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Critiques de Minh Tran Huy (261)
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Un enfant sans histoire

Difficile de ne pas être touché par l’histoire de cet enfant qui, quoi qu’en dise le titre, en a bien une…



Minh Tran Huy se dévoile et se révèle à travers le récit de son histoire personnelle, au moment où un diagnostic concernant Paul, son fils de deux ans, est posé. Elle passe d’un constat d’enfant turbulent, parfois violent, un peu en retard sur son âge à “enfant atteint de TSA” (Trouble du Spectre de l’Autisme). Le verdict est redoutable, implacable et source de nombreuses questions sans réponses car les formes d’autisme sont nombreuses et très différentes d’un cas à l’autre... Là où certains parviendront, malgré leurs difficultés d’adaptation sociale, à s’intégrer et à développer certaines capacités au-delà de la moyenne jusqu’à être qualifiés de génies, d’autres en revanche, ne dépasseront pas le stade de la petite enfance et ne parviendront pas à assimiler le langage oral, ni même la propreté, restant dépendants toute leur vie d’une assistance…



Ainsi, à travers le cas de Paul, Minh Tran Huy nous confie son combat au quotidien et celui de son mari, afin de donner le meilleur accompagnement à leur fils afin qu’il développe des capacités d'interaction avec les autres. N’ayant pas de cas d’autisme autour de moi, c’est grâce à son témoignage que j’ai découvert à quel point avoir un enfant atteint de TSA en France et lui donner des soins adéquats, relevait du parcours du combattant! Pénurie de places en centres spécialisés, manque de personnel formé, catégorie professionnelle sous payée, dossier administratif à remplir nécessitant limite un Master, bref, rien n’est fait pour faciliter la tâche à des parents en détresse, déjà épuisés par un quotidien particulièrement usant! La France est le plus mauvais élève européen sur ce sujet et enchaîne blâmes et procès lors des commissions, c’est grave et ça révèle à quel point les priorités ne sont pas tournées vers le social et vers l’humain…



En parallèle de son histoire, Minh Tran Huy dresse le portrait de Temple Grandin, née en 1947 aux Etats-Unis, à une époque où l’autisme n’avait pas de nom et où l’on internait automatiquement en hôpital psychiatrique toute personne différente… Grâce à une mère courage qui ressent la différence de son enfant mais aussi sa souffrance et va chercher à la comprendre afin de l’accompagner, Temple Grandin va réussir à échapper à l’asile. Avec beaucoup de patience et les bons accompagnements, la petite fille qui étalait ses excréments sur les murs lors de ses accès de rage, va peu à peu développer ses particularités jusqu’à devenir l’une des références mondiales dans le domaine de la zootechnie, rien que ça! Un parcours extraordinaire malgré de nombreux obstacles, qui a de quoi susciter l’espoir chez tout parent d’un enfant atteint de TSA…



Bref, à travers son récit-essai sur l’autisme, Minh Tran Huy nous offre un ouvrage passionnant et nécessaire qui devrait être lu par tous (et notamment par nos dirigeants!) afin d’informer les gens sur un sujet qui appelle à la tolérance et à la bienveillance. Bon après, j’avoue, si j’avais regardé le résumé avant de me lancer dans cette lecture, j’aurais tout de même attendu de ne plus être enceinte avant de m’y atteler, histoire de ne pas me rajouter d’angoisses supplémentaires hein…

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Le lac né en une nuit et autres légendes du Viêtnam



J'ai découvert une autrice talentueuse et prolifique : Minh Tran Huy qui est française et a découvert son pays d’origine, le Vietnam à travers les contes que lui racontait sa grand-mère quand elle était enfant, dans un français mal maîtrisé.

C’est alors qu'un Viêtnam imaginaire est né, et celui-ci n’existe que dans l'esprit de MTH.

Son éditrice chez @actessud qui avait aimé son roman : La princesse et le pêcheur (que je vais lire prochainement) lui a proposé d’écrire un florilège de contes vietnamiens, c'est ce livre que j'ai eu entre les mains et que je viens de dévorer qui pourrait représenter le cahier que s'échangent les amoureux Lan et Nam.



Comment rester de marbre à la lecture de ses 18 contes très courts et si délicats. Il y en a pour tous les goûts : contes philosophiques, fables chantant des amours impossibles, des héroïnes sacrifiées, des bonheur éphémères et des malentendus tragiques. Et souvent, cela finit mal, ce qui est traditionnel pour un conte Vietnamien.



Vous trouverez dans ce livre de conte : 

L’homme et l’esprit maléfique qui régnait en maître absolu sur le monde. Les deux frères Tan et Lang qui perdent tout suite à un incendie et qui sont recueillis par leur oncle Luu. La légende du roi Huong Vuong et de ses 20 fils qui pour choisir son successeur demande à toute sa progéniture de confectionner LE gâteau qui ravira son palais. La légende expliquant pourquoi la mer est salée. Un autre racontant la naissance du moustique.

En passant par un conte ressemblant à Cendrillon. Et comment les origines du peuple Vietnamien.



C'était très intense, on est sur un 130 pages, et c'était tellement bon, tellement régressif, tellement inspirant. Beaucoup de sagesse et de dureté et une galerie de personnages aux vertus où défauts accentués bien typique des contes forcément. 



Je vous conseille ce livre et je vais prochainement lire : La princesse et le pêcheur et les inconsolés.

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Les inconsolés



Minh Tran Huy est une romancière française d’origine vietnamienne, Les inconsolés est son quatrième roman.



Lise, 20 ans, milieu modeste, pétrie de mal-être au sein d'une famille plus qu'économe, tombe amoureuse d’un inconnu, un amour foudroyant.

Louis, le même âge, fils de bourgeois, vivant dans un château, éprouve un désir irrépressible pour la belle dès le premier regard.

Lise lit ce qui semble être une mise en abyme de ce premier amour : Le temps de l’innocence d’Edith Wharton, qui est l’histoire d’un amour tumultueux.

Lise a une immense soif d’aimer, elle est de ces filles qui rêvent plus qu’elles ne vivent et qui est amoureuse des histoires d’amour et des contes de fées, du cinéma, de l'art. Rejetée et mal aimée par sa mère affabulatrice et ayant des préférences assumées pour sa cadette, un père qui est l'archétype du savant distrait et n’ayant jamais su imposer ses idées.

Lise et Louis c’est un amour fou et aussi une rencontre entre deux milieux sociaux, deux conceptions de la vie aux antipodes et plusieurs cultures.

Lise ou le double fictif de l'autrice ?



Minh Tran Huy débute son récit avec les ingrédients et les références des contes de fées, et emmène sa bergère et son prince charmant vers un destin qui les liera à jamais, un destin tragique évidemment, car cela sera révélé dès les premières lignes et contrôlé d'une main de maître jusqu'au dénouement.

Minh Tran Huy qui a écrit notamment Le lac né en une nuit et autres contes du Vietnam que j’avais aimé et qui était trop bref pour le coup, m'a enchantée avec Les inconsolés, bien développé et enveloppé de toutes ces références littéraires et cinématographiques.

Les personnages sont très bien construits, et il y a un personnage dont on ignore qui il est et son rôle jusqu'au dénouement "l'autre". Ce qui les rend attachants, c’est le fatalisme vers lequel ils avancent, car nous savons les petites voix qui s’opposent en eux, et Minh Tran Huy nous les rends si familier que l’on pense et que l'on respire comme eux.

Les questions que pose ce livre : À quoi bon vivre une passion, si c'est pour tout détruire autour de soi et se détruire soi au passage ? Pourquoi ne pas se contenter d'aimer et d'être aimé par ceux qui désirent et qui savent vous aimer ? Pourquoi refuser ce qui peut vous sauver ?

Il y a cependant trop de descriptions à mon goût sur la psychologie, les goûts et l'histoire de Lise, ce qui déséquilibre l'histoire par rapport à Louis et nous éloigne du récit et de son avancement… et à contrario fait planer le suspense!

Cela reste un plaisir à lire car l’autrice a une plume incroyablement poétique et douce, qui sait envoûter les vents contraires, les non-dits car il en reste énormément, les moments intenses.

Ce thriller romantique et conte de fée cruel des temps modernes est à sortir des Pal ;) et La femme d'à côté de Truffaut à voir où revisionner.



Les thèmes abordés : Le premier amour, l’adolescence, les relations mères-filles, les relations entre soeurs, les blessures de l’enfance, le passage à l’âge adulte, les tragédies, le métissage culturel, le changement de classe sociale, les études supérieures, le drame, la littérature, le cinéma, les contes de fées.

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Les inconsolés

Un jour, mon prince viendra…



Ne pas s’attendre à une bluette !



Voici un conte cruel et dramatique, sur les vertiges du sentiment amoureux entre passion et haine, joies et douleurs, sensualité et intellect, et chocs des aspirations personnelles quand le coup de foudre se délite.



J’ai lu goulûment ce remarquable roman construit avec deux entités narratives: "Elle" et l’"Autre" dont l’identité anonyme laissera planer le doute jusqu’au final.

Les femmes y ont une place prépondérante, qu’elles soient mère, sœur, amie, laissant les hommes en retrait, leurs faiblesses ou blessures décryptées par une approche indirecte très féminine.



C’est un roman à la composante personnelle sur les origines vietnamiennes, référence que l’auteure partage bien souvent au fil de ses romans. L’occasion de confronter ici les différences de classes, tant par l’éducation, innée ou acquise, que par le creuset d’origine des individus. Un grand nombre de références littéraires, contes et classiques, ou cinématographiques, parsèment un récit sur la transgression sociale, tentant à vouloir prouver l’impossibilité du bonheur hors de son milieu, tout en mettant en avant la méritocratie républicaine.



Une écriture ciselée, une grande aisance stylistique, un soupçon d’exotisme, du drame, des caractères modelés comme des héros de livre de sorcière.

Et un très réussi final, inattendu, tel une cerise sur le gâteau.



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Ton frère

Reçu dans le cadre d'une opération Masse Critique Privilégiée, je remercie sincèrement Babelio et les Éditions Robert Laffont pour cette très belle découverte. J'ai été très émue par ce beau témoignage d'amour, car au fond, il ne s'agit presque que de cela... presque...



La collection "Les affranchis" demande aux auteur.ices d'écrire "la lettre que vous n'auriez jamais écrite". Minh Tran Huy répond parfaitement à la contrainte en rédigeant cet ouvrage à l'attention de son deuxième fils, son Serge. Elle lui raconte un peu de sa vie, un peu de celle de ses ancêtres (originaires du Vietnam), quelques contes asiatiques, mais surtout leur vie actuelle : famille française réunissant deux parents lettrés, Polo - son aîné autiste - et lui, Serge - le cadet en pleine santé.



L'autrice décrit si bien les difficultés d'être parent, a fortiori mère, augmentées par le trouble autistique de son premier fils. Elle rend compte avec rage et courage des embûches sur leur trajet pour apporter les meilleures conditions de vie à leur enfant, des renoncements nécessaires, des sacrifices incontournables, de l'organisation "PME" familiale. Elle nous confie ses frustrations, dont celles, immenses, liées au silence de son enfant, qui ne lira jamais ce que ses parents mettent tant de cœur à écrire. Elle livre aussi ses désillusions autour de la prise en charge des enfants "différents", mais surtout autour du principe de "méritocratie". J'y croyais aussi avec ferveur, mais à la lecture de ses mots, mon avis a changé : comment parler de méritocratie au regard de telles inégalités de classe, de genre, d'histoire, de santé...



J'ai dévoré ce livre, en quelques heures seulement, tant il est poignant, intelligent et bien écrit. Le style de Minh Tran Huy est aussi délicat, tendre et émouvant que les messages qu'elle fait passer, à ses fils avant tout, mais aussi au lectorat. Les novices - dont je suis - y trouveront autant de sincérité que d'amertume et de réalisme que de belles citations à ancrer profondément dans nos esprits.



Je le conseille vivement à quiconque s'intéresse à la parentalité, à l'inclusivité et à la tolérance.
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La double vie d'Anna Song

" Il arrive que la vérité soit tissée d'impostures, que les creux aient l'importance des pleins,que les choses tues comptent autant, sinon plus que celles qui sont dites". Cette citation du narrateur résume en elle seule ce roman.

Lorsqu'il perd ses parents dans un accident de voiture, Paul ,alors tout jeune,est recueilli par sa grand mère. Celle-ci lui fait rencontrer Anna qui est la petite fille de son amie vietnamienne. Cette rencontre magique se fait à travers la musique. La fillette est en effet au piano lorsque Paul s'approche d'elle. Dès lors l'idylle est enclenchée pour ne jamais finir. Le roman est construit un peu comme un jeu de miroirs car le lecteur découvre sans fin qu'une réalité escamotée en cache une autre. En ce sens ,le thème du roman familial est exploité comme jamais et transcrit comme une fable. Minh Tran Huy s'appuie cependant sur une partition bien réelle, celle de l'histoire du Vietnam depuis la colonisation française, par petites touches blanches et noires car les souvenirs d'Anna sont lumineux et se mêlent à la noirceur politique d'un pays malmené tant par l'extérieur que par l'intérieur. L'auteure elabore son roman en alternant le récit de Paul et les articles de journaux qui passent de la louange d'Anna Song à la révélation de l'imposture.

Fond historique,mythes familiaux,passion amoureuse, musique et réflexion autour du réel et sa perméabilité avec la fiction,tout ceci aurait dû m'enthousiasmer. Pourtant ,je ne sais pas pourquoi, cela n'a pas été le cas. Je me suis parfois ennuyée et n'ai pas ressenti l'émotion qui aurait dû être présente face à une histoire d'amour aussi poignante...
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La double vie d'Anna Song

Il y a quelques mois, j'ai découvert les romans de Minh Tran Huy, son écriture poignante et poétique qui transperce et qui bouleverse ; et son univers soyeux, très tourmenté et d'une grande cohérence.

Ce furent d'abord «Les Inconsolés » -sublime-, puis « La Princesse et le Pêcheur » -touchés par la grâce -. Je m'étais alors promise de dévorer aussi « La double vie d'Anna Song » quand j'aurai le temps et que la pile décadente de livres à lire qui colonise le parquet de ma chambre aurait diminué (soyons clairs : elle ne diminue jamais!).

Prise par d'autres auteurs, d'autres romans, j'ai oublié Anna Song jusqu'à ce que je lise, il y a quelques jours, ce qu'en a écrit berni_29 ici, un billet sensible et très beau qui a achevé de me convaincre de rechercher « La double vie d'Anna Song » et de m'y plonger.



Une fois de plus (jamais deux sans trois!) j'ai été complètement happée par l'histoire racontée par l'auteur, par son style à la fois très écrit, extrêmement poétique mais qui fait également la part belle aux sens, à la chair et à l'instinct ; par son univers torturé et mystérieux, cruel et pourtant plein de grâce, oppressant quoique fait de dentelle, à la lisière du conte ; par ses obsessions qu'on retrouve d'un roman à l'autre et qui les hantent comme autant de fantômes ; par son sens du récit et de la construction, par ce chemin qu'elle fait emprunter au lecteur, un peu brumeux, jusqu'à la chute vertigineuse qui poignarde et qui donne envie de reprendre le roman dès le début, pour tenter de trouver les clefs, les codes et de comprendre...



Anna Song avait quarante-neuf ans, elle était belle et talentueuse. C'était une grande pianiste, une virtuose méconnue. Une artiste maudite.

Anna Song n'a pas eu la carrière qu'elle méritait : une dystonie lui a fermé les portes des institutions de la musique classique, et lorsqu'elle a enfin pu se remettre à jouer, elle a préféré se retirer pour enregistrer les morceaux les plus célèbres et les plus difficiles dans le studio construit pour elle dans le jardin de la propriété qu'elle partageait avec son époux Paul Desroches. Alors même que ses enregistrements trouvaient enfin leur public grâce au travail et à l'abnégation de Paul, que critiques et musiciens reconnaissaient enfin le talent infini de la musicienne, elle a été emportée par le cancer qui la rongeait depuis des années et la laissait exsangue après chaque séance d'enregistrement.

Il n'en faut pas plus pour naisse la légende : les gens ont toujours aimé les destins brisés, les artistes maudits, les tragédies...

Il paraît que parfois pourtant les légendes se fendillent, que le réel les met à mal et qu'elles tombent alors de leur piédestal et se brisent.

Anna Song, peu après sa mort, va tomber du sien : ses enregistrements ne seraient pas les siens mais de vulgaires copies, des enregistrements piratés, des performances pillées à d'illustres inconnus. le scandale éclate et on somme le gardien du temple, l'époux éploré, l'imprésario endeuillé de s'expliquer.



Le roman alterne entre des articles de presse relatant « l'affaire Anna Song », de la mort de la pianiste à la découverte de l'escroquerie et le récit de Paul Desroches qui tente de se justifier, d'expliquer. En filigrane, son amour fou pour Anna, de cet amour qui confine à la folie et « la pavane pour une infante défunte » qui résonne encore et encore.



C'est l'histoire d'un enfant et de sa petite voisine qui commence quelque part en Normandie sous le regard bienveillant de deux grands-mères qui ne parlent pas la même langue mais qui se comprennent quand même.

Le petit garçon est timide, mélancolique et depuis la mort de ses parents, il s'éteint, sans bruit jusqu'au jour où il passe la porte de la maison d'à côté. Dans le salon, la fillette est au piano et ses mains courent sur le clavier, la musique en ruisselle et Paul est hypnotisé. Dès lors, Anna et lui deviennent inséparables -ou presque-.

Quand elle ne joue pas, Anna lui raconte sa vie et ses parents, le Vietnam d'où ils viennent mais qu'elle ne connaît pas, les légendes de cette terre qu'elle rêve au creux de l'exil européen de ses parents -c'est aussi le sien- et l'histoire de son grand-père et de sa propriété de conte de fées qu'il détruisit lui-même un soir de guerre mais qu'elle rebâtira un jour. Elle lui dit ses rêves de piano et de musique et lui rêve avec elle, de ce passé qui ne lui appartient pas et de ses projets dont il sera.

C'est un amour d'enfants qui se perdent puis se retrouvent et s'épousent.



Un amour fou entre deux grands blessés.



Au terme du récit de Paul Desroches, on comprendra le sens de l'imposture, des mensonges et tout le reste.

On saura les blessures inguérissables, celles de l'exil et de l'Histoire, celles de ses ancêtres qu'on porte en soi et qui nous hante, celles des échecs, celles du déracinement ; celles des rêves trop grands et qui ne se réaliseront pas, celles des amours blessées ; celles que même l'amour ne guérit pas.

On saura le poids des secrets et celui des racines trop longtemps étouffées.

On saura la force des contes et de la fable, celle de l'abnégation des amoureux transis, celle -implacable et tyrannique- de la réalité.



« La double vie d'Anna Song » est un roman captivant, cruel, très dense qui se lit d'un souffle. Il m'a étouffée et mise mal à l'aise parfois : exquise douleur dont je ne pouvais ni ne voulais sortir. C'est un roman hypnotique et triste, une mélopée lancinante qui abolit la frontière entre la réalité et le fantasme, où les silences sont assourdissants et dangereux comme les épines des contes ; un roman qui joue avec les miroirs, la folie et les rêves ; un roman, enfin, qui raconte la douleur des déracinés et la nostalgie des pays qui ne sont plus, plus vraiment.

















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La double vie d'Anna Song

Cette histoire est fascinante. Minh Tran Huy part du scandale Joyce Hatto (1928-2006), qui ébranla la musique classique en 2007.



Il s'agit d'une tromperie à grande échelle autour de la musique. Anna Song vit avec ses parents et sa grand-mère en France. Ses parents ont fui le Vietnam. Ses parents travaillants, elle se retrouve souvent seule avec sa grand-mère. Sa mère avait une passion pour la musique. Mais une fois en France, elle a renoncé à jouer. C'est Anna qui reprend le flambeau, avec virtuose et passion. Et il y a le grand-père, décédé, qui laisse une empreinte importante sur Anna qui ne l'a pourtant pas connue.



A côté de chez elle, un petit garçon, Paul Desroches, vit avec sa grand-mère. Ses parents ont trouvé la mort dans un accident de voiture. Cela le marquera à tout jamais.



Ces deux âmes seules vont se rencontrer. Ils vont grandir ensemble jusqu'au départ d'Anna pour les Etats-Unis. Ils se promettent de s'écrire et de se revoir. Ce n'est qu'une petite séparation.



Ils se retrouveront longtemps après. Mais Anna, devenu pianiste, a une grave maladie. Alors Paul décide de lui créer un atelier où elle pourra jouer de la musique à son rythme. Il enregistre tout ce qu'elle joue.



A son décès, il vend ses CD. Anna rencontre une certaine notoriété.



Jusqu'au grain de sable.



Ah, là si vous voulez connaître la suite, vous savez ce qu'il vous reste à faire.



Minh Tran Huy a réussi son coup. J'ai complétement plongé dans cette histoire qui ressemble à un lac calme mais qui cache bien des tragédies. Elle a su très bien orchestrer son roman. On suit la vie des deux protagonistes, de leur enfance jusqu'au final. On revient au Vietnam et à son histoire. Cela parle de musique, de rêves réduits à néant, alors qu'il y a tant de travail derrière. Également de déracinement, du poids des anciens sur les générations qui suivent. de l'impact des évènements sur la vie des uns et des autres. de solitude. D'Amour (avec un grand A). de cette imposture menée de main de maître, sans compter la fin surprenante.

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La double vie d'Anna Song

"Vivre, c'est s'obstiner à achever un souvenir" (citation de René Char en épigraphe du roman).



Pavane pour une interprète secrète...

Roman sensible et délicat, d'une justesse touchante.

Projection musicale d'un amour désespéré...



"Nous vivons tous dans un environnement tangible autant que dans notre imaginaire [...]"



L'histoire de ce roman tourne autour d'un scandale sous-jacent, et de ce que par amour l'on puisse être capable de faire.



Anna Song nous est décrite comme une enfant prodige, un passé à la très marquante histoire familiale aux racines vietnamiennes, et une vie très tôt consacrée au piano.



L'avenir d'une carrière de pianiste, concertiste, semblait tracé, mais la vie n'est pas un long fleuve tranquille...



Son mari et producteur Paul Desroches  jouera un rôle de protecteur, fidèle compagnon de toujours, il nous raconte son épouse bien-aimée.



A sa mort, Anna Song laisse une discographie impressionnante, du jamais vu, un répertoire pianistique immense et très diversifié.

Capable d'exceller aussi bien en jouant Bach, Beethoven, Chopin, que Prokofiev, Ravel, Messiaen...et bien d'autres encore. 



Des prouesses révélées sur le tard ...

L'hommage rendu à son talent prolifique confère presque du mythe alors, entouré d'un halo de mystère...



"La littérature, après tout, ne cesse de recombiner les mêmes mots et la musique les mêmes notes".



Initiation, passion, admiration... mystification.

Folie d'aimer... Chimère et réalité.

Des notes et des silences...

Des Inventions à 2 voix, à 3 voix, comme chez Bach, se laissent entrevoir...

*

Un roman au style raffiné et à l'histoire mêlant la musique et l'amour fou.

Une fantaisie-impromptu qui m'a joliment surprise.

*



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Le lac né en une nuit et autres légendes du Viêtnam

Le lac né en une nuit est le titre d'un conte vietnamien célèbre , c'est aussi le titre de ce livre , recueil de contes que nous transmet l'auteur , romancière française d'origine vietnamienne par ses deux parents .

Elle nous confie dans une préface émouvante que ces contes , elle les a entendu maintes fois pendant son enfance , raconté par ses parents nostalgiques du sol natal .

Quel meilleur moyen que les contes pour découvrir un pays lointain , une autre civilisation , dans ce cas précis asiatique .

Les contes parlent d'un pays , de leurs habitants , de leurs coutumes , de leurs différences et malgré tout ont un côté universel , savez vous par exemple qu'il existe une version de Cendrillon , d'origine chinoise qui date de plus de trois mille ans ?

Personnellement depuis quelques années je suis à la recherche de contes du monde entier , une recherche parfois frénétique en bonne passionnée , je ne pouvais pas passer à côté de cette belle découverte que sont ces contes vietnamiens , tour à tour poétiques ou cruels , étonnants par leurs différences ou au contraire par leur familiarité

Une très belle découverte , un beau travail de la part de l'auteur qui a retravaillé ces contes.
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La Princesse et le Pêcheur

Une histoire d'amour et de silence, de fuite et de guerre, de non-dits et de mort.

Alors que Lam est née en France de parents Vietnamiens, Nam est un boat people, fuyant le pays sans garantie de survie.

Une amitié naît malgré, ou grâce à, ces différences. Cependant quelque chose est entre eux, ils le savent, n'en parlent pas. Puis Nam disparaît.

L'exil n'est pas seulement la fuite d'un pays ; c'est aussi ne pas le connaître, en étant différent de sa terre natale. C'est ne pas pouvoir dire, à un âge où beaucoup de choses changent, évoluent.

Le silence, les émotions contenues et les contes, l'entrelacement avec l'amour, cela forment une toile, celle du Vietnam. Pays perdu ou inconnu, il tient une grande place dans la vie des protagonistes.

Un texte mesuré et subtil, comme une estampe japonaise.
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Un enfant sans histoire

Minh Tran Huy est une romancière et journaliste reconnue. Elle prend le pari ici de prendre la plume pour parler de son fils, Paul, qui jamais ne lira les mots couchés sur le papier par sa mère. Car Paul est autiste.



« Les Etats- Unis, tout comme le reste de l'Europe, ont abandonné dans les années 1960 les théories psychanalytiques attribuant l'autisme à un traumatisme psychologique. Pas la France, férue de psychanalyse depuis longtemps - c'est le pays qui compte le plus grand nombre de psychanalystes par habitant dans le monde. Le combat continue de faire rage entre ceux qui considèrent qu'un enfant comme Paul, victime d'une hypothétique, si ce n'est fantasmagorique, "blessure psychique", ne parle pas parce qu'il ne veut pas parler ; et ceux qui pensent qu'il ne parle pas parce qu'il ne peut pas parler, et qu'il faut par conséquent l'aider à acquérir les compétences (communicationnelles, cognitives, sociales, motrices…) dont disposent les enfants ordinaires. » La France, éternelle Lacanienne, a bien du mal à se secouer et à envisager d’autres prises en charge que la psychanalyse pour soigner les âmes en détresse. L’enfant va mal ? C’est la faute de sa mère…



« Nous sommes en 1990 et la réussite de Temple est d'ores et déjà spectaculaire: la fillette qui tapissait sa chambre de ses excréments, se débattait en hurlant pour des raisons que nul ne parvenait à saisir, l'enfant violente, incontrôlable, que son père et les psychiatres voulaient institutionnaliser, celle que ses camarades d'école, de collège, de lycée traitaient de "tarée" avec un mélange de peur et de mépris, occupe désormais le poste de professeur d'université en science animale, auquel elle a ajouté les casquettes d'ingénieure et de femme d'affaires […]. » La romancière prend appui – et espoir- sur le chemin de vie de Temple Grandin ; ébahie de constater que les soins qui lui ont permis d’avancer vers une espèce de « conformité sociétale » sont nés de l’instinct de la mère, puis de l’attention d’un professeur. Inspirant, mais ô combien culpabilisant quand on ne parvient pas à faire de même…



« En jetant toutes nos forces dans une bataille quotidienne contre l'autisme, Adrien et moi avons oublié qu'il s'agissait d'un marathon et non d'un sprint. Nous avons négligé de prendre soin de nous comme il l'aurait fallu et avons du mal à maintenir la tête hors de l'eau. » Les parents ont tout donné pour leur petit Paul : temps, énergie et argent. Au point d’en souffrir. 85% des parents d’enfants autistes divorcent ; comment résister malgré ces quotidiens sans répit qui se suivent et se ressemblent désespérément ?



Un livre qui questionne la place de l’autisme – et du handicap de manière générale – en France et qui met en avant le sentiment de culpabilité et d’impuissance que ressentent les parents quand, malgré les thérapies comportementales, les prises en charges médicales et paramédicales, leur enfant n’évolue pas. Poignant.

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Un enfant sans histoire

L’autrice, mère d’un petit Paul, diagnostiqué autiste nous fait découvrir, à la lumière de son expérience, ce monde, largement inconnu et ignoré qui touche pourtant un grand nombre de personnes et plonge dans l’incertitude et le malheur les malades et leur entourage. Elle prend le parti de dérouler deux histoires en parallèle, celle de Temple qui a réussi à s’en sortir et à apporter un témoignage précieux pour la communauté et celle de son fils qui malgré la mise en œuvre de tout ce qu’il est possible par des parents attentionnés restera lourdement handicapé. Très richement documenté, par les recherches effectuées par L’autrice et son mari pour leur petit Paul, on apprend beaucoup de choses sur le sujet et sur le retard considérable de la France dans la prise en charge de ces pathologies. Les familles touchées doivent se livrer à un vrai parcours du combattant pour, faire diagnostiquer, choisir la bonne voie thérapeutique, trouver les bonnes personnes et les bonnes structures existantes ou à créer. Témoignage précieux et émouvant.
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Les inconsolés

Il y a des livres qu'on découvre complètement par hasard, dans une librairie dans laquelle on n'avait pas prévu de pénétrer, sur un compte instagram qui en fait l'éloge; des livres qu'on décide alors de lire et dont on se demande comment on a pu s'en passer jusque là. Ce fut pour moi le cas des Inconsolés qui vient de me transpercer.



Dans ce roman bouleversant, Minh Tran Huy met en scène une histoire d'amour sublime, violente et destructrice entre Lise et Louis.

Ils ont vingt ans et se rencontrent à la terrasse d'un café non loin de l'école où ils étudient. Tandis que Lise évoque son admiration pour Edith Wharton et "Le Temps de l'innocence", Louis la dévore des yeux. C'est un coup de foudre, comme il n'en existe que chez Shakespeare, Truffaut et les romans. Un coup de foudre impitoyable entre ces deux êtres que tout sépare.



Lui, qui à la beauté blonde d'un archange est issu de la grande bourgeoisie parisienne. Il a grandi dans un somptueux hôtel particulier niché au cœur de Paris. Le monde est à ses pieds et le jeune homme se rêve déjà loup de la finance.

Elle est franco-vietnamienne et issue d'un milieu beaucoup plus modeste. Discrète, effacée, tourmentée et sensible à l'extrême, elle ne sait même pas qu'elle est jolie et se jette à corps perdu dans la littérature et le cinéma.

Leur amour, intense, fulgurant, violent, sera de ceux dont on pense qu'il durera toujours et qui fera un mal de chien quand il volera en éclats. Un mal à en crever, à en tuer.

C'est qu'il est des choses auxquelles même l'amour ne résiste pas et qu'expérimentent Louis et Lise: les différences infranchissables de classes sociales et de caractères, les tourments intimes, les déchirures et les mensonges du passé. Toutes ces douleurs rythment d'abord tout doucement puis de plus en plus violemment la passion des deux amants de sa mélodie lancinante, entêtante, hypnotique jusqu'à l'excès. Jusqu'au drame.



Ainsi le roman conte l'apothéose et les derniers feux d'une flamboyante passion amoureuse mais il le fait sans mièvrerie. De surcroît, il va au delà en auscultant d'autres thèmes puissants et douloureux tels que le déracinement, les blessures de l'enfance qui forgent l'adulte autant que ses bonheurs, l'insouciance de la jeunesse, le poids des origines qu'il dissèque à la lumière de la façon d'être et d'aimer son compagnon/sa compagne. Certes, cela confère au roman quelque chose de très cérébral, impression accentuée par les mille et une référence artistiques et culturelles qui émaillent le texte… Et en même temps… Et pourtant...



Et pourtant "Les Inconsolés" reste également un roman d'une intensité poignante, d'une sensualité à fleur de page et d'une poésie parfois cruelle mais très belle aussi. La langue de Minh Tran Huy est un plaisir, un chant incantatoire, une psalmodie envoutante qui se dévore mais qui se murmure aussi très bien.



La force de ce roman réside aussi dans sa forme et sa construction qui lui insuffle sa beauté troublante et son originalité.

Il y a cette construction à deux voix qui se répondent mais qui ne s'écoutent pas. Lise est notre première conteuse mais l'identité de cet "autre" mystérieux et inquiétant ne se révélera qu'à la fin de l'histoire, quand on commence à étouffer comme l'épine et la rose sous l'étreinte du lierre.

Il y a ce premier chapitre au clair de lune, doux, diaphane mais mortifère. Glauque même.

Il y a cette parure de conte cruel et gothique où les étoiles soudain deviennent glaciales, sanglantes; où les fées se démasquent pour montrer leur visage-serpent.

Il y le ver dans le fruit, le poison dans la passion, l'obscurité dans la lumière. Et cette atmosphère lourde, pesante et capiteuse de thriller.

Il y a Paris et le Viet Nam, les légendes et la cruauté de l'histoire du second et les pièges de la première.

Il y a cette vision enténébrée et fiévreuse de l'amour et de la passion qui ressemble tant au cinéma de François Truffaut: Lise et Louis, ce sont un peu Mathilde et Bernard de "La Femme d'à côté" ou Louis Mahé et Marion de la sirène du Mississipi", ces amants qui ne cessent de se blesser et de se tuer parce que s'aimer "est à la fois une joie et une souffrance", que c'est "ni moi sans toi, ni toi sans moi".



"Les Inconsolés " est une lecture inquiétante mais surtout incandescente, l'exquise douleur des sombres amours mises en mots.

Etouffant mais sublime comme les films de François Truffaut dont j'ai ressorti ce soir les dvd, poussée par Minh Tran Huy. Et ce sera bien.



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La double vie d'Anna Song

Ce livre est une rencontre particulière. L'histoire est très originale. Les deux protagonistes ont chacun leur passion. Anna la passion du piano et Paul la passion d'Anna. Comme toute passion elles s'achèveront dans le drame.



L'histoire est menée tout le long sur fond de musique au rythme du travail acharné d'Anna pour atteindre la perfection en tant que pianiste. Paul est spectateur dans un premier temps et découvre la musique. Sa passion le conduit à devenir un spectateur chevronné puis un acteur très actif pour défendre la passion d'Anna. Les références musicales sont nombreuses, le lecteur a l'impression d'écouter les airs de piano joués par Anna tout au long du livre.



L'auteure a su transmettre de l'empathie au lecteur pour comprendre la conduite de nos deux héros. En effet, le lecteur a parfois du mal à se situer dans le récit, mais la fin du livre est le révélateur de toutes les pages précédentes. Le cheminement est très habile car sous la plume de l'auteure le lecteur a finalement été guidé, tout comme les personnages, tout le long du récit.



Le style d'écriture m'a parfois gênée mais l'auteure écrivant bien mieux que moi je ne critiquerais pas.
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La Princesse et le Pêcheur

Durablement fascinée, profondément séduite par "Les Inconsolés" , je n'ai eu de cesse, depuis ce rapt, de vouloir prolonger ma découverte des œuvres de Minh Tran Huy et j'ai jeté mon dévolu sur "La Princesse et le Pêcheur", fascinant à sa manière lui aussi, d'une déchirante mélancolie et d'une cruauté contenue, comme le conte qui enserre le roman et en ouvre les chapitres.



Lan et Nam se rencontrent sur le ferry qui les emmène en Angleterre pour un séjour linguistique. Ils ont seize ou dix-sept ans peut-être et sans doute se rapprochent-ils d'abord parce qu'ils se ressemblent et que leurs traits reflètent le Viêt-Nam.

Elle, elle est née en France de parents vietnamiens qui ne lui ont jamais dit grand chose de leur passé, lui est réfugié depuis peu et sur le pont du ferry ils se chuchotent des légendes du pays qu'elle ne connaît pas et qu'il a quitté.

De promenades en séances de cinéma, de chocolat chaud en discussions interminables, de contes en confidences, les adolescents se rapprochent et se lient l'un à l'autre, d'autant plus intensément que cette relation demeure discrète, tue, comme secrète.

Lan ne tarde pas à tomber amoureuse de son ami, si beau, apparemment si sûr de lui parfois, si mystérieux aussi et si doux mais cet amour et ce désir même restent silencieux et pour cause Nam semble considérer la jeune fille davantage comme une petite sœur que comme une amante.

Et puis, il y a ses silences, tout ce qu'il ne dit pas et les murs qu'il semble avoir bâti autour de lui. Cette gêne qui le saisit parfois, cet inexplicable malentendu qui plane souvent autour d'eux comme un fantôme. Et la disparition.

Plus tard, Lan partira en voyage au Viêt-Nam avec ses parents où ils retournent pour la toute première fois et de secrets dévoilés en révélations douces-amères, elle comprendra peut-être. Elle comprendra enfin.



"La Princesse et le Pêcheur", c'est le roman d'une non-rencontre, d'un amour manqué et le roman du silence. Le roman d'une mélodie poignante, déchirante égrenée sur un piano.

C'est aussi un roman sur l'exil et ses traumatismes, sur sa violence et sur l'impossibilité de l'exprimer. Dire sa souffrance est inconvenant et douloureux, alors il vaut mieux se taire et avancer. Se taire pour avancer. Quitte à en être hanté. Quitte à en mourir.

C'est enfin un roman sur la fin de l'enfance et de son innocence, sur les renoncements et les douleurs qu'impose l'âge adulte, sur ses deuils, comme en témoignent sa construction qui laisse la place aux légendes et aux contes, qui sont comme un dernier cadeau avant que tout passe et se termine.



Il en ressort un livre aux accents déchirants, teinté d'une bouleversante mélancolie qui poignarde et serre le cœur; une histoire douloureuse, cruelle mais évanescente comme un rêve, comme un pan de brume. De ces histoires où on ne sait plus, quand on les a vécu, distinguer la part de réel et la part de fantasme.



Une histoire comme un sanglot, comme le Clair de Lune de Debussy.









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La Princesse et le Pêcheur

Préfacé par un extrait de au Sud de la frontière, à l'ouest du soleil de Haruki Murakami, et pouvant être considéré comme trop léger, ce roman aux apparences facile recèle de jolis trésors qu'il est agréable de découvrir. Toute en délicatesse il exprime les épines de la mélancolie... Chaque chapitre est accompagné d'un épisode de conte qui enjolive le texte et font se balader l'esprit du réel au fantasmé... en bref un conte cruel savoureux.
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Ton frère

« Il y a une faille en tout chose,

C’est par là qu’entre la lumière ». Leonard Cohen.



Minh Tran Huy dévoile son histoire personnelle de façon sensible, intime et sans fard. L’autrice raconte tout l’amour pour l’aîné de ses enfants, Paul, autiste, ainsi que l’impuissance et le désarroi vécus face à la situation de lourd handicap touchant Paul, elle s’adresse dans ce récit à Serge, son cadet, confiant cette histoire bouleversante.



Une volonté de mettre en lumière et sublimer les fêlures, de révéler au grand jour et en mots.

Enseignement, état des lieux, confidences, qui démontrent combien long reste le chemin à parcourir pour accompagner les familles et considérer les personnes souffrant d’autisme, de façon adaptée et digne.



L’autrice confie tout ce qu’être parent d’un enfant autiste induit, de responsabilité, d’indulgence, de difficultés dans notre société, de culpabilisation aussi – tristement, de vulnérabilité, de singularité.



Un témoignage intime, criant d’émotion, de douceur et de douleur, de justesse et de tendresse, de force et de chagrin ; pétri d’humanité, d’amour et de gratitude, porteur d’espoir.



(J’aime beaucoup la citation choisie en exergue de ce récit, elle fait partie des phrases notées dans mon carnet de citations, celles qui me touchent particulièrement).



Merci, pour l’envoi de ce livre, aux éditions Robert Laffont – collection « Les Affranchis » - et à Babelio – une lecture profondément touchante.

Une autrice dont j’avais apprécié la plume sensible et délicate lisant deux de ses romans : « Les inconsolés » et « La double vie d’Anna Song ».

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Ton frère

Ton frère est un livre absolument magnifique.⠀



C’est une mère qui s’adresse à son fils, Serge, qui n’a pas trois ans, pour lui parler de « son frère » de dix ans, Paul, autiste sévère. Cette mère, c’est l’autrice : elle n’en est pas à son premier livre, elle a publié de la fiction mêlée d’éléments tirés de son histoire familiale, et un témoignage avec un premier livre qui parlait de Paul, Un enfant sans histoire.⠀



Ton frère, c’est la lettre que Serge lira quand il sera grand, pour comprendre ce qu’il est encore trop petit pour comprendre ; et c’est aussi le livre que Paul ne lira jamais.⠀



C’est un témoignage : celui d’un quotidien pour lequel l’autrice trouve des trésors de mots qui nous font comprendre que quand elle dit que sa famille a été « essorée », l’image électroménagère que le terme fait surgir est la bonne. Ce témoignage anticipe les questions que posera Serge le moment venu : car pour l’instant, lorsque Paul est en crise, Serge insiste pour le rejoindre en disant « c’est Polo, c’est mon frère ! ».⠀



Mais c’est aussi une réflexion. Celle d’une femme qui est l’héritière d’une lignée venue du Vietnam, dont la famille a survécu à des horreurs, auprès desquelles devoir se faire discrète dans une société qui regarde de haut des immigrés transfuges de classe, ce n’est rien. Ce n’est rien ? Oui, mais un enfant comme Paul pulvérise toute velléité de discrétion : alors est-ce l’enfant que cette lignée attendait pour pouvoir enfin se défaire du carcan de la transmission intergénérationnelle de traumatismes que l’autrice décode très finement ? Pour pouvoir accueillir Serge sans lui faire porter le poids de ces traumatismes, mais en lui rappelant : « Il me semble que toi et Paul constituez tous deux à parts égales ce mélange qui nous offre aujourd’hui de tenir ensemble, de tenir debout, de tenir bon ». Paul et lui, et pas juste lui, et pas juste Paul.



Et ce livre est enfin un message qui nous concerne toutes et tous. Non, un enfant handicapé ne devrait jamais être considéré comme un malheur qui frappe une famille en permettant aux autres, au passage, de se féliciter de ne pas avoir été touchées. Nous sommes toutes et tous concernés, c’est une partie de notre commune humanité, et nous devons considérer qu’en prendre soin relève de la solidarité collective. « Paul est un révélateur du monde dans lequel nous vivons, mon Serge. Il m’a révélée à moi-même, comme il révèle à eux-mêmes tous ceux qui croisent son chemin, pour le meilleur et pour le pire ».⠀



Je suis pétrifiée d’admiration à l’idée que certaines familles trouvent des trésors de force pour faire face à l’arrivée d’un enfant qui balaye toutes les certitudes, dans un monde où il faut chercher l’aide qui est loin de venir spontanément et y consacrer toute son énergie. Je suis encore plus pétrifiée d’admiration à l’idée que ces familles trouvent aussi le temps de partager et de nous montrer que nous aussi, nous sommes tous concernés. Minh Tran Huy, à quelle source puisez-vous donc la force et le temps d’écrire ? Plus encore, d’écrire avec autant de finesse et de recul ?⠀



« On juge du degré de civilisation d’une société à la façon dont elle traite ses fous », m’a-t-on appris pendant mes études de psycho. Ses fous, ou disons, ceux qui « n’entrent pas dans les cases », dit Minh Tran Huy. Et pourtant... je lui laisse le merveilleux mot de la fin :⠀



« Le monde n’aime pas Polo, mon Serge ; il le juge au pire monstrueux, au mieux pitoyable, méritant tout juste d’être parqué dans un coin avec ses semblables, ceux dont on ne peut rien faire, ceux qui ne sont littéralement bons à rien. Polo est improductif, donc inutile, de même que les vieillards, les malades, les démunis. De même que les nuages et les étoiles, la musique, l’art, la beauté, la poésie ».⠀



Minh : merci, tellement.⠀
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La double vie d'Anna Song

Dans le roman de Minh Tran Huy,cette dernière s'est inspirée du scandale découvert en 2007 ( je crois),en Angleterre et qui fut le plus gros plagiat de l'histoire musicale .

Joyce Hatto, pianiste peu connue,s'est fait enregistrer par son mari et Il s'est avéré après enquête, que tous ces enregistrements étaient des faux,pillés sur d'autres pianistes reconnus,certains avaient subi des manipulations techniques.

Et C'est sur ce scandale que notre écrivaine va bâtir cette histoire.

Deux gamins âgés de 8 ans,vont se rencontrer dans de tristes circonstances .

Paul vient de perdre ses parents dans un accident de la route .Il est recueilli par sa grand mère qui l'élèvera.

Anna,vit chez sa grand - mère : Mme Thi, d'origine vietnamienne les parents d'Anna voyagent beaucoup à l'étranger. Les deux grand-mères sont voisines et s'apprécient.

Les deux enfants vont voir se tisser au fil du temps des liens solides et seront comme les inséparables.

Anna se révèle être une pianiste douée, encouragée par son entourage ,elle ne vit que devant son clavier,jusqu'au jour où....

À vous de découvrir la suite ,sans rien dévoiler, la seule question: jusqu'où un homme peut-il aller par amour et désespoir?

C'est un jeu de miroirs ,tout s'imbrique parfaitement dans cette histoire et puis : la chute ,totalement inattendue qui m'a laissée pantoise car très surprenante,je ne m'y attendais pas! .Peut-on parler de folie?.À vous de le découvrir, très beau roman.⭐⭐⭐⭐⭐



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