On peut conclure de ce panorama que si la violence semble attesté à toutes les époques de la préhistoire et de l'histoire, de par l'agressivité mal contrôlée de certains mâles humains, la guerre telle que nous la connaissons, y compris chez les sociétés traditionnelles, n'est le propre que de sociétés déjà nettement hiérarchisée, à savoir en Europe celles dites de l'Age de bronze, à partir du IIIe millénaire au plus tôt. La guerre est indissociable de l'émergence des chefs, et elle s'accompagne de nouvelles représentations idéologiques exaltant en retour les chefs et les armes. Les guerres sont-elles désormais l'horizon indépassable de l'humanité, malgré tous les traités de paix et toutes les procédures d'arbitrage ? On peinerait à trouver, depuis la Seconde Guerre mondiale, la plus meurtrière de l'histoire humaine, plusieurs années de paix consécutives sur l'ensemble du globe. Les armes ne sont-elles pas l'un des commerces, légaux comme illégaux, les plus prospères de la planète ?
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Cette rapide revue de l'émergence de l'agriculture et de l'élevage à travers le monde montre les différences comme les similitudes. Il a fallu à chaque fois un enchevêtrement de causes, entre conditions environnementales, capacités techniques et choix culturels. A chaque fois de petits groupes de chasseurs-cueilleurs ont été en situation de pouvoir se sédentariser, puis de pratiquer une petite agriculture ou horticulture d'appoint, en même temps qu'ils se familiarisaient avec certains animaux, le premier ayant été le plus souvent le chien à partir de canidés sauvages. Puis le nouveau mode de vie, au fil des siècles, s'est généralisé, débordant par colonisation ou par emprunt de sa zone d'apparition, pour absorber ou refouler, sinon exterminer ceux qui continuaient à vouloir pratiquer chasse, pêche et cueillette.
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Comme on sait, le mot "travail" vient du latin tripalium, qui désignait un instrument de torture destiné aux esclaves.
On est française ou français parce que l'on se sent et se revendique française ou français. Il n'y avait pas de "Français" il y a deux mille ans, et il n'y en aura certainement pas dans deux mille ans. Seul compte notre souhait de vivre ensemble, ici et maintenant.
De ce point de vue, les chasseurs-cueilleurs qui ont pu être observés avant leur anéantissement ne consacraient en moyenne que trois heures par jour à l'acquisition de leur nourriture, soit vingt et une heures par semaine, le reste du temps étant voué au loisirs.
Conférence proposée par le Conseil Scientifique
Intervenant:
Jean-Paul DEMOULE, préhistorien et professeur émérite à Paris 1
Panthéon-Sorbonne
Si l'on ne connaît pas de pratiques funéraires de la part de nos cousins primates ni des formes humaines les plus anciennes, des homo erectus en Espagne et des homo naledi en Afrique du sud ont entrepris il y a quelque 300.000 ans de déposer les morts de leur communauté dans des grottes, au fur et à mesure des décès. Puis les hommes de Néandertal, tout comme les premiers sapiens, ont commencé à creuser des tombes, déposant parfois des objets auprès du défunt, indice probable de croyances en un au-delà de la mort. Avec le néolithique et la sédentarisation des vivants, les morts aussi se sédentarisent dans les premières nécropoles, tandis que les pratiques funéraires ne cessent de s'enrichir, reprises des ossements ou modelage d'un visage d'argile sur le crâne récupéré du défunt. Les sociétés agricoles se hiérarchisant, les morts importants emportent aussi des richesses nouvelles, quand on ne leur construit pas d'imposants monuments mégalithiques, affirmation de la puissance des dominants. de fait, les tombes, en associant un individu aux objets témoignant de son statut, sont-elles des documents essentiels pour la compréhension des sociétés passées – même s'il existe malheureusement (pour les archéologues) des pratiques funéraires qui ne laissent que peu ou pas du tout de traces.
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