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La Vie de Bouddha - Edition pres... tome 2 sur 4
EAN : 9782413009078
688 pages
Delcourt/Tonkam (16/01/2019)
4.64/5   21 notes
Résumé :
Siddhârta est parti suivre les voies de l'ascétisme. S'il n'est pas près de rencontrer Dévadatta, le fils de son pire ennemi, devenu enfant loup et disciple éphémère d'un Brahmane étrange qui fut autrefois Nadaratta, il va lier connaissance avec Dêpa et le petit Assaji, deux Shramanas qui vont faire route à ses côtés. Le premier lui enseigne les austérités, alors que le second va mourir et renaître avec le pouvoir de divination. Chacune de leurs rencontres, chacun d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ce tome est le deuxième d'une intégrale en 4 tomes. Il comprend 11 chapitres du récit, écrits, dessinés et encrés par Osamu Tezuka (1928-1989). Les différents chapitres sont parus de 1972 à 1983, et le récit total comprend environ 2.700 pages, réparties en 4 tomes pour cette troisième édition en VF. Ce manga en noir & blanc raconte la vie de Siddhārtha Gautama (orthographié Siddharta dans le manga), le premier Bouddha, le chef spirituel d'une communauté qui a donné naissance au bouddhisme. Il commence par une carte de l'Inde et du Népal situant les principaux lieux du récit : Kapilavistu, Lumbini, Kosala, Kushinagar, Bodh Gaya, Magadha.

Siddhârta se réveille dans la forêt où il a dormi, adossé à un arbre. Il remarque que plusieurs animaux se sont rapprochés de lui et l'observe. Il va se laver le visage dans la rivière. Accompagné par des oiseaux, des faons, des lapins, des écureuils, une louve et son petit, il va contempler le paysage en contrebas de la hauteur où il se trouve, et il se déclare prêt à affronter les épreuves que le monde peut lui envoyer. Il arrive à une ferme où il est accueilli par le fermier à qui il explique qu'il veut se rendre au Magadha. L'homme le présente à son épouse et lui indique qu'ils ont recueilli un autre bonze. C'est ainsi que Siddhârta du Kapilavastu fait connaissance avec Dhépa du Kosala. Après un repas difficile à avaler, composé pour moitié de grains, et pour moitié de gravier, le fermier donne une tunique puante à Siddhârta. Puis les époux expliquent qu'ils ont trente-deux enfants et qu'ils souhaitent que les bonzes prennent en charge Asaji avec eux : un jeune garçon d'une dizaine d'années avec un gros sparadrap sur le front, chauve et la morve au nez. Ils prennent leurs jambes à leur cou et s'en vont en courant. Répondant à une question de son compagnon, Dhépa explique qu'il s'est brûlé lui-même son oeil gauche.

La discussion continue chemin faisant : Dhépa explique pourquoi il s'est ainsi fait souffrir en développant le sens du mot Ascèse, ainsi que son objectif. Plus on maltraite son corps, et plus on purifie son coeur, plus les désirs s'éloignent. Il ajoute que la plus grande ascèse qui lui ait été donnée de voir, c'est de choisir de vivre comme un animal. Il parle de son maître Naradatta qui se déplace à quatre pattes, a renoncé à parler et est aveugle. Dhépa joint le geste à la parole en traversant un champ de ronces. À contre coeur, pour ne pas être semé, Siddhârta fait de même, souffrant de nombreuses entailles. Puis ils se baignent dans une rivière, et Dhépa l'entraîne au fond de la rivière pour lui apprendre à arrêter de respirer. Ils sortent de l'eau, mais y replonge aussitôt parce qu'ils ont aperçu Asaji cheminant sur la berge, toujours avec la goutte au nez. Ils arrivent enfin au pays de Vaji où demeure Baghawa, un ascète. Ils rencontrent un vieil homme qui leur indique que l'ascète est au milieu de la tour avec les oiseaux Ils y pénètrent et découvrent les os de Baghawa qui a été dépecé et dévoré par les vautours. Ils ressortent et le vieil homme les avertit qu'une troupe arrive à l'horizon : il s'agit de Tatta et de Miguéla et de leur troupe de brigands.

Il est déconseillé de commencer par le deuxième tome, car il s'agit d'une biographie chronologique de Siddhârta Gautama, le premier bouddha du nom, et de nombreux personnages sont déjà apparus, tissant des relations interpersonnelles. Dès la première page, le lecteur retrouve les idiosyncrasies visuelles d'Osamu Tezuka. Il a adopté une narration visuelle tout public, en particulier pour les personnages. Il les représente de manière simplifiée avec des contours arrondis, des membres parfois allongés, des pieds parfois sans les doigts de séparés. Ce choix permet au récit de ne pas tomber dans la facilité du gore, et d'éviter l'écueil de la titillation des poitrines féminines souvent dénudées par les tenues vestimentaires. Ce choix peut parfois décontenancer du fait de sa candeur, voire de sa naïveté, ou des expressions de visage très franches. Pour autant, les dessins ne sont pas toujours très plaisants à voir. Par exemple, la représentation d'Asaji est très premier degré : il a vraiment une goutte de morve qui pend de sa narine droite, ce qui est peu ragoûtant. Il est également difficile de prendre du recul en voyant le jeune Dévadatta (une dizaine d'années) attaché sur un cadre de bois pour être dévoré par les bêtes sauvage pendant la nuit, à nouveau parce que la représentation est premier degré, très factuelle. Il y a ainsi plusieurs passages dramatiques d'une intensité visuelle difficile à soutenir malgré les apparences gentilles des dessins.

Comme dans le tome 1, le lecteur est vite pris par la fluidité de la narration visuelle, son rythme plein d'entrain, son évidence. Il est tout autant pris par sa richesse, sa variété, sa diversité. Osamu Tezuka est un conteur extraordinaire, mettant à profit les nombreuses possibilités de la bande dessinée, avec un naturel confondant. Cases en trapèze, passages dépourvus de phylactères et de cartouche de texte, traits de vitesse (par exemple pour la trajectoire de flèches), séquences animalières, variation du nombre de cases (avec une page découpée en 28 cases, p. 249), dessin en pleine page ou en deux tiers de page consacré à un paysage naturel ou une construction humaine, cases de la largeur de la page, cases de la hauteur de la page, etc. le lecteur se rend vite compte que ce tome se lit plus facilement que le premier, même s'il y a des nouveaux personnages, et bien sûr des situations différentes. Il se rend également vite compte que cette facilité de lecture ne rime pas avec un appauvrissement du récit. L'auteur continue à insérer des touches d'humour, souvent visuelles, avec des moments de pantomime pour la direction d'acteurs, qui peuvent surjouer, ou passer en mode burlesque, un sourire apparaissant tout naturellement sur le visage du lecteur. Certaines formes de comique se retrouvent également dans des dialogues décalés ou absurdes également réussis. Parmi les registres comiques, Tezuka continue à faire un usage maîtrisé des anachronismes : une référence au comportement des hommes loups qu'on voit au cinéma, un personnage (Mossa) qui utilise un fusil pour tirer sur un géant (Yatara), les brigands de la troupe de Tatta qui défilent réclamant des sous et protestant contre les licenciements, et quelques autres encore.

Comme dans le tome 1, les horreurs continuent de survenir et à chaque fois le lecteur compatit à la situation du personnage car Tezuka a l'art et la manière de les rendre vivants. Au fils des pages, le lecteur sent son coeur se serrer en assistant impuissant à des actes atroces : enfant maltraité, enfant tuant ses camarades de jeu à coup de pierre, une colonie d'abeilles exterminant une autre colonie d'abeilles, soldats tués net, transpercés par une volée de flèches, jeune femme couverte de pustules dues à la maladie, adolescent dévoré par les bêtes sauvages, épouse battue par son mari, etc. le futur bouddha l'avait annoncé dans le premier tome. Pourquoi vivons-nous ? Pour souffrir. Cette accumulation de souffrances est rendue encore plus pénible par celles que les ascètes s'infligent de leur propre gré, elles aussi de terribles mortifications physiques pouvant mener jusqu'à la mort. Là encore les dessins relèvent d'une approche naïve, tout en transcrivant bien l'intention et les moyens des individus, montrant clairement ces pratiques. Ces différents éléments racontent donc le parcours de Siddhârta vers l'éveil, avec cette phase de pratique des austérités (les mortifications de l'ascèse) et ses rencontres avec d'autres êtres humains. le lecteur retrouve donc certains personnages du premier tome : Dhépa, les 5 ascètes (Kondaniya, Baddiya, Bappa, Mahanama et Janussoni, en fait ils ne sont plus que 4), Naradatta, Tatta & Miguéla, le roi Suddhodana & la reine Maya, Prasenajit et son fils Virudhaka, etc. Non seulement il les reconnaît facilement grâce à leur apparence mémorable, mais en plus l'auteur sait s'y prendre pour effectuer un rappel discret et naturel pour les resituer. Il n'y a que pour Prasenajit et sa situation qu'il réalise 4 pages de résumé. le lecteur fait la connaissance de nombreux autres personnages : Dévadatta, Gaguéra, Asaji (qui ressemble à l'Enfant aux 3 yeux, un autre manga de Tezuka), la princesse Visaka, le général Sukhanda, sa majesté Senya Bimbisara, la très mignonne Sujata, le colosse Yatara, et quelques autres encore, tous aussi mémorables que les précédents. Afin de pouvoir installer ces personnages, l'auteur est parfois amené à leur consacrer un chapitre de plusieurs dizaines de pages dans lequel Siddhârta n'apparaît pas, comme une forme de digression, mais indispensable pour comprendre ce qui se joue dans leur relation avec Siddhârta.

Dès la première séquence, l'auteur fait bien comprendre au lecteur qu'il s'agit de sa version ou de son interprétation de la vie du futur bouddha. Cela commence avec une scène quasiment empruntée à un dessin animé Disney, avec les animaux de la forêt gentiment assis en arc de cercle autour de Siddhârta en attendant qu'il se réveille. À plusieurs reprises, il y a ainsi une mise en scène de la relation harmonieuse à la nature entre cet humain et la vie sauvage. Dans le même temps, la narration repose sur une approche pragmatique et naturaliste, Osamu Tezuka prenant grand soin de rendre plausible tout ce qu'il raconte. Quand Siddhârta fait l'expérience mystique du lien qui unit toutes les formes vivantes, le lecteur peut le voir comme une forme d'illumination provoquée par les privations et par l'enjeu émotionnel énorme de la situation. Quand Mosa se trouve confronté à Yatara un géant de 7 mètres de haut, Tezuka fait en sorte de dessiner ce dernier avec un stature plutôt de 2,20 mètres ou 2,50 mètres ce qui reste extraordinaire mais possible. Il y a donc une volonté d'auteur de rester dans le domaine de la biographie d'un être humain, plutôt que dans l'hagiographie d'une figure mythologique. Si son intérêt dépasse la biographie (déjà très riche), le lecteur s'attache au parcours spirituel de Siddhârta Gautama. Il en observe les différentes étapes : le questionnement sur la souffrance physique et psychologique, la remise en cause des mortifications, l'illumination relative à la source unique de toute vie, la peur de la mort, les sources de la souffrance comme par exemple la maladie, la pauvreté, la discrimination. Il regarde alors les souffrances des autres personnages dont Siddhârta croise la route, pour en noter la cause, mais aussi pour observer la manière dont ils subliment ou non leur souffrance, dont ils la reportent sur autrui ou non, autant de chemins que Siddhârta a délaissé, ce qui leur rend unique par comparaison.

Ce deuxième tome s'avère encore plus réussi que le premier avec une narration visuelle et une composition de chapitres plus naturelles, plus faciles à suivre, et tout aussi denses. Osamu Tezuka réussit un extraordinaire numéro d'équilibriste entre drames accablants et comédie rehaussant les drames, sans nuire à leur sensibilité, racontant son interprétation de la vie de Siddhârta Gautama, de manière naturaliste, au lieu d'une version mythologique ou divine. le lecteur occidental se doute bien que certains éléments doivent plus parler à des lecteurs japonais pour qui il s'agit de leur culture collective, mais cela ne gêne en rien, ni même ne devient manifeste. Il est entièrement pris dans ces drames humains, dans cette narration unique en son genre associant génie visuel et sensibilité hors pair, fasciné par le parcours du futur bouddha, à la fois par sa vie, à la fois par sa progression spirituelle.
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Deuxième tome (sur quatre prévus) de la réédition « intégrale prestige » de la Vie de Bouddha de Tezuka Osamu – encore une belle brique, même si un chouia moins que son prédécesseur ! Et un récit très ample et en même temps très dense, aux caractéristiques de roman feuilleton, ce qui ne facilite pas toujours la chronique – n'attendez pas de ce compte rendu quelque chose d'exhaustif, ça n'est pas dans mes cordes et ça serait probablement un peu absurde.



Mais disons du moins que l'on peut scinder les (très) divers arcs narratifs de ce tome 2 en deux groupes, même s'ils sont forcément poreux, ou liés, comme vous préférez : le premier groupe concerne directement le prince Siddartha devenu ascète et sur la voie de devenir Bouddha, ainsi que les autres ascètes qu'il est amené à fréquenter ; le second met en avant d'autres personnages, dans des récits davantage tournés vers l'aventure et/ou la politique. Je m'étendrai ici essentiellement sur le premier groupe, car il est à ce stade le moteur de l'histoire, et pour l'essentiel ce qui m'a le plus parlé dans ce deuxième volume.



Adonc, Siddartha a tout récemment quitté Kapilavastu, et, dès le premier chapitre, il fait la rencontre de deux personnages déterminants – deux jeunes ascètes comme lui : le fier Dhépa est un shramane, très assidu dans ses austérités, et convaincu que la souffrance est la clef de la vie d'ascète, qu'elle relève de son devoir – aussi s'est-il déjà à ce stade, et de lui-même, brûlé un oeil. Bien différent, le petit Asaji, que ses parents collent entre les pattes des deux autres, est un gamin chétif, perpétuellement la goutte au nez et l'air un peu niais…



Dhépa, que nous aurons l'occasion de voir peu charitable, se passerait bien de tel compagnon de route, mais Asaji les suit, d'une manière ou d'une autre – et Siddartha lui sauve même la vie en suçant le poison dans son corps. Or cette expérience, au cours de laquelle Asaji a bien failli mourir, change à jamais le personnage : son périple de l'autre côté du voile lui a conféré un pouvoir de prescience – il sait prédire à peu près tout, mais, comme c'est le lot de ces oiseaux de malheur, il prédit surtout les catastrophes… qui se réalisent bel et bien, immanquablement. Il sait aussi, à ce stade, le moment et les circonstances, pas moins horribles, de sa mort précoce, dix années seulement plus tard – et le petit Asaji sidère Siddartha par son « stoïcisme », disons, la sérénité avec laquelle il accueille tout cela et jusqu'à sa propre fin… Nous assisterons bel et bien, dans ce volume, à la mort d'Asaji – car elle est un moment clef sur la voie de l'illumination pour un Siddartha désemparé.



D'ici-là, cependant, les trois ascètes se rendent dans la Forêt des Austérités, un enfer masochiste où comme une colonie de dévots s'inflige journellement mille morts au service de la foi. Ils doivent y demeurer des années, et endurer la souffrance au quotidien. Cet enfer est pour Dhépa un paradis : le shramane se montre plus que jamais assidu dans ses austérités – et plus qu'à son tour critique de ceux qui ne souffrent pas autant que lui.



Or, si Asaji traverse tout cela comme une brise sereine, Siddartha, lui, s'interroge : toute cette souffrance est-elle vraiment nécessaire ? Qu'apporte-t-elle au juste ? Progressivement, au cours même de ses douloureuses austérités, Siddartha réalisera qu'il est vain et faux de prétendre que l'homme doit souffrir, au sens où il s'agirait d'un devoir imposant à l'homme de désirer et de rechercher la souffrance. Il comprend alors que, si la souffrance est primordiale, la réalité essentielle de la vie même, la vouloir est absurde, et la subir ne résout rien… Et il songe à quitter la forêt.



Tout cela, pour Dhépa, relève de l'hérésie pure et simple – car ce personnage, que nous n'avions guère l'occasion de trouver aimable jusque-là, même en tant que compagnon des plus positifs Siddartha et Asaji, se révèle à terme pour l'homme qu'il est vraiment : un bigot borné, dont la conception du monde est délibérément simpliste et intolérante – c'est comme ça et pas autrement. Et un homme dévoré par son ego, aussi, très fier de sa pratique ascétique extrême, et prompt à critiquer qui ne suit pas son exemple… Mais il semblerait que Dhépa ait encore un rôle à jouer dans cette histoire – peut-être une forme de rédemption lui est-elle malgré tout accessible… Lui, qui a trahi Siddartha, deviendrait son disciple – il a quelque chose, disons, d'un Judas ou d'un Pierre à l'envers…



Mais tout cela – les austérités, la sérénité d'Asaji jusqu'au moment de sa mort, la bigoterie brutale de Dhépa, mais aussi d'autres choses encore, des retrouvailles ambiguës (avec Tatta et Miguéla, notamment), des échos de la situation à Kapilavastu ou au Kosala (et de ce que son absence y entraîne), ses relations avec ses « voisins », ascètes ou aristocrates, vieillards et enfants, hommes et femmes, animaux et plantes aussi, etc. – tout cela, donc, ne s'avère pas vain en définitive, car ce sont autant d'étapes sur la voie de l'illumination pour Siddartha.



Et dans la conception du bouddhisme que Tezuka met en scène, cet itinéraire est défini par le principe divin même, Brahmâ, qui intervient dans la vie de Siddartha (mais aussi d'Asaji, etc.), lui apparaissant sous la forme d'un vieil homme, dans des rêves ou des visions – et Brahmâ lui annonce qu'il connaîtra l'illumination, et il en donne d'une certaine manière le signe, conférant à son tour, mais plus significativement que précédemment, au prince Siddartha devenu ascète, le nom de Bouddha, l'éveillé.



L'éveil de Bouddha, au pied d'un arbre, en compagnie des animaux, se produit vers la fin de ce deuxième volume. Siddartha demeure pourtant, en même temps, un jeune homme un peu naïf et régulièrement pris par le doute. C'est qu'à tout prendre son itinéraire ne fait que commencer…



Mais on croise donc bien d'autres personnages dans ce gros deuxième volume, qui, comme dans le premier, volent régulièrement la vedette à Siddartha. du moins au sens où des arcs narratifs assez développés peuvent les mettre longuement en scène, là où notre héros disparaît purement et simplement de ces pages : il se fait voler la vedette quantitativement, donc. Qualitativement, je n'en suis en effet pas toujours persuadé, et si certaines retrouvailles font plaisir (Tatta et Miguéla au premier chef, mais qui pour le coup sont directement liés à Siddartha), d'autres « écarts » ne produisent pas toujours grand-chose pour l'heure, ou peuvent donner le sentiment de quelque chose d'un peu « facile », peut-être (comme le dernier chapitre avec le géant Yatara, un peu téléphoné, si sa conclusion auprès de Bouddha est importante).



Deux de ces personnages pèseront probablement davantage sur la suite des événements. le premier, et de loin le plus intéressant, est Dévadatta, le fils de l'odieux Bandaka – et qui est semble-t-il destiné à devenir une sorte de « rival » de Bouddha. À ce stade de l'histoire, Dévadatta n'est qu'un tout petit enfant, mais sa vie est déjà très tumultueuse… et passablement morbide. Dès le deuxième chapitre, et de manière bien plus saisissante finalement qu'au travers des austérités des ascètes, Tezuka infuse ainsi dans son récit une noirceur et une violence qui tranchent sur le dessin tout rond et passablement enfantin, y compris donc quand il s'agit de mettre en scène des enfants ; c'est que cette violence, cette rudesse, sont connotées de traits éthiques douloureux et résolument adultes – la sensation de malaise n'en est que plus palpable. Ici, Tezuka subvertit d'une certaine manière le thème classique de l'enfant sauvage : les petits animaux mignons de la forêt qui entourent Dévadatta ne doivent pas tromper, le propos est tout sauf naïf, il est même essentiellement cruel. Mais nous n'en savons pas beaucoup plus pour l'heure – une bonne décennie au moins s'écoulera avant que Dévadatta ne revienne sur le devant de la scène.



Le second personnage à évoquer m'a moins convaincu, même s'il présente certaines caractéristiques qui valent d'être soulignées, et qui l'intègrent bien dans le propos plus général de la bande dessinée : il s'agit de Virudhaka, plus communément appelé le Prince Luly (?). Il est le fils du roi du Kosala et d'une esclave de Kapilavastu – ce que tous deux ne comprennent que bien tardivement, eux qui croyaient que la femme était de leur caste, et non un leurre envoyé par leurs faibles voisins… Mais si le roi fulmine, il contient cependant sa réaction ; le Prince Luly est beaucoup moins charitable pour celle qui lui a donné la vie… Il est un nouvel avatar de ces personnages régulièrement croisés dans le premier volume, et qui sont portés aux gestes intolérants et cruels – ces aristocrates et guerriers à la morale plus que douteuse. En même temps, Virudhaka n'est pas Bandaka, c'est-à-dire un personnage unilatéralement détestable, et sa douleur peut à l'occasion toucher le lecteur. Il y a tout de même comme un fâcheux air de déjà-vu… Même si c'est une bonne occasion de revenir sur la critique du système des castes, prépondérante dans le tome 1, beaucoup plus discrète dans celui-ci. Mais l'aspect le plus intéressant du personnage est probablement ailleurs : l'obsession du prince pour la date de sa mort – avec Asaji qui est de la partie. Plus encore que Siddartha à cet égard, il incarne l'antithèse de l'ascète avec la goutte au nez : l'homme qui est obnubilé par sa fin, presque au point de ne plus vivre. Ce qui justifie j'imagine sa place dans cette histoire.



Le bilan de ce deuxième volume est assurément positif. Pourtant, je suppose qu'il me faut le placer un bon cran en dessous par rapport au premier : si on en retrouve l'essentiel des qualités, dans le fond comme dans la forme, le récit tend à se disperser un peu trop, et pas toujours très utilement. Si l'épisode consacré à l'enfance de Dévadatta est saisissant, le Prince Luly et quelques autres manquent un peu de caractère.



La BD convainc surtout quand elle se focalise sur Siddartha et ses comparses si différents, Dhépa et Asaji. Tezuka met brillamment en scène l'évolution spirituelle de Siddartha jusqu'à son éveil, d'une manière qui parvient, non seulement à intéresser, mais aussi à toucher, un lecteur occidental pour qui le bouddhisme et son histoire ont probablement quelque chose d'un peu obscur – et c'était pourtant particulièrement périlleux.



Mais, oui, Tezuka a réussi son coup – et si ce deuxième volume me paraît donc un peu moins bon que le premier, j'en ai grandement apprécié la lecture, et il me faudra lire la suite (j'ai cru comprendre d'ailleurs que le troisième tome… sortait aujourd'hui même !).
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Un deuxième tome (tomes initiaux 3 et 4 combinés) toujours drôle (même si moins que le premier tome) ! Ce fut un plaisir de retrouver cet humour à travers le tragique, le côté humour de ces tomes se retrouvant notamment beaucoup avec Asaji.

L'esthétique est toujours aussi belle. Pourtant, ce tome est plus violent voire trash.

Quelques aspects m'ont moins emballée que le tome précédent : j'ai trouvé moins de rythme, il se passe peu (tout du moins dans la première partie), je n'ai pas retrouvé les anachronismes qui m'avaient plu. Enfin, c'était un peu compliqué au niveau de la chronologie.

Sinon, c'est véritablement dans ce tome que l'aspect spirituel et la vision de l'univers du bouddhisme apparaît. On commence à comprendre. Une vision de la vie et de la spiritualité plaisante, ne serait-ce que par le fait déjà que Siddharta refuse par exemple de poursuivre les souffrances qui lui sont imposées et qui ne riment à rien, je suis bien d'accord avec lui. Ce fut très intéressant, je sens que je vais aimer cette philosophie. A poursuivre !
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A la fin de ce deuxième tome, nous sommes déjà à la moitié des aventures de Siddharta, notre futur Bouddha, que le temps passe vite. Dans cette suite, le père du manga, pose son histoire. Il prend le temps de développer ses personnages et les interrogations qui rongent son héros. du coup, le rythme est plus lent, l'histoire avance moins et il se passe moins de choses mais cela reste une lecture marquante.

On y suit effectivement d'un côté les débuts de Siddharta comme ascète mais ça ne se passe pas comme prévu, et de l'autre les événements qui viennent bousculer la vie politique des royaumes de ce coin du monde. L'ensemble s'équilibre assez bien et le second a toujours des conséquences notables sur le premier. L'auteur aime bien aussi jouer avec la temporalité de l'histoire, nous présentant un personnage ne devant intervenir que 10 ans plus tard (Dévadatta, fils de Bandaka), ou encore ralentissant puis accélérant le temps selon la nécessité du récit. du coup, on ne voit pas le temps passer lors de cette lecture pourtant assez dense.

D'ailleurs au cours du périple de Siddharta plusieurs questions importantes autour de la religion sont posées. A quoi servent les ascèses ? Est-il nécessaire de souffrir pour prouver sa foi ? Est-ce quelque chose qu'on doit montrer ou quelque chose de plus intérieur ? Quel est le vrai sens de la vie ? et donc de la mort ? J'ai trouvé que c'était culotté de poser ces questions dans un titre que je pensais hagiographique concernant la figure de Bouddha. Dans la première partie, sont également posées des questions encore d'actualité autour de la nature, de l'écologie, de l'équilibre sur Terre. Tandis que dans la dernière partie, on revient très joliment sur la notion de caste, la filiale, les obligations dues à son statut... Ce sont à chaque fois des interrogations dont les réponses et leur recherche marquent de part leur sensibilité et leur modernité. Et tout cela aboutit dans les dernières pages à l'éveil de Siddharta qui devient ainsi le Bouddha dont on a entendu parlé. C'est un joli tout de chapeau de la part de Tezuka qui a mené sa narration de main de maître.

L'histoire a donc beau avancer moins rapidement, nous faire croiser moins de monde et aborder des sujets déjà connus, elle n'en reste pas moins forte et bien menée. Graphiquement, c'est toujours aussi novateur. Il y a une vivacité folle dans ce titre avec des compositions de planche proches du génie parfois. On sent vraiment que le mangaka expérimente et se fait plaisir ici malgré le côté classique de cette "biographie". C'est vraiment un plaisir à lire.
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Deuxième volume de la vie de Bouddha. Malgré le nombre de personnages et les différentes histoires qui se recoupent et se chevauchent outre les nombreuses péripéties si l'on peut dire, on arrive à s'y retrouver et à reprendre le fil de cette vie sans difficulté alors que la lecture du précédent est un peu lointaine. J'ai découvert avec un grand plaisir les planches en couleur et ai retrouvé l'univers de Tezuka entre poésie, philosophie, violence, fantastique et humour. Je regrette malgré tout les actualisations de certains dialogues et leur francisation qui me semblent particulièrement inopportunes. Cette réédition ne justifiait pas ce choix éditorial selon moi. Mais cela ne m'empêche pas d'avoir déjà commande à mon libraire préféré le tome 3.
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
De leur naissance à leur mort, les êtres vivants vivent tous dans ce monde en le partageant. Tous ont besoin des autres pour vivre, et cela tout au long de leur vie. Les fleurs, les arbres, les insectes, les poissons, tous sont liés les uns aux autres d'une façon ou d'une autre. Et ce lien ne sera jamais coupé tant que le monde sera monde. Par exemple, les poissons qui pondent des millions d'eux, imagine que chacun de ces poissons donnent un œuf. Notre Terre serait envahie de poissons, d'accord ? C'est pour cela qu'une partie est mangée par les autres êtres vivants, et ainsi leur nombre s'équilibre. […] Ce vaste ciel, et toute cette nature autour de nous, tout ça est commandé par la destinée.
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Dès lors Dévadatta oublia le langage des hommes. Dans sa haine des humains, il oublia progressivement qu'il en était un lui-même. De fait il s'attacha à sa mère louve adoptive davantage qu'à sa propre mère. Il est souvent question en Inde d'enfants trouvés élevés par des bêtes sauvages. Sans doute cela s'explique-t-il par le fait que ce pays offrait un même cadre de vie aux humains et aux animaux. Dévadatta apprit ainsi le langage des loups, non seulement les grondements et autres bruits, mais aussi les différents gestes qui les accompagnent.
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Tu ne comprends pas le sens du mot Ascèse ? Ascèse signifie Chaleur. À l'origine, c'était s'exposer à la chaleur du feu, celui du soleil. On restait assis avec des feux autour de soi allumés dans les quatre directions. On s'infligeait ainsi le double supplice du feu et du soleil, appelé les cinq feux. Peu à peu d'autres mortifications furent imaginées. Plus on maltraite son corps et plus on purifie son cœur, plus les désirs s'éloignent.
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La ligne bleue des montagnes, une petite rivière… La terre est féconde et les villages charmants dans notre pays de Magadha, et dans sa capitale sainte, au bord de la rivière vit un grand personnage qui allie la noblesse de l'éléphant blanc à la vaillance et à la puissance du chacal. Il a le regard doux de l'agneau et les crocs du serpent tel est notre grand roi Senya Bimbisara dont nous fêtons aujourd'hui l'anniversaire dans la liesse générale.
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C'est vrai qu'il est vulgaire et stupide d'être le jouet du plaisir. Mais n'est-ce pas tout aussi stupide et inutile de ne penser qu'à se faire souffrir ? On ne trouve jamais le salut ainsi !! Je suis certain qu'il existe un autre moyen.
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Attention !!! Nouvel horaire pour l'émission "Le coup de coeur des libraires" sur les Ondes de Sud Radio. Valérie Expert et Gérard Collard vous donnent rendez-vous chaque samedi à 14h00 pour vous faire découvrir leurs passions du moment ! • Retrouvez leurs dernières sélections de livres ici ! • • • Spy x Family (T12) de Tatsuya Endo, Satoko Fujimoto aux éditions Kurokawa https://www.lagriffenoire.com/spy-x-family-tome-12.html • One-Punch Man (T28) de One, Yusuke Murata aux éditions Krokawa https://www.lagriffenoire.com/one-punch-man-tome-28.html • Oshi no ko (T10) de Aka Akasaka, Mengo Yokoyari aux éditions Kurokawa https://www.lagriffenoire.com/oshi-no-ko-tome-10.html • Fullmetal Alchemist Perfect (T18) de Hiromu Arakawa et Fabien Vautrin aux éditions Kurokawa https://www.lagriffenoire.com/fullmetal-alchemist-perfect-tome-18-vol18.html • Pokémon Noir & Blanc - (T2 chapitres 18 à 34) de Hidenori Kusaka, Satoshi Hashimoto aux éditions Kurokawa https://www.lagriffenoire.com/pokemon-noir-et-blanc-double-tome-2.html • le combat d'Henry Fleming de Cuzor Steve aux éditions Dupuis https://www.lagriffenoire.com/le-combat-d-henry-fleming.html • Oum Kalsoum - L'Arme secrète de Nasser de Martine Lagardette et Farid Boudjellal aux éditions Oxymore https://www.lagriffenoire.com/oum-kalsoum-l-arme-secrete-de-nasser.html • Fleurs de pierre (T01) de Hisashi Sagaguchi aux éditions Revival https://www.lagriffenoire.com/fleurs-de-pierre-tome-1.html • Anus Beauté (T1) de Takeshi Ohmi et Satoko Fujimoto aux éditions Kurokawa 9782368522066 • Anus Beauté (T2) de Takeshi Ohmi et Satoko Fujimoto aux éditions Kurokawa https://www.lagriffenoire.com/anus-beaute-tome-2.html • It's Lonely at the Centre of the Earth de Zoe Thorogood et Maxime le Dain aux éditions HiComics https://www.lagriffenoire.com/it-s-lonely-at-the-centre-of-the-earth-un-roman-auto-biographique.html • Jours de sable de de Jongh Aimée aux éditions Dargaud https://www.lagriffenoire.com/jours-de-sable.html • Au chant des grenouilles - Tome 1 - Édition spéciale sépia: Urania, la Sorcière de Barbara Canepa, Anaïs Halard aux éditions Oxymore https://www.lagriffenoire.com/au-chant-des-grenouilles-tome-1-urania-la-sorciere.html • Princesse Saphir T01 de Osamu Tezuka aux éditions Soleil Manga 9782845659704 • Goldorak de Dorison Xavier, Bajram Denis aux éditions Kana https://www.lagriffenoire.com/goldorak-2.html • Phénix l'oiseau de feu (T1) - Édition prestige de Osamu Tezuka aux éditions Delcourt https://www.lagriffenoire.com/phenix-l-oiseau-de-feu-integrale-vol.1.html • Dragon Ball - Édition originale - Tome 01: Son Gokû et ses amis de Akira Toriyama aux éditions Glénat Manga https://www.lagriffenoire.com/dragon-ball-edition-originale-tome-01.html • Ashita no Joe (T1) de Asao Takamori et Tetsuya Chiba aux éditions Glénat Manga https://www.lagriffenoire.com/ashita-no-joe-tome-01.html • Marie-Antoinette, la jeunesse d'une reine de Fuyumi Soryo aux éditions Glénat Manga https://www.lagriffenoire.com/marie-antoinette-la-jeunesse-d-une-reine.html • • • Chinez & découvrez nos
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