Philippe Claudel qui préface ce roman posthume, souligne la filiation entre Pierre Charras (1943-2014) et Henri Calet (1903-1956). Deux écrivains qui avaient le goût des larmes, de l'esquive railleuse, de l'autodérision rieuse, parfois cruelle, un tantinet masochiste. François Bott parle de leur "chagrin d'humour".
Au début on se sent loin de Calet dans "Au nom du pire" : la province, la politique, des personnages typés qu'on verrait plutôt dans un film de Claude Chabrol. Et puis à un moment, quand on passe (je dis pas comment) du cirque électoral de 1995 aux jours terribles de l'Épuration, ça bascule dans l'émotion. Ça reste très roman-roman, construit rapide et efficace, zéro pathos, mais Charras distille en douceur et profondeur le sentiment du chagrin dans un scénario à la "Baron Noir" (la série télé). Depuis "La nuit, le jour et toutes les autres nuits" de Michel Audiard, je n'avais pas lu quelque chose d'aussi poignant sur les atrocités ordinaires de la Libération. Et ce temps-là, c'était celui de Calet, celui de "Contre l'oubli" ou des "Murs de Fresnes".
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