux des pensionnaires de longue date, qui nous font sombrer dans leur univers clos et rodé, peuplé de légendes mêlées de vérités. Nos plus étranges moments seront ceux passés avec ce mélange d'enfants handicapés, malades ou mourants. Avec eux, tout un imaginaire s'imbrique dans la réalité à tel point que nous-mêmes, adultes, doutons de la raison et croyons à l'incroyable.

Enfin, les points de vue de l'encadrement viendront parfois éclairer autrement les scènes et raisonnements auxquels nous prenons part. Car sous nos yeux s'anime et s'agite tout un imaginaire dans lequel s'ancrent ces enfants pour survivre aux réalités difficiles de leur vie, peuplé de monstres et de gentils fantômes, de passages secrets jusqu'à un « autre monde », de Sauteurs qui les provoquent et de Tombeurs qui les suivent, d'ombres nocturnes et de contes effrayants qui font office de mythes fondateurs. Des événements se déroulent dans la maison qui flirtent avec le fantastique. Est-ce réel ou l'imagination des enfants, les drogues, les cachets ? Mais le fait d'y croire, n'est-ce pas déjà faire exister cet autre monde, qui les attire et les effraie…?





Si, pour s'adapter, les nouveau pensionnaires doivent se fondre dans l'univers légendaire que les anciens ont déjà créé, l'encadrement doit alors gérer ces petits monstres persuadés que la maison dans laquelle on les a placés est magique : qu'elle leur parle, veille sur eux ou les punit, qu'elle est l'entité refuge et que la seule Loi qu'ils doivent suivre est la sienne, qui leur murmure menaces ou encouragements, des histoires dignes de contes les plus sombres et les plus fous, pendant leur sommeil, leurs séances de fumette en douce ou leurs douces nuits alcoolisées qui berceront leur séjour longue durée dans ce lieu enchanté, parmi les désenchantés… Pendant sept ans ils vivent les uns sur les autres, s'habituent, s'en réfèrent entièrement à la hiérarchie qui se forge, parfois avec les manières extrêmement brutales et violentes des convictions de l'enfance. Mais que se passe-t-il au bout de ses sept ans ? La Maison dans laquelle ils ont vécu est tout pour eux, comme ses autres habitants. L'extérieur n'existe pas, dehors il n'y a rien. de leur attachement pour la maison naît la crainte du dehors, du vide, du néant. de la mort. Alors ce déchirement, ce moment où l'on voit les gens partir mais jamais revenir, est un traumatisme de plus. L'inconnu effrayant. Qu'y a-t-il après l'enfance ? Ne peut-on y rester coincés, lorsqu'on a peur de grandir ? Et avec quoi comble-t-on les lacunes de la compréhension ou du savoir ? Avec l'imagination, très fertile à cet âge où la sensibilité est exacerbées, où chaque sensation est une aventure à elle toute seule, où la magie lie le vraisemblable à l'invraisemblable.





Et puis surtout, il y a les surnoms. On touche ici au coeur de la maison dans laquelle nous allons passer des heures d'errances délicieuses. Chaque nouvel arrivant se voit attribuer un Surnom qui forgera son identité au sein du groupe, surnom plus ou moins terrible en fonction de ce qu'il inspire aux autres…! Si tu entres ici, lecteur, tu devras donc accepter de vivre avec des Oiseaux en deuil, un Lord et un Vautour, des Crevards Pestiférés, un Fumeur et un Chacal, une Sauterelle, un Loup et une sorcière, et bien d'autres habitants hallucinants qui vont t'en faire voire de toutes les couleurs… Mais n'aie crainte, lecteur assidu et curieux, pour peu que tu n'aies pas encore perdu ton âme d'enfant, la Maison finira par te délivrer tous ses secrets. Sous ses airs impénétrables et hermétiques au premier venu, elle finit toujours par parler et s'ouvrir à ceux qui savent écouter ses murmures, lire sur ses murs, chuchoter des secrets… Peut-être même auras-tu un surnom, toi-aussi. Une chose est sûre, La maison dans laquelle on passe de l'enfance à l'âge adulte est difficile à quitter - même pour le lecteur. Comme l'enfance, que certains sont prêts à tout pour ne pas franchir, faute de se sentir armés pour affronter le monde réel des adultes qui les ont « abandonné », pour les parquer dans cette cour des Miracles. La maison est ce passage métaphorique de l'enfance à l'âge adulte. C'est aussi elle le refuge immuable qui remplace les parents, tandis que les éducateurs changent. Elle est donc grandement personnifiée, et devient le personnage principal du livre et du titre.





« Plus tard, il remarqua que la maison était vivante et qu'elle était capable d'aimer, elle aussi. D'un amour unique en son genre ; inquiétant parfois, jamais terrifiant. »

Comme on le ferait des parents, on se demande comme ces enfants : la maison laissera-t-elle ses Oisillons quitter Le Nid…? Leur apprend-elle l'indépendance, la débrouillardise, ou son cocon est-il trop confortable ? Tout dépend du caractère de chacun, mais elle les marquera tous.





«La maison exige une forme d'attachement mêlé d'inquiétude. du mystère. du respect et de la vénération. Elle accueille ou elle rejette, gratifie ou dépouille, inspire aussi bien des contes que des cauchemars, tue, fait vieillir, donne des ailes... C'est une divinité puissante et capricieuse, et s'il y a bien quelque chose qu'elle n'aime pas, c'est qu'on cherche à la simplifier avec des mots. Ce genre de comportement se paie toujours. »





Je vous invite donc à découvrir avec délice sa construction osée, cette architecture unique, sombre et brillante, étouffante et joyeuse, mystérieuse et universelle. Une certaine réalité s'esquisse doucement au fil des pages, mais un léger doute s'obstine à planer en nous, relique de nos croyances enfantines. En dévoiler plus serait trahir la Maison dans laquelle… Dans laquelle quoi ? Tout le plaisir du lecteur réside dans cette question, celle que les nouveaux venus se posent et qui tiendra le lecteur en haleine pendant plus de mille pages. N'ayez pas peur de vous y perdre, car le but n'est pas l'arrivée mais le chemin, celui qui mène de l'enfance à l'âge adulte. « il faut parfois se perdre pour trouver l'introuvable, sinon tout le monde trouverait l'introuvable. » (Pirates des Caraïbes^^). Ce livre d'ambiance et d'humanité enfantine, truculente à souhait, est l'un des romans les plus marquants que j'ai lu. C'est un texte véritablement onirique d'une puissance incroyable, que l'auteure a mis dix années à écrire - en commençant par dessiner son univers et ses personnages. Et le plus dingue, c'est que je ne suis allée voir les dessins qu'après ma lecture, et c'est exactement l'univers que j'avais imaginé (lien ci-dessous) ! Ce roman redessine l'enfance sur les murs de votre mémoire. Je l'ai fini mais les images dont il m'a abreuvée à chaque page demeurent et me hanteront longtemps.
Lien : https://www.ecosia.org/image..
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La Maison dans laquelle

La Maison dans laquelle, déjà l'étrangeté vertigineuse du titre ressemble à une symphonie inachevée, un chemin qui retient son souffre au bord du précipice, un peu comme ces routes emportées par l'eau tumultueuse des crues...

C'est un titre amputé, avec un trou béant laissé devant nous et qu'il reste à combler, à contourner peut-être pour ne pas tomber dedans... Un titre avorté, cabossé, fracturé, piétiné, qu'il reste à reconstruire, imaginer, habiter peut-être...

Avortés, cabossés, fracturés, piétinés, ils le sont aussi les pensionnaires de cette Maison, des enfants, - les petits, et des adolescents, - les grands, qui sont entrés un jour dans cette Maison parce qu'ils étaient tous handicapés... Bienvenue les gosses !

La Maison dans laquelle je suis entré à mon tour, en poussant les premières pages, m'a envouté, pour ne pas dire ensorcelé.

Je sais bien qu'elle choisit qui laissait entrer... Je ne sais pas si elle était faite pour moi puisqu'elle accueille des éclopés, des laissés-pour-compte, ceux qui n'ont pas réussi à s'envoler... Et si j'y ai trouvé ma place, mon chemin en quelque sorte, c'est peut-être que je leur ressemble un peu...

Elle arbore fièrement à son entrée « Hospice pour orphelins abandonnés ».

La Maison dans laquelle j'ai été absorbé est une sorte de ruche géante qui grouille sans cesse. Même la nuit... J'ai aimé les respirations, les stridulations de ce roman.

" La Maison a étalé devant moi tous ces possibles, elle a ouvert ses portes et ses chemins infinis. "

On leur donne des surnoms à ceux qui arrivent ici pour la première fois. Parfois en grandissant ils changent de surnoms...

Le Fumeur, Cheval, Vautour, Rousse, Sirène, les Siamois, Sauterelle, Sphinx, l'Aveugle, Putois, Bossu, le Macédonien, Gros Lard, Crâne, Sorcière, Noiraud, Roux, Grand-Duc, Gnome ou même Ralph...

Les éducateurs aussi ont des surnoms. Même le directeur...

Il y a des batailles de chefs, des luttes et des passations de pouvoir, des guerres de gangs, ça ferraille entre groupes, c'est parfois violent.

Il y a cependant des grands qui protègent les petits.

Ils créent leur monde, ils ont leurs propres codes qu'ils ont inventé de manière instinctive.

Parfois ils s'enivrent en écoutant des contes, pleurant de bonheur avec des histoires pleines de neiges, de dragons...

Pleines de monstres comme eux peut-être... Voulant leur ressembler.

Oui, on pourrait croire au premier abord que ces enfants sont livrés à eux-mêmes, dans une violence parfois extrême... N'en croyez rien...

Brusquement, j'étais avec eux, j'étais comme eux, j'étais eux...

La Maison dans laquelle je me trouve pour vous écrire, respire, vit, caresse, effraie, protège peut-être, rejette aussi... Protège de l'Extérieur. Car il y a un Extérieur qui est le monde des adultes, tandis que la Maison est l'univers qui appartient aux enfants. Il arrive que des couloirs se transforment en Forêt toute proche, emportant les angoisses, les peurs... Derrière les miroirs, il y a aussi un endroit qui est l'autre côté de la Maison, l'envers du décor, sans doute le plus beau... Voilà pour l'état des lieux. Maintenant, je vous laisse regarder par le trou de la serrure...

C'est comme un double abîme : l'Extérieur qui est enfermement et la Maison qui est ouverture sur un autre monde.

La Maison dans laquelle je me suis perdu, est immense, me paraît chaque jour plus grande, comme si elle engloutissait le silence autour d'elle.

Cette Maison m'échappe. Elle semble obéir à tant de choses complexes...

Et si quelqu'un, à un moment donné, avait sorti de son imagination cette Maison, conçu ce système, inventé une trame, un scénario, créé des personnages, attribué des rôles, une place et enlevé toutes les montres, toutes les horloges... ?

Et si tout ceci n'était qu'une vaste comédie ? Et si la puissance littéraire de Mariam Petrosyan m'avait ensorcelé dans ses espaces mystérieux et ses fulgurances poétiques ? Et si les écrivains étaient des personnes capables de nous faire perdre la tête ?

La Maison dans laquelle je suis entré est aux confins d'une ville. N'avez-vous jamais remarqué que les vies cabossées sont aux confins des villes ? Elle est à la frontière entre deux mondes. Celui que nous connaissons, maîtrisons, - du moins pensons le maîtriser, et puis l'autre et son étrangeté, sa différence, celui où le temps n'a plus de prise.

La Maison dans laquelle je prends le temps de vous écrire, ne possède ni horloges ni montres. C'est comme si elle imposait son propre temps...

C'est l'éloge de la différence, des bras cassés, des failles, des blessures, de ce qui est peut-être invisible et le restera à jamais. C'est l'éloge de l'enfance dont on ne voudrait jamais revenir. C'est l'éloge du temps déréglé, tordu dans tous les sens, puisqu'il est question de l'enfance et de l'adolescence...

La Maison dans laquelle je questionne les murs, les portes, les couloirs, les labyrinthes, me fait peur car j'entrevois à chaque page la possibilité d'obtenir des réponses.

Ce livre est un précipice. Vouloir comprendre est la meilleure manière de perdre pied à jamais... Comme il est parfois heureux de ne pas être maître des choses...

La Maison dans laquelle je me suis laissé consumer, page après page, était en lisière d'un monde peuplé de sortilèges, en lisière de nos vies et je le soupçonnais si peu jusqu'à présent.

La Maison dans laquelle... Finalement ce trou abyssal, laissé par une lame de fond qui aurait arraché la fin du titre, n'était rien d'autre peut-être que le temps qui passe...



« Je n'aime que les anomalies et les fêlures chez les êtres, les déchirures et les failles, car c'est par là que s'engouffre la vie, que la lumière passe. Ce qu'on appelle normalité me fait peur. J'y vois un renoncement qui ne ressemble en rien à ce qui me fait aimer l'existence - son galop, ses loupés, ses défis. il y a une droiture chez les fêlés, ils ne font que chercher dans le quotidien ce qui n'est pas visible à l'oeil nu. »

Simonetta Greggio



Dans cette lecture commune qui fut pour moi un vrai coup de coeur, je remercie quelques fidèles pensionnaires de cette Maison, Chrystèle (HordeDuContrevent), Diana (DianaAuzou), Doriane (Yaena) et Sandrine (HundredDreams). Sans elles, mes mots ne seraient rien.

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La Maison dans laquelle

En septembre 1962, je me retrouve à l'entrée du pensionnat avec mon petit cartable dans une main et la main de ma maman dans l'autre. Je rentre dans une vieille bâtisse où le temps semble s'être arrêté. J'ai 6 ans et je me demande ce que je fais là. En juin 1974, je ressors du même établissement avec le Bac en poche pour bondir dans le monde extérieur. Mariam Petrosyan aura mis 10 ans pour écrire «La Maison dans laquelle». C'est le seul roman de cette auteure russe. Selon ses propres dires, elle ne l'a pas écrit ; elle y a vécu et j'y ai vécu moi aussi…Entre la critique de mon amie Chrystèle et celle de mon copain Berni, je me devais de faire une place pour un livre que j'ai mis deux mois à lire sur cet épisode de pension qui a tenu 12 ans de ma vie.



C'est un livre de 1000 pages pour des lecteurs avertis. le nombre de personnages, de lieux, de temps vous entraînent dans un maelström d'histoires et d'aventures. Dans cette maison, on apprend à jouer aux échecs, à dessiner et à écrire sur les murs (moi j'y ai appris à graver sur les pupitres en bois de nos bureaux d'écoliers), à faire des amulettes et des gris-gris, à tricoter, à écouter du Led Zeppelin (Eh oui mon Paulo), à tomber amoureux, à se battre et aussi à soigner. Les chapitres s'entrechoquent en représentant soit le point de vue d'un personnage ou une année écoulée. On passe ainsi du « je » au « il »sans aucune transition, du passé au présent, du jour à la nuit, de l'été à l'hiver. Mais c'est surtout grâce à l'écriture juste et vraie de Mariam Petrosyan que l'on peut évoluer à l'intérieur du livre sans s'épuiser ou pire se perdre.



« Les murs étaient leurs journaux à eux, leurs magazines, leurs panneaux de signalisation, leur téléphone, leur musée. le principe était simple : on y notait ce qu'on avait à dire, après quoi il ne restait qu'à attendre. Ce qui en découlait ne dépendait plus de l'auteur. Un surnom pouvait aussi bien être oublié et recouvert d'un autre gribouillis, qu'adopté et employé sur le champ. »



Le roman raconte l'histoire de ces jeunes enfants qui rentrent dans un pensionnat. Ils sont handicapés, manchots, aveugles ou en fauteuil. On les suit de la rentrée dans l'établissement jusqu'à leur dernière année. Dans la Maison, des clans se forment : les rats, les oiseaux, les chiens, chacun avec leur propre chef et leurs propres règles. Dans ce milieu clos, on y fantasme sur l'extérieur. La solitude de chacun permet à tous d'imaginer un univers fantastique qui se mêle au train-train quotidien. Dans cette maison, il y a des nuits très longues ou l'on se raconte des histoires à faire peur (Mes amies Nicola et Sandrine vont comprendre le plaisir que j'ai eu à perpétuer cette tradition). Les enfants grandissent et deviennent des ados avec leurs premières cigarettes, leurs premières gouttes d'alcool et leurs premiers émois amoureux. Un même établissement où l'on reste entre copains de l'école primaire, au collège et enfin au lycée.



« Salut à vous les avortons, les prématurés et les attardés. Salut, les laissés-pour-compte, les cabossés et ceux qui n'ont pas réussi à s'envoler ! Salut à vous, enfants-chiendent ! »



Et les personnages me direz-vous ? J'y arrive. Il faut faire un effort pour retenir et suivre la centaine de pensionnaires qui habitent cette maison. Mais il y a aussi les directeurs, les éducateurs sans oublier les enseignants et le personnel soignant, les parents, et même certains animaux de compagnie. Il n'est pas facile de comprendre qui est qui dans un premier temps. Heureusement l'histoire tourne autour d'un noyau dur d'élèves qui vont vous permettre de vous accrocher et de rester dans la lecture (et dans la maison par la même occasion). Chez ces pensionnaires il y a l'Aveugle, chef incontesté et incontestable de la Maison et ami d'enfance de Sphinx. A eux d'eux ils vont être les piliers du roman. Viennent ensuite les Chenu, Fumeur, Roux, Vautour, Chacal (mon préféré), Noiraud, Lord, Larry, le Macédonien et Loup. Grace à Mariam Petrosyan, ils deviennent tous réels et attachants. On finit par habiter et vivre avec eux. Les adultes ne sont pas oubliés. Il y a Requin le directeur, Elan et Ralf les éducateurs. Les rivalités entre petits et des grands sont bien présentes avec la complexité du passage au monde des ados qui les accompagne. Les relations avec les adultes ne sont pas oubliées mais c'est la sortie vers le monde extérieur qui est traitée de façon magistrale.



« le monde de l'adolescence est moins agréable que celui de l'enfance, mais beaucoup plus intense et plus riche en émotions et en sentiments que celui des adultes. le monde des adultes est ennuyeux. Les adolescents ont hâte de grandir, parce qu'ils croient que l'indépendance va leur apporter la liberté. Alors qu'en réalité, ils vont se retrouver dans une espèce de prison à vie, faite d'obligations et d'interdictions dont ils ne pourront sortir que lorsqu'ils auront atteint la vieillesse – pour les plus chanceux. »



Et la Maison me direz-vous…Je m'y perds mes amis. Il existe un lien magique entre celle-ci et ses occupants. Elle est enfermée sur elle-même, ses fenêtres sont noircies à la peinture car… elles ne doivent pas donner sur l'extérieur! Elle est immense pour les yeux des petits mais aussi dans l'imaginaire des grands. Elle est composée d'une multitude de dortoirs et de chambres. Il y a un réfectoire et aussi une cafétéria (la cafetière). L'infirmerie (le Sépulcre) y est aussi présente comme le mystérieux croisement situé au coeur de la maison. On y trouve aussi accessoirement les salles de classes. le bureau de directeur est de la partie sans oublier la fameuse cour de récréation. Et enfin, il y a la Forêt, celle qui n'apparait que certaine nuit et pour les avertis. Reste l'extérieur que l'on doit éviter sous peine d'attraper la «maladie des égarés».



« Car la Maison exige une forme d'attachement mêlé d'inquiétude. du mystère. du respect et de la vénération. Elle accueille ou elle rejette, gratifie ou dépouille, inspire aussi bien des contes que des cauchemars, tue fait vieillir, donne des ailes… C'est une divinité puissante et capricieuse, et s'il y a bien une chose qu'elle n'aime pas, c'est qu'on cherche à la simplifier avec des mots. Ce genre de comportement se paie toujours. »



Un roman envoutant et marginal, difficile et exigeant pour tout lecteur. Dans un monde magique où les situations sont incroyablement proches de notre réalité. Elles représentent une expérience que nous avons tous vécue car elle marque le passage de notre enfance à l'âge adulte. Une écriture exceptionnelle qui enrichit et sublime cette métamorphose. Je me suis perdu dans cette maison plus d'une fois comme tous les protagonistes. J'ai erré dans les couloirs avec Sphinx et Lord. J'ai humé l'odeur de la Foret avec Aveugle. Je me suis frotté comme eux à cette « Nouvelle Loi » qui autorise la mixité entre les filles et les garçons. Permettant aux Rousse, Sirène, Rate, Aiguille Chimère, Gaby de rentrer dans la danse et bouleverser le monde des garçons pour le meilleur et pour le pire. Bravo Madame pour votre beau roman qui ma permit de revivre ces belles pages de mon adolescence. Et encore merci à Dori, Sandrine, Diana, Onee pour cette belle découverte commune.



« Tous les types de démences réunis en un seul et même Nid. Les spécialistes n'avaient qu'à se munir de leurs encyclopédies pour s'amuser à les pointer un par un. Des psychopathes, ici, il y en avait pour tous les goûts »

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La Maison dans laquelle

« Il est des phrases que le cerveau ne peut pas entendre et contre lesquelles il se défend en se murant dans le silence. » Aussi, après avoir lu autant de critiques, je me demande quelle incidence auront ces quelques mots supplémentaires... Parce qu'au fond, moi aussi j'ai « des dizaines de questions sans réponses. » Tout comme Bossu, ou Fumeur à une époque, je n'ai rien compris -ou pas grand chose...



Et c'est d'autant plus agaçant car « je me souviens de tout... (...) peut-être que les mots cachés juste en dessous éclaircissaient l'ensemble. »



Comment un livre peut marquer un individu dont l'esprit ne capte pas le dessous des cartes ? Et pourtant cela fonctionne. le temps de la lecture j'étais avec les pensionnaires de la maison. Dès que je refermais le livre, la magie n'opérait plus. Mais lorsque le lendemain je le reprenais -et dès la première ligne lue- j'étais dans cette ambiance particulière, surréaliste. Et pourtant je confirme n'avoir pas compris grand chose.



J'en suis venue à me dire que ce livre possédait, pour ses lecteurs, les caractéristiques de la maison pour les habitants : « Dans la maison, le temps ne s'écoulait pas comme à l'Extérieur. On n'en parlait pas vraiment, car ces choses-là étaient bizarres et auraient vite fait d'attirer les foules, mais certains parvenaient à vivre plus d'une vie, tandis que d'autres n'y passaient qu'un seul mois. Plus tu tombais dans ces endroits étranges qui aspiraient le temps, plus tu existais. »



Le temps de la lecture a été plaisant, et pourtant ...comprenez moi bien, je n'ai rien compris :)

Après ces 954 pages, bien évidemment soulagée de ces 1300 grammes qui ont bien plombé mon sac à main, je me dis que ce fût une expérience plus qu'une lecture. le partage d'un autre monde que Mariam Petrosyan a eu la gentillesse de révéler avec cette publication.



Je cherchais une histoire, une intrigue, et je n'ai eu qu'une ambiance, la vision d'une terre moins terre à terre. Décontenancée, surprise, énervée, je suis passée par tous les stades du désappointement pour au final, et je ne l'aurais pas cru, être contente de cette lecture si particulière.



Donc je vous remercie, le site Babelio et les éditions Monsieur Toussaint Louverture, car sans cette masse critique qui était pour moi un challenge ''pavé'', je n'aurais pas ce sentiment de contentement et d'étonnement qui en découle, une fois la dernière page tournée. Oui je suis déconcertée, après avoir pesté pendant la lecture, d'être ce soir à me dire que ce livre est un mystère plaisant pour moi.



C'est pourquoi je reprends ci-dessous, cette citation qui exprime le mieux cette impression que je garde après ces semaines passées confinée avec des adolescents boutonneux qui avaient un langage bien supérieurs à la moyenne. Ah oui... ils étaient aussi handicapés, mais franchement, ce n'est pas pour moi le thème du livre. Non ! c'est un mystère.



« La maison exige une forme d'attachement mêlé d'inquiétude. du mystère. du respect et de la vénération. Elle accueille ou elle rejette, gratifie ou dépouille, inspire aussi bien des contes que des cauchemars, tue, fait vieillir, donne des ailes... C'est une divinité puissante et capricieuse, et s'il y a bien quelque chose qu'elle n'aime pas, c'est qu'on cherche à la simplifier avec des mots. Ce genre de comportement se paie toujours. Voilà, maintenant que vous êtes prévenus, on peut continuer à discuter. »



...ou plutôt... trêve de discussion. A chacun de se faire son idée. Pour l'originalité et le plaisir qu'il offre, ce livre est intéressant et tant pis si je n'ai pas eu d'intrigue, si je n'ai pas tout compris. Finalement j'ai rêvé d'un autre monde, d'une terre qui resterait un mystère... Je marchais les yeux fermés, je ne voyais plus mes pieds, je rêvais réalité... D'autres ont peut-être croisé l'Aveugle et les Roulants pour écrire cette chanson, non ?
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La Maison dans laquelle

En pénétrant dans La Maison j’ai tout de suite ressenti sa présence. J’ai caressé ses murs au plâtre effrité et cherché à sonder son âme. Mais la maison ne se laisse pas apprivoiser si facilement, elle a tenté de me perdre dans ses méandres, m’attirant dans ses mystères et ses dédales, me présentant un visage maléfique puis protecteur.

Alors, je me suis dirigée vers ses enfants, véritables prolongements de la bâtisse au point d’imprégner les murs de leur essence et de se fondre en elle cœurs et âmes. Ces enfants rebus d’une société qui préfère les oublier, les dissimuler, eux les inadaptés, physiques, mentaux, psychologiques, ont fait de la maison leur carapace contre ce monde cruel. Véritable société dans la société. Car intégrer La Maison c’est renaître et ça commence par être rebaptisé. Ici ils se nomment Chacal, Sphinx, l’Aveugle, Gros Lard, Lord, Fumeur, Bossu, Crabe, Cheval, Roux, Vautour …et ont abandonné leur première peau dans le monde d’avant. Ici ils font partie d’un groupe dont ils adoptent les codes, mais surtout ils vivent selon les règles de La Maison, transmises des anciens aux nouveaux. Intégrées, digérées, non dites, connues de tous et omni- présentes.



Dans La Maison il y a des rites, des amulettes, des traditions, des sortilèges, des Logs, des punks, Led Zepplin, des blousons en cuir, des gothiques, des gilets à strass et des baskets qui changent votre destin. Il y a des Tombants, des Sauteurs, des Virevoltants, des Irrationnels, et même du personnel soignant et des éducs. Il y a des amitiés indéfectibles, de l’entraide, de la solidarité, des ennemis jurés, des rivalités, des luttes de pouvoir, des tourments d’adolescents et de l’amour sous toutes ses formes.



Dans La Maison il y a des mystères, des réalités pour lesquelles vous n’êtes pas prêt, de la violence, de la tristesse, des morts et de la vie. De la vie qui déborde, qui s’échappe, s’enfuie, se rebelle, se cache, crie, hurle, murmure, se réveille et se rendort.



La Maison c’est celle dans laquelle vous aurez envie de rester pour comprendre l’Aveugle, cerner Sphinx, percer le mystère du Macédonien, rester auprès de Chacal, ce Peter Pan des temps modernes à l’aura incroyable. C’est l’endroit où vous aurez envie de prendre chacun des habitants dans vos bras et de leur dire que l’Extérieur ne les mérite pas.



Un livre monde, un livre puzzle, un conte onirique et cauchemardesque bourrée de références, à l’analyse complexe intellectuellement mais dont chaque mot va droit au cœur.



Perdue dans l’entrelacement des époques ; bercée par l’ambiance ensorcelante de cette vieille bâtisse, je suis devenue une habitante de cette étrange demeure. Au moment de la quitter je m’aperçois qu’elle aussi me hante et désormais fait partie de moi.



Debout dans la quatrième chambre mon sac sur le dos, je me rends compte que je suis moi aussi membre des pestiférés, que leurs réflexions ne sont pas si alambiquées que ça, et que la folie et la réalité m’apparaissent relatives. Alors je pose mon sac pour m’en faire un oreiller. Callée entre Sphinx et Chacal je sens au loin la présence de Lord, de Bossu, de l’Aveugle, et tous les autres. Rassurée, je tends l’oreille pour cette ultime nuit des contes en respirant au rythme de la maison.





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La Maison dans laquelle

Un univers vraiment mystérieux et fascinant…

La plongée dans cette Maison peut être un peu déstabilisante avec ces enfants cabossés de la vie, handicapés. délaissés… Ils ont vécu déjà plus d’une vie. Une fois, arrivé à la Maison, tout le reste est oublié, n’existe plus. Ils sont laissés à eux-mêmes, les éducateurs ou professeurs n’y font que de brèves apparitions.

Difficile de pénétrer cette maison, de comprendre ses habitants : il existe toute une hiérarchie, des lois qui régissent ce lieu. Les jeunes ne réagissent qu’à des surnoms, les groupes sont titrés d’un nom d’animal. Ca me rappelle brièvement, la lecture remonte à loin, à La majesté des Mouches. Il y a des luttes, des trahisons, de la fidélité… Tour à tour, l’auteur suit les différents personnages : on commence avec un jeune garçon, surnommé Fumeur, au moment de son changement de groupe. Un regard extérieur, par moments, raconte le passé… Les différents liens entre les personnages qui grandissent et changent de nom, de position, de comportement..

J’ai eu parfois du mal à suivre (d’ailleurs, je n’ai vu la liste des groupes à la fin du livre que très tard dans ma lecture, ça m’aurait aidé), j’ai du revenir à arrière pour comprendre telle ou telle dialogue ou passage descriptif un peu énigmatique. Plus j’avançais dans cette Maison, plus je la trouvais inquiétante. Beaucoup de scènes m’ont interrogé, mais des bouts d’explications viennent et donnent un peu plus d’ampleur à cette œuvre. Cependant, certaines questions sont restées : qu’est-ce qu’un Log ? un tombant ? un sauteur ? Je n’ai que des réponses approximatives…

Cette Maison est un labyrinthe et j’ai aimé m’y perdre et retrouver mon chemin. Une aura fantastique la parcourt, la réalité n’est pas où on croit. Il me faudrait une deuxième lecture (plus tard, le temps de souffler) ou des bouts de relecture pour comprendre cet endroit. Un huis-clos original sur l’adolescence, le handicap, que j’ai apprécié, même si la lecture était dense (et l’objet, lourd). Merci aux Editions Toussaint Louverture pour cette découverte atypique.

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La Maison dans laquelle

« Salut à vous les avortons, les prématurés et les attardés. Salut, les laissés-pour-compte, les cabossés et ceux qui n'ont pas réussi à s'envoler ! Salut à vous, enfants-chiendent ! »



« La maison dans laquelle » est un roman étonnant, comme j'en ai rarement lu.

C'est une expérience de lecture incroyable, dans laquelle le lecteur fluctue entre rêves et cauchemars, réalité et imaginaire.

Comme un papillon de nuit attiré par la lumière du feu, je me suis laissée prendre au piège de cette Maison tentaculaire qui vous enserre de ses bras, vous lie et vous emmure. Et lorsque finalement, elle vous libère, vous vous rendez compte que vous ne pouvez pas la quitter vraiment, que vous aimeriez y rester encore un peu pour pénétrer encore davantage dans ses entrailles et recevoir d'autres confidences.



« Tu sais quelle est la signification de ce que tu as vécu ? ... Ça veut dire que la Maison t'a choisi, qu'elle t'a laissé entrer. Où que tu ailles, tu fais désormais partie d'elle. Et la Maison n'aime pas être morcelée, elle n'aime pas que ses fragments s'éloignent. Elle s'arrange pour les attirer à elle. Ce qui veut dire que tout n'est pas perdu. »



*

Cette Maison est un pensionnat qui accueille des enfants et des adolescents, tous handicapés physiques, certains ayant également des troubles du comportement ou des maladies psychiatriques. Ils se classent eux-mêmes en plusieurs catégories : les « roulants » en fauteuil, les « marcheurs » sans bras, les sauteurs, les irrationnels.

Ces élèves ne retrouvent leur famille qu'au parloir ou aux vacances d'été pour une durée d'un mois.



Totalement déconnectés de l'extérieur, ils abandonnent jusqu'à leur prénom et s'appellent désormais Sphinx, Chacal Tabaqui, l'Aveugle, Lord, Vautour, Gros Lard, Roux, Fumeur, Noiraud, …

Leur surnom reflète des personnalités très marquées. Ils sont obéissants, discrets, soumis, rebelles, bienveillants, intelligents, sournois, ingénieux, étonnants, étranges, sensibles, émouvants, querelleurs, bagarreurs, imprévisibles, incontrôlables, ou effrayant.



Tous les sept ans, le moment tant redouté arrive : les plus grands, alors âgés de dix-huit ans, doivent quitter le pensionnat pour « l'extérieur », un monde sans repère et source d'angoisse.



« L'année de la sortie, c'est vraiment un sale moment à passer. C'est comme s'apprêter à sauter dans l'inconnu, et tout le monde n'en est pas capable. C'est l'année de l'angoisse, des fous et des suicidés, des psychopathes et des hystériques, de la peur contagieuse et des infections qu'elle répand. Il n'y a rien de pire. Mieux vaut éviter d'assister à tout ça, si on peut. »



*

Ces enfants « rafistolés » ont tous des allures insolites, déroutantes, extravagantes, voire grotesques. Ils sont si singuliers et surprenants que parfois j'en ai oublié qu'ils n'étaient que des enfants et qu'ils avaient une infirmité.

En effet, si le monde extérieur les rejette du fait de leur handicap, dans la Maison, cette différence devient une force, une originalité qui les distinguent des autres. Les adultes responsables apparaissent négligents, parents démissionnaires, directeur retranché dans son bureau, professeurs effrayés ou éducateurs impuissants. Ils semblent livrés à eux-mêmes, mais contrairement aux apparences, ils vivent dans leur monde et se sont organisés en groupes, avec à leur tête, un leader charismatique, un chef de meute.

On y retrouve une forme de solidarité, d'entraide, de camaraderie, mais c'est aussi un monde sans pitié, hostile, extrêmement violent gouverné par un ensemble complexe de règles de vie, de hiérarchies qu'ils ont eux-mêmes élaborées au fil du temps. C'est dans cette maison qu'ils construisent leur identité, leurs rêves, leurs espoirs. Mais la mort s'invite parfois au milieu de toutes les rivalités.



« … ils modelaient petit à petit leur monde, un monde visible et invisible, à la fois ici et ailleurs, obéissant à ses propres lois… »



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Avec beaucoup de justesse et une certaine dose d'humour noir, l'auteure a su décrire cette période délicate qu'est la transition entre l'enfance et l'âge adulte. Elle a su poser les mots pour exprimer la fragilité de ces adolescents « abimés » par la vie, les signes de leur mal-être : repli sur soi, mutisme, impulsivité, agressivité, violence, consommation excessive d'alcool et de tabac, anorexie et boulimie, tendance suicidaire, grossesse, …

Je me suis attachée à ses enfants. Leurs maladresses, leurs imperfections, leurs doutes, leurs peurs, leurs épreuves m'ont touchées. J'ai aimé les voir grandir et voir pour certains les adultes qu'ils deviendraient.



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L'intrigue est centrée sur les enfants du quatrième groupe, notamment l'énigmatique Aveugle, le charismatique Sphinx, l'exubérant Chacal Tabaqui, l'elfique Lord, ou encore l'impénétrable Macédonien.

Alternant passé et présent en un temps déstructuré soumis à ses propres règles, le récit, centré sur leurs temps libres, nous entraîne, par ses flashbacks, dans leurs premières années avant de revenir au présent et se rapprocher du jour où ils devront quitter la Maison pour toujours.



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Le roman est construit comme un échiquier géant en perpétuel mouvement dont chaque pièce déplacée, soulève de nouveaux questionnements, de nouveaux secrets.

Et la détentrice de tous ces secrets, la pièce maîtresse de ce récit, est sans aucun doute la Maison.



Mariam Petrosyan la dépeint avec une telle minutie qu'elle en a fait le personnage clé de cette histoire. Elle garde en mémoire dans ses murs, tous les pensionnaires qui s'y sont succédés, leurs souvenirs, leurs amitiés, leurs jeux, leurs peurs, leur violence.



« Aussitôt je me retrouvai dans un autre monde. Autour de moi, une explosion de couleurs, un véritable feu d'artifice… le couloir n'était qu'une immense fresque. Les dessins étaient gigantesques, de taille humaine, parfois plus grands encore. Fascinants, ils serpentaient et suintaient, s'enchevêtraient, éclaboussaient et bondissaient, s'étiraient jusqu'au plafond pour enfin conquérir le mur opposé. On aurait dit que les parois avaient enflé sous l'effet des peintures, donnant à ceux qui l'empruntaient l'impression de progresser dans un espace de plus en plus exigu. J'avançais bouche bée, comme plongé dans les délires d'un fou… Chaque pan de mur était une voie d'accès à leur vie, une carte sans laquelle on ne pouvait y accéder, fût-ce en secret. »



Malgré son aspect délabré et crasseux, elle apparaît imposante, majestueuse, vivante, protectrice, prédatrice, « à la fois un piège, une maison et l'univers ». Elle semble changer de forme, d'aspect, dévoilant sa face cachée pour devenir tout à tour, végétale et se transformer en forêt, animale telle une araignée qui apporterait soin et nourriture à sa progéniture ou au contraire, la dévorerait.



« … la Maison exige une forme d'attachement mêlé d'inquiétude. du mystère. du respect et de la vénération. Elle accueille ou elle rejette, gratifie ou dépouille, inspire aussi bien des contes que des cauchemars, tue, fait vieillir, donne des ailes… C'est une divinité puissante et capricieuse, et s'il y a bien quelque chose qu'elle n'aime pas, c'est qu'on cherche à la simplifier avec des mots. Ce genre de comportement se paie toujours. »



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Mariam Petrosyan décrit un univers sombre, poétique, mystérieux, magique, angoissant, claustrophobe qui se dévoilent au fur et à mesure, sans explication.

Le côté déstructuré est assez déroutant au départ, obligeant le lecteur à être attentif aux nombreux indices semés tout au long du récit pour faire des liens entre les différentes époques, les différents points de vue, les différents protagonistes qui pour certains changent de surnom en grandissant !



Mais si je reconnais qu'une grande partie du roman est vraiment brillante, je me suis aussi perdue dans cette Maison, par manque de repères. J'ai bien failli m'y noyer et puis, j'ai repris pied, j'ai commencé à comprendre les liens qui les unissaient à cette Maison.

L'auteure a su également relancer mon intérêt et proposer un épilogue ouvert totalement inattendu qui m'a poussée à me questionner à nouveau et à remettre en question l'ensemble de l'histoire.



*

Pour conclure, « La maison dans laquelle » est un récit unique, complexe, à la fois envoûtant et onirique, angoissant, et cauchemardesque. C'est un roman-labyrinthe extrêmement dense et foisonnant dans lequel on aime se perdre et se retrouver.

Mariam Petrosyan a su créer un univers mystérieux et sombre autour de cette maison-refuge. En entrant dans ce roman, on entre également dans cette maison. Elle est un monde à elle toute seule et en même temps une porte vers d'autres univers.



J'aurais aimé y rester un peu plus longtemps, explorer davantage cette forêt pour pouvoir trouver des réponses aux questions qui subsistaient. Je suis bien consciente que cette maison garde encore pour elle de nombreux secrets qu'une seule lecture ne peut révéler. Une relecture s'imposerait afin de « prendre du recul pour avoir une vue d'ensemble », explorer la maison avec un nouveau regard plus rétrospectif et réfléchi.



Un premier roman d'apprentissage brillant, impressionnant, érudit, traversé de nombreuses références littéraires, teinté d'un réalisme magique captivant sur plus de mille pages.

Un coup de coeur, un roman à explorer.



***

Ce roman me faisait envie depuis la superbe critique d'Onee que je vous recommande, mais le nombre de pages particulièrement effrayant retardait ma lecture. Je suis donc contente de l'avoir lu dans le cadre d'une lecture partagée avec Chrystèle (HordeDuContrevent), Doriane (Yaena), Diana (DianaAuzou), Bernard (Berni_29). Je les remercie pour ces moments de partage qui ont permis de confronter nos regards et faire des liens pour mieux percer les mystères que renferme cette maison.

***
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La Maison dans laquelle

J'y suis entrée à pas prudents, attirée par sa légende et craignant qu'elle ne déçoive mes attentes.



Sur la première de couv', ses murs -palimpseste ont d'abord capté mon regard et bientôt ses enfants étranges, comme échappés d'un film de Tim Burton, m'ont intriguée : roulants et marcheurs, tombants et sauteurs...où étais-je venue me perdre? Dans quelle contrée aux confins du réel et du rêve ? quelle sorte de Poudlard pour ados névrosés, quel huis clos nostalgique et malfaisant pour adultes en mal de leur adolescence?



Puis, très vite, le sortilège a opéré : plus moyen de faire demi-tour, les grilles de la Grise se sont refermées sur moi. J'ai été happée par son mystère, ses codes, ses groupes, ses rituels, son temps immobile, ses personnages emblématiques aux sobriquets étranges et changeants.



J'ai dévoré cette énorme brique en trois jours et attendu presque une semaine pour pouvoir tenter de vous en parler, tant l'emprise reste grande, une fois la dernière page tournée.



La Maison dans laquelle, avec son titre boîteux, est à l'image de ceux qui la peuplent: des enfants et des adolescents cabossés par la vie , à qui mère Nature non plus n'a pas fait de cadeau : "roulants" en fauteuils, "marcheurs" sans bras, rebelles sans passé, voyants sans regard, enfants sans famille, sans raison ou sans espoir, La Maison est le refuge et la somme, parfois effrayante, de toutes ces pertes.



Des groupes, des hiérarchies, des sujétions, des brimades mais aussi des amitiés, des solidarités, de folles puissances se font et se défont entre ses murs couverts de paroles énigmatiques.



Les adultes -profs, parents, directeurs, soignants, éducateurs- sont là aussi, mais à la marge: le jeu pour les "Rats", les "Chiens," les "Faisans", les "Oiseaux "et le fascinant "groupe 4 " né de la Chambre des Pestiférés- il y a 6 groupes, mais quel est donc le 5ème ? - le jeu, donc, pour tous les pensionnaires de la Grise consiste à déjouer les règles des adultes, à y substituer les leurs, à maintenir le plus longtemps possible et comme suspendu , le temps délicieux, vénéneux et violent de l'enfance.



Quitte à tuer, quitte à muter, quitte à mourir.



La lecture est addictive, mais se doit d'être attentive :dialogues à double détente, narrateurs qui changent et changent aussi de noms, totems souvent empruntés à Kipling comme dans une meute de louveteaux déviants, et revêtant des sens à décrypter.



Même si la mort guette, les corps atrophiés sont animés d'une vie sauvage: il faut conjurer le péril de l'infirmerie, appelée le Sépulcre, la fuir à toute force! Les fauteuils deviennent alors des destriers plein de fougue, les toits, des miradors ouverts sur le Danger Extérieur, les arbres, des mâts de cocagne, des colonnes pour stylites ou des fourches patibulaires.



Mais le pire danger n'est-il pas le temps égrené aux cadrans des montres et des horloges, qui fait de l'irrésistible Sauterelle un Sphinx impénétrable, et du pauvre Fumeur , auquel s'identifie le lecteur, un Candide pas toujours clairvoyant, mais de plus en plus sceptique et hésitant ?



Le temps qui mutile et aveugle chasse du paradis des laissés-pour-compte ceux qui rêvent de normalité: le temps vous rejette dans le néant ou dans la vie, sauf si vous êtes un Chacal Tabaqui -ex Putois- aussi éternellement juvénile que ses gilets colorés !



Fable métaphorique sur une Enfance très rimbaldienne, sorte d'Illumination de 900 pages, de Bildungsroman poétique, méditation philosophique sur la différence qui isole et l'instinct clanique qui unit, La Maison dans laquelle est une plongée en apnée dans un univers puissamment original et totalement envoûtant !



En suis-je vraiment sortie? Parfois j'ai l'impression de hanter encore ses couloirs labyrinthiques en clopinant derrière le Mustang de Tabaqui...



Je recommande chaudement!
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La Maison dans laquelle

La Maison dans laquelle je me suis plongée pendant ces longues semaines d'été m'a révélé un à un les trésors de ses pièces, les traits de ses habitants, les graffitis et poèmes qui ornent ses murs, les restes de son passé souvent mystérieux, le contenu de ses rêves, les farces de ses fantômes, les pleurs de ses petits, la solidarité de ses clans, la méfiance de l'Extérieur, les ronronnements de ses chats, l'empathie de certains éducateurs, le manque d'air parfois, l'appel de ses alcools frelatés, les doutes de ses lendemains, la crainte des départs et l'immensité de sa cour.

J'ai été séduite par les descriptions de chaque chambre, des objets cachés sous les lits, des amulettes protectrices, des traits d'un visage cerné, de la tension lors des affrontements, des caractéristiques de chaque groupe, du handicap d'un Gros Lard, de la verve d'un Chacal, de la sensibilité d'un Macédonien, des règlements internes qui donnent à chaque geste une portée infinie.

L'univers de ce pensionnat m'a séduite. La Maison a l'envergure d'une cité entière. Chaque chambre est le quartier d'un clan avec son chef, ses adeptes, ses faiblesses et ses forces, ses règles et ses rituels. Les murs de cette bâtisse ne sont les les barreaux d'une prison mais des espaces de liberté, de communication, d'apprentissage, de souvenirs, d'émotions.

Et pourtant la Maison peut devenir cachot en acceptant de ses hôtes une totale dépendance et en inspirant un attachement sans bornes.



Vous l'avez compris, l'ambiance de ce roman dense et foisonnant m'a beaucoup plu.

Mais je n'ai pas apprécié le fait d'avoir été si souvent perdue.

Perdue dans les couloirs immenses un soir sans lune, je veux bien. Mais perdue au coeur des mondes réels, rêvés, passés, futurs, paranormaux, incarnés ou inventés a été beaucoup plus laborieux.

J'ai besoin de clarté, en lecture comme ailleurs.... Soit je plonge dans un univers magique à la Harry Potter et je peux imaginer toutes les créatures et les aventures les plus incroyables, soit je plonge au coeur d'un pensionnat et j'en découvre les secrets réels.

Balancez-moi les deux et me voilà à relire de nombreuses pages pour tenter de comprendre dans quel monde je me trouve.

Les habitants de la Maison ont tous des pseudos. Ce côté-là m'a plu. Mais lorsqu'enfin j'ai pu mettre des caractéristiques sur chacun de ces pensionnaires, voilà qu'ils se sont retrouvés affublés d'autres noms.

Beaucoup d'idées sont ouvertes ce qui révèle l'immense imagination de l'auteure mais trop souvent elles se retrouvent abandonnées dans la Maison en proie aux oubliettes et à la confusion du lecteur.

Enfin, je m'attendais à une fin en apothéose, je me suis plutôt retrouvée devant un flop ouvrant tant de nouvelles portes que je suis restée bouche bée sur le seuil sans tenter de comprendre...



Donc voilà ma chronique en dents de scie comme toutes les émotions que j'ai vécues lors de mes semaines dans la Maison. Entre exaltation et déception, joie et tristesse, envie de continuer de lire ses pages et abandon. La Maison dans laquelle je me suis aventurée va tout de même laisser en moi les jolies traces de sa belle énergie et de son pouvoir captivant.
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La Maison dans laquelle

La Maison, dans laquelle – Mariam Petrosyan***

LC avec HundredDreams (Sandrine), berni_29 (Bernard), HordeduContrevent (Chrystèle), Yaena (Doriane)

Pages : 954 exactement, le temps : il ne s’est pas laissé compter ni conter comme il faut, d’ailleurs c’est quoi « comme il faut » ?, un temps facétieux un vrai marionnettiste qui n’a pas arrêté de m’accrocher à ses ficelles âpres et soyeuses, le ressenti : épuisement et des moments d’envol, dans la tête et dans le corps, labyrinthe éprouvant entre paradis, enfer et purgatoire que j’ai vécus avec eux les louveteaux comprimés dans la Maison, imparfaits éclopés infirmes sans bras, mais bons marcheurs, sans jambes mais bons rouleurs, aveugles mais voyants, jeunes fauves dans une jungle encadrée, dont une certaine vie et ses lois jouent avec les extrêmes aux grands risques et périls de tous ses locataires petits et grands.



Roux porte corset, Chacal Tabaqui est roulant et porte lunettes, Fumeur roulant aussi, Lord porte béquilles, Sauterelle est sans bras , Sphinx est sans bras et chauve, chacun sa Maison de rêves ou rêveries, obsessions, fantômes, cauchemars, jeux mais chacun n'existe guère et ne se définit que par le groupe auquel il appartient.

La maison, comme un orphelinat accueille tous ces jeunes en manque de quelque chose de très important.



La lecture a été très difficile, je l’avoue, un marathon qui a failli m’avoir avec des hauts pics grisants et beaucoup de bas gouffres étouffants et une longueur qui m’a fait KO ou pas loin.



La Maison une double mise en abyme des espaces, d’un isolement dans un autre isolement, une mise en exergue de la différence qui condamne, un intérieur enfermé qui rime avec liberté, par opposition à un dehors une vraie prison où les lois ne sont pas créées, mais imposées.

Dans la Maison, triste, grise pas jolie, tout est hideux et répugnant, la perfection de l’ordre et de l’interdit semble avoir élu domicile permanent, et pourtant elle m’attire insidieusement, l’humain a disparu, l’animal prend toute la place, le miroir d’une fable métaphorique ? Comme dans une prison, des clans se forment, des approvisionnements s’infiltrent et se gardent secrets. Chaque personnage un éclopé, pas assez sauvage pour vaincre, pas assez dompté pour se soumettre, pas encore adulte pour comprendre ou accepter.

La Maison une scène aux portes fermées, une tragi-comédie dont les personnages jouent aux cartes qui peuvent s’appeler amitié, antipathie, liberté contrainte, bandes ou clans, la capacité ou l’impossibilité de se faire accepter par un groupe et, avec le temps, la peur de l’avenir, la peur de quitter la Maison, être effacé de la mémoire. Une forêt avec ses Oiseaux, ses Rats, ses Faisans, animaux plus ou moins dangereux, des clairières quand on s’approche pour les découvrir.

La différence, l’isolement, les clans, les bandes d’amis, les bandes ennemies, autant de frontières dans la Maison qui protège et isole, un retrait du monde extérieur, un enfermement, une ouverture vers le monde intérieur où se crée une liberté avec ses propres lois et règlements, un monde complexe surprenant contradictoire, ensorcelant, souvent lourd à porter, pas loin du risque de l’implosion à tout moment. Une forêt « mystérieuse et hirsute, elle abritait de profondes tanières et leurs étranges habitants, elle ignorait le soleil et était imperméable au vent. On y trouvait des cynocéphales et des oiseaux siffleurs, de gigantesques champignons aux chapeaux noirs et des fleurs vampires... »p.150 Magnifique métaphore du mystère, de l’inconnu, d’un âge rebelle de grande fragilité, « la forêt n’aimait pas les impatients, et elle pouvait très bien reculer… la forêt était capricieuse, craintive ; elle était aussi capable d’étirer et de multiplier les chemins qui menaient à elle. » p.149



Et mes pensée s’envolent vers Les disparus de Saint-Agil, Hogwart School ou Poudlard si vous voulez, Lord of the Flies ou Sa majesté des mouches, ou alors Oblio et une certaine Alice, histoires de temps intolérants de différences de frontières de longs chemins à faire.



Les adolescents gravissent des montagnes inexplorées déploient leurs ailes pour s’envoler dans leur monde créé de toutes pièces, chutent souvent dans la peur d’un extérieur inconnu dangereux menaçant, leur handicap devient force, arme, des guerres éclatent, des complots se tissent, des mains se tiennent, les adultes n’y sont pas invités, et pourtant, un éducateur, Elan, fait sourire la forêt, d’un sourire craintif, peureux : « Un sourire, mon petit, avait expliqué Elan, c’est ce qu’il y a de meilleur chez l’homme. Tu n’es pas vraiment un homme tant que tu ne sais pas sourire.

- Montre-moi, lui avait demandé l’Aveugle

Elan s’était penché, offrant son visage à ses doigts. Au contact de ses lèvres humides, l’Aveugle avait retiré sa main.

- Ça fait peur, avait-il déclaré. Je suis obligé de le faire ? Pour toute réponse, Elan avait soupiré. » p.152



La Maison les aspire se les approprie, un huis clos aux horizons infinis, et les adolescents des abeilles dans une ruche prodigieuse, ils la construisent jour après jours, avec la liberté de l’enfermement, celle qui se trouve en chacun d’eux. p.448



Moi, lectrice, j’entrais le plus souvent dans la Maison comme grande personne, avec un certain recul, sensible à beaucoup de symboles et de références à la littérature universelle, et pourtant pas détachée de ces enfants au seuil de l’adolescence, j’étais complètement dedans, d’où l’asphyxie.



La lecture a été difficile, j’ai trouvé l’écriture trop longue trop dense trop serrée, je perdais souvent le fil, un bal masqué, une fable métaphorique, une allégorie où plusieurs idées se mettaient en une image ou une seule image renvoyait à plusieurs sens, une jungle aux lois souvent impénétrables, lecture prenante très fatigante d’un livre dont la construction originale fortement symbolique accueille abrite et analyse l’immense univers de l’adolescence qui, fragile et téméraire, oh combien complexe, cruelle et compliquée, ne se laisse pas faire.



Si la boucle est bouclée c’est dans un miroir, ceux qui entrent dans la Maison en ressortent avec toujours une appréhension pour un autre inconnu, et en plus la douloureuse nostalgie d’un au revoir, une maturité s’installe, une adolescence s’en va « Et s’en aller quand même, retirer sa main de la mains d’autrui, comme si on déchirait à nouveau une plaie déjà guérie, Et s’en aller Où ? Dans l’incertain... » Rainer Maria Rilke, Le Départ du Fils prodigue, p.881

La Maison en dehors du monde, avec ses mondes à elle, la Maison – intermède, comme une synthèse de la Maison, intermède entre l’adolescence et la maturité, la police change, la vie aussi, et le point de vue et les mouvements en avancées vers les copains, en recul vers soi-même… et la forêt revient et le temps nous fait un pied de nez.



De grands artistes ces adolescents, ils ont une sève énorme mais délicate, pas des plus robustes, au contraires infirmes, comprimés, amputés, ils font pousser leurs racines et leurs branches pour trouver un équilibre, ils se sont construit leur Maison dans la Maison, leur ruche, et imaginé un monde plus fort que celui à l’extérieur, ils l’aiment et le défendent pour y vivre au risque d’y mourir. Ils voient tout d’un œil attentif et curieux, ils ne peuvent se livrer sans s’anéantir. Belles et compliquées figures.

Tous des faisans, du gibier ? Chacun convoité par un autre ? Beaucoup de questions dans le roman restées en suspens comme il se doit…



Livre dense, labyrinthique, analyse subtile titanesque et prodigieuse d’un âge difficile à percer, des personnages en meute, gangs, bandes ou solitaires, des chefs et des exécutants, des nomades sans appartenance.

Certaines longueurs des dialogues, des mouvements des personnages se prêteraient mieux, je crois, à l’image cinématographique qu’à la lecture, et le pavé qui en est devenu je l’ai trouvé trop fatigant et oppressant.

La Maison dans laquelle avec quelques points de suspension invisibles et une façade aux lettres brinquebalantes a été une lecture commune d’une bande joyeuse curieuse et exigeante qui m’a tenu compagnie, la Maison, toujours elle, a attisé ma curiosité de vivre quelque temps avec une adolescence et les souvenirs un peu brumeux de la mienne, de découvrir une écrivaine qui a mis dix ans pour mettre toute cette aventure sur papier, de faire un effort de souplesse intellectuelle pour ne pas développer une claustrophobie qui s’empressait de germer.

Il arrive que la mémoire flanche par moments, celle de l’histoire comme la mienne, lectrice étourdie, perdue, surprise, jamais avertie.

Je salue l’écriture de Mariam Petrosyan et dis un grand merci aux copains de la lecture commune : HundredDreams (Sandrine) berni-29 (Bernard), HordeduContrevent (Chrystèle), Yaena (Doriane).





NOTE : Les étoiles, quel qu’il soit leur nombre, je ne les mets jamais comme note pour l’auteur, je ne me le permettrais pas, mais comme tentative d’esquisser mon ressenti qui, avec le temps ou après une deuxième lecture, peut encore changer, tout est en mouvement  et transformation !...***
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La Maison dans laquelle

La Maison est un grand pensionnat comparé à une ruche géante aux nombreuses alvéoles. Dans chaque alvéole il y a une chambre, une chambre habitée par un enfant ou un adolescent pas très ordinaire. Des enfants que la nature n’a pas gâtés car chacun d’entre eux a une infirmité. Loin de leurs familles, sans repère, ce sont aussi des laissés-pour-compte, des cabossés de la vie qui pensent que nul n’a besoin d’eux. Dans ce lieu insolite, chaque enfant enterre son ancienne identité et adopte un surnom correspondant à sa personnalité : Sauterelle, Fumeur, Tabaqui, Vautour, Lord etc. Des groupes distincts sont également formés. La Maison a ses lois et ses règles mais les occupants peuvent s’y épanouir librement. Malheureusement l’autorité est défaillante et les éducateurs ont parfois bien du mal à encadrer tout ce petit monde.

La Maison paraît avoir une âme, elle a tout d’une grande forteresse bienveillante qui est capable de les aimer, de les protéger et de les aider à apprivoiser leur crainte de l’extérieur. Il est impossible de partir et de revenir comme on le souhaite, rien n’est fait au hasard mais à 18 ans l’adolescent doit quitter la Maison pour affronter la réalité et appréhender le monde des adultes.

Le début me paraissait prometteur mais au bout de la 500 ème page (le livre en comporte 954) je me suis essoufflée et lassée des multiples personnages évoluant dans cet univers fantasque mais confus. Bien qu’il y ait de très beaux passages poétiques et que le thème de l’adolescence soit abordé de façon très originale, je n’ai pas réussi à m’imprégner des personnages et de leurs histoires.

Ce roman initiatique au genre fantastique serait à mon avis très apprécié par de jeunes lecteurs.

Je remercie Babélio de m’avoir sélectionnée pour l’opération Masse Critique et je remercie les éditions les éditions Monsieur Toussaint Louverture pour l’envoi de ce livre.

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La Maison dans laquelle

Il y a des lectures qui deviennent des expériences. L’été est la saison propice aux expériences. Donc j’ai lu en cette fin juillet La Maison dans laquelle, de Mariam Petrosyan, traduit par Raphaëlle Pache.



Il y a des lectures qui nécessitent des aveux. Voici les miens : j’ai lu - tout lu, si, si, les 1070 pages -, me suis vite – très vite – perdu et je n’ai rien comprendu !



Il y a des lectures qui sont « trop ». Celle-ci l’a été. Trop imaginaire, trop abstraite, trop stagnante, trop énigmatique, trop étourdissante. Et donc trop longue !



Il y a des lectures qui ne sont pas pour moi, mais encore faut-il les lire pour le savoir, ce que je ne regrette jamais. Surtout quand elles sont faites en belle et joyeuse compagnie.



Il y a des lectures dont je ne vous parlerai donc pas plus, car je suis conscient que La Maison dans laquelle est un grand livre, clivant certes, mais un grand livre quand même. Et d’autres vous conteront mieux que moi les aventures de L’Aveugle, Chacal Tabaqui, Sphinx, Vautour, Pompée, Roux ou Fumeur.



Il y a des lectures qui laissent cependant quelques traces quoi qu’il arrive, comme cette violence sourde et étouffée placée en exergue de La Maison pour ceux qui voudraient y entrer un jour : « Salut à vous les avortons, les prématurés et les attardés. Salut, les laissés-pour-compte, les cabossés et ceux qui n’ont pas réussi à s’envoler ! Salut à vous, enfants-chiendent ! ». Vous êtes prévenus !
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La Maison dans laquelle

L’autrice semble avoir tout donné dans cet unique livre, écrit de ses 18 à ses 28 ans... et elle nous livre une sorte d’anti-Harry Potter : plutôt Sa majesté des mouches, dans un Poudlard cauchemardesque.

C’est la chronique d’un internat, gothique et déjanté à la Tim Burton, avec quelque chose de Gormenghast ; un internat où repas et leçons n’occupent que quelques lignes (sur 1070 pages) tant ses pensionnaires sont refermés sur eux-mêmes, sur leur clan.

Les pensionnaires sont tous des enfants handicapés : sans jambes, sans bras, sans yeux… mais qui remplacent tout cela par une mythologie, des rites, des traditions, des liens, et surtout des complots, des luttes de pouvoir allant jusqu’au meurtre. Ces gosses qui seraient, à l’Extérieur, discriminés, mais qui reconstituent, dans la Maison, une hiérarchie étouffante, je ne les ai jamais imaginés avec des visages d’enfants.

Il faut dire qu’ils tiennent à grand renfort de tabac, d’alcools maison et de drogues bricolées, des substances omniprésentes. C’est difficile de tenir, dans ce huis-clos, cette ambiance de prison, de confinement, et cette odeur de vestiaire de foot - voire pire du fait de leur cradosserie (liquides et cendres tombent sur couvertures et vêtements plusieurs centaines de fois).

Dans la première partie, un monde de garçons, dans la deuxième les filles arrivent (ce petit monde grandit), dans la troisième on voit apparaître davantage d’adultes, membres du personnel (qui se révèlent aussi comploteurs que les mômes), ou bien parents "opérants" ou "inopérants"…

J’ai aimé les échappées vers l'art : la musique, la poésie, les murs peints et graffités, l’exposition d’objets-qui-ne-sont-à-personne…

J’ai aimé les incursions dans l’onirisme, notamment la belle image de la forêt, qui m’a fait penser à Holdstock mais qui tourne court.

J’ai bien des fois failli abandonner. J’ai quand même tenu bon... sans trop de conviction.

J’avais lu tellement de bonnes critiques de personnes dont j’estime les avis et à qui je fais confiance, que je m'attendais (impatiemment, j’ai dû le réserver à la bibli) à une lecture envoûtante. Aux premières pages j’ai apprécié cette écriture énigmatique (et je venais de quitter Olga Tokarczuk, c’est dire) mais au bout de 500 pages, je me suis interrogée : tout ça pour ça ? Parce que ça fouille, ça creuse... mais ça n’avance pas.

Alors…

L’écriture est très belle, très poétique, dans une traduction irréprochable de Raphaëlle Pache.

Il y a sûrement plein de références que je n’ai pas saisies.

Mais je reste très, très, très perplexe.

Challenge ABC 2022/2023

Challenge Globe-Trotter (Arménie)

LC thématique de novembre 2022 : "Videz vos PAL !"
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La Maison dans laquelle

Bon eh bien, je me serais accrochée mais là... j'en peux plus. Arrivée à 600 pages je lâche. Je reprendrai probablement une prochaine fois mais là ma patience est arrivée à son terme et je n'ai qu'une envie c'est de me remettre à lire des choses prenantes, qui ne nous laisse aucun souffle. Ce qui n'a pas été le cas avec cette lecture.



La maison dans laquelle, pour moi, est un roman bien complexe a résumé car je n'ai pas compris quel était le fil de cet histoire. On suit la vie de plusieurs enfants souffrant tous de handicaps différents, au sein d'une maison qui représente pour eux un foyer dédié aux enfants comme eux. Chaque enfant est appelé par un surnom (qui peut évoluer au fil du temps d'ailleurs, on ne le sait pas au début, mais on finit par le comprendre tous seuls comme des grands) et vit au sein d'un groupe, chaque groupe ayant à sa tête un chef.



Les éducateurs et le directeur de la maison ne sont là que pour faire figuration car au final le personnage principal pour moi, c'est la maison, puis ensuite viennent ces enfants qui vivent au travers d'elle, et seulement en tout dernier les adultes qui sont censés cadrer le tout (je dis censés car franchement, les gamins font leur Loi).



Je me suis perdue tellement souvent dans ces pages, il s'est même passé certains chapitre où je n'ai rien compris de ce qui arrivait. Mais il y a toujours eu un chapitre pour me raccrocher aux branches, jusqu'à ce que ce jeu ne m'amuse plus (après 600 pages ça devient un peu grotesque).



Au final je me suis demandée si l'auteure ne vivait pas dans un monde complètement à part, déconnecté du notre, et qu'elle nous montrait un bout de ce monde par l'intermédiaire de ce livre. Dans tous les cas, je ne vois vraiment pas où elle a voulu nous emmener et je trouve ça bien dommage car la lecture en soit n'est pas désagréable, les personnages sont même attachants, la maison est très intrigante, mais au final on a l'impression de regarder encore et toujours le même tableau, sans cesse, sans en comprendre l'intention. C'est très déstabilisant. Et après la curiosité et la volonté de découvrir ce qui se cache derrière ce canevas, on perd patience et on passe son chemin.



Je remercie tout de même Babelio et les éditions Monsieur Toussaint Louverture pour m'avoir fait découvrir ce livre dont je me désole de ne pas avoir compris le but.
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La Maison dans laquelle

La maison dans laquelle ....

Où l’on peut se perdre,

Où l’on peut disparaître,

Où l’on peut faire des rencontre.

Des personnages complexes, une école étranges avec peu de personnage adulte, une densité et une originalité hors norme qui peut perdre le lecteur.

Lecture grisante, parfois ennuyante par ses longueurs.

L’ auteure, Mariam Petrosyan, nous ballade pour nous mener on ne sais où. Plaisant ou pas, à vous de voir.



La maison dans laquellle. Plusieurs groupes, diffèrent chefs, diffèrent membres, différente particularité... mystérieuse, gloque à souhait.

Entrez dans la maison,

Vous vous perdrez dans les labyrinthes au fur et à mesure de votre lecture.
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La Maison dans laquelle

Je viens d'achever ma première lecture de ce roman après une immersion de près de 15 jours. Je dis bien ma première lecture car il y en aura d'autres.



Je ne vais pas faire de suspense, je crois que je n'ai jamais rien lu d'aussi incroyable depuis des années et je ne pensais plus me retrouver dans un tel état à cause d'un roman. Pendant 15 jours j'ai eu deux vies, mettant presque ma vie réelle entre parenthèses pour rêver ce roman quand je ne le lisais pas. J'ai tenté d'être un peu adulte en le dégustant petit à petit, en essayant de ne pas le gober d'un coup d'un seul et peut être aussi de me préserver car je savais qu'il n'y avait pas de suite.



Je voudrais parler du livre, l'objet. C'est quand même quelque chose cette couverture! Cette texture, cette écriture à craie et tout le mystère qui est fait autour. Le papier est spécial, l'odeur est peu commune de même que les typographies. Tout est fait dès le départ pour qu'on se dise bien qu'on est pas face à un quelconque roman fantastico-jeunesse. Je l'ai gardé sur mes genoux au moins une heure avant d'oser l'ouvrir et le lire. Je me suis surprise plusieurs vois à juste en caresser la couverture, à renifler les pages en lisant, presque à vouloir plonger littéralement dans ce livre et en faire ma maison.



Puis j'ai osé l'ouvrir, le lire et dès la première page d'étais foutue.

Foutue parce que c'est exactement la lecture dont j'avais besoin à ce moment précis et que par conséquent, j'ai envoyé valdinguer tout le reste.

L'auteur a un don pour fabriquer des personnages plus charismatiques les uns que les autres. Je les ai tous aimés comme des amis proches. Peut être avec une mention spéciale pour Chacal Tabaqui, personnage que j'ai trouvé particulièrement délicieux et haut en couleurs. Chaque nom a une raison tout comme chaque détail est étudié.

Les thèmes de fond abordés sont souvent difficiles: handicap, adolescence, la mort, le suicide... Mais ils sont abordé avec une vision neuve et fraîche, avec convictions sans tabou mais sans impudeur pour autant.

Les ambiances et décors sont propices à l'imagination, à la création.

Dans une seule bâtisse, Mariam Petrosyan a créé un monde, que dis-je, un univers entier.Un univers fait de contes, de croyances, de violences, de rites initiatiques, d'amitiés sincères, de folie, de peine...Un univers d'une réelle complexité, répondant à ses propres codes.



Je peux concevoir qu'il est un peu difficile d'entrer dans ce monde mais l'immersion est assez progressive: l'auteur nous mets dans la peau d'un nouvel arrivant puis nous donne des images du passé, puis retour dans la peau de personnages un peu plus important...de sorte qu'au fil du livre on se sent toujours plus familier avec la maison, ses occupants et l'intrigue. Pour autant, reste une grande part de mystère propices aux divagations des imaginations fertiles. Pour moi c'est du pain béni.

C'est ce qui rend ce livre infini, car au delà des 960 pages, reste le souvenir et les questionnements qui maintiennent le roman en vie dans mon esprit.



Peut êtres vous, qui lisez ma critique, me trouverez un peu extravagante dans ma manière de retranscrire mon expérience. Mais vraiment, j'ai rarement été autant prise par un roman.



A ce titre je voudrais adresser mille mercis à Babelio et aux édition de Monsieur Toussaint Louverture pour l'envoi de ce roman magnifique, que je n'aurais probablement jamais acheté de moi-même. Vous m'avez offert l'une de mes plus belles expériences de lecture depuis bien des années.

Merci merci merci!
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