Citations de Michel Quint (396)
"Aujourd'hui autant que dans la Rome antique, un fils assassin de son père, waouh, on peut pas écarter l'hypothèse. Plein de types tuent même la femme qu'ils aiment. Alors un vieux père plein aux as ! En réalité des fois l’invraisemblable peut être vrai."
Tout ce barouf pour trois pierres perdues dans un marécage ? L'enjeu ne devait pas être qu'archéologique. Politique à tout le moins ! Gina confirme, pendant le ventennio, les vingt ans de fascisme, on partait du Mezzogiorno, on n'y venait pas sauf pour un exil intérieur. (p. 68)
Aucun ogre ne résisterait à cette douce odeur de chair fraîche. Robert pas plus qu'un autre. Il en fermerait la paupière de volupté à l'instant où il respire la note aigrelette du lait maternel, le piquant du savon de Marseille et, dessous, la touche enivrante, cruelle, sueur et sang, des accouchements triomphants. Oh, ça sent le bébé, le bébé couvé d'amour, le plus beau bébé du monde !
" Tous ces mots, tellement beaux, recherchés, que je m'en souviens comme des étoiles."
Au Cap Gris-Nez, même par beau temps, la falaise à suicidés doit agir sur les gens et les obliger à faire grise mine. Le long tapis d’herbes jaunes qui vient s’effilocher dans le vide est tout plissé, comme si les désespérés le repoussaient sans arrêt du pied avant de sauter, et on a l’impression qu’en s’approchant trop près du bord, on va soudain le faire dangereusement glisser jusqu’à la grève, en contrebas. Plus loin, la mer vert-de-gris sommeille sous le vol des mouettes, et des convois de cargos surveillent l’horizon.
« L’héroïsme, le cœur à l’échancrure de la chemise, la Marseillaise que tu leur chantes à la gueule jusqu’au souffle dernier, tu peux toujours rêver mon garçon, c’est du roman. » p.29
Consentir à autrui le pouvoir de vie et de mort sur soi, où se croire si au-dessus de tout qu'on puisse décider du prix de telle ou telle vie, c'est quitter toute dignité et laisser le mal devenir une valeur.
c'est quoi une vie ? toutes ces années devant soi, où on pense qu'on va se forger l'humanité à petits coups de joies et de chagrins ? Ou l'ombre d'une seconde, tôt dans l'existence où on s'est retourné et un être était là qui nous hanterait et ferait de nous ce que nous serons, éternellement par-delà les beaux et vrais mirages du temps qui nous accompagne, un être, qui nous est entré au coeur à jamais
Je fais un pas en arrière, je devine le contenu de ce billet...
Parce que maintenant, sitôt que je l'ai lu, je ne peux plus reculer. Les mots sont irréversibles. Les prononcer, les lire fait se lever le temps a venir. J'ai une vraie mère, elle s'incarne. Va falloir m'empêcher de rêver, m'agrandir la mémoire, je viens de subir une greffe de vie. C'est ca, je viens de naître...
Longtemps les mots ont roulé au fond de moi comme des cailloux au lit d'un torrent. Ils se précipitaient dans ma gorge, débordaient sur ma langue, butaient au barrage des dents et je parvenais juste à en cracher quelques-uns qui ne voulaient rien dire. Les gens les attrapaient au vol, les regardaient un instant au creux de leurs mains, navrés de ne pas les comprendre, puis les laissaient tomber dans la poussière du chemin. Les autres, qui se bousculaient encore dans ma bouche, je les ravalais et ils retournaient à mes fleuves intérieurs.
Je bégayais à m'étrangler.
"Consentir à autrui le pouvoir de vie et de mort sur soi, ou se croire si au-dessus de tout qu'on puisse décider du prix de telle ou telle vie, c'est quitter toute dignité et laisser le mal devenir une valeur."
Pas que je l'aime, pas si vite, la foudre c'est du roman, c'est juste bizarre dans le jarret quand je la regarde et du plaisir à savoir qu'elle existe, Lisa. Le plus souvent, je suis dans la doublure de la vie qui va.
- on m'ôtera pas de l'esprit que la loterie nationale c'est truqué : un chef d'Etat de 68 ans qui se prend une jeunette comme épouse a besoin de sous. Parce que côté politique, il a peut-être la santé, mais côté matelas, le cher Gaston doit manquer de ressort !
P53
"Tu sais, vieux, à l'hôtel des courants d'air, le déjeuner c'est du vent!"
Et lui qui s'est nippé distrait, sa maigre gueule de grand flahute en éclats de silex pas rasée, la bourrasque blanche de sa tignasse pas coiffée, poussiéreux de la godasse, la sacoche avec son premier Leica cabossé, le Canon numérique, les objectifs, son barda de photographe au long cours bien lourd à son épaule basse!
Certains témoins mentionnent qu'aux derniers jours du procès de Maurice Papon, la police a empêché un clown de rentrer dans la salle d'audience. Il semble que ce même jour, il ait attendu la sortie de l'accusé et l'ait simplement considéré à distance sans chercher à lui adresser la parole.(...) Par la suite, l'homme est revenu régulièrement sans son déguisement à la fin des audiences et des plaidoiries. A chaque fois, il posait sur ses genoux une mallette dont il caressait le cuir tout éraflé.
Mon père était le plus triste des clowns tristes.
- Sans vérité, comment peut-il y avoir de l'espoir... ?
A la mémoire de mon grand-père Leprêtre, ancien combattant de Verdun, mineur de fond, et à celle de mon père, ancien résistant, professeur, qui m’ont ouvert en grand la mémoire de l’horreur et fait pourtant apprendre la langue allemande, parce qu’ils sentaient bien que le manichéisme en histoire est une sottise.
Je crois que tout vie est tissée de celles des autres, que nous ne sommes que ces nœuds avec autrui, un manteau d'Arlequin mal taillé. Même la solitude est faite de mémoire, d'attente, d'espoir de ces nœuds à venir.