Des plantes et des hommes

Homme aux mille vies et aux mille talents, tour à tour ingénieur (Promo 88) puis créateur de start-up, instituteur, aujourd'hui écrivain, Alain Amariglio n'est jamais où on l'attend. Passé avec succès du récit au roman historique, du polar à la biographie, il nous invite dans son dernier livre (Des plantes et des hommes, Editions le Canoë) à le suivre sur les chemins inspirants de la botanique.
Mais Alain bouscule les codes et renouvelle le genre. Il nous parle de végétaux certes, fruits fragiles de l'évolution et qui constituent le fil rouge de l'ouvrage, mais aussi de moines bouddhistes et de cartels de la drogue, de grands explorateurs et de colonisation, de recherche scientifique et d'OGM. Des plantes et des hommes.
Le résultat est un petit bijou. Une promenade qui nous mène de la Côte d'Azur à la Chine en passant par la Grèce, les Iles Canaries, le Mexique et le Canada, et où l'on croise Darwin et Linné mais aussi Apicius et Orwell, les membres d'une étonnante société savante du nord de l'Angleterre, le premier agriculteur, ainsi que LUCA, auquel nous devons beaucoup. Mais une promenade engagée, au cours de laquelle Alain dénonce la folie destructrice des hommes. L'histoire du silphium, la première plante éteinte, dans l'Antiquité, d'une surexploitation humaine, en est une illustration édifiante.
Il serait certes réducteur de ne voir dans ce livre qu'une dénonciation. Car Alain y conserve ses yeux d'enfant pour s'émerveiller de la photosynthèse, sans laquelle aucune vie animale, donc humaine, n'est possible ; de l'émouvante symbiose entre le yucca et son papillon ; ou de la fascinante migration du papillon monarque. le ton, parfois grave, est souvent drôle, et l'empathie de l'auteur pour ses congénères, au génie prodigieux autant que dévastateur, transpire à chaque page.
Mais le constat demeure, implacable. Sapiens devenu Homo Economicus scie avec méthode la branche sur laquelle il est assis, et sa compréhension croissante des mécanismes à l'oeuvre ne le ralentit nullement. Au contraire, il accélère.
L'ouvrage est un concentré d'érudition, combinaison harmonieuse et efficace de savoirs issus de domaines aussi divers que la science et l'histoire, les mythes, les arts, la sémantique. Il ravira autant les spécialistes (la belle préface de Gilles Clément en témoigne) que les profanes, qui y apprendront les mystères de l'arbre fontaine ou l'étonnante origine du mot topinambour.
Après avoir lu ce livre, à la sobre couverture verte, on n'oubliera plus, « absorbé par des tâches urgentes et traversant la cour à la hâte, de faire attention à cet air plein de la respiration passionnée des dernières fleurs de tilleul. Car ce jour ne reviendra jamais, jamais ! » (Rosa Luxemburg, dans l'une des deux épigraphes de l'ouvrage. Chacun pourra choisir celle qui lui convient 😉)
Jérôme PUJOL, revue Télécom, juin 2023

Comment un livre qui parle de botanique peut-il déclencher autant d'émotions?
C'est que ce livre-là n'est pas un traité scientifique, ni un cours d'histoire naturelle, même si la démarche est scientifiquement irréprochable et l'effet pédagogique évident.
Alors comment qualifier cet ouvrage qui m'a parfois émue aux larmes, tant il remplit de respect et d'admiration pour cette nature que nous traitons si mal? Comment expliquer qu'il m'ait souvent fait sourire et même rire, tellement le style en est vivant, plein d'humour et d'imagination?
C'est tout le talent d'Alain Amariglio qui nous propose cette promenade engagée dans l'histoire des hommes et des plantes. On y apprend plein de choses étonnantes, on y parle aussi de mythologie, de découvertes scientifiques, d'écologie, de politique, mais surtout, ce livre nous ouvre les yeux sur la complexité, la résilience, la beauté de la nature dont nous faisons partie.
Lisez "Des plantes et des hommes", et vous ne regarderez plus jamais un olivier, une cacahuète, un saule, une fougère, un Gingko biloba ou un simple brin d'herbe de la même façon!