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Critiques de Rainer Maria Rilke (341)
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Lettres à une jeune poétesse

MASSE CRITIQUE BABELIO



Les « Lettres à une jeune poétesse » de Rilke s’adressent à une jeune Suissesse, Anita Forrer, jeune femme à la personnalité tourmentée. Sa correspondance avec l’écrivain autrichien s’étendra de 1920 à 1926, date où il est emporté par une leucémie, et est davantage centrée sur les errances du coeur que sur la qualité de la plume de l’apprentie écrivain. Anita cherche plus à extérioriser ses sentiments, ses doutes sur ses relations, ses affres intérieurs, qu’elle n'attend une réponse du poète. Celui-ci pourtant, entre ses longs silences pendant lesquels il s’efforce de travailler, a des intuitions subtiles et donne des conseils avisés à la jeune femme, à laquelle il conseille par exemple de renouer avec une de ses amies intimes…



« Depuis ce jour, j’ai compris que même le pire, le désespoir, n’est qu’une plénitude, un trop-plein d’être qu’il est possible de retourner en son contraire par une seule résolution du coeur, et là où quelque chose nous semble difficile et lourd, insoutenable, c’est que nous sommes déjà tout près de sa transformation. »



« Détournez parfois un instant le regard de tout cela et demeurez tout entière près de quelque chose de simple, qui, indépendamment de tout état, réjouit assurément, qui réjouirait même un mourant, un malade ou un prisonnier —, de telles choses d’une simplicité sublime, on en trouve en quantité dans la nature, chez soi. Cela aide parfois. »



Si ces lettres contiennent de belles fulgurances, leur intérêt reste limité et leur contenu peu substantiel, on est en tout cas bien loin du chef-d’oeuvre que sont les « Lettres à un jeune poète ».

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Lettres à une jeune poétesse

Ce recueil épistolaire est une vraie belle découverte, grâce à la masse critique.

Il est aisé de comprendre le choix du titre, assez accrocheur, mais il est inexact. En effet contrairement à Franz Kappus, il ne semble pas que la jeune Anita Forrer se soit sérieusement destinée à la poésie. Elle adresse bien au début de leur correspondance « quelques tentatives » à Rilke, mais ce dernier l’en dissuade immédiatement avec franchise « Vous feriez mieux de vous exercer à noter vos sentiments en prose ».



Alors que la version de « Lettres à un jeune poète » qui proposait également les lettres de Kappus, présentait à ce titre un intérêt certain mais un peu anecdotique, les lettres d’Anita apportent un vrai plus à cet ouvrage. La jeune fille de 19 ans possédait une personnalité entière et bouillonnante et son style est à la fois enlevé et sensible, moins empesé que celui de Kappus.



Rilke joue là encore un rôle de mentor, mais alors qu’il n’avait que 27 ans au début de sa correspondance avec Kappus, il a ici dépassé les 45 ans. On ressent une véritable affection entre les deux correspondants qui ne se sont cependant rencontrés que 2 fois. La jeune fille se cherche, elle se sent à l’étroit dans une famille pourtant aimante. Elle fait part par exemple à Rilke de ses premiers émois amoureux pour une autre jeune fille, et ce dernier lui répond avec beaucoup de bienveillance et sans préjugés.



Rilke va ainsi l’accompagner, de 1920 à 1926, toujours avec beaucoup de délicatesse, en l’encourageant à se révéler à elle-même, à prendre sa vie en main mais sans l’influencer directement. Il lui suggère également des lectures, notamment Les Fleurs du Mal, lui offre plusieurs ouvrages. On sent que Rilke a évalué la psychologie de la jeune fille avec beaucoup de finesse. A l’issue de leur première rencontre (résumée en annexe du livre), au cours de laquelle elle est restée mutique, pétrifiée par le trac, il lui dira : « Anita, pourquoi faites-vous toujours deux pas en avant pour reculer de trois », ce qui perturbera profondément la jeune fille.



La postface du livre nous apprend que cette dernière a finalement eu la vie riche et stimulante qu’elle appelait de ses vœux. Sans doute l’influence de Rilke l’y a-t-elle aidée.

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Lettres à une jeune poétesse

Que dire ? Ce n'est pas facile d'émettre un avis négatif sur un livre gracieusement reçu, cela me gène un peu mais je dois être honnête et dire que je me suis profondément ennuyé à la lecture de ces @lettres à une jeune poétesse.



Bon sans doute que @Rilke n'est pas ma tasse de thé puisque @lettres à un jeune poète ne m'avait pas bouleversé non plus même si je l'ai trouvé supérieur à celui-ci.



Je souhaite tout le succès possible à ce livre et au vu des critiques déjà publiées il semblerait que ce soit le cas, et c'est bien cela l'essentiel.



Je remercie les éditions Bouquins et Masse Critique pour la réception de ce livre que malheureusement j'oublierai très vite.
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Lettres à une jeune poétesse

"Lettres à une jeune poétesse" est un recueil inédit de lettres entre le poète Rainer Maria Rilke, 45-50 ans, et une jeune fille dans la vingtaine, Anita Forrer. Une soixantaine de lettres échangées entre 1920 et 1926. Une édition allemande de ces lettres avait paru il y a 40 ans et cette version française la réactualise.



Dans cette édition justement, il me semble que les notes des traducteurs.rices ainsi que l'accompagnement éditorial, préface, postface, photos, participent directement de l'intérêt de lecture. Par les notes, nous sommes avertis des trous dans la narration ("lettre perdue", extrait tiré du journal etc). Il nous est proposé l'expérience d'un récit lacunaire, recomposé. Un double récit en fait, deux narrations qui se croisent et dialoguent. le livre se formant par assemblage des fragments... par le travail d'édition, qui met bout à bout les deux côtés de l'échange, comble - juste ce qu'il faut, point trop n'en faut -, fait d'un discontinu un récit.



À ce titre, rarement l'importance du travail d'édition ne m'est apparu aussi clairement. Les notes d'accompagnement, pour certaines anecdotiques, tissent de bout en bout la toile de ce "récit de leur relation". Que ce soit par des explications quant à leurs références communes, livres, personnes, lieux etc., tout leur tissu d'existence partagée. Egalement par tout ce qui accompagne ces lettres, tel que rapporté dans les notes, par exemple telle lettre d'Anita était accompagnée d'un gâteau, ou d'un livre; telle autre encore aura voyagé de porte en porte avant de trouver "Rainer"... Les lettres semblent vivantes, concrètes, postées dans leurs boîtes aux lettres. Elles nous apparaissent entourées d'une auréole historico-romanesque. Il y a là, dans l'espace-temps ainsi déplié, une zone de vie historiquement datée, à l'Est, il y a un siècle.



Mais... place au texte. Aidées par la présentation, ces "voix du passé" ont pu jouer, moderato cantabile, sur les cordes de ma mélancolie. Lues aujourd'hui, elles passent pour des parcelles de vie dans la fosse obscure de la grande Histoire, toujours menacée d'oubli (en particulier la voix d'Anita, qui "vibre" de son aspiration à vivre).



Musique de nos remous intérieurs - et la confession provoque en moi un trouble. Ces lettres ne sont pas ou peu des récits d'actions, elles sont le récit d'une âme, une plongée en soi (mais guettant toujours l'autre) ; des parenthèses à la vraie vie, des minutes de pure partage, des alvéoles de sentiments, des respirations au pouls de l'autre. Les détails de la vie concrète prennent une autre dimension dès lors qu'ils sont racontés sur le ton de l'aveu (qui est un peu un aveu à soi).



Les lettres prennent également une autre dimension dès lors qu'"elles ont été lues", et c'est bien un double regard qui s'affiche au travers de chaque courrier. Malgré nous, nous nous approprions les yeux de Rainer lisant Anita, et inversement.



Le lecteur trouvera finalement dans ce recueil le mariage d'un échange épistolaire raffiné, plein d'esprit, et d'un récit à la fois historique dans les faits et romanesque pour l'imagination.



Les notes sont capitales pour la compréhension mais restent succinctes, n'appesantissent pas la lecture. Elles laissent des questions en suspens: que faisait alors Rilke dans cette demeure?... Qu'en est-il de la maladie de la mère d'Anita?... Cette concision est bienvenue pour les respirations qu'elle laisse (et les ellipses ont leur valeur littéraire).



On appréciera dans les pré- et postfaces l'implication enthousiaste des traducteurs-éditeurs français : Jeanne Wagner et Alexandre Pateau, le plaisir qu'ils éprouvent à nous présenter leur travail ; aussi la mise en page des éditions Bouquins, aérée, confortable à l'oeil ; enfin la reliure couleur crème, au toucher agréable.



Les fins de lettres sont souvent des formulations charmantes, par exemple ils ne cessent de se dire "Adieu pour aujourd'hui".



Anita, P. 149 : "Acceptez, Rainer, ma gratitude en échange de toute votre bonté !"

Rainer, P. 114 : "Célébrez, chère Anita, un jour bon, un jour beau dans ses réalités, - beau dans toutes ses significations, et avant tout un jour qui donne à votre coeur tout l'espace d'être gai !"



Merci à Masse Critique et aux Editions Bouquins pour cette découverte.
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Lettres à une jeune poétesse

ÉMOUVANTE CORRESPONDANCE D'UN MAÎTRE À SON ÉLÈVE.



Longtemps durant, l'œuvre du poète Rainer Maria Rilke fut connue au public français non seulement par l'entremise de ses grands recueils de poèmes, peut-être un peu par le biais de son unique et étonnant roman, Les cahiers de Malte Laurids Brigge, (auquel il est régulièrement fait référence dans le présent ouvrage), mais, dans une très large mesure, c'est par un livre qu'il n'a jamais lui même directement composé ni ouvertement souhaité que la postérité de cet immense poète autrichien né à Prague s'est faite chez nous, les fameuses Lettres à un jeune poète. 



C'est oublier un peu vite plusieurs éléments : que celles-ci avaient été envoyées à un "apprenti poète" sans volonté première de "faire œuvre". Qu'elles sont le reflet d'un poète à la reconnaissance pas encore aussi affirmée que celui qui écrira plus tard à la jeune Anita Forrer, puisqu'elles furent rédigées entre 1903 et 1908. À cette époque-là, les "grands" recueils déjà écrits par Rilke sont surtout Le livre d'image (1899) et, plus encore, La Chanson de l'amour et de la mort du cornette Christophe Rilke (1904) et son magnifique Livre des Heures (1905). Cela n'ôte rien aux qualités intrinsèques de cette série de dix lettres adressées à son compatriote Franz Xaver Kappus ni à ses "leçons" d'esthétique ou de vie, mais ce que les éditions Bouquins, par l'intercession d'une Masse Critique spéciale organisé par notre site de lecture en ligne préféré, Babelio.com mettent en évidence en traduisant pour la première fois en français ces Lettres à une jeune poétesse, c'est que des correspondances - sauf volonté expresse, et de leur vivant, par leurs deux auteurs - ne sont pas autre chose que des échanges ponctuels, dispersés dans le temps, plus ou moins intimes et inégalement riche d'intentions, d'envie, de projection - cela dépend bien évidemment de leurs auteurs - entre deux personnes. 



Mais entrons dans le vif du sujet. Nous sommes au début de l'année 1920 en Suisse où Rilke réside depuis peu (mais désormais, jusqu'à ces derniers jours en 1926). Une jeune femme de la bourgeoisie en vue de la ville universitaire de Saint-Gall, Anita Forrer, alors âgée de dix-neuf ans, venait de voir et d'entendre le poète à l'occasion d'une série de lectures qu'il avait données en septembre de l'année précédente. Avec la maladresse sincère et enthousiaste propre aux "fans" qui se décident enfin à approcher leur idole, Anita finit donc par se décider à écrire à Rilke, même si cette première missive ne se voulait «rien d'autre que [lui] montrer l'émotion profonde d'une jeune fille qui aime [ses] œuvres.» Divine surprise, Rilke répondra à cette lettre qui ne demandait expressément aucune réponse, faisant d'elle une sorte d'élue. Suite à cette manière de malentendu miraculeux, s'ensuivirent six années d'un bien étonnant échange épistolaire au cours duquel la jeune femme avoua très vite à son "maître" s'adonner à l'art difficile du poème ainsi que du recueil de pensées diariste. Rilke, avec une forme intransigeante de brutalité douce la dissuada presque immédiatement de poursuivre dans la première direction tandis qu'il lui conseilla tout aussi tendrement et sincèrement d'approfondir cet autre forme d'écriture - le journal intime - pour laquelle il lui semblait qu'elle était bien plus elle-même, bien plus vraie, bien plus douée. Très vite, tant dans l'existence d'Anita Forrer que dans leurs échanges, cessent ces références à la poésie ainsi qu'au désir d'entrer en écriture (ce qui différencie, entre autres choses, ces lettres de celles que l'auteur des Elégies de Duino entretint avec le jeune Kappus, et qui nous font estimer le titre retenu pour ces correspondances un rien racoleur - c'est aussi celui de l'édition originale allemande -, même si tout autre titre eût été difficile à choisir. Ce sera notre seul remarque négative à ce très bel ouvrage).



Tout aussi rapidement, en revanche, s'installe une étrange mais parfaitement voulue relation de maître à élève, un échange se portant bien plus sur l'existence que sur l'écriture ou l'esthétique, même si les livres, et en particulier ceux de Rainer Maria Rilke (les Cahiers en tête, comme un Leitmotiv), sont abondamment cités et présents au fil de ces très belles pages. Ces derniers n'interviennent alors bien souvent que comme matière à exemples, comme modèles de chemins intérieurs à suivre ou à ne pas suivre, comme possibles sources de réflexion intimes, d'avancées personnelles, de motifs d'espoir, d'ouverture au monde et de compréhension de celui-ci, beaucoup plus que comme relation strictement esthétisante d'un lecteur à un autre. On y lira cependant l'importance d'un Francis Jammes (le poète "mystère" mentionné sans le nommer dans les Cahiers), d'un Charles Baudelaire (cadeau d'anniversaire un rien subversif du maître à son élève, véritable appel à l'indépendance d'esprit et à la liberté d'être), d'un Jens Peter Jacobsen (écrivain préféré de Rilke), d'un Valéry Larbaud...



On y découvre aussi - avant tout, peut-être - une jeune femme en pleine rébellion intérieure, passablement déprimée, pour ne pas écrire dépressive, en tout cas à fleur de peau, et cherchant, sans bien savoir comment, à s'affranchir de sa condition, à son destin tout tracé, à s'extraire, mais en cherchant à ne pas mettre à mal ceux qu'elle aime (qui ne la comprennent d'évidence pas), de cette prison dorée, familiale et sociale. Pour une part, Rilke saura lui ouvrir la voie, lui donnant des armes pour apprendre à vivre ; il saura même la mettre en garde à l'encontre de fausses solutions. Celle proposée, par exemple, par des théosophes qui l'avaient invitée à l'une de leur réunion. Celle encore de l'Amour, ou supposé tel, qui trouvera un temps sa solution en des fiançailles qui n'aboutiront jamais. Pour une autre part, on sent le poète presque désemparé par certaines questions, certaines attentes, certaines douces colères de cette femme à l'aurore de sa vie (celles concernant ses parents, entre autres choses), qui va d'ailleurs se mettre brutalement en retrait de cette correspondance qui ne sera plus, désormais (à la suite de l'une des deux seules rencontres, manquée, d'Anita et de Rainer, en 1923), qu'un long monologue sans aucune réponse, malgré le caractère empressé des lignes que la jeune femme envoie à son "maître". L'un des derniers mots, terrible, de l'autrichien sera de dire à sa correspondante tandis qu'il la raccompagnait à la gare à la fin de cette rencontre affreusement décevante : «Anita, pourquoi faites-vous toujours deux pas en avant pour reculer de trois ?» Mots auxquels Anita répondit, bien involontairement sans doute, par ceux-ci à l'occasion de leur seconde et ultime entrevue, tandis qu'il ne lui avait pas répondu une seule fois en trois ans ; des mots encore plus dramatiques, encore plus émouvants avec le recul, Rilke décédant d'une leucémie seulement quelques mois plus tard : «Comment avez-vous pu me faire ça ?» Et Rilke de répondre, « quel terrible malentendu». Mais quel passionnant, quel enthousiasmant malentendu, proposé à notre lecture près d'un siècle plus tard !

L'édition qui nous est proposée ici, constituée d'une soixantaine de lettres - certaines très brèves, d'autres tenant sur plusieurs feuillets ; d'autres encore n'existant plus qu'à l'état de résumés ou d'extraits restitués par le journal intime d'Anita - permet tout autant d'en découvrir plus sur l'auteur des Sonnets à Orphée - une autre de ses œuvres majeures - que sur l'existence de cette femme de la bonne société du début des années 1920, des carcans étouffants dans lesquels l'une d'entre elles eut à se débattre afin d'en sortir dignement et surtout librement. La suite de l'existence d'Antia Forrer en atteste indubitablement. De ces rares et beaux échanges avec l'un des plus grands poètes du XXème siècle, elle sut faire œuvre existentielle intime, la vieille dame qu'elle devint (elle eut une belle et longue vie, s'éteignant très âgée au début des années 80) n'oubliant en effet jamais les conseils et les mots de son ancien maître. 



On notera aussi la richesse des notes, souvent agrémentées d'extraits d'autres correspondances de Rilke venant éclairer celle-ci, ainsi que le patient travail de présentation et de traduction de Jeanne Wagner et d'Alexandre Pateau. Notons, enfin, que l'ouvrage est agrémenté de documents iconographiques particulièrement enrichissants pour l'ensemble de ce recueil. Un bien bel ouvrage pour lequel nous tenons, une fois de plus, à remercier les éditions Bouquins de nous l'avoir fait parvenir gracieusement. 
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La vie commence chaque jour

Je continue mon exploration des Plis et celui-ci me permet de faire connaissance avec Rainer Maria Rilke que j'avoue très peu connaître (non je n'ai pas lu Lettres à un jeune poète...) et avec lequel je me sens a priori peu d'affinités. C'est d'ailleurs tout l'intérêt de ces petits recueils, un peu comme des échantillons qui introduisent et donnent envie ou pas de poursuivre la découverte.

A ce titre, j'ai regretté que ce volume ne comporte pas de mini-biographie (comme celui de Charlotte Brontë ou Napoléon) bien utile quand on n'est pas familier ni de l’œuvre ni de la vie du personnage. Ses liens avec les correspondants des lettres publiées ne sont pas toujours explicités non plus, c'est dommage.

Intitulé "La vie commence chaque jour", celui-ci met en avant dans la correspondance de l'écrivain des réflexions sur la vie (et la mort) et une sorte d'éthique du comportement qui consiste à être pleinement conscient du bonheur de vivre, de le savourer et surtout d'y travailler (le mot travail est archi-présent, sorte de fil rouge de l'existence, travailler à devenir...). Il y a des choses très intéressantes mais aussi d'autres bien plus ennuyeuses (dommage sur 60 pages) et d'autres enfin un peu trop mystiques pour moi.

Bref, il y a très certainement de nombreux amateurs de Rilke mais je ne suis pas bien partie pour en être, ce qui ne doit nullement décourager les lecteurs de faire sa connaissance à travers cet élégant fascicule.
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Lettres à une jeune poétesse

Dans sa maturité, le poète autrichien a correspondu avec une Suissesse de 19 ans. Ces tendres « Lettres » sont enfin traduites.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..
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Lettres à une jeune poétesse

Quel meilleur mentor que Rilke pour bien débuter dans la vie ?



À 19 ans, Anita Forrer envoie une première lettre au poète pour lui faire part de son admiration (ainsi que l’avait fait un autre jeune dont on se souvient [cf. « Lettres à un jeune poète »]).

De ce courrier naît une belle correspondance, où se mêlent les émotions les plus diverses. Anita fait partie de ces jeunes personnes lucides sur qui pèse le poids des conventions. Il en résulte un mal-être, une souffrance – bref, une crise existentielle avec tous les questionnements que cela implique…

Pour répondre aux interrogations de sa disciple, Rilke n’y va pas par quatre chemins ! Ainsi, quand celle-ci lui demande son avis sur un poème qu’elle a composé, l’écrivain lui enjoint d’emblée d’abandonner les vers. Loin de s’en offusquer, Anita accueille ces conseils avec enthousiasme, et l’on devine dans ses lignes une dévotion sans borne.

Au fil de la correspondance, le mentor s’efface, non seulement pour se consacrer à son écriture, mais également pour rendre sa liberté à la jeune Anita, qui doit voler de ses propres ailes.

La mort du poète marquera la fin de l’échange, qui aura duré 6 ans.

Toute sa vie, Anita gardera les leçons de son maître ; ces leçons si vraies, si lumineuses, et qui ne visent qu’à l’épanouissement de l’être.



« Depuis ce jour, j’ai compris que même le pire, le désespoir, n’est qu’une plénitude, un trop-plein d’être qu’il est possible de retourner en son contraire par une seule résolution du cœur, et là où quelque chose nous semble difficile et lourd, insoutenable, c’est que nous sommes déjà tout près de sa transformation. »



De belles lettres à découvrir !

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Lettres à une jeune poétesse

Un très grand merci à Babelio et aux éditions Bouquins. Ce livre est un véritable petit bijou, digne des plus grandes correspondances de Rilke à mon sens. La jeune Anita Forrer en quête d'un maître spirituel ne démérite pas face au grand poète. Ce dernier rempli son rôle à merveille - exigeant, honnête et patient - et leur correspondance regorge de pépites mémorables sur l'élan intime, la transformation intérieure qui se fait dans l'âme de toute personne en quête d'une forme de spiritualité. Mon seul regret est de ne pas avoir accès aujourd'hui à la version française des Lettres à Nanny largement mentionnées en bas de page et qui permettraient de prolonger encore pour le lecteur ces échanges extrêmement nourrissants aussi bien sur le plan spirituel que littéraire.
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Lettres à une jeune poétesse

Entre Rainer Maria Rilke et Anita Forrer sa jeune correspondante l'amitié singulière se nouera aussi par les livres et la lecture. Rainer s'inquiètera vite de ce que les siens troublent Anita (Le Livre d'heures écrit entre 1899 et 1903 Les Cahiers de Malte Laurids Brigge en particulier son seul roman paru en 1910, il l'orientera vers ses auteurs favoris J. P. Jacobsen ou S. Lagerlöf : « Ca ne doit pas toujours être moi, Anita, – je vois bien qu'il faudrait que je vous détourne de moi pour vous mener vers d'autres livres » (lettre du 28 janvier 1920). Plus tard lui enverra « le Livre du thé » (Okakura Kakuzo) et jusqu'à son exemplaire des « Fleurs du Mal », pour ses vingt ans, accompagné d'un poème-dédicace à son attention (12 avril 1921).



Le premier qu'elle avait lu de lui était la monographie de Rodin ; elle achetait tous ses livres et les faisait relier en demi-cuir precise une note de bas-de-page (p. 19). Anita Forrer a dix-neuf ans, Rilke a une fille du même âge, il est au beau milieu de la quarantaine avec une notoriété bien établie, quand elle assiste à une soirée de lecture donnée à Saint-Gall par l'écrivain fin 1919. Elle lui écrit via son éditeur le 2 janvier 1920 : [...] « Comme il doit être beau de faire votre connaissance. C'est bien parce que cela est impossible que je peux vous l'écrire. » […] de Locarno en Tessin où on lui a transmis la lettre il se désole en réponse de n'avoir pu lui serrer la main, lui fera part dit-il de ses éventuels nouveaux travaux et lui confie encore :



« Les cinq bouleversantes années écoulées ont ouvert en moi d'abyssales interruptions ; une réflexion et une concentration laborieuses seront nécessaires afin de les surmonter et de poursuivre ces travaux intérieurs que j'avais – ah, et avec quelles espérances ! – entamés en 14. Je ressens encore dans toute ma nature la désespérance de la guerre […]



Ainsi commencent leurs échanges épistolaires inédits en France jusqu'à maintenant ; très réguliers au tout début et plus ou moins distendus par la suite, entrecoupés d'une tentative de rendez-vous manqué au printemps 1920, d'une rencontre décevante en 1923 et d'une autre, ultime et fortuite, en 1926 six mois avant la mort de Rilke. La limpidité du style et la pensée de Rilke d'un côté, la prose d'une très jeune fille en quête de « sa véracité » de l'autre ; elle lui envoie rapidement ses premiers essais poétiques. le jugement de Rilke ne se fait pas attendre :



« En ce qui concerne vos petites tentatives, j'étais bien content d'avoir à leur côté quelques pages de votre lettre : vous vous y exprimez ô combien plus justement et singulièrement ! Vous feriez mieux de vous exercer à noter vos sentiments en prose. Je ne saurai vous mettre suffisamment en garde contre la tentation de la rime, qui viole et aliène imperceptiblement ce qu'on pensait lui confier, et qui, en vérité, se perd en cours de route quand on tente une transformation poétique sans la maîtriser pleinement. Il n'est pas sans danger pour notre propre véracité de se réfugier dans une forme qui nous dénature, nous gâte et nous rabaisse un peu, là où l'on voudrait reconnaître notre image la plus chère. En prose (c'est ce que vos deux lettres qui me sont chères et qui sont vraies, m'indiquent clairement), vous êtes capable d'esquisser précisément et pleinement vos sentiments. Vous seriez effrayée si je pouvais vous montrer à quel point les petits vers sont quant à eux vagues et insignifiants » (lettre du 16 janvier 1920).



De quoi échauder les ardeurs de la débutante. Rainer a endossé le rôle de Maître « par son versant le plus sévère », mais encourageant il écrira ensuite : « Cédez toujours avec zèle à la pulsion de mettre quelque chose sur le papier, mais faites-le en prose, avec pour seul désir d'être authentique. Et lisez de bon livres, bien éloignés du Malte. » (lettre du 19 janvier 1920)…



Hésitant « entre deux plumes » (poésie et prose) elle se dit « libérée » d'avoir a choisir : « Comme vous écrivez bien ! Tellement attentif à ne pas blesser, comme le ferait un grand frère. - je vous en remercie ! ». Anita Forrer ne sera pas poétesse. Ce sont là des lettres à et d'une jeune fille en prose. Outre l'asymétrie de leurs positions respectives – l'écrivain est tout de même en surplomb face à la jeune fille qui se confie –, ces courriers révèlent vite des ressorts plus personnels et intimes de la psychologie d'Anita (que sa santé fragile rend vulnérable depuis l'enfance) et des aspirations profondes qu'elle tente souvent maladroitement de faire émerger, isolée dans un milieu familial encore régi par des conventions sociales strictes :



« Je me sens infiniment éloignée de tous les gens heureux, par un incommensurable malheur qu'on ne peut ni exprimer ni définir, il faut l'éprouver pour le comprendre. Pourtant, il n'y a sans doute rien de mal qui y est associé » (lettre du 20 novembre 1920).



« Et il y a ce poids qui pèse toujours sur moi, devoir rester à la maison et attendre un homme, en quelque sorte. » (18 mai 1822)



Son insuffisance supposée, sa crainte d'être une correspondante médiocre : « Je ne mérite pas que vous m'écriviez une seule lettre de plus et que vous perdiez votre temps pour moi » (25 janvier 1921), sa désespérante façon de se dénigrer ou d'affirmer ailleurs son ambition d'être une femme hors du commun, ses questionnements multiples contradictoires, ses avancées et reculades, exprimés maintes fois sont pointés par Rilke, (a-t-il pu s'en lasser ?) :



« Ce qui m'est le plus douloureux, c'est votre façon de vous sentir tantôt à moitié supérieure, tantôt à moitié inférieure ; il semble par moments que vos emportements vous font presque dépasser votre coeur, puis vous vous immobilisez de nouveau devant lui comme au pied d'une montagne ; vous vous estimez armée de talents, pour aussitôt rabaisser cette faculté, à cause d'une petite épreuve aléatoire et en douter si profondément qu'elle ne semble pas même suffisante pour le plus ordinaire des jours ». (29 novembre 1920)



Figure d'autorité intellectuelle et confident Rilke reçoit le poids des préjugés moraux et des conflits familiaux qui accablent Anita. Dans une lettre elle lui relate une amitié féminine de pension mal vue dans son milieu quand elle avait quinze ans ; plus tard dans une autre son amitié avec une femme divorcée. Très belle sera la longue réponse où Rilke aborde sans détours la question de l'homosexualité pour la libérer d'une culpabilité inutile (p. 47 à 50) ; très forte son empathie « Si seulement j'avais pu vous soulager plus tôt de ce poids fantôme – je suis triste pour chacune de vos jeunes journées qui en a souffert » (p. 57). Ce qui ne l'empêche pas d'ironiser auprès de la grande amie de ses dernières années Nanny Wunderly-Wolkart qu'Anita rencontrera plus tard : « mercredi j'ai écrit des lettres, notamment sept pages à Anita, qui avait marché sur moi avec toute une artillerie de questions à gros calibre : « Croyez-vous en Dieu ? » ; « Croyez-vous qu'il y a une vie après la mort ? » (note de bas-de-pages, p. 69).



Reste pour Rilke son travail d'écrivain, l'isolement qu'il requiert :



« […] mais désormais mon isolement (qu'exige mon travail) est de plus en plus strict, car le temps, ce temps calme et préservé dont je dispose ici, s'envole et je ne suis qu'au tout début de ce qui devrait être produit et, peut-être, accompli. le strict évitement de toute forme de rapport s'étend ainsi de plus en plus à mes échanges épistolaires […] » (10 mars 1921)



Jusqu'à son terme et alors que les silences s'allongent entre les lettres (les dernières d'Anita sont sans réponse), la lecture reste d'autant plus captivante qu'elle s'accompagne d'un appareil de notes (bas-de-pages) qui éclaire ou précise à chaque fois le contexte ou le contenu des missives. On s'attache à la personnalité contrastée d'Anita, à ses débuts compliqués dans la vie, à ses oscillations d'humeur, ses atermoiements ou à ses gestes attentionnés et chaleureux en direction de Rainer à Noël, on se plonge dans les années suisses de création de Rilke (achèvement des Élégies de Duino et Sonnets à Orphée ses dernières oeuvres), et souvent on envie Anita d'avoir échangé avec un tel correspondant ; mais en définitive c'est le côté inachevé de leur relation qui touche infiniment ici, inscrit dans le malentendu de leur rencontre ratée du 4 octobre 1923 (la lettre d'Anita datée du lendemain de cette entrevue est restée sans réponse) ou de leur tentative d'explication de 1926, confortant la beauté de l'élan initial qu'Anita s'était autorisé en direction du poète pour qu'il l'aide à affirmer ce que sa fragilité peinait à lui faire conquérir : sa propre « assise intérieure ».



Très beau.





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Lettres à une jeune poétesse

Opération mass critique.



Cette correspondance impromptue est initiée en 1920 par une jeune suissesse, fräulein Anita, après que cette dernière ait assisté à une séance de lecture du poète. Rilke lui répond promptement et essaye d’apporter conseils et perspectives à la jeune âme que l’on découvre très vite tourmentée d’Anita. Ce n’est plus tout à fait le Rilke de Lettres à un jeune poète, l’auteur est dans sa maturité littéraire, les Carnets de Malte ont déjà paru, ainsi que plusieurs recueils de poésie. Autre différence, l’échange avec Anita est d’emblée plus centré sur la vie de la jeune femme.



“Pourquoi je vous écris tout cela : je ne sais pas, c’est peut-être que j’obéis à une nécessité intérieure.” Cela commence certes par des échanges sur la littérature, quelques vers envoyés à Rainer par Anita lui valent une invitation à plutôt essayer la prose : “je ne saurais vous mettre suffisamment en garde contre les tentations de la rime”… mais c’est presque un coaching thérapeutique nous pourrions dire. En effet, Anita sans relâche confiera ses doutes, ses peurs, ses ressentis à la recherche de l’appui, mais aussi sans doute de l’intérêt de Rilke, tout en s’inquiétant de sa légitimité à ainsi perturber le grand écrivain par ses missives somme toute assez centrées sur elle-même, de son propre aveu.



Le maître rassure, apaise sans complaisance, sans mièvrerie feinte, allant droit au but dans la limpidité, le dépouillement et la spiritualité qui le caractérisent. Puis les mots ayant leur limite, mieux vaut laisser infuser des paroles claires qu’user sa plume à les répéter, alors le maitre s’efface peu à peu… Si les lettres de Rilke sont d’emblée plus fécondes pour le lecteur, de par les conseils, le recul et la vision de l’auteur, il n’est pas inintéressant du tout de voir à quoi ce dernier se raccroche dans les demandes d’Anita avant de professer ses recommandations.



“Nous ne savons pas ce qu’est le centre d’une relation amoureuse” répond Rilke à Anita qui lui écrit avoir consulté un psychiatre, troublée suite à une relation avec une amie. Les vues du poète praguois sur l’homosexualité, alors que la lettre d’Anita est sibylline, tortueuse, sont d’une sagacité bluffante : “des être travaillent depuis longtemps déjà à dissiper les soupçons si laids qui pèsent sur les relations amoureuses au sein du même sexe”. Ces mots, ainsi que la disqualification de la psychiatrie ou de tout jugement extérieur ou tendance culpabilisante face à ce qu’il nomme l’innocence et le mystère de l’amour auront joué un rôle important pour Anita qui renouera avec son amie, et par la suite vivra une longue histoire d’amour avec une autre femme.



Il y a un petit côté courrier des fans, nous sentons comme Anita, sans même en revenir d’entamer une relation épistolaire avec Rilke, est en demande par rapport à lui, elle a l’hubris de vouloir savoir - et lire de la plume même de Rilke - s’il existe une place pour elle dans les pensées du poète et on ne peut qu’imaginer comme elle retint son souffle à la lecture de la réponse de l’écrivain : “Ai-je répondu à toutes vos questions Anita ? - Il en reste une : est-ce que parfois, sans qu’une de vos lettres m’y invite, je pense à vous ?”



Comme le suspense est à son comble, il ne tient désormais qu’à vous de décacheter la cire sur l’enveloppe à la flamme de votre chandelle…



Il me faut saluer et remercier Babelio & les Editions Bouquins pour ce très bel ouvrage. C’est un très bel objet, les lettres sont accompagnées de quelques mots qui ouvrent et clôturent la lecture pour la contextualiser sans l’appesantir, en s’en tenant à l’essentiel, des photos et des extraits du journal d’Anita Forrer et notamment les précieux passages consignant ses deux rencontres réelles avec le poète.



Un pré-requis peut-être avant d’entamer une correspondance (lorsque bien sûr celle-ci ne nous est pas destinée) : ne pas s’interdire le voyeurisme et plonger à fond dans la vie des autres !



qu’en pensez-vous ?
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Lettres à une jeune poétesse

J’ai retrouvé avec plaisir le regard que Rilke pose sur le monde et on sent, dans ces lettres-ci, qu’il a gagné en maturité. Il y a douze ans entre les premières lettres que Franz Kappus avait envoyé à Rilke et celles d’Anita. Le poète a d’ailleurs une fille du même âge qu’Anita et on sent qu’il est vraiment un conseiller en matière de vie pour la jeune femme.



Anita est à la période où elle se questionne et elle a un caractère qui lui semble difficile à cerner et à assumer. En vérité, il est très facile de s’attacher à la jeune femme qu’on découvre dans les lettres, qui se sent perdue et qui cherche, dans ce poète qu’elle adore, quelqu’un qui puisse la comprendre et lui donner des conseils. Bien souvent même, on sent qu’Anita cherche simplement à extérioriser ses sentiments et que, même si elle espère, elle ne s’attend pas réellement à ce que quelqu’un d’aussi connu que Rilke prenne la peine de lui répondre.



Et pourtant, au fil des années, Rilke le fait, couche sur le papier des réflexions qui sont autant de manières différentes de voir le monde et de le comprendre, d’encourager Anita à être heureuse et de se réjouir avec elle lorsque c’est le cas. Ils abordent tous deux de nombreux sujets : les liens familiaux, la religion, le désir, toutes ces discussions qu’Anita ne peut avoir avec personne, elle les a avec Rilke.



J’adhère aux visions de Rilke et c’est certainement ce qui fait que j’accroche autant à ces correspondances. La manière dont il décrit le monde, la vie, la mort et l’amour, trouve un écho en moi, et ces mots, qui peuvent parfois paraitre obscurs et qui m’ont demandé de temps en temps de les relire plusieurs fois, sont empreints d’une poésie que j’apprécie. Au fil des lettres, on découvre un poète qui ne juge pas ses semblables et qui partage simplement ce en quoi il croit.



Je regrette finalement un peu qu’on n’en sache pas plus sur Anita car, et j’ai beaucoup apprécié la petite biographie qui suit la correspondance. Elle fait état d’une femme à la forte personnalité, qui a œuvré lors de la Seconde Guerre Mondiale et qui a eu une vie dans l’ombre où elle a beaucoup fait pour de nombreuses personnes.



En bref un ouvrage qui me donne envie de découvrir encore plus de mots de Rilke !
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Lettres à une jeune poétesse

En entamant la lecture de Lettres à une jeune poétesse, la correspondance entre Rainer Maria Rilke et Anita Forrer, à l'invitation d'une opération Masse critique sur Babelio, je n'imaginais pas que j'y trouverai, de la part de Rilke lui-même, une réponse à un ressenti vieux de 25 ans.

En juin 2020, j'avais décidé de reprendre Les Cahiers de Malte Laurids Brigge, qui avait été à mon programme universitaire et j'écrivais ceci : « A l'époque, j'avais entamé les premières pages de ce livre avec enthousiasme et puis survint un blocage. Sans doute étais-je trop jeune pour un tel ouvrage. » Étonnant écho à ces mots, dans l'une des premières lettres qu'il échange avec Anita, à peine moins âgée que l'étudiant que j'étais, Rilke écrit ceci : « Les Cahiers de Malte, je vous les aurais retirés (si vous êtes aussi jeune que je le suppose) pour vous le rendre dans quelques années seulement. »

J'ai terminé Lettres à une jeune poétesse la semaine dernière, et depuis, il me manque de ne plus avoir de nouvelles lettres à lire. Je me suis attaché à cette correspondance singulière, qui tisse des liens d'intimité étonnants entre ces deux êtres si différents.

Le mal-être d'Anita Forrer, son questionnement intérieur, trouvent dans les œuvres de Rilke et dans ses lettres, une reconnaissance et plus qu'un maître, un guide, « une construction géométrique auxiliaire », selon l'expression de Rilke. A l'évidence, cet échange épistolaire recèle plus qu'il ne montre au premier abord.

Les interrogations existentielles de la jeune femme, les réponses sincères et sensibles de l'écrivain ouvrent « des espaces spirituels insoupçonnés », comme le précise la quatrième de couverture, non seulement pour Anita, mais aussi pour nous-mêmes aujourd'hui. Avec pour conséquence de donner envie d'explorer plus avant l’œuvre de Rainer Maria Rilke. Les émotions sont palpables, jusque dans les lacunes de la correspondance, ces lettres perdues que l'on se plaît à imaginer, jusque dans les silences, les malentendus aussi parfois qui rendent pleinement compte de la profonde humanité de l'écrivain, d'Anita Forrer et de leur relation.
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Lettres à une jeune poétesse

Difficile de chroniquer "Lettres à une jeune poétesse" sans évoquer "Lettres à un jeune poète" . Bien sûr , la période n'est pas la même , les motivations sont différentes , et Anita Forrer n'a pas la même liberté que Frank Xaver Kappus .

Rilke et Kappus étaient encore au début de leur vie adulte , ils n'étaient que des hommes en devenir .

Alors que pour la correspondance avec Anita Forrer , Rilke est un écrivain reconnu , sa fille a presque le même âge qu'Anita , c'est un homme mûr . En réalité , Rilke et Anita Forrer n'ont que très peu de choses en commun , mais ils se parlent avec franchise . Lui éprouve une certaine tendresse pour la jeune femme , alors que depuis qu'elle a vu l'auteur à Saint-Gall dans une lecture en novembre 1919 , elle est en adoration devant lui . A tel point que , les rares fois où elle le rencontre en chair et en os , elle est quasi mutique , elle s'exprime mieux par écrit .

Dans sa première lettre à l'auteur , elle lui déclare : "votre compréhension des êtres doit être bien grande . Comme il doit être beau de faire votre connaissance" . Il n'en reste pas moins que Rilke parle toujours comme un maître à penser : il n'hésite pas à décourager Anita de rédiger de la poésie , et elle tient compte de son avis .

Mais si la Suissesse s'adresse au poète , c'est essentiellement pour se libérer du carcan de la bourgeoisie de Saint-Gall et d'une éducation stricte . Elle espère que Rilke l'accompagne sur les chemins de la liberté et l'encourage à s'assumer pleinement . Il faut se replacer dans le contexte de l'époque : une jeune femme comme Anita n'a pas le droit de rencontrer seule un homme comme l'auteur . Et cela ne s'est jamais produit d'ailleurs .

On peut constater que Rilke répond totalement aux attentes d'Anita Forrer , il lui fait découvrir des auteurs comme Baudelaire , il lui offre "les fleurs du Mal" , qui est toujours considéré en 1920 comme un recueil sulfureux et immoral . C'est quasi un geste subversif .

Aux débuts de leur relation épistolaire , Anita déclare qu'elle "attend un homme" , les jeunes femmes de l'époque n'ont qu'une seule alternative pour échapper au carcan familial : se marier . Elle ignore encore son homosexualité à cette époque , mais Rilke , qui l'a compris , encourage la jeune femme à assumer cette "variante du désir" qui appartient à l'être humain . Selon ses convictions , il lui déclare que l'amour qu'elle recherche doit être avant tout une relation spirituelle , avant que d'être charnelle .

Les questions que pose Anita à Rilke le contraignent parfois à se dévoiler . Quand Anita lui demande quelle est sa nationalité , il est le premier à s'interroger : né à Prague , il est théoriquement de nationalité autrichienne , mais il se sent tellement peu autrichien qu'il se souhaiterait russe (après un voyage en Russie) .

Bref , ces échanges épistolaires nous en apprennent autant sur Anita Forrer que sur Rainer Maria Rilke . Par exemple , on apprend que Rilke rédige toutes ses lettres en Kurrent allemande , mais il passe à l'écriture latine dès qu'il écrit une partie de sa lettre en français (ou même un seul mot) .

Cet échange épistolaire est riche en réflexions philosophiques . On regrette d'ailleurs que toutes les lettres d'Anita ne soient pas disponibles , certaines ont disparu . Heureusement , le livre est enrichi de nombreuses annotations en bas de page qui permettent de combler les infos manquantes .

Je remercie Babelio et les Editions Bouquins pour ce livre reçu dans le cadre d'une opération Masse Critique privilégiée .

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Lettres à un jeune poète

En s'aventurant dans ce recueil de lettres, on s'introduit tout entier dans la fabrique de la poésie. Choisi dans son édition réunissant les lettres de Rilke et celles de Kappus, on y trouve au travers de pages d'une intense profondeur comment le grand art permet de se découvrir, de se comprendre soi-même. Combien il n'est pas une fuite vers un monde imaginaire mais bien un affrontement de l'absurde qui nous relie au monde, et la force qu'on peut tirer de ce combat.

Dans cet ouvrage, élève et professeur sont également passionnants à lire. L'un par la clairvoyance de ses propos sur le monde, la vue qu'il adopte ; et l'autre pour son honnêteté, sa transparence, et finalement la dernière lettre où il rejoint le maître. Il le rejoint à sa façon, suivant sa propre voie et sans même en avoir totalement conscience, mais il est enfin maître de son propre choix et n'ayant plus besoin, désormais, de plus de réponse que tout autre maître en aurait besoin lui-même. L'interruption de cette correspondance en devient ainsi d'une force tout aussi évocatrice que l'était sa continuité l'instant précédent.
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Lettres à une jeune poétesse

Lettres à une jeune poétesse est un échange de lettres entre Rilke et une jeune femme admiratrice, Anita Forrer, qui cherche en ce poète un ami, un confident et un "maître" qui lui apprend la vie au travers de textes, de livres poétiques et autres.

J'ai souri au début du texte car j'ai retrouvé dans ces échanges épistolaires beaucoup de similarité avec l'amitié que j'ai avec un ami, que je n'ai moi aussi jamais rencontré en vrai mais avec qui j'échange régulièrement de longs mails. Et nous échangeons pratiquement la même chose : il est pour moi un guide, un ami, un confident, je le surnomme même mon "journal intime vivant".



Si vous cherchez de belles phrases inspirantes pour vous élever, vous questionner en vous-même ou sur le monde, méditer au travers de la poésie... et bien... vous serez peut-être déçus. Sans prendre de gants, ce livre est simplement des échanges de lettres entre une "gamine" assez inconstante, légèrement déprimée et capricieuse, et le poète qui tente sans cesse de la calmer, de lui envoyer du réconfort et tenter de la réjouir par le biais de quelques lettres. Ce n'est pas de la grande poésie ni un livre de développement personnel, ni de la philosophie. Ne n'y trompons pas !



Sur la fin, j'ai fini par me lasser non pas de Rilke, qui reste un poète sage et gentleman, mais de Anita qui, un coup ca va, un coup ca va pas et attend toujours de Rilke, avec trop d'insistance à mon goût. Elle se veut grande, mûrie, désormais heureuse et forte, mais elle retombe toujours dans le rabaissement d'elle-même, la susceptibilité, c'en devient un peu lassant.



Néanmoins, si ce ne fut pas un coup de coeur et si j'ai nettement préféré @Lettres à un jeune poète de Rilke, j'ai apprécié ma lecture dans ce qu'elle a d'intime, qui va droit au coeur, d'authentique, et aussi pour le clin d'oeil de mon amitié réciproque avec mon ami qui me donne des leçons de vie et des conseils, exactement comme l'échange entre Anita et Rainer.
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Les Cahiers de Malte Laurids Brigge

Dans ce roman, on suit Malte Laurids Bridgge, qui se trouve "depuis trois semaines" à Paris ; il est pauvre et solitaire, erre dans Paris où il apprend à "voir"; il rêve de devenir poète.

Il parle de ses peurs, de souvenirs, d'angoisses; des réflexions, des méditations intéressantes sur la mort, sur la vie, sur la poésie.

Une oeuvre poétique.
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Lettres à une jeune poétesse

Entre 1920 et 1926, la jeune Anita Forrer a entretenu une correspondance avec Rainer Maria Rilke. Dans ses lettres nous découvrons les tourments d'une jeune femme pas en phase avec son époque et pleine de questions sur la vie, sur ses ressentis.

1920-1926 ce sont aussi les dernières années de Rilke, des années marquées par le poids laissé par la guerre, des années de doutes et de difficultés matérielles.



Évidemment impossible pour moi de ne pas comparer cet ouvrage à "Lettres a un jeune poète" tant le concept est similaire et tant j'avais adoré ces dernières.

Si la plume de Rilke est toujours aussi belle et que plusieurs idées se retrouvent comme celle qu'un grand changement ne peut venir que de soi, que forcer les choses ne mène à rien ou que l'adversité conduit à l'élévation, j'ai trouvé cette correspondance moins universelle, plus intime et maternante. Il semble que Rilke s'implique plus personnellement dans ses conseils. Il m'a donné l'impression d'être un guide spirituel, un psy parfois, alors que j'avais plus ressenti un philosophe dans "Lettres à un jeune poete". Est-ce lié à la condition féminine et à la jeunesse de la destinataire ou à la maturité de Rilke ?



"Lettres à une jeune poétesse" a l'avantage de présenter toutes les lettres, pas seulement les réponses de Rilke. Cette correspondance complète permet de vraiment entrer dans l'intimité de l'échange et j'ai apprécié en apprendre plus sur l'homme et voir se dessiner l'évolution d'Anita au fil du temps. Certes, les conseils de Rilke m'ont moins fait méditer que dans son échange avec Franz Kappus mais ils permettent d'appréhender ce grand nom de la littérature autrement.



Ce fut une belle découverte, je remercie Babelio et les éditions Bouquins dont je salue le travail. L'objet livre est magnifique et les nombreuses notes de bas de pages enrichissent vraiment l'ouvrage.
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Lettres à une jeune poétesse

Voici soixante lettres, écrites entre 1920-1926. Paru pour la première fois en 1982, en Allemagne, aux Éditions Insel ; le recueil de ces échanges épistolaires entre la jeune Anita Forrer et Rainer Maria Rilke, n’avait jusqu’à maintenant jamais été traduit et publiée en France.Les éditions Bouquin viennent pour notre plus grand bonheur par la présente édition d’y remédier.

La première guerre mondiale est terminée depuis deux ans. «  Je ressens encore dans toute ma nature la désespérance de la guerre ». Rilke a 45 ans. Anita 19 ans lorsque elle adresse sa première lettre au poète. Durant six ans, leur correspondance, bien qu’ayant connu quelques périodes de silence, n’a jamais vu son intensité, son urgence, sa nécessité, faiblir.

Lorsque Rilke répondit à a première lettre de Franz Xaver Kappus ( Lettres à un jeune poète) le poète avait 28 ans.

C’est donc un Rilke augmenté, plus largement traversé, que nous lisons à travers cette présente correspondance. Traversé par le génie de Rodin, par d’autres amours, traversé par la guerre, par l’Europe. Mais un Rilke éternellement égal à lui même. Travailleur acharné, protégeant sa solitude, un Rilke toujours errant- - «  car savoir où aller, voilà qui est pour moi- et pour de nombreuses raisons une question délicate et difficile. 05.1921 ) - angoissé, mais qui connaît l’adresse exacte de sa demeure : la poésie. Sa seule maison, son unique refuge. Son royaume. Sa seule maison, même si les vers du poète nous rappelle que « ce qui tue est encore demeure ». ( « Baudelaire » poème dédicace de Rilke )

Un Rilke généreux, patient, d’une sagesse si vraie que la beauté qui en émane nous parvient directement.

« Dans la vie , on n’éveille jamais assez souvent le sentiment du commencement en soi, et nul besoin pour cela d’un grand changement extérieur, car nous modifions le monde depuis notre cœur même, et si celui-ci veut bien être neuf et incommensurable, celui-là se présente alors comme au jour de sa création : infini » .

Un Rilke guidant mais ne dirigeant jamais. Un Rilke si riche d’enseignement. « un guide secourable dans la géométrie du coeur »

Anita est jeune, issue d’une famille bourgeoise hélvétique. Anita ne trouve pas sa place au sein de la société dans laquelle elle est obligée d’évoluer. Anita se cherche, se questionne. Anita ne rentre pas dans le cadre, ni dans le moule. Anita sera priée d’aller consulter un psychiatre. Séance qui la traumatisera à vie. Et puis Anita découvre les poèmes de Rilke. Lui écrit. Et à jamais sa vie sera transformée. Cette « toute petite lueur dans l’obscurité » a suffi pour qu’Anita prenne Vie ; L’art et la littérature, la poésie ne la quitteront jamais. Elle en fera le chemin de sa vie. Compagne et exécutrice testamentaire d’Annemarie Schwarzenbach, Anita deviendra, sera.



« Ce qui reste déterminant pour toutes les transformations d’être humain à être humain, que l’on ne doit jamais regarder et évaluer une relation dans ses particularités depuis l’extérieur : ce que deux être ont souhaité se donner et s’accorder l’un à l’autre dans leur profonde sincérité reste en tout temps un secret de leur intime confiance, cette confiance qui est unique et indescriptible pour chaque relation. Pensaient-ils à un certain moment pouvoir, d’une façon ou d’une autre, se combler plus tendrement encore, il se pourrait bien que cela fût une petite erreur, si, ce faisant, ils n’étaient pas au service de leur bonheur, mais plutôt de leur désir et qu’alors ils s’inoculaient dans le sang des inquiétudes qui, après coup, viendraient les oppresser., peut-être, mais qui décide de cela ? Peut-être aussi avaient-ils raison dans cet abandon si indescriptiblement innocent, comme tout ce qui, dans l’amour naît du pur besoin et de l’impossibilité de faire autrement, - personne ne devrait se hasarder à juger de l’extérieur ce qui s’est passé là ; un tel émerveillement et une telle joie, si vastes fussent-ils, peuvent faire émerger un instant de pure transformation spirituelle, et alors qu’on croyait faire une nouvelle expérience au cœur de ce que l’on nomme sensualité, on était peut-être déjà tout entier dans l’avancement de l’âme, qu’ainsi peut-être on ravissait. »



« Votre lettre m’a libérée «  ( Anita Forrer 18.01.1920)



Quel aurait été le destin d’Anita sans les lettres de Rainer Maria Rilke ? Différent sans aucun doute, différent et affreusement éteint.

Rilke, savait que rien n’était plus fort que la vie, que l’amour d’être et d’exister parmi les autres. Et qu’il faut pour cela comprendre, admettre, et prendre soin avant toute chose de nos solitudes. Savoir répondre, obéir à notre nécessité intérieure la respecter, la défendre. Oui, «  ce que Rilke lui avait donné était entré dans le sang. « 

«  des livres nous saisissent, mais on les lâche, un être a une présence bien plus grande et un plus grand effet, et il n’agit pas seulement par la parole, mais par tout le mystère de sa nature, qu’il ne connaît pas lui-même et qui est peut-être le plus parlant quand il se tait. » R.M Rilke 28.01.1920



"Chercher le bonheur dans cette vie, c'est là le véritable esprit de rébellion. » Henrik Ibsen



Traduction française de Jeanne Wagner et Alexandre Pateau.

Opération Masse critique mars 2021- Éditions Bouquins.

Astrid Shriqui Garain



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Lettres à une jeune poétesse

Anita Forrer, fille du docteur Robert Forrer, avocat et homme politique à Saint-Gall, n'a pas dix-neuf ans lorsqu'elle écrit au début du mois de janvier 1920 sa première lettre à Rilke, quelques semaines après une soirée de lecture qu'il a donné dans la ville de Saint-Gall. Dans cette première lettre, Anita Forrer, avec beaucoup d'ingénuité, lui exprime son admiration pour un recueil de nouvelles" Histoires du bon Dieu" qu'elle vient de lire et le remercie de la conférence à Saint-Gall qui l'a « profondément émue » : « je ne saurais dire si c'étaient vos mains, votre front, votre langue ou le son de votre voix.». Rilke est alors un poète reconnu et admiré. A partir d'une réponse de "politesse" de Rilke, va s'établir une correspondance entre Anita Forrer et Rilke de 1920 jusqu'à la mort de Rilke en 1926, qui donnera à Anita un «sens nouveau à sa vie», un amour pour l'écriture, les arts et le débat intellectuel.

«depuis que j'ai vos chères lettres, il se passe quelque chose en moi, c'est tellement difficile de vous l'expliquer précisément».

Anita, enfant gâtée, de santé fragile, très protégée par sa famille, d'humeur changeante, parfois joyeuse, parfois tourmentée, "souvent en peine", ressent beaucoup de difficultés avec la vie.

Rilke lui servira de guide en la rassurant sur ses mauvais sentiments, en lui redonnant confiance et goût à la vie.

Dans sa lettre du 2 février 1920, il lui écrit «rejetez de vous cet accablement, du jour au lendemain, sur-le-champ, rien n'est plus simple que cela, car il n'y a pas le moindre petit poids de culpabilité ou de laideur dans ce que vous portez avec vous.»

Anita de lui répondre : «Mon être intérieur [...] a l'impression que vous me connaissez et me comprenez déjà très intimement.»

Rilke saura répondre avec intelligence et délicatesse aux questions les plus diverses et intimes de la jeune fille concernant ses doutes sur son utilité dans la vie, l'amour homosexuel, la religion, la mort, les courants intellectuels de l'époque. Il la conseille aussi dans ses lectures comme celles des "Fleurs du Mal" ou la" Correspondance de Goethe". «je vois bien qu'il faudrait que je vous détourne de moi pour vous mener vers d'autres livres.»

En Revanche, il la décourage de continuer à écrire en vers et lui demande de noter ses sentiments en prose».

Au fil des lectures et de sa correspondance avec Rilke, Anita ressent une fascination et une adoration pour lui (lettre du 5 octobre 1923-page 208). Conscient du danger, Rilke cherchera à la libérer de cette" influence" pour la pousser à prendre sa destinée en main. «cet homme [Rilke] tente certes de comprendre vos sentiments, et avec la plus grande application, Anita, mais gardez-vous de voir en lui le seul et l'unique, en qui vous avez trouvé un être aimable et secourable.»

- Alors, me direz-vous, avec notre regard d'aujourd'hui, qu'est-ce qui a bien pu poussé un poète reconnu et admiré à entretenir une correspondance quelques fois intime, mais toujours appropriée, avec une adolescente de prime abord quelque peu fantasque : à cette époque, les réseaux sociaux n'existaient pas (quel bonheur) et les échanges par lettres étaient habituels et courants. Par ailleurs, Rilke a affirmé dans plusieurs lettres avec d'autres correspondants, que sa «plume d'épistolier était la même que celle de poète et que l'écriture épistolaire était pour lui un moyen d'engager le processus de création poétique».

Pour notre plus grand bonheur, nous avons eu, avec ce livre «lettres à une jeune poétesse» le plaisir d'apprécier et de savourer ces échanges entre deux êtres tellement différents, mais si proches par leur amour de la prose et de la poésie.

Je remercie les éditions Bouquins et Babelio de m'avoir permis de découvrir ce livre et de me replonger dans l'univers de Rainer Maria Rilke.
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