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Sharakhaï tome 1 sur 6
EAN : 9781028100798
Bragelonne (17/08/2016)
  Existe en édition audio
3.93/5   222 notes
Résumé :
Dans les arènes de Sharakhaï, la perle ambrée du désert, Çeda combat tous les jours pour survivre. Comme de nombreux autres, elle espère la chute des douze Rois immortels qui dirigent la cité depuis des siècles. Des souverains cruels et tout-puissants qui ont peu à peu écrasé tout espoir de liberté, protégés par leur unité d’élite de guerrières et les terrifiants asirim, spectres enchaînés à eux par un sinistre pacte. Tout change lorsque Çeda ose braver leur autorit... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (55) Voir plus Ajouter une critique
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Une excellente illustration de couverture de l'excellent Marc Simonetti, une bonne histoire servie par une plume agréable, un univers intéressant qu'on a envie de parcourir, une cité de caractère à la "Laelith" et une héroïne complexe et intrépide qui ne se laisse pas faire… Avec ce premier tome de fantasy orientale, les promesses sont tenues : l'ouvrage de Bradley Beaulieu est une bonne surprise, sans doute l'une des meilleures de ces dernières années. Ah ça ce n'est pas moi qui fait me fendre d'une critique random, du genre ce n'est pas un chef-d'oeuvre, blablabla ce n'est pas non plus le livre de l'année, blablabla cela ne révolutionne pas le genre, blablabla c'est classique donc pas original du tout, blablabla finalement c'est édité par Bragelonne donc c'est forcément de la daube… Non, pour la faire simple et sincère c'est situé entre la chouette vista de Brandon Sanderson et la noirceur complexe de Stella Gemmell, sans parler des cool réminiscences de "Dark Sun" et "Legend of the Burning Sands", et sans parler que dans un univers d'hommes les femmes occupent une place de premier plan en étant constamment le moteur du roman et constamment à l'origine des vents du changement !
Sharakhaï est un alter ego fantasy de Samarcande IRL qui pioche autant dans les contes et légendes arabo-musulmans des Mille et Une Nuits que dans la mythologie hébraïque de la Bible, et elle règne sur le désert du Grand Shangazi tout autant que sur les routes de la soie qui le traversent… Bien que l'auteur brouille les cartes et se garde encore de livrer toutes les clés de son univers, derrière Miréa, Malasan, Qaimir et les milles terres de Kundhun on peut deviner les ombres tutélaires de Rome, de la Perse, de l'Inde et la Chine… Toutes ces nations lorgnent sur les richesses de la cité tentaculaire, mais depuis plus de 400 ans elle vit sous la férule de douze rois qui ont obtenu la puissance et l'immortalité en passant un pacte de sang avec les Anciens Dieux lors de la bataille tragique de Bet Ihman contre les douze tribus du désert… (Mais l'Histoire est écrite par les vainqueurs, et à Sharakhaï personne à part les vainqueurs ne connaît l'horrible vérité sur ce qui s'est passé ^^) La perle du désert traverse ainsi les générations sous la chape de plomb d'Asad le Roi des Épines, de Cahil le Roi Confesseur, de Besir le Roi des Pièces, de Mesut le Roi Chacal, de Sukru le Roi Moissonneur, de Zehel le Roi des Murmures, d'Ilsan le Roi Éloquent, d'Onur le Roi des Lances, d'Husamettin le Roi des Lames, de Yusam le Roi aux Yeux de Jade, de Kulasam le Roi Errant et de Kiral le Roi des Rois. Ils font appliquer sans pitié leurs volontés grâce aux 144 Vierges Noirs, aux compagnies de Lances d'Argent et aux redoutables et redoutés asirim qui à chaque nuit de Bet Zha'ir quand les deux lunes sont pleines parcourt la ville pour prendre la vie des élus sacrifiés aux dieux…

Premier bon point on évite le sempiternel méchant millénaire : ils sont douze, ils sont cruels, prêts à tout et au reste pour conserver le pouvoir et l'augmenter (la vieille malédiction du pouvoir personnel), et indéniablement rivaux tant ils se tirent dans les pattes les uns les autres quand ils ne se manipulent pas les uns les autres. Mais ils font toujours front commun pour protéger leur cité des convoitises des tribus du désert comme des nations voisines, on nous explique qu'ils sont victimes du fardeau de l'immortalité donc constamment soumis au deuil et au chagrin de la perte des leurs, et que comme tout à chacun ils ont leurs espoirs et leurs craintes : le Roi des Lames est un guerrier sinon à un artiste martial pour qui l'honneur n'est pas un vain mot, le Roi aux Yeux de Jade est un voyant anxieux car hanté par ses visions de l'avenir… (J'avoue sans honte que mon propre projet de saga fantasy est basé sur les mêmes éléments).
Nous sommes dans un récit faussement choral car nous suivons par ordre d'importance décroissant les POVs de la quête de vengeance de Çeda l'inflexible, les mésaventures d'Emre le tourmenté, la quête de vengeance de Ramahd le taciturne et les manipulations d'Ihsan le Roi Éloquent… Encore que la cité elle-même est un personnage en soi, décrite avec soin avec ses bruits, ses odeurs et ses couleurs, ainsi qu'avec ses mœurs, ses modes et les différentes gastronomies de ses habitants (et c'est plutôt bien rendu à la traduction par le travail d'Olivier Debernard).
On suit le schéma narratif classique de la quête de vengeance, sauf qu'ici elles sont multiples, qu'elles s'entrecroisent, tantôt alliés tantôt ennemies, voire qu'elles sont imbriquées les unes dans les autres puisque quelque part elles marchent toutes dans les pas de celle Ahya impliquée dans une vendetta séculaire contres les Rois et les Dieux… Qui était-elle ? Quelles étaient ses motivations ? Pourquoi en savait-elle autant ? Pourquoi cherchait-elle à en savoir encore davantage ? Qui était ses alliés et ses ennemis ? Pourquoi s'est-elle rendue à ses adversaires héréditaires quitte à marcher vers son funeste destin ? Et pourquoi a-t-elle conçu une fille pour faire d'elle l'instrument de sa vengeance par-delà la mort ? et achtung spoiler, encore que cela soit pas trop dur à deviner si on suit bien l'histoire,

D'habitude je me superméfie des flashbacks (mauvais souvenir de la série "Lost", mais plus encore de "La République des voleurs" de Scott Lynch où les 300 pages de flashbacks n'avait aucune incidence sur le récit principal en plus de hacher l'histoire et de délayer la sauce), mais ici c'est passé nickel : en plus de prolonger le côté "Gladiator" du roman, ils sont courts, suffisamment espacés, et jouent le rôle d'interlude dans le rythme du roman tout en éclairant le passé de Çeda et d'Emre, de leur relation plein de non dits qu'on peut qualifier d'histoire d'amour mais qui va plus loin que cela, mais aussi celui de leur entourage (Pelam le laniste, Osman de mafieux, Tariq et Hamid ses sbires, Djaga la gladiatrice devenue batelière, Davud l'étudiant, Ibrahim le conteur, Hefaz le cordonnier, Hefhi le marchand de tapis, Dardzada l'apothicaire, Saliah la sorcière, Tehla la boulangère ou les jeunes Jein et Mala…)
L'auteur a aussi amené un éclairage intéressant sur le phénomène de la radicalisation : d'attentats de la résistance en représailles de la dictature, la violence s'est enracinée dans la population au point qu'on ne fait plus la différence entre les crimes aveugles exercés par les uns et par les autres. Çeda obnubilée par la vengeance n'est toutefois pas prête à l'exercer sur des innocents, et elle essaye de dissuader son ami d'enfance Emre de passer du Côté Obscur ; Ramadh est à mourir pour venger sa femme et sa fille tuées mais pas à tuer des innocent pour la Cause, mais il s'aperçoit que sa belle-soeur qui est passée du Côté Obscur et est prête à tuer un peuple tout entier pour trouver un exécutoire à sa haine… Les Hôtes sans lune ne sont pas sans rappeler la Secte des Assassins, c'est donc tout naturellement que l'entrée d'Emre dans leurs rangs rappellent les méthodes de recrutement des mouvements terroristes… Au final tous les personnages et toutes les populations sont les otages de la terreur et de la violence qui s'exercent depuis trop d'années…

Quelques bémols cependant :
- l'auteur a eu le bon goût de ne tomber ni dans mormonneries mièvres typique de la fantasy américaine ni dans le grimdark pour le grimdark typique de la fantasy américaine, un bon équilibre donc mais c'est le goût et les couleurs j'ai trouvé que cela manquait un peu de tripes quand même (c'est un sentiment sûrement du au rythme du roman en fait)
- il y a tout un côté "Dune" avec les adicharas qui sont des arbres étranges et tordus du désert qui s'étendent tout autour de la cité dont les pétales semblent jouer le même rôle que l'épice et qu'on sent être un pièce essentiel du pouvoir des Douze Rois mais franchement ce n'est pas très bien explicité
- les navires du désert ne sont pas suffisamment mis en avant, et j'ai mis pas mal de temps avant de comprendre pourquoi une ville du désert avait quatre ports qui ne soient ni maritimes ni fluviaux… C'est ballot d'avoir fait un aussi grand effort dans le vocabulaire descriptif orientalisant, pour reprendre le vocabulaire maritime 100% anglo-saxon qui m'a un régulièrement un peu sorti de l'ambiance
- dans les 100 premières pages on a droit à un duel dans l'arène, l'attentat du souk et le survival de la nuit de Bet Zha'ir mais ensuite on retombe quand même dans le tome d'exposition, pire dans le syndrome Brandon Sanderson c'est-à-dire qu'on on tient la jambe aux lecteurs avant de tout balancer dans les 75 dernières pages dans un déluge de twists et de cliffhangers qui obligent à lire la suite (attention au WTF du sorcier vampire traqué par un djinn démoniaque ^^)… On alterne les courses furtives à travers la cité (héritage jdr), investigations des uns et des autres (héritage jdr), les intrigues des uns et des autres (héritage jdr), jusqu'au moment où l'héroïne partagée entre son identité d'emprunt de professeur d'escrime, son identité cachée de Louve Blanche la gladiatrice et sa véritable identité de chercheuse de vérité découvre son ascendance et intègre les rangs de l'ennemi pour mieux l'abattre de l'intérieur…
- un easy reader peut ne tenir aucun compte de cela, mais en vieux routard j'ai identifié les mystères trop facilement

A trop retarder les révélations avec de petites naïvetés dans le build up, ou tout simplement à retarder les apports d'information, l'auteur gâche un peu les effets de sa dramaturgie… C'est symptomatique qu'il faille attendre plus de ¾ du roman pour avoir le nom, la fonction et la description des Douze Rois dans le gouvernement de Sharakhaï !
D'ailleurs je ne sais s'il faut accuser l'auteur ou l'éditeur, mais marre des ouvrages aussi touffus sans dramatis personae et sans glossaire : pour l'auteur qui a cela sous la main comme outil de travail cela ne coûte rien et pour l'éditeur qui cultive la culture des gros pavés cela ne coûte que quelques pages de plus… Une fois de plus c'est les lecteurs lambda qui vont devoir si coller sur wikipédia donc basta !

Dans une trilogie bien construite chaque épisode a son importance en apportant des réponses et en apportant sa pierre à l'édifice… Cela semble être le cas ici et, et vu que le foreshadowing fait la part belle aux mystères et aux prophéties, aux malédictions et aux sombres présages, il me tarde d'avoir sous la main le tome 2 intitulé "With Blood Upon the Sand" : tout un programme !


PS1: je conseille d'aller faire un petit tour par l'excellente analyse d'Apophis qui resitue bien l'ouvrage dans les évolutions récentes du genre
PS2: Il n'y a un truc que je ne comprends pas… Pat, Français expatrié outre-Atlantique, blogueur bien inséré dans les milieux SFFF nord-américains et bien considéré par eux (le fameux Pat Fantasy Hotlist), avait mis en avant l'auteur depuis ses premières armes et son coup de coeur avait été largement relayé par les blogueurs amateurs des genres de l'imaginaire. Et puis d'un coup pour plein de membre du fandom SFFF français, l'auteur semble être passé du statut d'étoile montante à celui de tâcheron sans ambition et sans imagination… En fait j'ai compris, il est édité en France par Bragelonne et comme l'on bien expliqué les caïds de cour de récré, Bragelonne ne sort que la merde c'est bien connu… Par contre pas un mot sur l'éditeur qui a acheté les droits de son cycle fantasy d'inspiration slave pour ne pas l'éditer mais surtout que personne d'autre ne puisse le faire… l'édition française dans toute sa médiocrité : l'important ce n'est pas de bien faire son travail, mais de dénigrer et de saboter celui des autres !
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Un univers solide, une intrigue passionnante, des personnages complexes et attachants, mais une narration perfectible

Bradley P. Beaulieu est un auteur américain de Fantasy (y compris Young Adult) qui décide de se consacrer à l'écriture au début des années 2000. Il est guidé sur cette voie par des écrivains prestigieux comme Joe Haldeman, Tim Powers, Nancy Kress et Kij Johnson. Sa Fantasy est inspirée de cultures terrestres, comme celle de l'Arabie pour le livre dont je vais vous parler aujourd'hui, la culture nordique pour son cycle Tales of the Bryndlholt, ou encore celle des peuples slaves pour la série Lays of Anuskaya. Outre Les douze rois de Sharakhaï, le cycle (qui s'appelle en anglais The song of the shattered sands et en français simplement Sharakhaï) comprend une préquelle, tandis que deux autres tomes sont prévus.

- le genre, l'univers

Il s'agit d'un des plus purs représentants de ce que les spécialistes appellent la Silk Road Fantasy (Fantasy de la Route de la Soie), en clair un monde qui n'est inspiré ni par l'Europe, ni par la Chine (ou le Japon, d'ailleurs), mais par ce qui se trouve entre les deux, sur l'ancienne route qui servait à acheminer la soie : Arabie, Proche- et moyen-Orient, Asie Centrale, Inde, ou un mélange de tout ça (avec également des éléments africains parfois). C'est un genre plus large et plus fourre-tout que l'Arabian Fantasy, qui, comme son nom l'indique, est beaucoup plus spécifique.

Même si le gros de l'ambiance est arabo-perse, la simple situation de la Cité-Etat de Sharakhaï (au moyeu d'un cercle de royaumes, contrôlant les routes commerciales de façon à forcer les caravanes à passer par elle ou par ses caravansérails) suffit à classifier sans le moindre doute possible le roman en Silk Road Fantasy. La ville est, de toute évidence, inspirée par Samarcande. Il me semble qu'il y a aussi un vague aspect hébraïque (certains noms de personnages ou de fêtes), mais je ne suis pas assez connaisseur de cette culture pour en être certain.

Il y a, par ailleurs, des choses étonnantes, comme ces « bateaux » à patins qui servent à parcourir le grand désert qui entoure la ville, ou le Zilij, le « surf des sables ». Il faut bien dire qu'il est plutôt inhabituel pour une cité située dans un tel milieu aride de posséder quatre « ports » !

En tout cas, que ce soit au niveau des éléments complètement imaginaires ou de ceux inspirés de cultures terrestres, l'auteur a livré une copie très solide et cohérente, avec notamment une riche géopolitique, avec des relations complexes avec les royaumes voisins, les tribus du désert qui ne supportent pas la sédentarisation des Sharakhiens, et bien entendu une rébellion opposée aux douze Rois qui gouvernent la Cité.

- L'atmosphère

Il y a un facteur frappant dans la bonne Arabian / Silk Road Fantasy : l'excellence des descriptions, l'atmosphère très évocatrice. J'avais été frappé, par exemple, dans Throne of the Crescent Moon, par le fait qu'on puisse littéralement sentir les odeurs de la cité décrite à la lecture du roman. Là, c'est la même chose, mais en encore plus poussé : sans faire des descriptions interminables, qui, à moins de s'appeler Jaworski (et encore…), vont lasser 99 % des lecteurs, l'auteur se débrouille toujours pour vous donner l'ambiance olfactive et gustative de son univers, en plus de l'auditive et de la visuelle. Et ça, mine de rien, c'est plutôt rare en SFFF. de même, il est rare (mais très plaisant, à mon goût, car créant une image très riche de l'univers du livre) qu'on vous décrive les spécialités culinaires locales ! (Connaissez-vous le plat typique ou la friandise préférée des habitants du Gondor, d'Ambre ou de Melniboné ? Non ? Eh bien, vous voyez ?).

Il y a un autre facteur à considérer niveau ambiance : c'est nettement plus noir que l'Arabian Fantasy moyenne. D'ailleurs, le simple fait que Glen Cook ait apprécié (et s'y soit tout simplement intéressé) vous convaincra aisément que nous ne sommes pas sur de la Fantasy gnan gnan. Les Rois de Sharakhaï sont particulièrement sanguinaires, et s'il faut crucifier une vingtaine de fillettes pour bien faire comprendre que la rébellion n'est pas une option, ils le font. de même, le bouquin est explicite niveau sang, tabassages, excréments (il y a une scène de maltraitance envers une personne âgée assez hardcore) et sexe, c'est pas une publication young adult mes cocos. D'ailleurs, puisqu'on en parle, quand j'ai vu que l'héroïne avait 19 ans, j'ai eu un peu peur, mais j'ai vite été rassuré, car c'est du 19 piges Glen Cook, pas dystopique YA. L'influence du maître est en outre palpable dès qu'on parle de magie, particulièrement ténébreuse dans cet univers.

Mais le point le plus remarquable au niveau ambiance est tout simplement la ville elle-même : Sharakhaï est si tangible, vivante, sous la plume de l'auteur qu'elle prend du coup sa place au panthéon des plus remarquables cités de la Fantasy, aux côtés de métropoles aussi prestigieuses que Camorr ou Lankhmar.

Enfin, il faut signaler qu'il y a tout un tas de clins d'oeil à des sagas célèbres, qu'elles soient issues du jeu vidéo (Prince of Persia, Assassin's Creed), du cinéma (il y a des aspects très Gladiator ou le transporteur) ou de la littérature ( quand ses jeunes élèves des quartiers pauvres réclament à Çeda une leçon d'escrime, elle répond qu'elle n'a pas le temps de danser aujourd'hui, une allusion ma foi très claire à Syrio Forel et aux Danseurs d'eau du Trône de Fer). A ce propos, il y a, je trouve, une relative influence issue de Dune, le pétale d'Adichara rappelant vaguement l'épice et la présence de nombreux personnages ayant le don de scruter les futurs possibles étant à signaler.

- Personnages et thèmes

Au début, on pense qu'on est en face d'un livre de Fantasy classique dont l'héroïne, unique, s'appellerait Çeda. Puis, plus on avance, plus on s'aperçoit qu'on a en fait affaire à quelque chose qui ressemble un peu au cycle La dague et la fortune de Daniel Hanover : il n'y a pas un protagoniste unique mais plusieurs, même si l'un d'eux se taille la part du lion en terme de nombre de chapitres dans lesquels c'est son point de vue qui est adopté. Ce qui, bien entendu, entraîne certaines complexités narratives, comme vous le verrez un peu plus loin.

Outre le point de vue de Çeda, donc, il nous arrive parfois de suivre celui d'Emre, son colocataire-âme soeur, ainsi qu'en quelques occasions ceux de Ramahd (un prince-consort étranger) et d'un des rois de Sharakhaï, Ihsan. Les trois premiers ont un point commun : ils veulent tous assouvir une vengeance. Il s'agit, un peu comme dans Les mensonges de Locke Lamora (encore une fois), du thème principal du roman. On ne peut donc pas dire que les McGuffin brillent par leur originalité, mais bon, tant que le roman est efficace (et ici, il l'est), peu importe, après tout. Çeda veut donc venger sa mère, zigouillée par les Rois, tandis que toute la personnalité d'Emre tourne autour d'une vengeance qu'il n'a pas pu assouvir et que Ramahd veut tuer l'homme qui est responsable de la mort de sa femme et de sa fille.

Çeda est ce que l'on appelle, dans les jeux de rôle, un personnage multi-classé : gladiatrice d'élite (malgré ses dix-neuf ans à peine) sous le pseudonyme de la Louve Blanche, professeur d'escrime, ex-voleuse des rues et apprentie-apothicaire, et enfin concurrente de Jason Statham dans l'activité de transporteur-de-colis-à-n'ouvrir-sous-aucun-prétexte, le personnage a de multiples talents. Comme celle de tous les autres protagonistes, sa psychologie est complexe et réaliste, et elle est hautement attachante. Sa quête des responsables et des raisons du meurtre de sa mère, ainsi que celle de ses origines (elle ne connaît pas son père et sa génitrice s'est montrée très évasive à propos de sa tribu natale), créent une réelle empathie avec le lecteur. Ce qui est intéressant également, c'est qu'elle suit le parcours inverse d'une héroïne de Fantasy classique : elle commence le livre en étant expérimentée dans son activité, avant de glisser, dans le dernier tiers, dans le rôle, plus classique, de la nouvelle qui doit tout apprendre ou presque dans une école (très spéciale), avec les inévitables rivalités, amitiés inattendues et changements d'opinions radicaux des unes ou des autres.

Outre leur psychologie et leur histoire, solides et bien décrites, ce qui est intéressant avec les personnages est qu'ils ne sont pas figés dans leurs croyances, opinions, amitiés ou haines : ils évoluent, ce qui les rend donc bien plus intéressants que dans la plupart des niaiseries Young Adult. Et les personnages marquants ne manquent pas, y compris au niveau des seconds rôles (sans oublier, comme je l'ai déjà mentionné, que la ville elle-même peut être considérée comme un personnage à part entière) : les Rois les plus emblématiques, bien sûr (particulièrement Ihsan et Husamettin), mais aussi Dardzada l'apothicaire, Sümeya la Vierge du Sabre ou Meryam la mage de sang.

Les Rois sont des antagonistes particulièrement fascinants et convaincants : suite à un pacte avec les Dieux 400 ans auparavant, ils sont immortels, et certains sont dotés de pouvoirs surnaturels. Bien entendu, les douze souverains ne bénéficient pas du même degré de développement dans le roman, car si Ihsan ou Husamettin apparaissent souvent, d'autres sont à peine mentionnés ou présents seulement dans une ou deux scènes, comme Besir (le Roi des Pièces) ou Onur (le Roi des Lances).

- Structure et narration

La structure est complexe : outre les points de vue multiples et asymétriques déjà mentionnés, il faut aussi savoir que tout au long du livre, nous avons droit à des flash-backs sur l'enfance et l'adolescence de Çeda, sur ce qui l'a conduit à son comportement actuel (ainsi qu'à celui d'Emre, au passage). Ce retour en arrière commence lorsqu'elle a huit ans et remonte petit à petit vers le présent.

Ce système de flash-back présente deux problèmes assez sérieux, à mon avis :

* D'abord, les révélations faites dans les flash-backs sont très mal positionnées par rapport aux scènes qui se déroulent dans le présent (et qu'ils sont supposés éclairer d'un jour nouveau et pertinent) : alors que ce système était utilisé à la perfection dans un livre comme Les mensonges de Locke Lamora, par exemple, il est ici utilisé relativement maladroitement, avec toujours un assez gros temps d'avance ou de retard par rapport au moment idéal.

* Ensuite, si vous avez bien tout suivi, on peut potentiellement alterner entre présent de Çeda / passé de Çeda / point de vue de trois autres personnages, et ce sans structure régulière, sans rythme précis (du genre : 1 chapitre de chaque, puis la boucle revient à son point de départ). En clair, on peut avoir par exemple présent / passé / Ramahd / présent / Emre / présent / Ihsan / Ramahd / présent / passé, ce qui fait qu'on peut très bien laisser un des personnages « suspendu par le bout des doigts » pendant des dizaines de pages avant de connaître son sort. J'ai trouvé que le phénomène se reproduisait un peu trop souvent, et qu'on avait du mal, parfois, à se rappeler qui faisait quoi et qui était qui (une fois de plus, l'absence d'un Dramatis Personae, récurrente chez Bragelonne, se fait lourdement sentir, surtout vu le très grand nombre de personnages -12 rien que pour les Rois-).

Bref, sans être non plus totalement maladroite, confuse ou inutilement complexe, la narration est à mon avis nettement perfectible, surtout chez un écrivain qui n'en est pas à son premier livre. C'est pour moi le point faible du roman, qui a, par ailleurs, de nombreuses et nettes qualités.

Pour terminer sur le chapitre maladresses, signalons quelques révélations complètement téléphonées (mais d'autres qui sont, au contraire, inattendues et passionnantes), et la pluie de révélations des quarante dernières pages, un peu abusive.

Par contre, signalons de multiples aspects enquête (sur la mort de la mère de Çeda, ses poèmes, les agissements des rebelles, etc) qui sont tout à fait intéressants, avec un rythme des révélations qui est, cette fois, plutôt bien maîtrisé.

Et puis bien sûr, il y a des points extrêmement positifs, comme ces noms très évocateurs (ceux des épées ou de l'organisation des Vierges du Sabre, par exemple) et, surtout, ces scènes à grand spectacle époustouflantes : les combats dans l'arène, celui de Sümeya contre le Roi des Lames, l'apparition des douze Rois pour la première fois réunis, la bataille sous les Adicharas à la fin, et ainsi de suite. A l'inverse, je ne sais pas si c'est dû à l'auteur ou au traducteur, mais le nom de la rébellion (les Hôtes sans Lune)… bof, bof : on a connu des noms claquant un peu plus au vent de la destruction tels des étendards funestes…

Un point important à signaler : il ne me paraît pas possible d'envisager ce roman comme un one-shot, car ce premier tome n'est clairement qu'une mise en place pour les deux suivants. La fin ne règle pas beaucoup de questions, énormément de choses restent à découvrir.

- En conclusion

Un roman de Fantasy de la Route de la soie (ou de Dark Fantasy arabisante, c'est comme vous voulez) globalement réussi et prenant, avec un riche univers, un style très plaisant et évocateur, de solides personnages, une intrigue passionnante, mais qui souffre (sans que ce soit rédhibitoire) d'une structure un poil maladroite, abusant des points de vue multiples et des flash-backs. Ce n'est pas un chef-d'oeuvre, mais c'est en revanche incontestablement très plaisant et très prenant. Je n'ai absolument aucun doute sur le fait que je me précipiterai sur la suite dès qu'elle paraîtra (et on espère que la préquelle sera également traduite), et que je poursuivrai l'exploration de l'oeuvre de l'auteur en VO. Si vous cherchez une Fantasy qui s'écarte des clichés du médiéval-fantastique d'inspiration européenne et / ou que vous avez une forte affinité pour la Fantasy des Mille et une Nuits (bien qu'ici dans une version très « dark »), ce livre est fait pour vous.

La Fantasy d'inspiration arabo-perse a longtemps eu mauvaise réputation dans l'édition française (car réputée « pas vendeuse ») : voilà un roman qui a tout pour la démentir. On espère que, dans son sillage, les grandes maisons d'édition sauront nous proposer plus de Fantasy inspirée par la Chine, L'Inde, L'Arabie, l'Afrique ou les civilisations précolombiennes, histoire d'introduire plus de variété dans un genre très codifié, pour ne pas dire souvent stéréotypé.
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Cela faisait un moment que je n'avais pas lu de Bragelonne pour la simple et bonne raison que j'ai de plus en plus de mal à me retrouver dans le style des romans publiés par l'éditeur. Romans qui, à quelques exceptions près, louchent un peu trop du côté d'une fantasy très classique et légèrement « bourrine » dont les auteurs nous sont systématiquement vendus comme « l'un des meilleurs du genre de ces dernières années » (on a maintenant presque droit à la même formule à chaque sortie...). Récemment je me suis malgré tout laissée séduire par le premier tome de « Sharakhaï » qui me semblait faire preuve d'un peu plus de singularité que les précédentes parutions de l'éditeur et qui, selon les avis de certains blogueurs que j'apprécie beaucoup, était de bien meilleure qualité. Si je n'ai effectivement pas été déçue en ce qui concerne l'originalité, je ressors malgré tout de cette lecture avec un sentiment plus que mitigé. Commençons par le point le positif, à savoir la qualité du décor. Un décor qui se limite à cette fameuse cité de Sharakhaï (l'auteur ne nous en dévoilant pour le moment guère plus sur son univers), mais quelle cité ! Bradley P. Beaulieu opte ici pour une ambiance orientale et brosse le portrait d'une ville vivante et fourmillante dans laquelle on déambule avec plaisir de quartier en quartier en appréciant la multitude de parfums et douceurs locales.

Pour l'immersion aucun problème, donc. Là où les choses se gâtent, c'est au niveau de l'intrigue qui constitue à mon sens le plus gros point faible du roman. le système des flash-back pour en apprendre davantage sur la personnalité du héros n'est généralement pas une mauvaise idée mais là les transitions entre présent et passé sont assez maladroites. de même, la plupart des révélations tombent à l'eau car trop prévisibles pour le lecteur à défaut des personnages qui passent leur temps à être surpris par tout ce qu'ils voient ou entendent. Même l'héroïne (qui s'amuse à échafauder des plans inutilement tordus et complexes pour parvenir à ses fins) n'en finit pas de s'étonner chaque fois qu'une de ses actions aboutit au résultat qu'elle semblait pourtant vouloir atteindre. Les quelques tentatives de l'auteur visant à donner à son intrigue un côté un peu plus sombre via des exécutions d'enfants ou des sacrifices sanglants tombent elle aussi à l'eau à partir du moment où on comprend qu'il ne mettra jamais vraiment en danger son héroïne ni ses petits camarades. Difficile dans ces circonstances d'être vraiment convaincu par la dureté du monde dépeint... Çeda avait pour sa part tout ce qu'il fallait pour me plaire mais j'ai trouvé le personnage assez agaçant, en grande partie parce que j'ai passé la majeure partie du roman à tenter de comprendre la logique de son comportement... sans succès.

Avec ce premier tome, Bradley P. Beaulieu nous plonge dans un décor immersif et suffisamment atypique pour titiller la curiosité du lecteur. L'intrigue et les personnages sont malheureusement loin d'être à la hauteur aussi abandonnerai-je ici ma découverte de la série et de cet univers.
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Pioché au hasard dans ma PAL débordante (surtout sur ma liseuse), j'ai adoré.

L'ambiance arabisante n'y est pas pour rien, je l'ai trouvée très bien décrite, dépaysante à souhaits. L'héroïne, Ceda, est très attachante, son ami Emre tout autant. Ils sont vraiment bien campés, et c'est un vrai plaisir à lire.
C'est très bien écrit, très bien traduit, également...
Les flash-backs explicatifs sont à propos et très utiles, et j'ai pris plaisir à découvrir le passé des personnages.

Ce tome 1 est une vraie de vraie réussite.
Je sais pour avoir parcouru l'avis de mon cher Alfaric que le tome 2 ne l'est pas autant.
En fait, il n'y aurait eu qu'un seul roi de Sharakhaï, je pense que la réussite aurait été totale, même si le mystère qui rôde entre ces 12 rois est intéressant, c'est aussi le prétexte à un délayage et des répétitions de mauvais aloi. Dommage...

Je me contenterai donc de ce premier tome qui m'a entièrement satisfaite, et ne lirai pas la suite.

Comme d'habitude ces derniers mois, je n'ai pas envie de faire un long avis circonstancié. Si vous voulez en lire plus, allez lire l'avis d'Alfaric sur ce tome 1 et vous en saurez plus. :)
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Les Douze Rois de Sharakhaï est le premier tome d'une nouvelle trilogie proposée par les éditions Bragelonne. Fortement inspiré des légendes du Moyen-Orient et du Maghreb, Bradley P. Beaulieu nous propose, avec sa première série traduite en français, un univers de fantasy très fort et très original pour le genre. Bien qu'habituellement je m'interdise de lire des séries où seulement le premier tome est sorti, j'avoue qu'avec cette série, c'était difficile de tenir mon engagement et de ne pas céder.

Malgré que le roman nous propose différents points de vue, l'histoire tourne principalement autour de Çeda, jeune héroïne carrément badass qui, quand elle ne passe son temps à faire des trucs illégaux, gagne sa croûte en combattant dans les arènes. Au cours d'une sortie dans les rues de Sharakhaï lors de la sainte nuit de Beht Zha'ir (sortie bien entendu interdite), Çeda fera la rencontre d'un asirim, espèces de spectres qui ont le rôle de récupérer des sacrifices lors de cette nuit sainte. Cet asirim, au lieu de la tuer, lui récitera un poème qui fera écho au passé de Çeda et à sa mère, pendu pour trahison il y a quelques années. Et c'est à partir de ces quelques phrases que tout va s'enchaîner et que Çeda en apprendra beaucoup plus sur elle et sur ces douze rois qui dirigent sa ville.

Le récit commence plutôt fort avec un premier chapitre ouvrant sur un combat d'arène et avec une Çeda au mieux de sa forme. le rythme aura malheureusement tendance à se ralentir dans les chapitres qui suivent. L'auteur prendra son temps pour mettre en place son univers, son intrigue et ses nombreux personnages et créatures. Bien que cela ne soit pas un défaut en soi, je me suis un peu ennuyée à ce moment de l'histoire que j'ai trouvé un peu long. J'avais l'impression que l'auteur avait tendance à faire un peu de surplace. Cependant, arrivée à la moitié du roman, tout s'enchaîne et il est très difficile de lâcher le roman. de l'action, des rebondissements et surtout des secrets dévoilés, l'auteur saura nous captiver et nous happer complètement dans son univers foisonnant, univers qui reste le gros point fort de ce roman. Des sorties en plein coeur du désert et une intrigue politique complexe autour de ces douze rois font qu'on est réellement intrigué par cette histoire et qu'on devient complètement prisonnier de cet univers.

Ce premier tome clôt parfaitement la première partie de la série tout en nous promettant de belles choses pour la suite, vivement !
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critiques presse (2)
Syfantasy
18 avril 2022
Après avoir publié les livres de Terry Goodkind, Les Salauds Gentilshommes de Scott Lynch ou Le Nom du Vent de Patrick Rothfuss, Les Douze Rois de Sharakhaï devraient faire date dans le catalogue de Bragelonne.
Lire la critique sur le site : Syfantasy
Elbakin.net
05 janvier 2017
Ce premier roman remplit son rôle : donner envie de connaitre la suite de l’histoire (...) il y a vraiment matière à faire de Sharakhaï une très bonne trilogie.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
- Que les lunes éclairent tes pas Ibrahim. Comment se porte la perle que tu as pour femme ?
- Une perle ? (le vieil homme se renfrogna.) Un maudit bout de charbon, tu veux dire.
- Si c'est un morceau de charbon, il brûle comme le soleil.
- Pourquoi crois-tu que je porte un chapeau ? répliqua Ibrahim en soulevant le bord de son couvre-chef.
- Parce que tu as peur que sa beauté t'aveugle ?
- Parce que j'ai peur de tourner de l’œil en la voyant !
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La haine est épuisante, et quand sa flamme vacille, il faut beaucoup d’efforts pour la raviver et souffler sur les braises qui vous dévorent le cœur.
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- Toi ? Tu voudrais combattre dans l'arène ?
- Oui. Et j'espérais que tu accepterais de m'entraîner. (Ceda)
Djaga éclata d'un rire bref.
- A ta place, je choisirai une autre carrière. Chien de poussière est un sale métier. Il n'est pas fait pour les gens comme toi.
- Je suis faite pour combattre dans les arènes.
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- Tu as une sale tête.
- Un escalier m’a cherché querelle. Il était plus fort que je ne pensais.
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Certains d’entre eux venaient donc se mesurer aux Sharakhiens, convaincus que leurs nobles origines et leur entraînement rigoureux les rendaient invincibles. On trouvait parmi eux quelques redoutables guerriers, mais la plupart n’étaient que des prétentieux espérant accaparer un peu de gloire dans la cité qui se vantait de compter les meilleures lames des cinq royaumes. Ils découvraient vite pourquoi Sharakhaï n’avait jamais plié devant une armée ennemie. Les enfants du désert apprenaient le maniement du sabre, de la lance et du bouclier dès qu’ils savaient marcher. À Sharakhaï, le combat n’était pas un simple divertissement, c’était une tradition. Il faisait partie de la vie des habitants au même titre que la faim, la soif et la chaleur implacable.
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