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EAN : 9791035610005
160 pages
Le Serpent à plumes (30/08/2018)
3.67/5   21 notes
Résumé :
Nous sommes en 2015, en Afrique du Sud. Des années durant, Masechaba a souffert de douleurs chroniques liées à une endométriose. Le sang a forgé son caractère, non seulement il a fait d'elle une personne solitaire, presque craintive, mais il l'a aussi poussé à devenir médecin. Quand débute le roman, elle est interne dans un hôpital. Dans le flux ininterrompu des patients, elle s'interroge sur sa capacité à les aimer tous, à leur donner toutes ses forces, tout son dé... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Existe t-il une seule femme au monde qui ne déteste pas avoir ses règles ? Pour Masechaba qui souffre de menstruations anormalement abondantes, longues et douloureuses, les saignements honnis ont conditionné sa vie dès l'adolescence. Impossibilité d'exercer une activité physique, peur constante de la tâche honteuse, évanouissements dus à l'anémie, ... Masechaba a donc un rêve secret : devenir médecin afin de rencontrer un ou une collègue qui acceptera de lui pratiquer une hystérectomie et la débarrassera enfin de son utérus.

Après avoir subit une endométrectomie les saignements et douleurs sont un lointain souvenirs. Devenue médecin elle peut enfin commencer à vivre. Ses illusions sont rapidement brisées en morceaux lorsqu'elle est confrontée à la réalité du système de santé sud-africain. Heures de travail interminables, fatigue, pauvreté des patients, racisme du personnel et des patients,... Sans s'en rendre véritablement compte, la désillusion la fait peu à peu sombrer dans la dépression.

Sa vie connaît un réellement changement lorsqu'elle rencontre une interne zimbabwéenne, Nyasha, et quitte sa mère pour emménager avec elle. Dans une Afrique du Sud où les tensions raciales sont encore loin de faire partie du passé, Nyasha qui hait les blancs et les accuse de tous les maux éveille la conscience de Masechaba et lui ouvre les yeux sur la xénophobie latente qui ronge la société sud-africaine. Mais en prenant la défense des victimes, Masechaba s'expose à la violence des siens.

Un roman court mais incroyablement intense, fort, cru et douloureux qui aborde des sujets difficiles : la maladie (physique et mentale), le racisme, la violence, le viol.. Écrit sous la forme d'un journal intime adressé à Dieu, Masechaba y dévoile sans interdits ses pensées les plus intimes.

Avec ce roman Kopano Matlwa délivre un message féministe. Non les femmes ne sont pas vouée uniquement à souffrir, et leur existence n'est pas conditionnée par les organes génitaux avec lesquels elles sont nées.
L'autre versant du roman est social, et explore la xénophobie dans l'Afrique du Sud post-apartheid. . L'auteur dresse un portrait assez sombre de l'Afrique du Sud dont les crimes liés aux tensions raciales alimentent régulièrement la colonne des faits divers.

Ce roman est un coup de coeur. Je suis tombée sous le charme de la plume de Kopano Matlwa. Une écriture simple mais rageuse et percutante.



*lecture en VO -édition britannique-*
A noter que contrairement à l'édition sud-africaine qui s'appelle "Period pain", l'édition britannique de l'ouvrage est titrée "Evening primrose" du nom anglais de l'onagre. L'huile essentielle issue de cette plante est utilisée pour réduire les douleurs pré-menstruelles. le titre anglais a également un sens caché que l'on découvre à la fin du livre.
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Mises en garde: viol, violence, sang, suicide, racisme
L'histoire: Ce court roman prend la forme d'un journal intime qu'une jeune femme nommée Masechaba adresse à Dieu. Elle y parle de ses douleurs, ses angoisses et de son viol très ouvertement et pose des questionnements très légitimes quant à la violence et au racisme présent en Afrique du Sud post apartheid.

Mon avis: wow. Ce court roman m'a fait l'effet d'une petite bombe. Je suis une lectrice qui lit énormément au feeling et je ne connaissais ni l'auteure ni le roman quand il a attiré mon attention à la bibliothèque. Lorsque je l'ai commencé, je l'ai fini en deux heures, je l'ai dévoré.

Dès le début du roman, on rencontre une femme qui souhaite plus que tout être libre, mais qui se sent prisonnière et limitée par son propre corps ainsi que par sa famille. Il a été vraiment facile de me mettre à sa place, car elle situe très bien ses relations sociales ainsi que l'histoire et la culture de son pays qui influence la manière dont elle pense et conçoit les choses.

La partie où elle parle ouvertement de son viol m'a énormément touchée. Les questionnements qu'elle se pose sont des questions que toutes les femmes victimes de violences sexuelles doivent se poser. Qu'ai-je fait pour mériter ça? C'est la nature humaine d'essayer de trouver des raisons aux événements qui se produisent. Hors, parfois et même souvent, il n'y en a pas.

Elle amène également une vision très réaliste et honnête de son travail de médecin et j'ai trouvé cela rafraîchissant. Il est bon de voir des personnages qui sont vrais et qui n'ont pas toujours les bons comportements dans les situations qu'ils vivent: ils sont humains, ils ont des défauts. Et c'est ce qui les rend si beaux et qui permet aux lecteurs de s'identifier à eux.

La seule raison pourquoi ce livre n'a pas tout à fait atteint le 5 étoiles de ma part fut les quelques passages que j'ai trouvé plutôt arriérés et sexistes, mais je comprends également l'auteure dans ses choix.

Bref, j'ai adoré ma lecture et je recommande ce livre à n'importe qui, sauf si vous êtes sensibles aux avertissements notés plus hauts.
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Quelle déception que ce roman dont l'incipit semblait si prometteur.
On trouve pourtant dans les premières pages une touche d'humour et de second degré qui vient contrebalancer le désespoir et la douleur de Masechaba, atteinte d'une endométriose : "Je priais sans relâche pour que le Dieu qui avait ouvert la mer Rouge et l'avait asséchée pour le peuple Élu puisse envisager de m'accorder sa bénédiction en m'octroyant une saison de culottes sèches".
Cette touche d'humour m'est apparue comme la bonne idée de ce roman, une force d'opposition à la tristesse, au discours ambiant et misérabiliste sur la maladie, sourire doucement plutôt que pleurer.
Mais voilà, notre personnage rencontre un à un les déboires de l'existence humaines et se perd dans les questionnements de l'âme humaine : être un bon médecin, être une bonne amie, affronter le deuil, subir l'apartheid et surtout l'épuisement, fini le deuxième degré, on suit des états d'âme de plus en plus sombre.
Qu'il soit donné à une jeune femme médecin de nous livrer ses doutes face au système médical, face à ses choix, face à la politique et face à la terrible loi de la vie et de la mort ne manque pas d'intérêt, mais que nous sombrions page après page dans une profonde dépression face au monde cruel et à nos incertitudes -dépression qui atteindra son apogée dans un viol collectif-, quelle horreur !

Roman à déconseiller sauf si vous aimez la dépression et les crises d'angoisse. Dommage...
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Née à Prétoria en Afrique du Sud, Kopano Matlwa n'est pas seulement une enfant de l'ère Mandela, elle est également médecin et écrivaine déjà remarquée pour son premier ouvrage, Coconut, consacré au parcours de deux femmes noires évoluant dans des milieux sociaux différents. Si l'on attend toujours la traduction française de Spilt Milk, c'est aujourd'hui son troisième roman, Règles douloureuses, qui trouve le chemin des librairies française grâce aux éditions le Serpent à plumes et à la traduction signée Camille Paul. Un livre court (à peine 150 pages) mais d'une densité remarquable et d'un réalisme poignant.

Être une femme en Afrique du Sud
L'héroïne de Règles douloureuses n'est autre qu'une jeune femme médecin (coïncidence ?) qui travaille en tant qu'interne dans un hôpital public sud-africain. Si le récit va très vite se recentrer sur la question médicale puis religieuse, le roman de Kopano Matlwa parle avant tout de la condition féminine en Afrique du Sud en 2015. Avec ses superstitions et ses croyances, Masechaba doit affronter son propre corps avec ces règles abondantes et douloureuses qui lui font honte. Hantée par les imprécations d'une mère qui pensent que la jeune fille n'honorent pas ses ancêtres comme il faut, elle découvre petit à petit qu'elle souffre d'endométriose et que si les saignements seront maîtrisés par une opération radicale (une ablation de l'endomètre, la muqueuse tapissant l'utérus), les douleurs, elles, ne lui offriront aucun répit. Sans tabou, Kopano Matlwa parle de la souffrance de cette jeune femme qui doit se battre à la fois contre son propre corps mais aussi contre les regards extérieurs. Pourtant, en un sens, c'est cette souffrance qui va décider de son avenir : Masechaba sera médecin.

Médecin sans moyen
Second malheur pour Masechaba, elle découvre trop tard que la médecine en Afrique du Sud est conditionnée par l'argent. Dans son hôpital, les patients pauvres se contentent de ce qu'ils ont et meurent faute de mieux. Kopano Matlwa parle alors de quelque chose d'éminemment difficile : la confrontation entre la volonté du soignant et son manque de moyens matériels. On découvre avec Masechaba le calvaire moral d'une telle situation qui détruit petit à petit le moral et la santé du soignant réduit à l'impuissance. D'une terrible lucidité, l'auteure Sud-Africaine regarde l'état de pauvreté et de dénuement de son héroïne pour évoquer une situation sanitaire et humaine effroyable. Pourtant, au milieu, Masechaba veut mieux, pour elle et pour les autres. le problème, c'est qu'elle se heurte alors à l'autre grand problème posé par son choix de carrière mais également par le poids de l'Histoire : le racisme.

Pour la suite de la critique : https://justaword.fr/r%C3%A8gles-douloureuses-84a9c2caa2d4
Lien : https://justaword.fr/r%C3%A8..
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Masechaba est une jeune Sud-Africaine. Comme les autres. À quelques gouttes près. 💦
Son sac à main est rempli de serviettes, de tampons. Pas un, de secours, au cas où. Non. Des dizaines. Qui a besoin de tout cela ? 💉🌡

Une jeune femme, qui souffre. Qui vit dans la peur, la crainte. Sa phobie à elle a l'aspect d'une tache, l'odeur de fer, et une couleur qu'elle reconnaîtrait entre mille.
Elle se souvient, honteuse, de cette fois où son frère avait nettoyé ce siège, victime malheureuse de son passage dans cette voiture. Elle avait fait l'erreur de s'y assoir. le rouge de prendre ce tissu pour bavoir. 💉🌡

Rouge. Rouge d'un sang qui coule bien plus qu'il ne le devrait. D'un rouge qui va conditionner sa vie de femme, et lui forger ce caractère, cette envie d'être médecin, d'aider, de soigner les autres. 💉🌡

La maladie est évoquée, sans jamais tomber dans un discours médical complexe. On s'intéresse à la manière dont elle a régie les différentes facettes de la vie de Masechaba.
À commencer par son métier. La santé. L'aide. Être utile. Des envies auxquelles vont très vite se confronter la réalité du système et de la société Sud-Africaine.
La désillusion est dure. le désespoir et le découragement immense. 💉🌡

Écrit sous la forme d'un journal intime adressé à Dieu, la deuxième partie du roman nous donne envie de le secouer, ce Dieu. 💉🌡

C'est un court roman engagé, qui éclaire sur beaucoup de sujets, du racisme d'une société marquée par l'apartheid et son histoire, aux gestions désastreuses de patients mourants.
Le portrait de cette société, c'est une révolte. 💉🌡

À lire pour l'humanité qui se dégage du texte.
Règles douloureuses est sortie depuis le 30 août aux éditions @leserpentaplumes !
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
J’ai décidé d’arrêter tous mes traitements. Je suis fatiguée. J’ai fini par aimer ce mince filet de sang qui s’écoule de mon corps jour après jour. Il teinte l’eau du bain d’une jolie couleur rose. Parfois, quand un petit caillot s’échappe, l’eau devient marron foncé.
La partie molle de mon ventre est chaude et me picote. Je me sens si mal que je suis souvent obligée de m’asseoir pour ne pas m’évanouir. C’est une sorte de douleur, une sorte de plaisir, une sorte de liberté que j’aime et que le traitement du docteur Phakama a essayé de me dérober. Mais cette sensation est à moi, et elle est agréable, et je la veux.
Les murmures qui m’accompagnent ne me gênent pas non plus. Ils me tiennent compagnie, me chantent des chansons et me racontent des histoires qui font passer le temps. Ton silence était de toute façon bien trop assourdissant.
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Si j'en ai retiré quelque chose, c'est l'humilité. J'avais une haute idée de ma personne. Je me trouvais spéciale, immunisée, exceptionnelle.
Me disais que ce genre de choses ne m'arriverait pas. Mais ce n'est pas le cas. Je ne suis qu'un viol sud-africain de plus dans les statistiques. Mon histoire n'a rien d'exceptionnel, cela se passe partout, tous les jours. Que je sois hautement diplômée, que je sois médecin, que j'ai lancé une pétition relayée par la presse, rien de tout cela n'a d'importance.
J'ai un vagin. C'est tout ce qui importe.
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Ma dit que je dois laisser les patients là-bas. Je dois me mettre à leur place mais ne pas leur donner de place chez moi. Alors je les y laisse, coincés entre les draps sales et le sandwich caché dans l’attente du jour où ils auront retrouvé l’appétit, entre des toilettes bardées de merde et le distributeur de savon qui n’a fonctionné qu’une fois, le jour de la visite du ministre. Mais je ne parviens pas à me mettre à leur place. Ils n’ont pas de place, Ma. Comment est-ce que je peux me mettre à leur place alors qu’ils n’en ont pas ?
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'J'ai été violée'.

Le docteur Phakama insiste pour que je prononce cette phrase à voix haute. Elle dit que ça aide. Elle dit qu'en mettant l'événement au passé je peux le surmonter.

C'est bien beau, mais quand c'est ta vie, la distinction n'est jamais aussi claire. Je continue d'être violée, même en ce moment, même quand je ne le suis pas. Je ne peux pas dire quand le premier s'est arrêté et quand le suivant a commencé. Je suis en train d'être violée.
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Je pense à l’infirmière du Patient anglais. Peut-être que si je m’étais occupé de mes patients autant qu’elle du sien ? Mais elle s’est aussi glissée dans son lit. Est-il possible de les aimer et de les laisser là où ils sont ? Est-il possible de les aimer sans marquer son cœur ? Un cœur a-t-il assez de place pour accueillir toute leur douleur (et la sienne propre), leurs os brisés (et sa propre âme en miettes), leur gêne (et sa propre honte) ?
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Vidéo de Kopano Matlwa
Pierre Bisiou présente Kopano Matlwa - Règles douloureuses
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