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Waël Rabadi (Traducteur)Isabelle Bernard (Traducteur)
EAN : 9782330163846
256 pages
Actes Sud (06/04/2022)
2.56/5   9 notes
Résumé :
Rayyane est une adolescente koweïtienne née avec une déformation de ses organes sexuels, d'origine génétique, et qui vit depuis l'enfance avec le sentiment confus d'être un garçon.
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Ce roman qui aborde sans équivoque la question du genre dans son titre, a eu le mérite de susciter un débat sur la transidentité au Koweït et plus généralement au Moyen Orient. On ne peut donc que saluer une démarche qui permet de faire sauter les tabous autour des sexualités.
Apparemment inspiré d'une histoire vraie, il ne s'agit pas cependant du récit d'une personne concernée par la transition mais d'un roman, écrit par un écrivain - journaliste, qui s'est auparavant intéressé à la condition féminine au Koweit.
Personnellement, j'ai dans un premier temps abordé Hâpy comme un témoignage, d'autant plus facilement que j'ai trouvé le roman très mal écrit et très mal construit ( ce qui pouvait se concevoir s'agissant du journal d'un adolescent perturbé par les épreuves).
Mais ce qui m'a davantage inquiétée, c'est le nombre d'imprecisions, de confusions et d'amalgames rencontrés au cours de ma lecture.

Rayyane, soutenu par sa mère et sa meilleure amie Jawa, s'inquiète au moment de la puberté de ne pas avoir ses règles et se questionne sur son identité de genre, puisque depuis l'enfance il regrette de ne pas être un garçon. Il décide de procéder à des analyses médicales pour comprendre l'origine de son malaise et apprend que son taux hormonal correspond à celui d'un garçon, puis on lui annonce qu'il est atteint d'une anomalie génétique et qu'il n'a ni utérus, ni ovaire.
Pourtant, l'intersexuation n'est jamais évoqué, ni par les médecins, ni par les recherches sur Internet. Ni par l'auteur hors fiction, bien sûr.!
Ainsi Taleb Arelfai confond allègrement les personnes intersexes et les personnes transgenres.
Cette confusion est inadmissible à notre époque, surtout lorsque l'on entreprend d'écrire sur un sujet aussi intime.

Tout au long du roman, cette confusion sera portée par les différents personnages et par Rayyane lui-même. Pire encore, comme le souligne fort justement soeurcierelitteraire, la transidentité est associée à la maladie et la solution est nécessairement chirurgicale.
Ces "malformations de l'appareil génital", ces bébés "qui paraissent normaux" à la naissance, cette "défaillance des enzymes" nous plongent dans le registre de la maladie et de la tare physique. Diagnostic d'autant plus perturbant qu'il est lié à la consanguinité et que l'on apprend que les parents sont cousins.
De même, la mère utilise fréquemment dans son argumentaire la comparaison avec la malformation cardiaque de son petit-fils. Si on peut soigner sa maladie à l'étranger, alors Rayyane doit pouvoir également bénéficier d'une opération pour guérir. En s'appuyant sur une fatwa, elle peut consolider sa démonstration : " Il s'agit d'une maladie et, par une thérapie adéquate, on peut en guérir. Il ne s'agit nullement de changer les créatures nées de la main de Dieu."
Elle va même jusqu'à prendre en charge une part de responsabilité par la superstition en racontant à son fils que pendant toute la grossesse, elle était persuadée d'avoir un garçon et que ses convictions ont pu perturber son identité.

En ce qui concerne l'approche de l'homosexualité, le regard est également équivoque. Rayyane se réjouit d'être finalement un garçon parce qu'il échappe ainsi à la honte d'être homosexuel. Lorsqu'il a commencé sa transition et qu'il reçoit des lettres d'amour d'un garçon, il s'exclame à plusieurs reprises " Quel drame !". Ce même garçon, affublé d'un surnom péjoratif, Samir le mou, reproduit les clichés de l'homosexuel, il se parfume, écrit des lettres roses, a les larmes aux yeux lorsqu'il s'adresse à lui, et fait l'objet de moqueries de la part des lycéens.

Ainsi d'une démarche qui semble progressiste, on parvient à un discours transphobe et homophobe. S'agit-il de malhonnêteté intellectuelle, d'ignorance ou de préjugés enracinés ?
On ne peut en effet proposer un discours cohérent et respectueux lorsque l'on traite le sujet avec une telle désinvolture et une vision aussi approximative.
Taleb Arelfai confond allègrement orientation sexuelle, identité de genre, sexe biologique et expression de genre. Et c'est grave lorsque l'on prétend être porte-parole d'un transgenre au Koweit.
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TW : TRANSPHOBIE, HOMOPHOBIE

Note : lorsque j'emploie des guillemets, j'utilise les termes problématiques du livre

Rayyane est un jeune homme assigné fille à la naissance. L'univers des garçons lui a toujours davantage parlé que celui des filles. À l'adolescence, ses règles tardent à arriver et des examens médicaux révèlent que Rayyane n'a ni utérus ni ovaires. Si la société le perçoit comme une fille, il est « diagnostiqué » (!) comme « génétiquement homme » et entame une hormonothérapie. Sa famille peine à le soutenir dans sa transition, certains membres le rejettent même complètement.

Il ne s'agit pas d'un récit own voice (écrit par une personne concernée) mais j'ai fait le choix de le lire pour plusieurs raisons :

- L'auteur, Taleb Alrefai, est Koweïtien. En francophonie, nous avons peu accès à la littérature du Koweït et j'espérais avoir un aperçu de la société de ce pays par une personne qui y est née et y a vécu.

- Surtout, le récit est présenté comme basé sur une histoire vraie. Et il est compliqué pour les personnes transgenres de se faire publier dans certains pays (c'est peut-être là le seul point intéressant soulevé par ce livre, à la toute fin). Après lecture, je m'interroge. de qui parle ce livre ? Est-ce seulement vrai ? Il n'y a aucun avant-propos, aucune note, aucune information sur le site de l'éditeur, aucune interview de l'auteur qui parle du processus d'écriture. C'est vraiment louche.

Quel est le problème avec ce livre ? (Ou plutôt : pourquoi ce livre est un problème ?) Tout d'abord, Taleb Alrefai semble n'avoir fait aucune recherche avant d'entamer l'écriture de ce roman. En effet, il y a grande confusion entre :

- personnes intersexes et personnes transgenres (nommées transexuelles)
- plus grave encore, entre transidentité et maladie !

L'identité de Rayyane est en effet assimilée à une maladie, dans ce cas précis une « malformation » causée par la consanguinité (ses parents sont cousins).

Ce roman alimente les conceptions, transphobes et homophobes, toxiques, dangereuses et erronées selon lesquelles :

- les personnes transgenres sont malades
- les personnes intersexes doivent être assignées à un sexe ou l'autre à travers la chirurgie
- l'homosexualité se soigne à travers une chirurgie de réassignation sexuelle. En effet, Rayyane ne ressent du désir sexuel pour les femmes qu'après avoir été « diagnostiqué » (!) homme et avoir été opéré du torse et des parties génitales (ce désir est extrêmement soudain, disproportionné et très orienté "male gaze")

Le roman est-il subversif et suis-je tout à fait passée à côté ? J'en doute sérieusement.

Ces idées ne sont pas inculquées à Rayyane par sa famille et la société. Elles proviennent de recherches sur Internet et de consultations médicales. Et surtout, Rayyane semble en tirer du soulagement : il n'est pas un « scandale » ou la « honte » de sa famille puisqu'il n'est « pas homosexuel » ou en train de faire un « caprice de jeunesse ». Il est malade au même titre que son neveu qui souffre d'une malformation cardiaque. Ceci semble également être la condition du soutien de sa mère : elle soutient son fils car il est malade.

Ce qui est paradoxal, c'est que le roman est extrêmement critique envers le fondamentalisme religieux et même tout simplement envers la religion musulmane. Il y a d'ailleurs des passages très, très limites, dont un tout simplement islamophobe qui assimile le port du hijab à de l'extrémisme religieux. de plus, tout au long du livre, son amie Jawa et sa mère, Américaines, sont érigées en sauveuses. En témoigne ce passage absurde dans lequel Rayyane loue leur tolérance qui serait génétique (!) :

« Est-ce que ce sont les gènes de sa mère qui conduisent sa langue, sa façon de penser et son comportement ? Ou bien était-ce l'éducation ? »

Ce sont elles qui encouragent Rayyane à consulter un médecin, ce sont elles qui le poussent à continuer ses études, c'est chez elles que le jeune homme se réfugie quand sa famille le rejette... Bref, de vraies héroïnes alors que la famille musulmane pratiquante de Rayyane baigne dans l'obscurantisme.

Pourtant, en assimilant la transidentité, l'intersexuation et l'homosexualité à des maladies, le roman alimente ce qu'il pourrait dénoncer... le problème n'est donc pas à situer dans la religion mais dans une transphobie et une homophobie profondément intégrées dans toutes les cultures, peu importe la confession, à tous les niveaux d'éducation, et justifiées par tout et n'importe quoi. Alors que Taleb Alrefai aurait pu évoquer les spécificités socio-culturelles de la transphobie au Koweït et le danger de mort qui plane sur les personnes transgenres qui y vivent, il se vautre complètement.

Pour ne rien arranger, même si au vu de tout ce que je viens dénoncer cela vous paraîtra sans doute dérisoire, j'ai trouvé le roman extrêmement mal écrit. Je ne comprends pas comment il a pu être édité chez Actes Sud. Taleb Alrefai use et abuse des points d'exclamation, les dialogues sont irréalistes, voire franchement absurdes. le roman se répète toutes les cinq pages, les images invoquées par l'auteur sont vraiment mauvaises (j'ai éclaté de rire à la lecture d'un passage dans lequel les assiettes sur la table sont « émues »).

En résumé, ce livre est mauvais à tous les niveaux. Il est mal écrit et mal construit et propage des informations mensongères. Il n'a rien de subversif et rien n'éclaire le contexte de sa création.

Surtout, ce livre est dangereux car il est transphobe et homophobe. Je m'interroge sur ce qui a pu décider à le publier dans un label aussi prestigieux que Sindbad chez Actes Sud. La confiance que j'avais en cette maison d'édition est brisée.
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Taleb Alrefai est publié depuis 2016 en France par Actes Sud, à raison d'un roman tous les 2 ans (il est l'auteur de 12 livres au total). Travaillant au Conseil national de la culture, des arts et des lettres, qui dépend du ministère de l'information au Koweït, ce poste lui permet sans doute de savoir jusqu'où ne pas aller trop loin dans ses écrits, vis à vis du pouvoir en place, sachant qu'il n'hésite pas à aborder des sujets sensibles dans son pays, comme la place des femmes ou le sort des travailleurs immigrés. Hâpy, sous titré Histoire d'un transgenre koweïtien, se présente comme une sorte de journal intime de Rayyane, une adolescente née avec une malformation de ses organes génitaux, et qui vit depuis l'enfance avec le sentiment confus d'être un garçon. Un parcours douloureux va la conduire jusqu'à plusieurs opérations, soutenue par sa mère et par sa meilleure amie, face à la désapprobation violente de son père et des soeurs. Bien qu'il soit signé par Taleb Alrefai, le roman, qui est censé être inspiré par une histoire vraie, ne peut que se lire que comme un récit à la première personne d'un jeune garçon, dont la candeur et les prises de position peuvent parfois surprendre, notamment dans ses réactions et ses pulsions. Il s'agit avant tout d'une expérience de vie, personnelle, qui brise sans aucun doute beaucoup de tabous au Koweït et dans laquelle Alrefai exprime aussi la réalité d'une société patriarcale et où la religion prend souvent le pas sur la religion, y compris dans le milieu relativement aisé dans lequel vit la famille de Rayyane. Peut-être est-ce un témoignage partiel et subjectif, contestable par ceux qui connaissent parfaitement le pays, mais on ne peut dénier à l'auteur un courage et une ténacité constante dans ses sujets, récompensés par la traduction de ses livres en plusieurs langues. Pour ce qui est de Hâpy, même si l'on n'a jamais été confronté de près ou de loin aux situations qui y sont décrites, il est tout bonnement impossible d'être insensible à la quête identitaire et aux souffrances, physiques et mentales, de son personnage principal. Et comme à son habitude, Taleb Alrefai use d'une langue simple et fluide qui convient parfaitement à l'histoire de Rayyane, qui se confie au lecteur comme à un(e) ami(e) silencieux(se) et bienveillant(e).
Lien : https://cinephile-m-etait-co..
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Faire passer la transsexualité comme une maladie à guérir est-elle la seule façon acceptable qu'un auteur du Koweït puisse trouver afin d'écrire sur ce sujet ? Les souffrances et la crise identitaire du personnage principal sont justifiées parce que les preuves biologiques et génétiques sont irréfutables, et ne peuvent donc pas être négociées ou réfutées. Il n'y a aucune réflexion sur la question du genre, et le roman est imbue d'homophobie et de transphobie même dans ses meilleurs moments. Au-delà du manque d'honnêteté et de nuance dans la description de cette expérience de transition si douloureuse, le roman ne fonctionne pas non plus en tant que journal intime tant le protagoniste manque d'agence dans ses choix et actions. Tout est fait pour lui par d'autres, tout au fil de l'histoire, sans exception. Chaque étape et chaque succès est le fruit d'un autre, et rien ne lui appartient sinon des monologues intérieurs sans conviction, répétitifs et restreints, dans la lignée de la plus mauvaise littérature adolescente. Les personnages sont tous stéréotypés : l'enfant prodige littéraire qui cite Dostoïevski, la soeur fanatique religieuse, le père adultère, la mère bafouée à l'amour inconditionnel, la meilleure amie entièrement dévouée et disponible. le fait qu'un auteur d'un pays autocratique et conservateur traite de ce sujet ne peut en aucun cas justifier l'ignorance et la bêtise, surtout quand elles sont mises en avant comme un progrès humaniste.
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Ce roman raconte l'histoire de Rayyane (le prenom est épicène), né garçon dans un corps de fille, au Koweït. Il grandit donc comme l'une des filles d'une riche famille de la capitale, malgré son malaise grandissant : il ne se sent pas fille, sans toutefois arriver à mettre des mots sur ce ressenti. Alors que Rayyane guette ses premières règles avec angoisse, il finit par passer une série d'examens médicaux et le résultat est sans appel : taux de testostérone très élevé, pas d'utérus...Rayyane est un garçon. Commence alors pour lui un parcours du combattant, non seulement médical mais aussi familial et sociétal. Il sera heureusement soutenu par Jawa, sa meilleure amie américano-koweïtienne et sa mère.

Ce roman m'a beaucoup touchée, car la détresse de Rayyane, qui se sent abandonné par ses proches, est palpable. Il pose aussi question : le fond du récit reste en effet assez conservateur, la transidendité de Rayyane étant justifiée par des données médicales par exemple. de plus, la religion est très présente, et Rayyane semble mettre beaucoup d'application à "penser comme un garçon"...Mais ne serait-ce pas, finalement, le reflet de la société koweïtienne ?
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'On the Map', 2012 : Taleb ALREFAI.
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