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Critiques de Natsuo Kirino (155)
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Le vrai monde

Le vrai monde de Natsuo Kirino renverse, à  sa manière, le concept "Cool Japan". De même, pour les principes confucéens de respect dû à ses parents, on repassera... surtout quand on a tué sa mère...



L'auteure nous convie à une chorale noire (rien à voir avec le gospel). Les voix de quatre adolescentes et d'un jeune homme (surnommé le lombric et qu'on voit sombrer dans une sorte de folie croissante et fantasmatique), tous en dernière année de lycée, se font entendre. Si chacune a sa propre tonalité, selon son passé, toutes se rejoignent dans une absolue noirceur. La vision de la vie de ces cinq Tokyoïtes se nourrit de constats blasés et de désespoir. Alors que tous jusque là se débattaient surtout avec la perspective des sessions de concours à venir pour les inscriptions en universités (et ce n'est pas pour rien que les Japonais surnomment cette période "l'enfer des concours"), à coup de cours en "juku", boîtes de bachotage ("de gavage", selon Toshiko), le meurtre de la voisine de Toshiko par son propre fils va entraîner le groupe de quatre amies dans une spirale folle, comme s'il s'agissait d'un jeu un peu spécial.



A travers les voix de ses personnages, Natsuo Kirino interroge le monde contemporain, la société japonaise actuelle consumée par le consumérisme exacerbé - tout particulièrement pour les adolescents, la course aux meilleures places et la définition de la réalité. Est-ce que les expériences que l'on vit, les actes hors norme que l'on commet, ne nous conduisent pas dans un monde autre, différent de celui des braves gens qui restent dans le rang?

Un véritable coup de pied dans l'apparente harmonie qui transcende et formate, à nos yeux occidentaux, la communauté nippone. Un peu à l'image de Murakami Ryû, la romancière retire les filtres du consensus pour mettre à nu le mal-être d'une jeunesse en perte d'identité et la violence latente qui, faute de soupape, conduit ici au matricide.



Il émane de ce roman une violente noirceur mais aussi une profonde solitude; chacune des voix exprime l'impossibilité d'être comprise par autrui, y compris par ses amies. Y compris par soi-même. Qui sont-ils finalement ces cinq jeunes, embrigadés par la consommation et le paraître. Leurs rapports aux adultes, parents y compris, sont marqués par la méfiance. Il faut dire, pour les filles, qu'être confrontées dès le début du collèges par le problème de mains baladeuses lubriques dans les transports en commun bondés, par l'acharnement permanent des sondeurs prêts à tout pour présenter les produits de leurs boîtes, des pères absents et rentrant tard et souvent saouls ou fleurent l'odeur de leur maîtresse, etc, ça n'aide guère à voir ces adultes sous un angle positif.



On est vraiment loin dans Le vrai monde (et quel titre!) de la happy school girl en uniforme jupe plissée-marinière de nombre de mangas et animes. Chez Natsuo Kirino, le vrai monde est froid, dur, noir, éprouvant, désespérant et source de solitude. Une autre image du Japon, c'est certain...
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Intrusion

Mais quest-ce qu'Intrusion fait classé en roman policier? Erreur d'aiguillage, de toute évidence. Certes, Kirino Natsuo ne nous fait guère voir la vie en rose. Mais on est plus dans un roman psychologique qui creuse les méandres labyrinthiques des rapports homme-femme, de l'amour, de l'adultère, ..., le tout dans un contexte d'écriture romanesque et de milieu éditorial.



Tamaki, femme écrivain d'une quarantaine d'années, part à la poursuite de O., la maîtresse dont parle Mikio Midorikawa (mort depuis dix-sept ans au début du récit) dans Innocent, une autofiction crue qui lui assura une grande notoriété. Elle compte en faire un roman. Ses recherches tournent à l'obsession avec le parallèle qu'elle dresse entre la liaison adultère d'Innocent et celle qu'elle a vécu avec son éditeur, Seiji. Dans les deux cas, la relation donne lieu à l'émergence d'un amour-haine ravageur et destructeur.



Kirino Natsuo insère dans son intrigue des extraits d'Innocent et d'autres auteurs, des lettres, des mails, ... De même, son récit repart souvent en arrière pour mettre en exergue des anecdotes de sa liaison avec Seiji. Il est néanmoins curieux que, si Tamaki évoque brièvement qu'elle est mariée et mère d'un fils, elle ne rentre pas plus dans les détails des répercussions de son adultère sur sa vie familiale.



Côté masculin, il est intéressant de noter quelques similitudes entre Mikio Midorikawa, tel qu'il se dépeint dans Innocent, et l'éditeur Seiji. Notamment une mauvaise foi avérée et une certaine lâcheté face à leur responsabilité dans l'adultère.

L'autre intérêt d'Intrusion est la description du travail d'écriture de l'écrivain, avec les recherches nécessaires, les devoirs de réécritures, ses rapports avec l'équipe éditoriale très présente.



Mais dans l'ensemble, le roman est nettement en deçà de ce que j'ai pu lire de Kirino Natsuo jusqu'ici. J'ai senti un manque de maîtrise de son intrigue et une narration parfois chaotique. Il me reste Monstrueux dans mes étagères; je vais attendre un peu avant de m'y mettre.
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Out

De minuit à cinq heures du matin, sans la moindre pause, Masako, Yoshié et Yayoi garnissent des paniers-repas qui passent devant elles sur un tapis roulant. Le travail à la chaîne exigeant une forte dose de complicité, les quatre femmes s'entraident.

Elles ont d'autant moins la vie facile que le jour, elles doivent malgré leur fatigue affronter une vie de couple ennuyeuse et des maris qui les traitent comme de vulgaires objets encombrants. Lorsque commence le récit, Yayoi vient une fois de plus de se disputer avec son conjoint, qui dilapide au jeu l'argent qu'elle est seule à gagner. Un jour, n'y tenant plus, elle l'étrangle.



Une femme qui tue sans préméditation ne sait plus quoi faire pour se débarrasser du cadavre : toute seule, elle ne peut le transporter. Yayoi fait donc tout naturellement appel à Masako. Ce sera le début d'un engrenage infernal...

Entre actes de haine et cadavres découpés en morceaux, Out est un thriller haletant et terrifiant.

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Monstrueux

Le roman de Natsuo Kirino est noir. Les cotés monstrueux de personnages sont très bien décrits. Les sept cent pages du roman se lisent très facilement car les histoires sont fascinantes. Natsuo Kirino nous fait vivre l’intérieur d'une école où l'aspect vestimentaire est plus important que le cognitif, elle nous fais vivre l'immigration chinoise au Japon, et aussi la vie dans l'entreprise par une femme.

Natsuo Kirino donne une autre image des Japonnais, qui même s'ils sont monstrueux , ils ont des désirs humains. Que Natsuo Kirino soit remerciée !

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Le vrai monde

Natsuo Kirino décrit les adolescents japonnais comme des adolescents état-uniens, comme les décrit Gus van Sant ou Richard Russo.Les adolescents sont à la dérive, à la recherche d'eux mêmes, sans communication avec leurs parents.

Habituellement, les adolescentes japonaises font parler d'elles à travers " Japan Expo". Ici Natsuo Kirino donne une autre vision de l'adolescence japonaise.

Ce qui m'a plu dans le roman, c'est que les adolescentes sont curieuses du lombric (= Jeune voisin, surnommé " le lombric ) bien qu'elles savent que le lombric est dans une voie sans issue.

Le titre " le vrai monde" décrit bien l'enjeu pour ces adolescentes.

Les personnages sont bien vivants, l'ambiance est bien noire.
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Le vrai monde

Bienvenue dans le vrai monde de Natsuo Kirino ! Un monde cruel qui impose, et cela dès leur plus jeune âge, à ses écoliers japonais d'être toujours les meilleurs, un monde où la pression du système éducatif mais aussi des parents est constante, un monde où de dociles adolescents, qui finissent par exécrer ce système, se muent en dangereux petits criminels.

Telle est l'histoire de Ryo plus connu sous le surnom de "Lombric", adolescent complexé et mal dans sa peau également étudiant dans un lycée d'élite, qui commet soudainement l'irréparable en assassinant violemment sa mère (et le mot est faible car il y va à coups de batte en fer). En l'espace de quelques heures il devient le héro fascinant de quatre jeunes lycéennes qui directement et indirectement vont se retrouver liées à son crime : Toshiko, Yuzan, Terauchi et Kirarin, toutes les quatre issues de la bonne société japonaise et formatées selon le modèle idéal éducatif qui est l'excellence. Mais l'excellence a un prix...

Natsuo Kirino nous livre un roman audacieux aux voix multiples puisque chacun des cinq personnages s'approprie intégralement un ou plusieurs chapitres. La polyphonie narrative a pour effet d'accentuer leur caractérisation psychologique et permet ainsi au lecteur d'entrer dès le début du récit dans leur intimité profonde. L'auteure leur donne la parole, elle alterne leurs points de vue, leurs humeurs par rapport aux faits et au crime.

Natsuo Kirino nous offre aussi la vision d'une jeunesse désenchantée dans un Japon ultra moderne où le système éducatif est particulièrement strict. Les élèves subissent la pression de la réussite dès leur plus jeune âge, leur temps libre se résume aux gavages et aux jukus (cours intensifs et stages de révision). Elle traite aussi le sujet de l'identité sexuelle, de l'homosexualité plus précisément, qui, tant qu'elle n'empiète pas dans son champ de vision, commence tout juste à être tolérée dans la société japonaise.

Vous l'aurez compris j'ai apprécié la lecture de ce roman même si la traduction m'a laissée un peu perplexe par moment (surtout la première partie du roman) mais cela n'a en rien gâché ma lecture et je n'oublierai pas de sitôt le portrait plutôt effrayant de ces cinq adolescents qui abordent la mort finalement comme un jeu et subiront les conséquences de leurs actes tels des dommages collatéraux.

Je remercie mh17 pour m'avoir conseillée la lecture de ce roman et j'en profite pour faire une dédicace spéciale au Yeux de la momie qui a décidé de voguer vers d'autres horizons et dont les critiques vont nous manquer (Jean Pat' si tu me lis...).





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Out

Quatre femmes travaillent de nuit dans une usine de panier-repas de Tokyo. Leur point commun ? Elles ont toutes des maris détestables, et détestés. Il y a d’abord Masako, la volontaire, tacitement considérée comme la meneuse du groupe. Son mari et elle vivent séparément sous le même toit, et leur fils, volontairement devenu muet, s’enferme dans sa chambre. Yoshie est une mère célibataire, plaquée par son mari qui, en cadeau d’adieu, lui a laissé la charge de sa belle-mère grabataire. Elle tente tant bien que mal de s’occuper de sa fille, adolescente désintéressée sur la mauvaise pente, et de lui payer ses frais de scolarité. Kuniko est une femme complexée, dépensière, vénale et orgueilleuse dont le mari, à la suite d’une dispute, s’éclipse avec toutes leurs économies, la laissant criblée de dettes. Enfin, Yayoi, la plus jeune, est la mère de deux charmants bambins qu’elle n’aime pas laisser seuls quand elle doit partir travailler. Son mari ne s’occupe pas de sa famille, ne s’intéresse plus à elle malgré sa beauté, et dépense tout leur argent pour courtiser une hôtesse.



Un beau jour, Yayoi finit par le tuer. Hors de question de se rendre. Il va bien falloir se débarrasser du corps, mais vers qui se tourner ? Les quatre femmes vont se retrouver plus ou moins malgré elles entraînées dans un tourbillon de noirceur, une spirale infernale dont il va falloir trouver la sortie. On les regardera se débattre les unes après les autres, comme prises au piège dans une gigantesque toile d’araignée, alors qu’au fur et à mesure d’autres personnages, tous plus noirs les uns que les autres, se feront attraper. Il faudra être sur ses gardes, car un mal plus sombre que tout le reste rôde, attendant patiemment son heure.



Out est un roman policier peu conventionnel, dont on suit le déroulement du point de vue des coupables, coupables qui attirent la sympathie du lecteur, qui finit par espérer qu’elles se sortent de l’engrenage dans lequel elles se sont mises. Au travers de ses personnages à la psychologie troublante, voire dérangeante, Natsuo Kirino dépeint la condition de beaucoup de femmes japonaises, enfermées dans leur condition d’objet, qu’il soit décoratif ou sexuel. Un monde d’hommes, machiste et violent, où les gestes et considérations d’une femme n’ont pas leur place. Kirino plante un scalpel tranchant dans la nature humaine et tire d’un coup sec, découpant et déchirant au passage les relations que peuvent avoir les hommes entre eux, l’amitié, l’amour ou la haine. Un roman haletant, noir et cruel, à déconseiller aux âmes sensibles. Personne n’en sortira indemne.
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Out

OUT est roman policier pas nécessairement japonais. La seule information que Natsuo Kirino donne sur le japon est que les travailleurs immigrés au Japon sont brésiliens.Les femmes avec qui Natsuo Kirino nous fait partager l'histoire ont des maris ressemblant à des hommes pas forcément Japonais.

La manière dont Natsuo Kirino nous a montré ces femmes qui ont monté leur petite entreprise m'a plu beaucoup. En effet, d'une nécessité, elles élaborent une idée et elles cherchent à l'appliquer.

Et bien longtemps après avoir fini de lire ce roman, je reste enthousiasmé par l'histoire d'amour passionnelle finale.
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Intrusion

« Intrusion » narre la quête obsessionnelle d’une jeune écrivain, Tamaki, pour O., la maîtresse du célèbre auteur Mikio Midorikawa , décrite dans son roman scandaleux, et donc bien nommé, « Innocent ». Tamaki souhaite en effet faire d’O. le personnage de son propre roman, « Inassouvi ». A-t-elle réellement existé, cette femme sensuelle, extravagante et élégante à la belle robe jaune ? C’est ce que Tamaki va tenter de déterminer tout au long du roman en rencontrant plusieurs personnes ayant bien connu Mikio Midorikawa.



Pourquoi un tel intérêt de la part de Tamaki ? Plusieurs raisons l’expliquent.

Le désir tout d’abord d’écrire sur la manière dont l’écriture, ou la réécriture, d’une histoire d’amour peut éteindre tout sentiment : « Réfléchir au sujet de la "suppression de l'amour", ce n'était absolument rien d'autre que l'"obsession" d'atteindre l'extrémité de l'amour ».

Cette obsession de la fin d’amour et de sa suppression est d’ailleurs une expérience que Tamaki a vécu avec Seiji, son éditeur, et dont elle souhaite témoigner dans « Inassouvi ». Après des années de passion qui leur a laissé des marques, personnelles puisque tous deux étaient mariés, professionnelles puisque Seiji a connu un déclassement sans ma maison d’édition lorsque leur relation s’est ébruitée, Tamaki a décidé de mettre brutalement fin à une relation qui s’effilochait et ne menait plus à rien, sans toutefois réussir à l’oublier.

La recherche d’O. et les réminiscences de son amour passé aident ainsi Tamaki à terminer l’écriture de son roman.



J’avais précédemment lu de Natsuo Kirino « Disparitions », un excellent polar. J’ai donc attaqué « Intrusion » avec enthousiasme. Si ce roman ne m’a pas totalement déplu, je partage la surprise des Babéliotes ayant précédemment posté une critique sur l’ouvrage : « Intrusion » n’est pas un polar ! C’est un roman sombre, désespéré, hanté par la perte d’un être aimé (comme « Disparitions » d’ailleurs), psychologique (les personnages féminins sont magnifiques, les masculin, comme Seiji ou Mikio Midorikawa, sont très négativement décrits), mais c’est tromper le lecteur que de le mettre dans une collection policière.



L’intrigue n’est pas bien épaisse par ailleurs, soit la recherche de l’identité d’une femme, dont l’histoire passionnelle fait écho à celle de Tamaki, laquelle s’identifie aussi à l’histoire d’« Innocent » de Mikio Midorikawa (qui met en scène, de manière plutôt scabreuse, les réactions de Chiyoko, la femme de Midorikawa, quand elle a appris l’adultère de son mari, un beau minable).

Je ne suis pas sûre non plus d’avoir compris l’intérêt de l’insertion de nombreux extraits d’« Innocent », et la fascination que le roman pouvait avoir sur Tamaki, tant ils m’ont paru désagréables, outranciers, et tant son auteur, Mikio Midorikawa, m’a paru macho, lâche, en un mot, nul.



« Intrusion » est donc un roman inégal, ses aspects réussis (quand il se concentre sur son héroïne et ses réflexions sur l’écriture d’un roman, sur l’immersion dans celui-ci jusqu’à ne plus distinguer la fiction de la réalité) ne parvenant pas à compenser une impression de flou, de mollesse dans la maîtrise de sa propre intrigue. Bref, une petite déception.
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Disparitions

Première incursion chez Kirino Natsuo avec Disparitions. L'occasion aussi de lire un roman dont une partie de l'action se passe dans l'île septentrionale de Hokkaidô.



Yuka, cinq ans, disparaît alors qu'elle, sa soeur et ses parents passent quelques jours de vacances dans la maison secondaire des Ishiyama, des amis. Un article révèle tout cela d'entrée de jeu. Les personnes présentes dans ce lotissement, peu nombreuses au demeurant, ont toutes un alibi. Sis à l'orée de la forêt en montagne, une voiture ne serait pas passée inaperçue. Or, rien. Pas un indice, pas de corps retrouvé  (à se demander si la personne chargée du résumé en quatrième de couverture a lu le même livre, soit dit en passant). Enlèvement? Disparition volontaire? Accident? La fillette semble volatilisée. Ou, pour reprendre une expression issue  du folklore japonaise, enlevée par les dieux.



Si tout semble partir sur une intrigue entre roman noir et enquête policière, on se rend vite compte que le mystère Yuka sert à faire remonter à la surface le passé, les méandres psychologiques, les pulsions, les idées parfois mauvaises, etc, de chacun des protagonistes. Kirino Natsuo place sous une lumière crue et implacable la personnalité des gens. A commencer par la mère de l'enfant, Kasumi. Originaire d'un village de la côte ouest de Hokkaidô, elle a fugué dès ses 18 ans et l'obtention de son diplôme au lycée pour fuir à Tokyo, laissant ses parents aubergistes sans la moindre nouvelle, des années durant.



Après la disparition de sa fille, sa préférée, elle continue à chercher jusqu'à l'obsession. Quatre ans plus tard, secondée par un inspecteur de police qui vient de démissionner pour cause de cancer irrémissible, elle reprend sa quête en Hokkaidô. Au fil de la cohabitation de ces deux personnages que rien ne rapproche à la base, la quête va prendre une tournure inattendue.Au passage, Utsumi, qui sait ses jours comptés, donne à réfléchir sur la fin de vie, sur le rapport aux autres à ce moment-là.



Encore mieux qu'un thriller, l'auteure nous offre une véritable étude psychologique, où la disparition d'une fillette finit par mettre bas les masques. Le titre met bien Disparitions au pluriel; plus que des personnes, ce dont les faux semblants qui disparaissent à mesure des chapitres.

Surprenant, déroutant, violent dans les sentiments, le roman met à mal les intuitions et déductions des lecteurs. J'en ai formé des hypothèses au-travers des miettes que Kirino Natsuo abandonnait avec parcimonie. J'ai eu zéro sur toute la ligne et c'est tant mieux, d'une certaine façon.

La façon d'écrire et de construire sa narration m'intrigue fortement et j'ai déjà repéré quelques titres qui me tentent énormément. Mata ne, Kirinosan!
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Intrusion

Intrusion porte tres mal son nom , il aurait du s'intituler déception !



La premiere interrogation , en refermant le bouquin , se porte sur le genre fierement affiché sur la couverture : policier . J'ai envie de me gausser tout de go , ouarf , ouarf , ouarf . Je ne sais pas si l'on doit cette usurpation à l'auteur ou sa maison d'édition mais là , manifestement , il y a tromperie sur la marchandise ! En meme temps , en demander le remboursement alors qu'il m'a gracieusement été offert par le jury policier Babélio et les éditions du seuil que je remercie au passage , serait peut-etre légerement déplacé , non ? Un policier sans meurtres , sans enquetes , sans flic divorcé et torturé biberonnant à tout bout de champ , appartient certainement à bien des mondes litteraires , mais pas à celui du polar !



Mais qu'importe le flacon , l'ivresse serait peut-etre malgré tout au rendez-vous ? D'autant que je restais sur l'excellent souvenir qu'avait constitué la découverte d'Out . Ironie des titres : Out perdurera favorablement alors qu'Intrusion rejoindra le vaste tiroir mémoriel des rendez-vous manqués...



Tamaki est écrivain . Marquée par Innocent , un roman autobiographique ayant soulevé un véritable tollé général à sa sortie quelques années auparavant , elle n'aura de cesse de découvrir qui en était la mysterieuse héroine O. qui l'obsede tant afin de s'en nourrir et de l'aider à finaliser son nouveau roman .

Assurément , Kirino sait écrire sur la femme . Tout comme Out , les personnages principaux sont essentiellement féminins . Elle les magnifie en decryptant avec une précision chirurgicale ce que sont leurs doutes , leurs espoirs , leur questionnement au quotidien . L'homme , une fois de plus , n'apparait pas sous son meilleur jour . Fort justement d'ailleurs .

Ce qui justifie un tel délire obsessionnel , c'est le fait que Tamaki s'identifie pleinement à O. et sa propension à porter ou dynamiter un couple . Mais son interet se porte tout autant sur Midorikawa , époux adultere auteur d'Innocent et écrivain tout comme elle . Un effet miroir à double emploi .

Un bouquin basé sur la poursuite de fantomes ou la réalité et la fiction littéraire semblent se confondre étonnamment voire dangereusement . L'on assiste donc Tamika et Seiji ( son : je t'aime , moi non plus ) , les accompagnant dans leurs amours , séparations , retrouvailles , amours , séparations...bien trop fréquents et finalement plutot lassant . Autre point rébarbatif , ces récurrentes découvertes portant sur la mysterieuse identité d'O. et s'avérant tres rapidement de nouveaux coups d'épée dans l'eau . Une quete d'identité visant à asseoir une quete identitaire , le propos était interessant . L'auteur sait indéniablement écrire et les morceaux de bravoure ainsi que les trouvailles ( l'auteur inserera judicieusement des passages d'Innocent , donnant à ce roman l'aspect de poupées gigogne ) sont bien présents mais bien trop rares pour justifier un enthousiasme débordant . Petit bémol concernant la traduction qui , parfois , a certainement désservi Kirino : du type " allume l'électricité " ?!?!?

Bref , une histoire qui manque de souffle , d'epaisseur et qui tire en longueur malgré une idée de départ prometteuse . Dommage...



Intrusion : oui , illico presto et par la grande porte dans le monde non exhaustif des grosses déceptions de 2011... 2.5 / 5
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Monstrueux

Deux ou trois choses pour commencer. D'abord sur la couverture du livre il est indiqué : Thriller. Si ça c'est un thriller, moi je suis les Beatles. Je pense que depuis le temps je sais reconnaître un thriller, du moins je l'espère, sinon c'est grave. Ensuite le commentaire qui accroche : Un croisement électrique entre Ellroy et Jelinek, signé Lire. Bon ce Monsieur lire n'a pas lu le livre ou alors il ne connait pas plus Ellroy que Jelinek ou il s'agit d'un croisement, une bouture qui aurait mal pris, peut-être un enfant des deux non reconnu qui aurait hérité ni de l'un ni de l'autre, bref des sornettes. Pour finir, pourquoi ce choix et bien parce que l'auteure a obtenu le grand prix du roman policier du Japon en 1998, d'accord c'est pas récent, j'aurais pu y penser ou prendre le grand prix ou elle s'est mise au pommeau entre deux, qui sait, bref on repassera.

Dès le départ on sait que deux prostituées ont été assassinées, on connait l'assassin : un émigré chinois (grand amour entre les deux peuples, si, si) qui ne s'accuse que d'un des meurtres. Chic il va y avoir enquête, police, poursuites peut-être, yakuzas, triades, que sais-je encore, non-non rien, en fait on sait, sans savoir, tout en sachant que le gars, le chinois, il a tué les deux mais à leur demande (?) mais c'est pas sûr, car dans ce roman rien n'est certain tout est effleuré, on laisse, enfin on, Natsuo (joli prénom)laisse le lecteur faire son choix comme à Auchan ou Carrefour ou votre hyper du coin si vous habitez un coin s'entend. Bon voyez déjà comment c'est tentant, vous salivez, je le savais.

Alors six cents pages pour rien, non, je ne dirais pas ça, pour pas grand chose oui, mauvais livre noui, mais je fais profil bas ma méconnaissance de la littérature japonaise me porte certainement à la déraille et si c'était un chef d'oeuvre et moi un âne, pour quoi pas après tout. Cependant la littérature reste la littérature même en hiéroglyphes donc un jugement n'est jamais subjectif lorsqu'il s'agit de prendre en considération une intrigue, des mots, des phrases et la prosodie si elle existe ou pas. Je n'ai pas eu le déclic de base du lecteur enjoué et, c'est vrai, j'ai découvert des trucs sur un pays mystérieux et certainement méritant le détour, mais ici aussi pas assez fouillé, pas approfondi, mon pote si tu veux lire ce livre achète-toi le guide japon du routard car c'est pas fourni, non mais des fois, fichtre, allons !

Monstrueux pourquoi, parce que les quatre filles, jeunes femmes et femmes, protagonistes de l'histoire sont monstrueuses, l'une par sa beauté, la seconde par sa laideur, la troisième par sa méchanceté et la dernière par sa tromperie. Sur les quatre filles, toutes ayant été élèves d'un bahut super classe, trois se prostitueront, deux mourront, la troisième suite à un besoin d'argent, la quatrième entrée dans une secte fera de la prison pour avoir participé à la mort par empoisonnement aux pesticides d'un groupe d'enfants.



Ce roman est traduit du japonais en anglais puis de l'anglais en français, il ne reste qu'à boucler la boucle et traduire du français en japonais histoire de voir si la Kirino retrouverait ses chatons, ce serait marrant, non ?



Bon assez bavassé, j'y colle un 2/5 à la Kirino et c'est bien payé. Je vais laisser passer un ou deux siècle avant de lire à nouveau un thriller japonais.


Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Out

Out est définitivement " in " .



Jeu de mot , il est vrai , facile contrairement à la vie que mene ce quatuor de femmes travaillant de nuit à la confection de plateaux repas . Mais ne dit-on pas : travail besogneux , mariage heureux ? non ! A ce travail harassant s'ajoute une double peine , une cellule familiale qui n'en a que le nom !

Masako , leader incontesté , au passé trouble , de ce groupuscule apparemment soudé , cohabite plus qu'elle ne vit avec un mari démissionnaire et un fils qui ne lui adresse plus la parole .

Yoshié , surnommée " la patronne " au boulot , est une femme usée qui éleve seule son enfant et sa belle-mere grabataire . Elle assure au travail mais s'en remet totalement à Masako pour le reste...

Kuniko ne vit que pour et par l'argent . Se trouvant grosse et moche , elle a fait du paraitre une ligne de vie , dépensant à tout va l'argent qu'elle n'a pas si ce n'est au travers de ses nombreux prets qu'elle peine à rembourser...Derriere une attitude bravache , elle craint Masako qui lui en impose encore malgré leur différence d'age..

Et enfin , l'on retrouve Yayoi . La plus jolie des quatre n'a pas plus de chance avec un mari volage et joueur qui à la main leste lorsqu'il a un peu trop bu . Elle sera à l'origine de ce thriller psychologique de haute volée en l'etranglant et s'en remettant , elle aussi , à Masako pour faire disparaitre le corps .



A des niveaux diverses , ces quatre personnages seront désormais complices de meurtre et feront ainsi de leur vie un enfer ! Dans leur malheur , c'est Sataké , un patron de jeux clandestins au casier judiciaire bien rempli et aux rapports plus qu'atypiques avec la gente féminine , qui sera dans le collimateur de la police . Relaché , il n'aura qu'une obsession , retrouver et punir le ou les auteurs de cet assassinat qu'on lui impute !



Honnetement , j'ai lu des thrillers bien plus sanglants ( encore qu'il y ai de veritables moments de bravoure ) et d'une nervosité autre mais ce Out m'a pris dans ses filets lentement , irrémédiablement en me contant une histoire haletante dont les héros ou anti-heros sont des personnages à la dérive luttant juste pour survivre . Une rentrée d'argent frais , promise pour avoir fait disparaitre un corps , sera perçue comme une éclaircie salvatrice dans le brouillard de leur vie alors que c'est une nuit polaire qui les y attend desormais! Impossible de faire machine arriere ! C'est une course poursuite épique ou les chasseurs deviennent proies et ou les rebondissements foisonnent . Meme si le rythme est plutot lent ( thriller asiatique oblige , ne l'oublions pas ) , l'ennui y est cependant totalement banni grace à une écriture incisive au pouvoir hypnotiseur .

L'auteur nous livre un excellent thriller empreint d'une critique sociale des plus interessante sur la société Japonaise et la place de la femme en son sein .

Les personnages sont travaillés . Leur psychologie ultra fouillée .

Malgré le pavé , aucune fioriture , aucun raccourci facile .

Les seconds roles sont également là pour apporter leur écot à ce puzzle psychologique et y ont tous une place de choix .

Autre point remarquable , l'evolution des rapports entre ces quatre galeriens des temps modernes . D'amicaux , les rapports vont se distendre et les veritables natures se faire jour ! Quand la mort frappe a votre porte , le déni , la veulerie , la trahison , la délation ne sont jamais tres loin...

Et que dire du final epoustouflant , ce face à face inéluctable ou la condamnée semble se fondre en son bourreau , l'accepter comme son alter égo et...paf ! le chien...lisez et vous saurez...



Lire Out , c'est un peu comme rouler en DS , la vitesse fait défaut mais le plaisir de conduite est là et bien là !
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Le vrai monde

Un monde glaçant et dérangeant.

L'auteur se sert d'un matricide pour décrire une jeunesse sans repères.

Dans une zone résidentielle de Tokyo, quatre copines de 17 ans aident "Le Lombric", voisin d'une des leurs, à fuir après qu'il a massacré sa mère à coups de batte de base-ball. Chaque chapitre adopte le point de vue de l'un des cinq protagonistes.

J'ai eu du mal à entrer dans ce livre à cause de la violence du sujet bien sûr mais aussi à cause du style heurté et du vocabulaire bizarre. Renseignements pris, j'ai vu qu'il s'agissait de la traduction d'une traduction anglaise ! Les célèbres éditions du Seuil ne peuvent-elles pas employer un traducteur de japonais ?



Le livre est terrible car il décrit une jeunesse profondément solitaire et déboussolée. Les adultes sont nuls et hypocrites. Les pères absents, pris par leur travail, très mous. Les mères, lorsqu'elles sont encore en vie, sont surtout préoccupées des apparences et du qu'en dira-t-on. Les adolescents, quand ils ne sont pas en train de bachoter dans un "institut de gavage", vivent en vase clos dans leur monde et communiquent entre eux par portable interposé. Aucune des quatre filles n'éprouve de compassion pour la victime. Aucune. Elles méprisent ou haïssent toutes leurs mère, et sont donc fascinées, du moins au début, par ce gars qui est passé à l'acte. Et puis il les sort de leur existence ordinaire et imposée. Mais le Lombric n'est ni un héros, ni un anti-héros. Comme son surnom l'indique, c' est un grand mou avec... une case de vide. Il n'éprouve aucun remord. Aucun. Mais il va leur servir de révélateur. Elles semblaient déjà se préparer à vivre comme leurs mères. Elles dissimulaient déjà une part de leur identité derrière un maquillage, une apparence, ou un pseudo. A son contact certaines pourront peut-être échapper à cette roue hyper-moderne...



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Out

On peut tout demander à ses bonnes copines qu'il s'agisse de prêter de l'argent pour payer un voyage scolaire, de récupérer une reconnaissance de dettes douteuse, de faire disparaître le corps d'un époux que l'on a fait passer de vie à trépas. Décidément, les femmes japonaises n'ont pas froid aux yeux !

Quand la douce Yayoi finit par étrangler son mari violent qui a gaspillé tout l'argent du ménage pour le jeu et surtout les beaux yeux d'une entraineuse, elle demande conseil à la solide Masako toujours si fiable et déterminée.

Avec l'aide de la gentille Yoshié qui se sacrifie pour soigner sa vieille belle-mère acariâtre, elles vont découper en morceaux le défunt et même la futile Kuniko aidera à disperser les restes macabres contenus dans d'innocents sacs poubelle.

Attention, nous ne sommes pas dans le registre de l'humour noir avec une histoire rigolote de filles meurtrières mais dans un superbe roman très noir qui met en scène une intrigue implacable avec de multiples rebondissements.

En effet la police soupçonne un dangereux mafieux d'être à l'origine du décès de l'infortuné époux et ce dernier voit d'un très mauvais oeil son activité mise à mal pour un crime qu'il n'a pas commis . Il va chercher à se venger ...Une terrible lutte à mort va commencer et l'opposera à la meurtrière et ses complices, tenant le lecteur en haleine jusqu'à l'époustouflante scène finale.

Natsuo Kirino fait preuve d'un art consommé en nous plongeant dans cette société japonaise contemporaine qui reste encore aussi dure pour les femmes. On ne peut s'empêcher de frémir pour celles qu'elle met en scène , espérant qu'elles échapperont aux conséquences de leurs actes terribles.

J'ai vraiment adoré ce roman pour la finesse de l'analyse psychologique de tous les personnages et son sens de l'action qui interdit de lâcher le livre une fois qu'on l'a commencé.

Du grand art!
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Intrusion

Après la pause estivale, voilà le retour de la sélection pour le Prix du jury Seuil Policiers.

Intriguée par une belle couverture et alléchée par le résumé où l'enquête va être menée par une romancière, j'ouvre Intrusion avec envie et curiosité. Malheureusement, au bout de quelques pages à peine, je constate que je me suis fait duper. Non seulement Intrusion n'est pas un roman policier mais en plus je risque de m'ennuyer ferme à sa lecture. Je lutte pour le terminer et une fois achevé, j'ai du mal à en faire un résumé moins alambiqué que toute cette histoire.

Alors disons que Tamaki, jeune romancière, est en plein travail sur son nouveau roman Inassouvi. Elle y raconte sa liaison passée avec Seiji Abé son éditeur. Mariés chacun de leur côté, ils se sont vus pendant quelques années mais leur liaison a brisé l'équilibre de leurs familles respectives et s'est terminé dans la douleur il y a un an. Sa propre histoire rappelle à Tamaki les faits relatés dans Innocent, le best-seller de l'écrivain Mikio Midorikawa. Elle va donc partir sur les traces d'O. la mystérieuse maîtresse de l'écrivain.

On suit, au fil des chapitres, les réflexions et interrogations de Tamaki sur le couple, l'adultère, l'amour et surtout la fin du sentiment amoureux, sa suppression, mais aussi sur le travail d'écriture, sur l'influence de la fiction sur la réalité...C'est sûrement très beau, plein de métaphores, de paraboles, d'hyperboles ou que sais-je mais tout cela m'a laissée froide et a même fini par me lasser.

Je n'attends pas obligatoirement d'un roman policier qu'il me fasse frissonner d'angoisse mais le minimum syndical est de me donner envie de connaitre la suite, de me faire tourner les pages impatiemment pour savoir le fin mot de l'histoire. Dans le cas d'Intrusion, il ne s'est rien passé de tel. J'ai subi sans les apprécier les élucubrations pseudo-philosophiques de Natsuo KIRINO.

Je retiens de cette lecture que décidément je suis hermétique à la littérature japonaise. Et je persiste à dire que ce roman n'a pas sa place dans la sélection.
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Monstrueux

« Monstrueux » de Natsuo Kirino est un roman psychologique dense (700 pages) qui aborde une multitude de sujets tabous du Japon. C’est toute la société japonaise, fondée sur l’inégalité sociale et profondément machiste, obsédée par l’apparence et l’origine sociale qui est ici épinglée. Je découvre la hiérarchie figée où le poids de la naissance a énormément d’importance, les écoles d'élite et les grandes sociétés avec leurs conventions et leurs exigences. L’auteur en dépouillant les faux-semblants de la société japonaise, nous fait découvrir une réalité bien différente, sordide et quasi oppressante.

L’intrigue, le meurtre de deux prostituées, Yuriko et Kazue, n’est qu’un prétexte à la trame du récit. Le livre est articulé en plusieurs parties avec des points de vue et des rédactions différentes : on découvre ainsi le journal intime de Yuriko, celui de Kazue, des lettres échangées, des conclusions d’enquêtes de police, l'historique de Zhang, leur assassin, ce qui enrichit le roman. La narration à la 1ère personne, du point de vue de la sœur de Yuriko, cynique, haineuse et froide effectue un retour dans le passé et aide à élucider comment un "monstre" de beauté comme Yuriko a pu tomber dans la prostitution, tout comme Kazue, directrice-adjointe compétente et reconnue d'une entreprise japonaise. Mais les quatre comptes-rendus expliquent différemment le crime.

J’ai été d'abord surprise par cette étude cruelle des protagonistes puis, fascinée et captivée par cette description qui décortique la "monstruosité" sordide de la société japonaise et puis finalement, cela m’a carrément déprimée. J'ai été perturbée par certaines phrases qui m'ont l'air d'avoir été mal traduites (le livre est une traduction de la version anglaise, elle-même traduite du japonais) De plus, pas une seule fois dans cette brique de 700 pages n’est donné le prénom de la sœur de Yuriko, elle est signalée comme la sœur de, la fille de, la petite-fille de, la tante de. En fait, elle n’a aucune identité propre.



Edit du 29/8: J’avais d’abord noté 2 sur 5 étoiles car profondément choquée par ce livre. Mais il a le mérite de faire réfléchir et c’est ce que j’ai fait une fois le livre fermé. J’ai relu certains chapitres et je termine par attribuer 4 étoiles. Natsuo Kirino est géniale même si le livre me laisse avec un sentiment de malaise
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Out

Auto

Traduction : Nakamura Ryôji & René de Ceccatty



Si, sur Nota Bene, nous ouvrons ce fil non dans la section "Polars" mais dans celle dédiée à la littérature asiatique, c'est que, un peu comme la Barbara Vine qui se dissimule sous les traits de Ruth Rendell, Kirino Natsuo utilise un argument policier pour dépeindre et critiquer, de façon pertinente et souvent violente, la société japonaise moderne. Elle le fait, notons-le, avec une agressivité plus radicale que l'auteur anglais contemplant sa propre culture. Question - peut-être - de génération, plus sûrement de contexte : contrairement à la Grande-Bretagne, le Japon a connu tout d'abord une modernisation en quelque sorte à marche forcée et, après les horreurs d'Hiroshima et de Nagasaki, une américanisation outrancière qui, certes, a permis de relever le pays mais à quel prix ...



Dans une usine qui prépare des plateaux de sushis, quatre femmes venues d'horizons bien différents ont choisi, pour des raisons purement salariales, de travailler de nuit, c'est-à-dire de minuit à cinq heures du matin, en non-stop ou presque.



Katori Masao, la quarantaine bien affirmée, souffre du repli sur soi-même marqué depuis des années par son époux, souffrance aggravée par le silence dans lequel s'enferme désormais leur fils lorsqu'il vient à les croiser dans l'une ou l'autre pièce de leur petite maison. Jônuchi Kuniko vit pour sa part en concubinage avec un compagnon qui ne tardera pas à la quitter, et sans trop se soucier des dettes de plus en plus élevées qu'elle contracte pour se montrer sans cesse "dans le vent", à la manière occidentale. Azuma Yoshie, la plus âgée du groupe, réputée pour sa cadence au travail, est veuve et doit s'occuper d'une fille impatiente de voler de ses propres ailes mais bien contente de puiser dans la maigre bourse maternelle, et de sa belle-mère grabataire - à la fin du livre, elle se retrouve en outre en charge de son petit-fils, que sa fille aînée, enfuie depuis longtemps, revient sans cérémonie lui déposer chez elle. Enfin, Yamamoto Yayoi, pourtant la plus jolie du lot, connaît de gros problèmes de couple (scènes diverses, violences) auprès d'un époux qui sort de plus en plus et a commencé, sans bien sûr lui en rien dire, à fréquenter les salons de jeux et les bars à hôtesses les plus luxueux de la ville.



Un soir, vers les onze heures, alors qu'elle s'apprête à partir pour son travail, Yayoi, devant son aveu cynique qu'il vient d'épuiser toutes leurs économies, étrangle par surprise son mari. Reprenant ses esprits, elle décide de se confier à Masao, en qui elle voit probablement un substitut maternel, et celle-ci lui promet de l'aider à se débarrasser du cadavre ...



A partir de là commence, pour chacune de ces femmes - puisque, une à une, toutes finiront par être impliquées dans l'affaire - une descente non pas en Enfer mais au plus profond de ce que leur personnalité est capable d'accomplir pour se sortir sans trop de mal de ce que leur impose une société gouvernée par la volonté de ne jamais perdre la face, le désir insatiable de réussite et la tolérance la plus totale envers ce que peuvent s'autoriser les membres du sexe mâle.



Car "Out" est aussi une étude soignée - on pourrait presque écrire "au petit point" - de la condition féminine dans le Japon contemporain. Si l'on veut bien garder à l'esprit que la culture japonaise est, depuis toujours, à vocation patriarcale, on constate ici que la modernisation du pays n'a pas changé grand chose à cet état de fait : pis, elle semble même l'avoir aggravée. L'Homme domine toujours, tout lui est permis mais la femme, elle, doit encore, sous peine d'être cataloguée comme mauvaise épouse, mauvaise mère, etc, etc, ..., endosser toutes les corvées quotidiennes, et ceci sans protester une seule fois. Faute de quoi, elle risque gros, telle Jônuchi, personnage à vrai dire assez peu sympathique qui, à trop vouloir faire la maligne, finit prise à son propre piège.



Un livre épais mais qu'on ne veut lâcher pour rien au monde avant d'en voir la fin, à la traduction soignée, à l'intrigue alerte et épicée d'une sacrée dose d'humour noir, aux personnages riches et complexes. A ce jour, c'est pour nous le meilleur livre de son auteur. Lisez-le : vous nous en direz des nouvelles. ;o)
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Out

C'est le premier thriller japonais que je lisais, et très franchement, j'étais vraiment curieuse de savoir ce que pouvait donner un polar à la sauce nippone ! et bien je n'ai pas été déçue !

En tout premier lieu pour le dépaysement, pour cette plongée dans le Japon moderne qui m'a permis de mieux cerner les us et coutumes de ses autochtones. En second lieu pour l'histoire narrée par l'auteur. Celle-ci nous brosse le quotidien de quatre femmes, Yoshié, Yayoi, Kuniko et Masako, vivant dans la périphérie de Tōkyō. On est loin de la jolie banlieue dorée des “Desperate housewives”, pour elles pas de sorties shopping, ni de réunions tupperware, mais un travail de nuit en usine, abrutissant et sans la moindre pause, consistant en la préparation de paniers-repas à la chaîne ! Leurs vies personnelles ne sont pas plus réjouissantes : maris violents, joueurs et infidèles, belle-mère incontinente et grabataire à charge, problèmes financiers, un quotidien des plus moroses et désespérant. Il n'est pas facile de vivre au pays du soleil levant, société patriarcale par excellence, quand on est née femme !

Jusqu'au jour ou l'une d'elle craque et étrangle son mari, prise d'une folie meurtrière quand elle apprend qu'il a perdu toutes leurs économies en jouant au baccara. Ces quatre femmes vont se retrouver liées par ce meurtre, elles vont en toute complicité, démembrer le mari de Yayoi, pour se débarrasser du corps plus facilement. Ce qui reste le plus déroutant est le sang-froid et le calme avec lequel elles accomplissent cet acte, comme si elles exécutaient tout simplement une de leur tâche ménagère quotidienne. Voici d'ailleurs un passage, qui résume bien l'état d'esprit de ces femmes au moment où elles passent à l'acte :



«… Mais qu'est-ce que vous faites ?

Masako se tourna vers elle d'un air excédé.

- On le coupe en morceaux. On a décidé que c'était un travail comme un autre.

- Mais enfin … c'est pas un travail !

- Si, c'en est un ! décréta Masako pour couper court. Tu as besoin d'argent, tu nous aides.

Ces mots la réveillèrent…»



….. à partir du moment où elles commettent l'irréparable, leurs vies vont se fissurer, ce sera l'escalade, l'effondrement progressif, total et inéluctable !

Ce qui caractérise la plume de Natsuo Kirino ? cynisme, froideur et élégance. J'ai beaucoup aimé son style d'écriture et ce roman qui sort des sentiers battus. Je vais donc attaquer très prochainement, un autre de ses livres “Monstrueux”(encore un pavé), en espérant qu'il sera aussi passionnant que celui-ci !
Lien : http://leslecturesdisabello...
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Out

Un roman noir, très noir dans une banlieue qui ressemble à toutes les autres.

Quatre femmes travaillent de nuit dans une usine de panier-repas de Tokyo. Cela peut paraitre surprenant mais c'est un choix. Qu'ont-elles en commun à par cet emploi?

Elles ont toutes des situations familiales chaotiques. Commençons tout d'abord par Masako qui est la vieille, la chef du groupe en quelques sorte. Son mari semble souffrir de dépression, son fils refuse de parler ... Ils partagent donc un toit.

Yoshie elle est seule : son mari parti, il lui reste la charge de sa belle-mère grabataire et de sa fille adolescente.

Kuniko se dispute avec son amant, qui part, la laissant seule avec leurs dettes.

Et enfin, Yayoi : en apparence tout va bien. Deux enfants, un mari qui a un emploi, une maison, ...

Mais Yayoi découvre qu'il a dilapidé leurs économies, il la frappe et il courtise une "escort" ... elle finit par le tuer. Son premier réflexe est de se tourner vers Masako. Que faire?

Le destin des quatre femmes est maintenant lié et entre problèmes d'argent, de famille, d'amour et de fréquentations dangereuses, leur vie devient de plus en plus noire.

J'ai beaucoup aimé ce polar, à la fois très bien construit et très sombre, mais aussi teinté d'une forte critique de la société japonaise et de la place des femmes.

Je vous le conseille vivement!
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