Le secret de la Renaissance est en cela — qu’elle n’a pas abouti. Jamais encore autant de force créatrice n’avait été suscitée à la fois dans le monde, et jamais ne se sont révélés une telle tragédie de la création, un déséquilibre aussi complet entre le dessein et la réalisation. Cet échec de la Renaissance donne à la création humaine ses critères véritables. Il faut chercher là sa beauté profonde. Si la Renaissance n’a pas abouti malgré l’extraordinaire tension d’énergie créatrice qu’elle renfermait, c’est qu’une renaissance du paganisme était impossible dans le monde chrétien, définitivement impossible.
Nul ne met sérieusement en doute la valeur de la Science. La science est un fait indiscutable, et indispensable à l’homme. Mais on peut douter de la valeur et de l’utilité du scientisme. Car science et scientisme sont deux données complètement distinctes. Le scientisme suppose le transfert des critères scientifiques dans d’autres domaines de la vie spirituelle, étrangers à la science ; il impose la notion selon laquelle la science est le critère par excellence, supérieur à tous les autres, et qui confère, en conséquence, à ses solutions une portée décisive et universelle.
La grande Renaissance italienne a été infiniment plus complexe qu’on ne le conçoit habituellement. Elle représente le niveau le plus élevé qu’ait atteint la faculté créatrice de l’homme, et par là, le problème de la création s’y pose avec une acuité sans égale. L’homme de la Renaissance s’est efforcé de retourner aux sources antiques de la création, à cet aliment créateur que n’avaient pas épuisé la Grèce et Rome. Mais ce serait faux de penser que la Renaissance italienne a été païenne, et de la placer sous le signe d’un réveil du paganisme. Il faut laisser cette vue simplifiée aux historiens de la culture. La vérité est que dans cet élan créateur de la Renaissance, les principes chrétien et païen déposés au fond de la nature de l’homme se sont heurtés pour la première fois. C’est là qu’est la signification éternelle et universelle de la Renaissance.
La philosophie, en quelque acception que ce soit, ne doit pas être une science, et ne doit pas être scientiste. Il est presque incompréhensible qu’elle veuille l’être. Il ne peut y avoir de science de l’art, de la morale, de la religion. Pourquoi la philosophie serait-elle une science ? Il paraît clair que rien au monde ne doit être scientifique que la science.
C’est dans la création artistique que se révèle le tragique de toute création, — le déséquilibre entre ce qui est conçu et ce qui est réalisé. L’objectif de tout acte créateur est de créer un Être nouveau, une vie nouvelle, c’est un but théurgique ; mais la réalisation de cet acte, n’est plus qu’une oeuvre différenciée, répondant à des besoins esthétiques définis, et qui se range non dans un autre monde, mais parmi les valeurs culturelles de celui-ci.
« Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père », déclare le Christ dans l'évangile de Jean. Si les différentes Églises chrétiennes ont fondé des traditions dissemblables, leur dessein est cependant de s'unir en Dieu.
Retraçant l'aventure oecuménique à travers ses grandes figures, dates et étapes, Antoine Arjakovsky montre comment, par-delà la réunion des baptisés, elle permet d'envisager et d'appréhender la nécessaire convergence entre les croyants du monde entier. Prenant appui sur Nicolas Berdiaev, John Milbank, mais aussi Emmanuel Levinas ou Abdennour Bidar, reprenant l'esprit de rapprochement entre les Églises chrétiennes initié en Europe au XXe siècle et de la rencontre interconfessionnelle d'Assise en 1986, il dessine une voie de conciliation entre chrétiens, juifs, musulmans mais aussi hindouistes et bouddhistes, afin de dégager une conception de l'oecuménisme plus juste, plus vraie, plus paisible et plus respectueuse de l'environnement à l'échelle planétaire. Il y parvient en proposant une science nouvelle fondée sur une métaphysique résolument oecuménique.
Une profession de foi en l'espérance.
Fondateur en 2004 à Lviv, en Ukraine, du premier Institut d'études oecuméniques en ex-URSS, directeur de recherche au Collège des Bernardins, enseignant de science oecuménique à l'Institut chrétiens d'Orient et président de l'Association des philosophes chrétiens, Antoine Arjakovsky est l'auteur, entre autres, de Qu'est-ce que l'orthodoxie ?
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