Islamisme radical : Comment sortir de l'impasse

Voici un essai dont le titre extrêmement ambitieux intrigue a priori : Islamisme radical, comment sortir de l'impasse.

Diable ! Quelqu'un connaîtrait donc la solution ?



En effet, Christian de Molinier a une idée. Mais avant de l'exposer, il s'explique.

Ayant « commis » un article peu politiquement correct, il a suscité un débat agité, comme on sait en faire en France et il tient, dans cet essai, à préciser sa pensée. 

L'avantage est que sa pensée est claire et parfaitement bien explicitée ici. Après une introduction assez courte, dans laquelle il expose la problématique politique que représente l'islam radical en France, à savoir la présence d'une population assez importante, mais minoritaire, qui ne désire pas s'assimiler, il annonce trois parties :



« Dans ma première, je pose le problème et je fais un tour d'horizon mondial est historique des solutions apportées pour prendre en compte les minorités ethniques et religieuses. Dans la seconde, je détaille le statut coranique que je préconise d'instaurer. Dans la dernière, je réponds aux critiques que mon article dans Causeur a suscitées. »



Après un aperçu assez objectif de la situation française, et après avoir succinctement présenté son idée : des régimes différents sur un même territoire, Christian de Moliner passe en revue différentes organisations qui ont été adoptées, au fil des siècles, en divers endroits du monde, pour permettre, sous divers régimes politiques le plus souvent autoritaires, la coexistence de populations de religion et d'ethnies différentes. D'Al Andalous à l'Empire austro-hongrois en passant par l'Asie, ou les Amériques, il nous présente des cas historiques dont, souvent, nous n'avons pas même entendu parler. Au passage, il traite la période de l'Édit de Nantes jusqu'à sa révocation. C'est tout simplement passionnant et cela suffirait à justifier l'achat de ce livre.





Je note tout de même au passage une erreur, la seule que j'ai pu remarquer, puisqu'elle concerne la Suisse (je n'aurais pu la remarquer à propos d'un pays du bout du monde), il dit page 81 : «  Cependant, en 1981, le seul canton bilingue de la confédération, celui de Berne… » Non. Il y avait quatre cantons bilingues : le Berne, le Fribourg, le Valais et les Grisons. Donc certains détails sont peut-être sujet à dispute, mais cela n'obère en rien la qualité de la démonstration.

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Dans la deuxième partie, Christian de Moliner suggère de réserver des territoires très circonscrits à l'islam radical. Tout un protocole démocratique permettrait, selon lui, de donner à certaines municipalités, ou quartiers, une autonomie juridique permettant l'application de la Charia, mais sans ses aspects les plus anticonstitutionnels. À ces privilèges géographiques, Moliner suggère d'ajouter un privilège individuel, permettant à tout citoyen de ressortir du statut juridique islamique plutôt que du républicain.


L'auteur se penche alors systématiquement sur un certain nombres d'impératifs de l'islamisme radical. Là commence une amusante énumération de spécificités islamiques, toujours très sérieusement accompagnées d'une suggestion d'applications, ou pas, car certaines sont refusées, qui tourne progressivement au comique tant ces spécificités sont amusantes, mais tragiques, et parfaitement inadaptées à la société européenne. Néanmoins, tout ceci est très sérieusement envisagé et l'on hésite entre le comique involontaire et le second degré ravageur. Cela rappelle un peu Houellebecq qui, lui aussi, expose des choses dramatiques très sérieusement tout en les rendant comiques.



Ainsi donc les femmes pourront-elles choisir librement de se soumettre à la Charia, mais sans que leur mari ne puisse les influencer. La loi y veillera. Bien sûr les mains coupées des voleurs seront interdites, ainsi que le mariage des fillettes, ou la kafala, sorte, nous dit Moliner, d'esclavage moderne pratiqué, paraît-il, au Proche-Orient.


« J'ai poussé le curseur au maximum », conclut l'auteur, qui espère sans doute que les oulémas les plus virulents seront satisfaits.



Tout cela donne, on s'en doute, une immense matière à discussion. Aucun programme d'exécution n'est suggéré, ce qui laisse un peu perplexe quant à la possibilité de faire passer ces lois d'exception par le Parlement. Mais ce n'est pas le sujet du livre, c'est vrai, puisqu'il propose un moyen et non une méthode.




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La dernière partie est constituée de courts chapitres présentés comme des réponses aux futures critiques, mais aussi à celles faites à la suite de l'article de Causeur qui a servi de prologue à cet essai.

Force est de constater que Christian de Molinier n'a pas la moindre idée de la manière d'organiser sa « sortie de l'impasse » (on sort d'une impasse en faisant demi-tour, en général). Faire demi-tour, il n'en est pas question : « La remigration est une illusion » (p. 180), donc, pas de sortie de l'impasse, il faut y vivre coûte que coûte : « L'idée d'une France harmonieuse où les communautés coexisteraient côte à côte sans aucun problème est une illusion et une pure utopie » (p. 171). Aménageons donc l'impasse « et donnons aux musulmans rigoristes le moyen de s'épanouir en France ». (p. 175). Ils n'en réclameront pas plus, c'est certain. « Roubaix ne sera jamais à elle seule une commune islamiste » (p. 178). C'est sûr. À jamais. La France aura trouvé sa forme définitive. « Et nous sommes heureusement protégés par notre Constitution et par les lois européennes » (p.185). Notre Constitution est déjà la cinquième (modifiée plus de quarante fois) et les lois européennes n'existent simplement pas.


Une remarque, enfin, Christian de Molinier mentionne, page 185, « nos soeurs musulmanes ». Je les croyais nos concitoyennes. Christian de Moliner serait-il musulman intégriste ? Sûrement pas, mais aime l'humanité.

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Une lecture très intéressante, mais dont le sous-titre laisse songeur. Loin de nous sortir de l'impasse, Christian de Moliner nous y enfonce systématiquement, comme, dans 1984, Winston, croyant échapper à Big Brother, ne fait que s'en rapprocher.
Sans doute l'islamisme est-il un sujet plus tordu qu'on ne penserait.