Quelles furent les origines et les causes profondes de la guerre anglo-boer ? Ses fondements idéologiques ?
Martin Bossenbroek, historien néerlandais, tente de répondre à ces questions dans son ouvrage «
L'or, l'Empire et le sang ».
Dans son introduction, il situe d'emblée ce conflit : c'est tout d'abord une « expression paroxystique atypique de l'impérialisme britannique ». C'est la seule épreuve de force de grande envergure entre blancs. Ce conflit a conduit l'Empire britannique à la recherche d'alliances et à sortir du « splendide isolement ».Autre caractéristique , qui prend un relief tout particulier pour des lecteurs contemporains : la place donnée aux médias : 200 correspondants de guerre furent mobilisés , un réseau étendu de communication télégraphiques , des transports intensifiés vers cette partie du continent africain donnèrent un grand écho à ce conflit .Enfin, et c'est le sujet le plus attendu , les conséquences de cette guerre sur les populations civiles : 230 000 blancs et non-blancs furent internés, 46 000 d'entre eux périrent par suite de malnutrition et de leurs conditions de détention .
Pour illustrer au mieux les différents points de vue,
Martin Bossenbroek décrit le rôle de trois acteurs dans ce conflit : Willem Leyds, diplomate hollandais qui se mettra au service de la cause Boer,
Winston Churchill, correspondant de guerre, et
Deneys Reitz, jeune soldat Boer.
Martin Bossenbroek , dans les différentes parties de son ouvrage , a un mérite immense : celui de nous rappeler les idées et options, les visions du monde des classes dirigeantes de l'époque , celles de l'Empire britannique , celles des leaders Boer .Pour les premiers, c'est par une haute idée des bienfaits de la civilisation britannique, de l'expansion souhaitable de sa zone d'influence qu'ils sont habités : ainsi , Joseph
Chamberlain, ministre des colonies britanniques déclare-t-il : « La race britannique est la plus grande des races impériales que le monde ait connues. »
Winston Churchill, dont l'auteur décrit les activités de correspondant de presse durant le conflit, s'inscrit dans le droit fil de l'impérialisme britannique : « Pour le salut de notre Empire, pour le salut de notre honneur, pour le salut de la race, combattre les Boers est un devoir », affirme t-il dans un ouvrage rédigé en 1896. Pourtant, une question semble escamotée par
Martin Bossenbroek, ou à tout le moins minorée :
la guerre des Boers, par ses atrocités, ses modes de répression, a-t-elle été le prélude aux camps de concentration nazis ? A-elle constitué une répétition générale aux actes des régimes totalitaires du XXème siècle ? Kitchener, haut dirigeant de l'Empire n'a-t-il pas envisagé de déporter tous les Boers après la fin du conflit ?
La question n'est pas tranchée à la lecture de cet ouvrage par ailleurs fourmillant de détails révélateurs d'une époque, restituant fidèlement l'arrière-fond intellectuel celui de l'impérialisme colonial, de la suprématie de la race blanche, de la conquête du continent africain, alors en plein déroulement.