" Où est Lizzie?
Où est Darcy?
Avant de nous lancer, il est intéressant d'entrer un peu dans l'originalité de ce qui est présenté ici?
Le mode de narration.
Un jeu " Cherche et trouve" s'adresse souvent aux plus jeunes, offrant du ludique et de l'observation en mode de lecture de substitution. Il s'imposera comme la nouvelle valeur sûre du jeu en livre et prendra le relais des classiques "Jeu des 7 erreurs".
Les "7 erreurs" ne raconteront pas, le "Cherche et Trouve" si, offrant des étapes progressive à un ou plusieurs personnages.
Les enfants, on le sait en bibliothèques, resteront captifs un long moment de ce genre récréatif et facile, d'autant plus quand on leur réclamera des efforts pour apprendre à lire seul. Les " Cherche et Trouve" ne réclament pas de savoir lire, ils ont constitué leur cachier des charges bien connu des lecteurs et sur la présentation d'une double-page nous saurons automatiquement quoi faire, qui chercher et où sont rangés les éléments bonus à rechercher pour prolonger l'aventure avant de la tourner, cette page.
Le thème.
À partir de 8 ans, c'est un bel âge pour proposer des univers plus divers que le conte, et donc à côté des Mythologies nous pourrons trouver le fond d'aventure historique ( les civilisations racontées, leur espérance de faire fortune, leurs voyages pour découvrir le monde...).
Ainsi, effectivement l'univers de l'auteure pour adultes
Jane Austen ne s'adressera pas directement à la cible mais cependant son époque anglaise romantique pourrait offrir un terrain d'imaginaire délicieusement "rose" pour les publics de jeunes demoiselles lectrices, avec ses amours contrariés, ses us et coutumes qui posaient les hommes et les femmes à distance quand ils étaient de bonne éducation, avec ses énormes manoirs époustés par des domestiques et cruellement arrachés aux familles par les revers financiers et la ruine.
Ce jeune public qui appréciera de rêver un peu les bonnes manières chez les garçons, se régalera des affaires de bal, des belles robes cintrées sous la poitrine à la mode "Empire" et des chapeaux serrés d'un ruban pour préserver leur discrétion au dehors.
Les auteures
Pascale Charpenet,
Victoire Bocquillon et
Jenna Lyn Brooks auront l'idée d'inviter le public d'environ 8 ans à la Littérature anglaise sur le mode du jeu: le ton sera donné, les filles de ces romans chercheront à se faire marier( avec la guerre, il faudra faire vite pour se mettre financièrement en sécurité et pour trouver la perle rare dans ceux qui auront la chance d'en revenir. Sinon, c'est un peu le déshonneur, dépassant la vingtaine, toujours pas mariée et vivant chez ses parents.
Et pourtant cette époque offrira sa petite étincelle d'indépendance, peut-être même plus que lorsqu'elles se marieront et lâcheront tout pour s'occuper de la propreté d'un domaine, de la réputation de leurs époux en société et des enfants si il n'y a pas de domestiques. Elles travaillent: elles sont lectrices, secrétaires ou gouvernante d'enfants.)
Orgueils et Préjugés.
Nous trouverons tous ces repères dans ce roman( adapté en livre-jeu) mais le roman donnera évidemment plus de détails.
Branle-bas de combat pour la famille Bennet, un peu en difficultés financières et qui doit promettre un avenir à chacune de ses filles( 5 tout de même). Comment faire pour ne pas donner l'air d'être désespéré, dans l'urgence et pour ne pas brader les dot?
Un voisin riche s'installe non loin et c'est la chasse pour toutes les familles qui auront des filles à placer et de préférence dans la belle société.
Au coeur de ces préoccupations d'époque, il y aura des esprits un peu libres, agacés par les obligations sociales que leur réclament leur rang et leur sexe.
Et si Elisabeth "Lizzie" ne voulait pas se marier et devenir écrivain?
Et si Darcy préférait épouser une domestique?
Leurs natures les pousseront un jour l'un vers l'autre mais il faudra laisser le temps au temps car l'un et l'autre se détesteront et ne cèderont pas à l'obligation des discussions courtoises de séduction qui ne laisseront pas beaucoup de place pour leur personnalité.
Le reste sera à découvrir mais pour ce jeune âge, nous recommandrons les adaptations cinéma des films de
Jane Austen qui envelopperont facilement ce public dans le charme et les intrigues spéciales de l'époque.
"Fuis moi je te suis suis moi je te fuis", c'est un vrai jeu de chat et de souris entre Darcy et Lizzie qui se placeront aux antipodes l'un de l'autre des scènes en double-pages pour éviter de se croiser la plupart du temps ou bien, pour ne faire que ce qui leur plait loin des règles de mondanités.
Contrairement à un " Charlie" de
Martin Handford, les auteures feront bien moins d'efforts ici pour que les personnages soient toujours un peu à l'identique, il faudra bien observer et se fier au texte qui nous dira ce que fait chacune des soeurs Bennet, où se trouve le fameux jeune voisin, Mr Bingley, où se trouve le prétendant Mr Collins( l'une ou l'autre des soeurs Bennet, peut importe. Les hommes aussi connaissent l'urgence qui les poussent à se marier pour conserver bonne réputation. Ils fument, boivent, fréquentent des lieux de plaisir, quelle horreur? Il y aura tout à refaire pour une femme qui veut faire tenir son ménage bien droit. le pire, c'est ce Mr Darcy. Un homme qui se moque de sa réputation n'est pas un honnête homme pour une femme, dira t-on).
Le livre-jeu sera une excuse, l'aventure s'attachera à raconter comment la romance entre Lizzie et Darcy pouvait se trouver possible avec un Darcy pétri de préjugés et une Lizzie bourrée d'orgueil, après quelques péripéties et comment symboliquement ils avanceront l'un vers l'autre jusqu'à la page centrale pour se dire " Oui"
Le jeu pourrait se contenter d'une histoire mais il offrira une autre perspective de cette même histoire et vu par ceux qui vont emménager à côté des Bennet.
L'album est au final une bonne idée offrant le bonus d'un roman romantique à hauteur du jeune public et facilement digéré grâce au ludique narratif.
Les plans architecturaux en coupe, ne sont pas si éloignés des charmantes maisons de poupée de collection et les poses des personnages nous emmèneront aussi sur le terrain de l'Art, des grands portraits d'époque que l'on reconnait pour le goût vestimentaire mais aussi la pose caractéristique pour la peinture.
C'est sympathique et original.