Magie de la littérature, j'ai adoré ce roman dès les premières lignes. Immédiatement, il ne vous lâche plus, il vous emporte avec lui. J'aurais voulu m'abstraire du monde et rester dans ma lecture jusqu'au mot fin sans devoir m'arrêter.
Le narrateur nous raconte sa vie, depuis sa conception dans le péché, car sa mère n'avait que seize ans et ça se passait en 1945. Elle fut chassée par ses parents après avoir été copieusement insultée par le curé pendant la messe. Elle accoucha à Dublin, où, seule et sans argent, elle confia son fils à l'adoption.
C'est ainsi que Cyril, enfant à la maturité étonnante, grandit chez les Avery ses parents adoptifs, un couple dysfonctionnel passablement déjanté.
J'ai eu sans cesse l'impression d'être parachutée dans un monde inconnu. L'Irlande, pays étrange pour moi qui n'en connaissais que le nom et la situation géographique, m'est apparu extrêmement puritain et intolérant, presque moyenâgeux. D'ailleurs l'auteur le dit explicitement que "L'Irlande est épouvantablement rétrograde, dirigée par des curés malveillants, malintentionnés et sadiques [...]"
J'ai adoré Cyril qui, à sept ans avait déjà un regard acéré sur ce qui l'entourait, qui se rendait bien compte qu'il ne fonctionnait pas comme la majorité des gens, et qui acceptait la place étrange qu'il occupait auprès de ses parents adoptifs, pas vraiment un meuble mais pas un enfant non plus. D'ailleurs les parents sont des phénomènes dans leur genre, complètement inconséquents, égoïstes et superficiels mais jamais malveillants. En réalité, tous les personnages sont incroyables et souvent très drôles.
Cyril est torturé par sa conscience : il déteste le mensonge. Or, à l'époque, l'homosexualité était pénalement réprimée en Irlande ce qui l'obligeait à cacher ce qu'il avait compris sur lui-même depuis très longtemps. Sans parler de l'homophobie ambiante totalement assumée par tout un chacun et la violence qui en résultait à l'encontre des homosexuels considérés comme des pervers et des moins que rien.
Les nombreux personnages et leurs destinées sont passionnants.
Chose à laquelle je ne m'attendais pas en commençant ce livre, j'ai énormément ri ! Des dialogues totalement hilarants ponctuent ce roman. C'est d'une drôlerie incroyable alors que le sujet est douloureux dans les époques que le narrateur traverse, toutefois sans jamais donner dans le pathos, bien au contraire, tout en étant très émouvant par moments.
C'est un énorme coup de coeur que ce roman qui nous dit la difficulté, la douleur et la peur souvent, de vivre son homosexualité selon l'endroit et l'époque où l'on nait. L'auteur met en exergue la beauté intérieure de ceux qui en sont pourvus, nous éclaire sur les liens invisibles et les pirouettes du destin qui se jouent de nous.
J'ai adoré ce récit d'une vie entière et de toutes celles dans son sillage, raconté avec tant de verve et de délicatesse aussi, qui nous montre l'évolution de la société irlandaise qui a eu bien du mal à s'ouvrir l'esprit, de 1945 à nos jours.
Une chose est sûre, c'est que je vais poursuivre la découverte de l'oeuvre de
John Boyne qui vient d'entrer dans mon panthéon des auteurs incontournables auprès de
Yasmina Khadra,
Pat Conroy,
Jeanine Cummins,
Lance Weller,
Anne Steiger,
Maria José Silveira,
Laurent Gaudé et
Paul Auster entre autres.
Les 853 pages lues en cinq jours, c'est dire si l'histoire est prenante.
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