Si l'auteur a réussi à exposer l'ampleur de la violence par arme à feu aux États-Unis et à en cerner son origine et son évolution catastrophique, je trouve que son approche est beaucoup moins convaincante en ce qui concerne la mise en place de mesures concrètes pour endiguer ce fléau.
À la page 72,
Paul Auster note : "...l'immense problème... ne sera pas résolu par la promulgation de nouvelles lois ou l'abrogation d'anciennes, ni en faisant passer de mesures de sécurité novatrices au Congrès."
L'auteur compare même l'éventualité de la suppression du fameux deuxième amendement de 1791 à la Constitution, qui permet au peuple le droit de détenir et de porter des armes, à la situation qu'a entrainée le vote du dix-huitième amendement relatif à la prohibition des boissons alcoolisées en 1919. Une telle législation aurait, selon lui, les mêmes effets contraires et une augmentation de la criminalité.
En d'autres termes,
Paul Auster craint qu'une réglementation stricte des armes à feu ne serait pas acceptée par une large partie de la population et provoquerait un retour à une Amérique du grand banditisme d'un
Al Capone, Meyer Lansky ou Lucky Luciano !
Ne rien entreprendre au niveau des autorités fédérales américaines et laisser des tarés munit d'armes automatiques ou semi-automatiques, acquis par ailleurs le plus légalement au monde, organiser un bain de sang dans un magasin, une église ou une école, n'est sûrement pas la solution.
Cela me fait penser à la réaction du président Trump au massacre de 26 personnes tuées le 5 novembre 2017 dans une église de Sutherland Springs au Texas par Devin Patrick Kelley : il s'agit d'une question de problème mental pas d'armes ("This isn't a gun situation."). le jeune tueur, 26 ans, trimbalait un fusil d'attaque semi-automatique et avait un casier judiciaire.
Un mois avant, le 1er octobre 2017 à Las Vegas lors d'un festival de musique, Stephen Craig Paddock avait causé avec le même genre d'arme la mort de 58 personnes et en avait blessé 257.
Le 10 mars 2018 sur Babelio dans une critique du livre de
Dana Loesch "
Hands Off My Gun !" (Ne touchez pas à mon arme), j'ai eu l'occasion d'expliquer mon incompréhension du pouvoir qu'exerce aux États-Unis la "National Rifle Association" NRA (rifle = fusil), l'association des défenseurs d'armes à feu et du deuxième amendement, qui finance allègrement les campagnes électorales des Républicains et dont cette sexy
Loesch, une amie de Trump, a été la porte-parole (2017-2019) et en reste la coryphée.
Je ne vais pas reprendre ici mes arguments contre cette association, qui empêche toute initiative politique susceptible d'avoir un impact sur le commerce d'armes à feu et me permets de vous renvoyer à mon billet, dont les conclusions demeurent hélas toujours valables.
Depuis 2013 existe un site sur internet, "Gun Violence Archive" GVA, qui publie consciencieusement toutes les données par rapport à des fusillades de masse (faisant au moins 4 victimes). On peut y lire que de 2019 à 2020 le nombre annuel est passé de 417 à 611 cas et le nombre de victimes de 15.448 à 19.411.
Malgré mon avis différent de l'auteur quant aux initiatives législatives à prendre, je peux vous recommander ce livre de
Paul Auster, qui présente de façon claire et précise la tragédie des abus d'armes à feu et parfaitement bien illustré par les 101 pages de photos (sur les 208 de l'ensemble) prises par
Spencer Ostrander d'une trentaine de sites après une tuerie, comme témoins silencieux d'une réalité inacceptable.