Ce livre répondait-il à un besoin? Il nous l'a semblé. Il nous a semblé qu'il était temps de faire sortir la poésie des troubadours des nécropoles scientifiques que sont trop souvent nos revues, nos collections et nos dissertations, pour la produire au grand jour. L'étude des troubadours a profité du développement des études romanes. Plusieurs éditions ont paru, d'autres sont en préparation; certaines parties de l'histoire littéraire ont été traitées à fond. Ce sont les résultats de ces divers travaux que nous avons voulu résumer. Après tout les troubadours n'ont pas écrit pour que leurs oeuvres deviennent des sujets de thèses de doctorat ou de discussions académiques. Ils ont écrit pour le public, pour un grand public où les femmes d'intelligence et de coeur formaient la majorité et où régnait le culte de la poésie. Malgré la différence des temps et des moeurs, ce public ne doit pas avoir complètement disparu du moins nous ne le croyons pas.
La tentation est grande d'expliquer par une survivance des traditions littéraires la naissance de ce mouvement poétique. La poésie des troubadours serait l'héritière de la poésie latine de la décadence. Une explication de ce genre paraît même si naturelle qu'on pourrait être porté à s'en contenter tout d'abord et à n'en point chercher d'autre. Cependant la vérité paraît être bien différente. Nous essaierons de la dégager après avoir délimité le domaine linguistique de l'ancienne langue d'oc. La question des origines sera plus claire après cet exposé.