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Citations de Nathalie Azoulai (283)


Ensuite elle murmure les vers car elle a toujours besoin que ses lèvres claquent, bougent dessus, qu'il y ait un contact entre entre eux, l'air et la chair. Ses yeux ne lui suffisent pas, elle a besoin de les mâcher.
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Titus ne peut pas quitter Roma. Si bien que Bérénice est obligée de faire l’article de son amour, sa réclame. Dans son pauvre boniment, elle plaide pêle-mêle pour la primauté du désir, la capacité des enfants à pardonner, l’insignifiance d’un patrimoine. (…) Devant ses yeux, sur le mur du palier, elle avise une grande photo de Titus, Roma, les enfants. Elle se fige. Que le diable emporte les familles et leurs trophées, pense-t-elle, ce soleil, ces sourires, cette jovialité triomphale. Plus que tout, au-delà de tout, elle a voulu valoir plus que la famille de Titus, plus que six personnes réunies, plus que leurs années réunies, être cette devise providentielle qui dévaluerait instantanément toutes les autres, et au nom de laquelle un homme braderait son empire.
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L'ennui des lieux conduit à l'ennui des choses, répond-il. Vivez en Dieu.
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Elle-même autrefois, quand elle tenait lieu de confidente aux autres, ne pouvait s'empêcher de penser que le récit du chagrin est aussi ennuyeux que le récit de rêve, que rien ne vous concerne moins.
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Pour se consoler, Jean instruit des comparaisons. Il se répète, par exemple, que l'errance de Didon est encore plus douloureuse que la sienne : quand la mort emporte celle que vous aimez, elle a beau vous l'enlever, elle ne vous enlève rien d'autre, tandis que l'abandon pur et simple vous retire tout d'un coup en jetant sur le tout premier serment la lumière noire du mensonge. C'est pathétique, mais il ne trouve rien d'autre : comparer sa douleur à celle d'une héroïne, soupeser les deux souffrances, passer par la fiction pour supporter la réalité. Il revient donc au chant IV de L'Enneigé comme on se blottit dans un vieux manteau. S'il avait su... S'il avait su, enfant, que l'excitation et la peur qu'il éprouvait chaque fois qu'il ouvrait le livre lui seraient un jour des consolations, il se serait senti moins coupable devant ses maîtres, mais qu'auraient dit ses maîtres de cette déréliction sans Dieu, de toute cette détresse à cause d'une pécheresse ? Sans doute le savait-il. Sans doute avait-il senti très tôt que la plainte de Didon recevait en lui un écho favorable, jumeau, qu'il était profondément de son côté. Il mouline ses évaluations tout le jour, ventile son esprit et son coeur mais ne fixe rien. S'il parvenait pourtant à mettre des mots à lui sur cette souffrance, il fabriquerait son antidote, saurait y revenir chaque fois que nécessaire, chaque fois que le chagrin viendrait le lancer, celui-ci ou un autre. Son antidote est celui du monde entier. Ecrire la tragédie de l'amour trahi, la tristesse pure de l'abandon, la suffocation, n'écrire que cela, cinq actes durant, oui, se dit Jean, rien d'autre que cette suffocation, et ainsi dépasser Virgile.
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La bienveillance n'est qu'une chimère au regard de cette tenaille qui le tient tout entier. Ce que l'on nomme amour n'est ni doux, ni tendre, rien n'en est proche comme la haine, soupire-t-il. Il n'a rien entendu de plus bête que ces gens qui, par amour, disent vouloir le bonheur de ceux qu'ils aiment. p. 163
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(...) puis elle entre dans leur chambre. Pour les couvrir, les remettre à peu près droit dans leur lit, mais ce sont des prétextes, tout ce qu'elle veut, c'est les regarder dormir. (....) Elle n'a jamais pu s'ébahir comme elle le fait depuis qu'elle regarde les joues de ses filles, leur surface douce, bombée, leur tendre abandon sur le drap de coton. Alors elle se couche doucement, aux côtés tantôt de l'une, tantôt de l'autre, et elle regarde. Elle s'y enfonce comme dans du beurre, de la brioche, toutes ces choses comestibles en quoi elle voudrait parfois les transformer parce qu'elle se sent cannibale.
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« Les propos d'Anne me ramenaient en arrière, son exemplarité, son ascendant, cette manière qu'elle avait de toujours me regarder en grande soeur, cet air impérieux. Or, dans mon jardin, devant mes enfants, mon mari, mes beaux-frères et belles soeurs, devant mes collègues, ceux d'Alain, son regard ne m'a pas traversée ; il s'est bloqué quelque part à la surface de ma peau, comme un couteau qui se plante mal, une lame qui se tord et rate sa cible. Quelque chose en moi s'est durci sous ses mots. »
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Quand je l’écoute, je vois du code pousser sous toutes les surfaces du monde, le menu, la table, les banquettes, le zinc, le percolateur, la caisse, le feu rouge à l’extérieur. Le sol devient surface de verre sous laquelle j’aperçois les lignes de code. Je me figure des masses touffues, velues, qui chaque fois que je soulève une chose, une action quotidienne, acheter un billet de train ou une place de théâtre, prolifèrent sous la pierre comme des mousses, des fourmis. Je fais une expérience mentale, je supprime le code comme on éteindrait l’électricité dans le monde entier et tout plonge dans le noir, la faim, le froid. Rien de bucolique ne se profile, aucune vision champêtre, seulement la guerre, la désolation, l’apocalypse.
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En pleine Seconde Guerre mondiale, Grace Hopper est la première à dire qu'elle code quand elle donne des instructions à une machine. Jeune, elle a l'air d'une actrice hollywoodienne....
..... Grace entre dans l'armée. Elle définit le codage comme une suite d'ordres précis enregistrée dans une mémoire, elle ne parle pas encore de langage, mais en 1955 le concept de traduction émerge. Les machines se multiplient et il faut trouver un langage commun à toutes, universel. A cet époque-là, l'ordinateur n'a pas encore de visage puisqu'il n'a pas d'écran. C'est plutôt une sorte de grand tableau de bord. Il n'y a pas de reflet, l'hypnose n'a pas encore commencé et le codeur n'est pas né. Le verbe coder s'efface durant vingt ans et on dit programmer.
Dans les années quatre-vingt, coder revient, vif, compact. Certains le déplorent, le trouvent trop obscur, légèrement occulte. Pas le jeune homme qui, lui, aime bien ce verbe. Il ne sort plus de sa chambre, y passe des nuits blanches. Il pianote durant des heures sans parler, rivé, vissé. Son corps se réduit à ses yeux, à ses mains. Son visage se reflète dans l'écran. Les femmes, elles, ont quasiment disparu du champ, on reste entre hommes.
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La plage, c'est comme la Lune ou Mars peut-être, des endroits où on ne pèse plus rien, où on flotte, où on peut marcher sur les mains.
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(...) Il marche autour de l'étang ou s'assoit sur la rive. Il lit, relit, module différemment. Les phrases sont simples, sans galanterie, mais elles tonnent, font gronder des orages dans sa tête, des ciels zébrés par la violence des hommes et des dieux. Sans parler de la rage des femmes. Pour Jean qui ne connait d'elles que leur teint blanc, leurs douces bénédictions et leur corps enfoui sous la serge, Electre, Antigone ou Jocaste semblent plus violentes encore que la reine Didon. Elles lui font changer de climat, de latitude et d'espèce. Dans ce nouveau monde, même les arbres pourraient se mettre à hurler.
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Il a soumis son discours [d'intronisation à l'Académie] à Nicolas [Boileau], et même à La Fontaine pour l'occasion. Il a vu dans leurs yeux briller la jalousie et le dévouement qu'on met dans ce qui revient aux autres et qu'on verrait bien pour soi, le zèle de l'envie, le besoin de transformer le sentiment de l'injustice en gratitude chez l'autre.
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Je te dis qu'elle est séduite, qu'Andromaque aime Pyrrhus. Que l'amour se glisse n'importe où, corrompt toutes les puretés.
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Sa mort me laisse donc la possibilité de ne plus me comparer, de me réjouir de l'avoir connue elle et, grâce à elle, d'avoir fait entrer tous ces affluents du savoir dans ma bulle d'écriture à l'instar de Flaubert qui voulait faire aussi bien que le scalpel de son père, mais les Mister Freeze fondent et se reforment aussi sec, comme des stalagmites. Dans un film d'épouvante, quand on croit le démon terrassé, in extremis, on voit sa main qui sort de terre.
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A force de ne pas vouloir être des filles comme les autres, on devait avoir endommagé certaines commandes cérébrales.
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C’était sérieux, elle disait, mon rêve,
ce serait de faire des maths la journée et le soir, de
fendre les eaux turquoise comme une sirène. Et ce
n’était pas un vœu pieux, elle s’entraînait. Elle allait
plusieurs fois par semaine à la piscine et dirigeait
son corps comme un cylindre emmené par l’énergie
de ses bras qui crawlaient, crawlaient, jusqu’à sentir
ses jambes se joindre et onduler ensemble, depuis
la taille jusqu’au bout des orteils, et sans faire de
mousse. Elle me racontait ses séances, détaillait ses
sensations. La mousse, c’est l’échec, disait-elle gravement. Elle mettait des briques en caoutchouc entre
ses cuisses pour les tenir collées-collées, suturer ses
jambes de haut en bas, les zipper, c’était son mot.
Et sentir les deux plantes de ses pieds battre comme
une nageoire. Elle progressait, mais elle continuait
à pester : dans l’eau, ça se voyait, elle avait toujours
deux jambes distinctes, elle, elle pouvait l’oublier,
mais c’était évident, les autres ne voyaient que ça. Et
puis ses bras qui crawlaient, comme si une sirène, ça
crawlait !
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- Masturbez-vous, lui dit-elle devant le visage d'ange de la petite Adèle dont Laure eut immédiatement envie de couvrir les yeux et les oreilles.
- Oh mais, docteur... bredouilla-t-elle.
- Faites venir les images, reprit Sabine, et les scènes viendront d'elles-mêmes. Ainsi vous huilerez la machine et il n'y aura plus qu'à. Car, vous verrez, quand on pratique souvent, on n'a qu'une envie : qu'une bonne queue passe par là pour, d'un bon coup, vous finir royalement.
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Sous ses yeux se rejoignent les deux extrémités de sa vie, son enfance et son enfant.
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Les plus belles femmes le pressent de confidences. Parfois crues, comme celle qui lui dit que les séparations sont bien moins majestueuses dans la vie que dans sa pièce, qu'elles n'ont pas cette harmonie grave, qu'elles sont stridentes, crèvent les tympans, une personne quittée est une carcasse qu'on désosse et qui couine de toutes parts, dont on déchire les plus tendres cartilages, sans ordre, ni méthode. N'est-ce pas plutôt un cœur qu'on nous arrache ? suggère-t-il. Non...Non...ce sont les os, répond-elle.
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