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EAN : 9782213682563
336 pages
Fayard (09/09/2015)
4.25/5   4 notes
Résumé :
Que signifie vraiment l'Occupation ? Comment saisir le vécu d'une catastrophe nationale, les bouleversements d'une nation et d'une société qui doit s'adapter du jour au lendemain aux contraintes de l'occupant ?
En s'attaquant à la vie quotidienne des Français pendant cette période, Michèle Cointet revient sur des sujets qui dérangent : le taux de natalité élevé, l'argent "sale" acquis par certains, les rivalités entre maquis qui ont pu engendrer des représail... >Voir plus
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« Et si on essayait d'oublier l'idéologie ? » demande malicieusement Michèle Cointet à propos de cette Occupation sur laquelle, selon ses inclinations politiques et ses jugements a posteriori souvent ineptes, chacun a son opinion sans l'avoir étudiée. Étudier, c'est précisément ce que fait l'auteure dans un essai sans concession et parfaitement documenté. Tout y passe, donc, sans souci de plaire aux uns ou aux autres.

Les icônes ne sont pas épargnées, pas plus que les salopards ne sont exagérément dépeints. Ainsi, de De Gaulle : « Charles de Gaulle n'est pas un officier banal. Il a une ambition supérieure, tôt révélée, qui le rend souvent odieux à ses camarades mais qui suscite quelques dévouements admiratifs. L'envol en Angleterre sera moins surprenant quand on saura que Charles de Gaulle est déjà lié au milieu politique et particulièrement averti des enjeux internationaux. »

Le régime de Vichy n'est certes pas encensé. Mais on peut lire par exemple des faits historiques avérés : « Il est incontestable que la mortalité infantile – très élevée dans la France de l'entre-deux-guerres – a diminué sous l'Occupation dans les milieux populaires avant d'exploser à nouveau après la Libération. » Car Vichy avait une politique nataliste très soucieuse et des nouveau-nés et des mères, que ces dernières veuillent ou non les garder (bien entendu, l'avortement est farouchement combattu, comme dans la plupart des autres pays d'ailleurs).

Cela à une époque où, surtout par la volonté de l'Occupant accapareur, aidé par des profiteurs de guerre : « La gymnastique mentale pour calculer les rations familiales finit par remplir l'esprit de préoccupations matérielles obsédantes, éloignant d'autant des questions politiques. Pour certains, le jugement politique vient de l'estomac. » Mais : « Sans l'organisation du Ravitaillement, les Français les plus riches auraient en effet accaparé les denrées dont les prix auraient explosé et la famine aurait touché les pauvres. »

Plus loin, évoquant un sujet encore tabou, à savoir les bombardements alliés sur la France dont le caractère stratégique est pourtant nettement plus discutable que son bilan meurtrier, Michèle Cointet pointe les historiens idéologues : « Les jeunes des Équipes nationales, que des historiens au jugement rapide présentent comme des “fascistesˮ alors qu'ils accomplissent un service de protection civile, dangereux et utile, apportent leur aide. »

Elle enfonce même le clou : « Les bombardements de 1941, 1942,1943 n'étaient pas indispensables. Semer la mort dans un pays qui n'était pas en guerre et dont la population était bien disposée est une décision, à bien des égards, criminelle. Les installations industrielles travaillant pour les Allemands ont été souvent manquées. »

Pire, elle moleste l'Oncle Sam (qui n'aurait jamais gagné la guerre sans le sacrifice des millions de Russes au passage) : « Quant aux Américains il est maintenant admis qu'ils se sont exercés pendant plusieurs mois au-dessus de la France afin de se former dans un espace moins dangereux que celui de l'Allemagne. » Autant de vérités historiques mises (trop longtemps) sous le tapis, de peur de valider les accusations proférées par Vichy contre les bombardements alliés.

Pareillement, l'auteure ne cède pas à l'idolâtrie concernant les maquisards, responsables d'opérations désastreuses, dont celle de Tulle qui occasionna des représailles sanglantes. Oradour-sur-Glane suivra : « Il n'y avait pas de résistance particulière à Oradour-sur-Glane qui subit une opération programmée de terreur militaire. » Mais qu'attendre de SS abreuvés de haine ? Ici encore, Michèle Cointet brise les mythes en n'épargnant pas les Alsaciens protestant contre la condamnation des leurs au procès d'après-guerre et qui avaient tout de même participé à ce massacre calqué sur ceux pratiqués par les Allemands à l'Est.

S'agissant encore des Américains sur le sol français, il est indéniable que « nombre de soldats américains se comportent dans la France amie comme de véritables occupants méprisants et violeurs ». Quant aux procès qui auraient concerné essentiellement des soldats noirs, le wokisme est revu à la baisse par l'historienne, révélant que leur condamnation ne relève pas exclusivement du racisme. Même s'il est indéniable qu'être Noir dans les années 1940 aux États-Unis n'était pas une sinécure.

Autour de Pétain, Michèle Cointet s'en tient encore à l'Histoire et non à l'émotion mensongère. Toutefois, on notera que Pétain, qui aurait pu vivre sous la protection de la Suisse, a préféré se rendre aux autorités françaises et affronter son destin, face à des magistrats qui, ironie du sort, lui avaient presque tous prêté serment quelques années plus tôt ! Idem pour les communistes revanchards et qui, avant l'invasion de l'URSS par les Allemands, en juin 1941, n'avaient pas trop résisté, mais se gonflèrent d'importance à la Libération, oubliant que les premiers résistants étaient souvent des cathos réacs. Tout comme les flics ne furent pas tous des monstres lors des rafles et prévinrent des familles juives en amont, beaucoup protégées par les populations, notamment les enfants.

Non, la France n'était pas une succursale du IIIe Reich, contrairement aux allégations qu'on peut entendre çà et là.

Conclusion, le texte de Michèle Cointent, très savant et en dehors de toute forme de récupération, est d'une salubrité telle qu'il en devient indispensable.

[Un point, cependant : on ne peut comprendre l'Occupation si on ignore 1914-1918. En effet cette saignée aura une incidence incalculable sur l'avenir.]
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