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Christine Zeytounian-Beloüs (Traducteur)
EAN : 9782070178483
176 pages
Gallimard (07/01/2021)
3.71/5   31 notes
Résumé :
Pavel Volodine, grand reporter et baroudeur doté d'un bagou certain, vit à Moscou une existence presque rangée, après avoir été spécialiste des conflits interethniques dans la Fédération de Russie. C'est avec une grande surprise qu'il est un soir appelé par la police, pour venir jouer le rôle de médiateur sur les lieux d'une prise d'otages.  
Le preneur d'otages est en effet un jeune homme que Pavel avait fait libérer en Tchétchénie, avant de le perdre de vu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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"Mikhaïl Chevelev, né en 1959, est un journaliste d'opposition connu en Russie. Une suite d'événements est son premier roman ". Je pourrais arrêter mon billet là. Je ne pense pas que l'auteur puisse publier ce qu'il veut dans un journal en Russie sans courir de risques alors il a décidé de faire passer ses idées dans un roman. Un roman à thèse donc avec en fil rouge une histoire de prise d'otages.
En 2015, Pavel Volodine est en train de se chamailler gentiment avec Tania dans sa cuisine moscovite quand il reçoit un coup de fil. Il est attendu à l'église de L'Epiphanie dans un village à côté de Moscou. Un homme y retient en otage plus d'une centaine de fidèles et ne veut négocier qu'avec Pavel Volodine et Evgueni Stepine. Pavel reconnaît alors sur une vidéo Vadim qu'il a connu durant la première guerre de Tchétchénie en 1996. Pavel était reporter pour le Courrier de Moscou et Evgueni Stepine était un jeune journaliste fauché qui travaillait pour la télévision. Tous les deux avaient réussi à faire sortir quatre prisonniers dont Vadim...

Ne vous attendez pas à un thriller haletant ni à du grand roman psychologique. le récit de Pavel sur sa vie de journaliste alterne avec celui de Vadim qu'il rencontre dans un cagibi de l'église. L'auteur raconte ce qui pour lui conduit un jeune russe à devenir terroriste. Sa thèse c'est que les Russes sont tous responsables. Il s'agit donc d'un documentaire implacable sur le système qui conduit à l'injustice et à la déresponsabilisation individuelle depuis les années Eltsine jusqu'à celles de Poutine. Les médias sont particulièrement visés. Et plus largement l'affairisme et la corruption qui gangrènent les institutions. L'histoire tragique de Vadim serait très intéressante si elle n'était pas entrecoupée d'anecdotes inutiles ou de blagues absconses pour une petite lectrice occidentale.
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En tant que journaliste dissident, Mikhaïl Chevelev a pris la plume pour un roman afin d'exprimer ce qu'il ne peut se permettre de dire dans les médias traditionnels. Pour rendre compte de l'ampleur de l'impuissance et toute la colère ressentie face à une démocratie défaillante qui construit (encore) des monstres malgré sa façade de nouveaux horizons. Une fausse liberté d'expression dans une censure bien installée et toujours cette impression de devoir travailler pour le pouvoir si l'on veut survivre...Chevelev a couvert toutes les guerres nationales après l'effondrement du bloc soviétique et c'est un peu de ça dont il est question dans Une suite d'événements.

Vadim, jeune des années 90, a vécu les guerres de Tchétchénie et d'Ukraine. Il a dû s'exiler plus d'une fois, il a vu et vécu des horreurs et des atrocités sans nom, des injustices. Il combat là et part ailleurs et combat ailleurs , et cela semble sans fin. Ce qu'il voit c'est que la société russe est à blâmer et c'est ce qu'il veut faire comprendre lorsqu'il décide avec d'autres de prendre un centaine de personnes en otage dans une église d'un petit village. Ses revendications sont simples, il veut que le président russe s'excuse. Voilà. Et c'est lors de la prise d'otages qu'il demande, en tant que négociateurs, Pavel et Evgueni, deux journalistes qu'il a connu en Tchétchénie. Et Vadim racontera à Pavel son histoire, son triste parcours...

Une suite d'événements c'est comment les événements (au nom de quoi on déclenche des guerres ? Pourquoi les crimes restent impunis? Pourquoi les humains sont-ils si cruels?) nous mènent à cette forme de colère désespérée car l'idée de justice nous semble inaccessible, c'est la construction d'un terroriste. C'est colère et brutalité.

Chevelev a utilisé une plume et une langue tendues, incisives, sans garniture pour enjoliver. C'est froid, c'est cru et c'est hautement révélateur de l'incurie des pouvoirs face au terrorisme. Une question se pose dans ce roman, celle de la responsabilité. Pouvoir politique, administratif moral. Lequel est le vrai pouvoir ? Immanquablement, on réfléchit à cette question après cette lecture qui demeure une véritable charge contre le pouvoir russe.

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Je remercie l'équipe de Babelio et les éditions Gallimard pour l'envoi de ce livre lors d'une Masse Critique, je ne suis pas certaine de l'avoir choisi pour cause de problème de cases cochées mais non validées. Mais je ne regrette absolument pas et c'est une très bonne découverte car en plus c'est le premier roman de Mikhail Chevelev.

Il est journaliste indépendant à Moscou et malgré l'habitude de rédiger, écrire un livre n'est pas le même genre d'exercice que pondre un article.

Le personnage principal Pavel est aussi journaliste spécialiste des conflits interethniques en Russie. Un preneur d'otages demande à ce qu'il soit médiateur avec un collègue journaliste TV. Vadim le preneur d'otages était lui-même prisonnier en Tchétchénie quelques années plus tôt et avait été libéré par Pavel et son collègue. Petit à petit vont être dévoilées les raisons de cette demande.

Pourquoi et comment, voilà le coeur de ce roman qui n'est pas vraiment fictionnel, les situations de conflits et d'intérêts sont toujours d'actualités en Tchétchénie, en Ukraine mais aussi dans le Dombass. Chévélev explique très clairement que rejet, incompréhension et haine peuvent modifier le comportement et la vie d'une personne jusqu'à le pousser dans le terrorisme !

Sans aller jusqu'à l'extrême d'une guerre en Europe le cheminement psychologique de Vadim est aisément transposable chez nous. En parallèle Pavel va prendre conscience que le silence et l'indifférence dont il a fait preuve, à l'image de tant d'autres, pas qu'en Russie d'ailleurs, mènent à des contextes destructeurs.

J'ai eu l'impression parfois que ce roman, ironique et dérangeant malgré sa forme de thriller, était une manière de faire son mea culpa pour l'auteur et une incitation à ouvrir les yeux à ce qui se passe autour de nous !

La postface rédigée par Ludmila Oulitskaïa se termine ainsi : “Ce livre s'adresse à nous tous. Regardez dans votre coeur : n'avez-vous pas aussi votre part de responsabilité dans la brutalité et la colère qui nous entourent aujourd'hui ?”

Challenge MULTI-DEFIS 2021
Challenge MAUVAIS GENRE 2021
Challenge RIQUIQUI 2021
Masse Critique janvier 2021
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Journaliste d'opposition en Russie, Mikhaïl Chevelev a attendu l'âge de 56 ans pour publier son premier roman, Une suite d'événements. le livre est nourri de son expérience, frappant par sa lucidité et son ironie désabusée quant au destin d'un pays dominé par la figure du "tsar" Poutine, que visiblement l'auteur ne porte pas dans son coeur. Si l'ouvrage est un roman, ce sont d'abord ses caractéristiques documentaires que l'on retient et le regard sans complaisance de Chevelev sur les guerres menées en Tchétchénie et en Ukraine. Si la patte journalistique est évidente dans Une suite d'événements, l'auteur montre aussi qu'il sait mener à bien une fiction réaliste avec une maîtrise certaine d'un suspense qui tourne autour d'une prise d'otages dans une église. Avec l'aide de plusieurs flashbacks, le roman entend démontrer comment un citoyen russe lambda, à la suite de situations tragiques, dues en grande partie à la corruption du système, en arrive à emprunter la voie du terrorisme. Un portrait mis en perspective avec la personnalité et le destin du narrateur, qui ressemble à l'évidence beaucoup à l'écrivain lui-même, exerçant le même métier et tâchant de le faire en toute indépendance, bien que la chose paraisse plus que difficile en Russie. C'est un tableau assez désespéré que dresse Mikhaïl Chevelev et le dénouement sec, radical et choquant du livre renforce encore cette impression.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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Cela fait de longues années que la Russie est confrontée à la violence, violence d'état et violence du quotidien, Vadim le personnage clé du roman a connu les deux au travers des guerres de Tchétchénie et d'Ukraine, la corruption de la police et le déclassement social. Dans un pays où seuls les pourris ou les plus violents s'en sortent, il va choisir un geste désespéré pour exister une dernière fois.
Le récit du parcours de Vadim permet à M. Chevelev une description de la décomposition de la société russe, que seule la vodka permet de supporter avec quelques ilots d'amour ou d'amitié.
Même Pavel le journaliste narrateur a du mal à s'y retrouver et à se situer, dans ce contexte trouble où chaque action même réalisée avec bienveillance peut devenir perverse.
Pour suivre la narration il n'est pas inutile de plonger dans Wikipedia pour identifier des acteurs réels dont les noms nous sont parfois connus mais qu'il faut situer sur l'échiquier. le mélange des guerres, des rivalités internes et des trafics où l'ennemi est parfois client ou fournisseur brouille les cartes et les esprits.

Le roman au style journalistique et à la chronologie éclatée est assez déprimant et inquiétant pour l'avenir du peuple russe. Vue de l'occident la Russie reste un colosse au caractère ombrageux, aux réactions imprévisibles mais au-delà de la puissance militaire et économique des oligarques la solidité de la société russe pose question. Pourra t'elle résister longtemps à cette atmosphère délétère ?

A noter un passage savoureux où le jeune Vladimir Vladimirovitch Poutine encore simple secrétaire à la mairie de St Petersbourg sert servilement le café et les petits fours à des journalistes obscurs.

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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
1984
Je les ai tous détestés. Comme tout le monde.
Ou du moins je croyais que tout le monde était dans le même cas. Quand en troisième année dans mon groupe la moitié des gars ont choisi le K.G.B, j'en suis resté bouche bée : comment ça ? Des types tout ce qu'il y a de normal, certains étaient même des amis. Et eux en réponse à mon étonnement : et pourquoi pas ? C'est un boulot comme un autre, ça paye bien, dans deux ans on te garantit un voyage à l'étranger, et tu es en bonne place sur la liste d'attente pour recevoir un logement, et puis c'est bien beau de vouloir faire le difficile quand on est moscovite comme toi, mais nous autres, après le diplôme, qu'est-ce que tu proposes qu'on fasse ? Qu'on retourne vivre à Tambov ?
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La deuxième guerre de Tchétchénie, les immeubles qui explosent, le départ de Eltsine, l'arrivée de Poutine qui entreprend de protéger la Russie selon son bon plaisir...J'ai appelé Evgueni pour lui proposer de repartir. Il a réagi sans enthousiasme. Je n'y ai pas prêté attention, me disant qu'il avait un empêchement.(...)Ensuite Evgueni s'est mis à travailler pour la première chaîne. Je n'ai pas vu ses reportages, mais on m'a dit qu'il passait son temps à filmer des popes et des généraux, du style La Sainte Russie se relève fièrement et sa noble armée reçoit la bénédiction de la Sainte Eglise...
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Nous avions encore l'intention de nous rendre en Abkhazie, mais ça commençait à devenir lassant, partout la même chose : les héros de la veille qui n'avaient pas fini au cimetière se métamorphosaient en brigands, une population opprimée et apeurée, partout la misère et le désarroi, mais en revanche, toutes les enseignes du pays étaient désormais rédigées dans la langue du pays...
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De surcroît, des nouveaux venus venaient de faire leur apparition à Karamakhi et Tchabanmakhi, qui se rassemblaient le soir pour étudier le Coran. Ils enseignaient qu'il convient de vivre selon les règles, comme Allah l'a prescrit, ne pas boire, ne pas fumer, respecter ses aînés, que les femmes doivent connaître leur place, et bien d'autres choses encore. Et que le pouvoir qui s'oppose à ce que les gens vivent de cette manière est impie et doit être combattu. Et les habitants ont commencé à suivre ces conseils : ils ont chassé les mafieux, ensuite les flics, puis l'administration et le juge. Pour vivre selon la charia. C'était le milieu des années 19990, tout le pays était sens dessus dessous, et au Daghestan, ça allait encore plus mal qu'ailleurs, aussi personne n'avait?-il le temps de s'inquiéter de ce qui se passait dans ces deux trous perdus. Ils vivent entre eux et ne font de mal à personne, on a déjà assez de tracas avec les Tchétchènes.
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(sur la crédibilité des journalistes) Le problème, c'est que nous avons tellement menti avant ça, passé tant de choses sous silence et déformé tant de faits qu'on a cessé de nous faire confiance.
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