Je ne regrette pas d'avoir coché La Lune verte lors de l'opération masse critique :).
J'avais trouvé la couverture poétique, et la quatrième de couverture également, par certains aspects. Je n'ai pas été déçue. Il se dégage de la ville en décrépitude une ambiance salée, onirique, insaisissable, de par cette brume verte qui la surplombe tout d'abord, ensuite du fait qu'on la parcourt par de nombreux chemins de traverse (les escaliers, les ruelles, les souterrains...).
Le récit est très imagé, d'emblée (avec la description des personnages par exemple), ce qui m'a beaucoup plu ; mais également drôle, avec différents niveaux de langue, de l'ironie, des formules bien trouvées : 134 marches sont "134 occasions de se casser la figure", les oiseaux larguent "une déjection de beau calibre"... La narration participe de l'humour, quand l'un des personnages raconte l'histoire d'amour de son congénère avec un style disons bien à lui, ou alors quand il se fait lui-même des films quand il lui arrive quelque événement.
La force de la Lune verte tient dans ses personnages : ne vous attendez pas à de grandes révoltes sociales juste parce qu'il est question d'une usine et de pauvreté.
L'auteur joue avec le lecteur, parfois mené en bateau entre différentes versions : laquelle faut-il croire ? celle racontée par le narrateur ? celle que se raconte le personnage ? Celle qu'invente un second personnage, à partir du vécu, des dires du premier ? Ou bien : ne s'en moque-t-on pas, de savoir laquelle est la "vraie" ?
Deux regrets :
- l'abus de points d'exclamations dans la narration. J'ai bien compris qu'un personnage s'exprimait à travers le narrateur, mais de là à forcer le trait... J'ai eu un peu de mal, car j'ai trouvé le reste plutôt subtil.
- les différents fils narratifs se rejoignent aisément, mais je n'arrive pas à savoir si j'apprécie la fin, restée en suspens au gré des "brouillards de la vie..." Peut-être une autre manière de décontenancer le lecteur qui cherche une fin à ce qui n'en a pas.
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Par delà l'imaginaire de Rodolphe et de ses habituelles planches à bulle, un roman, une ville, une vieille ville fondée par un légendaire pirate, Leroy-Latour.
Une cité à front de mer qui évoque nos villes industrielles, celles qui polluent. Ou encore celles que l'on travesti ou condamnées au profit d'un tourisme de masse.
Sous les volutes vertes de la ville, une poignée d'hommes et de femmes songent à un ailleurs. Ti-Paul marchant dans l'ombre de l'inspirant pirate à l'aura de John Silver; à ses côtés Grand-Paul, balèze au coeur d'argile, blessé en quête de sa Rose; derrière son bar, Bert, naufragé de sa femme; et puis Irène accoudée au même bar, parfumée anis. Elle conte les faits divers; et enfin Polky, gratte-papier d'histoires volées, pilleur des livres des autres. Une belle équipe de flibustiers gentils qui sous l'halo d'une lune verte, à terre rêvent d'un monde meilleur … prendre la mer pour un autre monde sans un dernier baroud d'honneur.
Dans cette nouvelle, je retrouve l'univers de Rodolphe, un monde proche du notre mais qui semble mois réel et intemporel. Des personnages loufoques naviguant au hasard parmi les brouillards de leur vie. Une courte lecture plaisante, téméraire et vaporeuse.
Merci à Babelio et les éditions Sentinelles pour cette lecture, lauréate d'une masse critique.
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