Tant pis si la poésie n'emporte pas l'univers entier
sur son dos.
Qu'elle déplie au moins une part de son fardeau à terre,
à même le sol.
Réalité sur réalité, ce qui montre, ce qui est montré,
l'impact du pinceau et de la toile où se tient la couleur.
p.41
Lorsque vous pesez votre âme,
prenez garde aux esquilles. Saisissez-
la plutôt par la queue que
par les ailes et assommez-la
sur le mur ou sur le sol.
Choisissez une balance à
fil de soie et à plateau
de suie. Mettez des poids
de cristal dans l'autre
plateau. Et prenez garde
que l'âme vivante est
toujours plus lourde que
l'âme morte. Si elle s'évade
remplacez-la par votre
corps.
p.79
Je voudrais écrire à coups de hache dans la forêt
la nuit est comme deux mains jointes dont les paumes
s'écrasent
il n'y a le bruit d'aucune aile sauf le marteau qui vole
dans la cloche d'heure en heure prisonnier
Nul ne marche
les routes effacées ne servent plus à rien
sauf quand la grande lune s'en empare et les lisse
La lumière qu'elle y jette est un si grand cheval
qu'on ne voit rien que ses miettes plus fines
que la neige
un velours de lanterne
une sauce d'yeux blêmis tellement mêlés
qu'on dirait une couleur absente.
p.37
L'arbre comme un cheval d'herbe hennit dans l'orage.
p.42
Alain Borne. Quand je serai mort.