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EAN : 9782271088178
377 pages
CNRS Editions (27/04/2017)
3.33/5   3 notes
Résumé :
La nature nous relie les uns aux autres et à l'ensemble du vivant. Mais quelles expériences avons-nous aujourd'hui de la nature ? Celles-ci, ou leur absence, façonnent-elles nos façons de vivre et de penser, d'agir et de gouverner ? Existe-t-il une valeur ajoutée de l'expérience de nature pour l'éthique et la politique ?
Il est urgent de préserver un " souci de la nature " qui soit au cœur des institutions, des politiques publiques, de nos dynamiques de tran... >Voir plus
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critiques presse (1)
NonFiction
25 octobre 2017
Un ouvrage interdisciplinaire sur les modes d'expériences de la nature.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Floran Augagneur : Agir dans (nos représentations sociales de) la nature / Chapitre 23 : Écologie et psychologie sociale – extraits.

Contrairement à d'autres courants politiques, comme le marxisme, qui tente de faire du matérialisme historique une science applicable au vivre ensemble, l'écologie, affirme Georges Canguilhem (1974), « ne nous dit rien – et n'a rien à nous dire – des choix implicites ou explicites qui orientent les pouvoirs de décision ». Le philosophe critique la récupération d'un discours scientifique, celui de la science écologique, par un discours politico-idéologique sur la nature. Pour lui les idéologies politiques qui se réclament de l'écologie scientifique ne peuvent que la desservir.
...

L'écologie politique a le souci, non pas de la nature mais de rendre aux humains les rênes de l'agir « dans la nature ». Deux variantes en forment la dialectique : l'une représentée par l'école française (Moscovici, Gorz, Illich...) et l'autre par l'école allemande (Jonas, Anders, Beck...). Ces deux polarités s'accordent sur l'origine du problème : l'autonomie de la rationalité instrumentale et le mécanisme automatique du progrès. Là où ces deux écoles ont divergé c'est sur le rôle de la science dans la manière d'y répondre.
...

La psychologie sociale n'est pas une psychologie marxiste, qui affirmerait la primauté du social. Ce n'est pas non plus une addition de psychologies individuelles. Elle est bien autre chose. Cette discipline a pour vocation de devenir une anthropologie du monde contemporain. C'est une science de l'irrationnel, son objectif est de comprendre « pourquoi les hommes font des choix irrationnels et les optimisent, malgré tout ce qui devrait les en dissuader » (Moscovici 2000a : 210). Elle a pour objet d'étude, comme matière première, ce que précisément le mouvement écologique devait porter en son sein : la connaissance et le sens commun.

Le désenchantement du monde, la grande opération de rationalisation, est une gigantesque opération d'élimination. Car rationaliser ne signifie rien d'autre qu'éliminer. Eliminer les valeurs religieuses, les symboles, les traditions, la croyance, la subjectivité. « Il existe une solide croyance selon laquelle la pensée scientifique doit remplacer la pensée profane et la tradition populaire. En d'autres termes, la diffusion et la socialisation de la science visent à remplacer et à éliminer la connaissance profane et toutes les formes communes de connaissance. Cette croyance hante également le marxisme et le libéralisme, ainsi que les pratiques d'aujourd'hui en matière d'éducation, qui semblent former le prérequis de la rationalité moderne » (Moscovici 2013 : 22). Tout ce qui est considéré irrationnel est exclu, condamné, diabolisé, considéré comme le reliquat d'une époque révolue. « Je pense que l'on peut parler d'une rationalité obtenue par des négations successives de sociabilités vivantes et dont les stigmates sont dénoncés au cours de la glaciation progressive des valeurs et des sentiments collectifs » (Moscovici 2015). C'est ainsi que notre époque se singularise par la possibilité de prononcer le verdict de mort et de pronostiquer la fin de tout.
La fin de l'histoire, la fin de la société, la « fin de l'homme » (Fukuyama)... Les marxistes « étaient convaincus que la connaissance spontanée devait être dépouillée de ses irrationalités idéologiques, religieuses et populaires, et remplacée par une vision scientifique de l'homme, de l'histoire et de la nature » (Moscovici 2013 : 237).

Quant à la position libérale, « l'objectif était de transformer tous les hommes en scientifiques, de les amener à penser de manière rationnelle. Paradoxalement, dans le même temps, chacun considérait la diffusion de la connaissance scientifique sous la forme d'une science publique et populaire – la vulgarisation de la science – comme une dévaluation et/ou une déformation de cette connaissance » (Moscovici 2013 : 237). De Machiavel à Marx, de Diderot à Auguste Comte, dans l'époque moderne la connaissance commune est synonyme de carences et dysfonctionnements. Les héritiers des Lumières partagent tous l'espoir que le savoir scientifique viendra progressivement corriger les erreurs du savoir populaire, jusqu'à son remplacement total par l'ultime vérité. ... En conséquence, « le surnaturel, écrit Maupassant (1881), baisse comme un lac qu'un canal épuise ; la science à tout moment recule les limites du merveilleux ». L'idée persiste que cette élimination du merveilleux finira par faire « place nette » pour une société enfin moderne, libérée des illusions qui lui font confondre la réalité avec les ombres obscures de la caverne. Mais pour Moscovici (1995) c'est tout le contraire : « c'est en renonçant à faire place nette que l'on parvient à traduire la science en une croyance et un sens commun partagés, à transformer les structures actuelles de la raison en une seconde nature, inconsciente, susceptible d'agir comme des passions collectives et des normes morales ». La science se diffuse donc dans le sens commun mais ne l'élimine pas ni le remplace.
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Les représentations sociales se forment par des influences, des allers-retours entre la délibération scientifique et l'expérience ordinaire. Il existe donc un décalage entre une théorie scientifique et sa représentation et ce serait une erreur de croire qu'elle est due à l'ignorance du public. Le marxisme, la psychanalyse, la génétique ou la relativité, toutes ces théories ont connu une diffusion et une métamorphose analogues. Notre comportement et nos opinions sont influencés par la pression qu'effectuent nos représentations sociales sur notre jugement individuel et ce afin de maintenir un ordre social stable. Cela correspondrait « à une exigence plus profonde de la société, cherchant à se prémunir contre des changements brusques et des mouvements intempestifs d'opinion » (Moscovici 2000a : 228). Les possibilités d'action, de transformations et de créations sont donc à rechercher du côté du pouvoir des minorités actives, dans le rapport entre la conformité (l'ordre majoritaire) et l'innovation (l'influence minoritaire).
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Comment soulever les foules ? Quel est le ressort de l'action collective ? C'est la passion, bien sûr ! Mais bien que nous le sachions, nous continuons de penser qu'il suffit de faire une démonstration rationnelle pour faire agir. « Prouvez ! Et nous croirons » s'écriait Condorcet. En réalité, nous devrions plutôt dire : « Prouvez que nous pourrons en tirer un avantage ! et nous croirons »...
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Alors il existe, aux antipodes la pensée jonassienne, « une méthode écologiste, qui n'est ni prophétie, ni militantisme, ni bourrage de crâne. C'est le dégel d'une pensée assommée et le réveil de sensations anesthésiées, c'est la conversion des consciences à un monde familier auquel on ne faisait plus attention, qu'on ne voyait plus à force d'habitude » (Moscovici 2002a : 31-32). Tout comme la psychologie sociale, l'écologie doit avoir comme objectif de s'appuyer sur le sens commun, elle doit « rendre visible ce que les autres ne savent plus voir, faire sentir ce à quoi ils ne sont plus sensibles ». Elle se trompe et s'appauvrit en s'abritant derrière l'autorité scientifique. « Un des ressorts de base de l'influence minoritaire, c'est qu'au départ, les gens disent que c'est utopique » (Moscovici 2000b). Ils trouvent cela absurde. Ils la tournent en dérision. Puis les utopies deviennent la norme. Parfois elles échouent ou n'ont pas d'effet apparent. C'est précisément le signe de leur efficacité.
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Malgré la grande diversité des modes expériences de nature, les travaux qui intéressent aux liens entre expériences de nature et comportements pro-environnement se sont surtout focalisés sur la connaissance.
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Vidéo de Cynthia Fleury
En lien avec l'exposition «La France sous leurs yeux. 200 regards de photographes sur les années 2020», une table ronde réunit quatre auteurs qui échangent sur les nouvelles représentations de la France contemporaine.
Quatre auteurs ont été invités à regarder les travaux produits par les 200 photographes de la grande commande nationale pour le photojournalisme et à rédiger quatre essais dédiés chacun à une notion de la devise nationale, convoquant journalisme (Liberté par Pierre Haski, journaliste), philosophie (Fraternité par Cynthia Fleury, philosophe et psychanalyste), histoire (Égalité par Judith Rainhorn, historienne, et Potentialités par Pierre Charbonnier, philosophe). Ils échangeront sur les nouvelles représentations de la France contemporaine.
Table ronde animée par Sonia Devillers, France Inter, membre du jury de la grande commande pour le photojournalisme
Plus d'informations sur l'exposition «La France sous leurs yeux. 200 regards de photographes sur les années 2020» : https://www.bnf.fr/fr/agenda/la-france-sous-leurs-yeux
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