Ce roman est une bonne découverte. Excellente, même ! En le lisant, l'estime que j'avais de l'auteur est remontée d'un coup (je connaissais déjà La Malédiction d'Old Heaven, que j'avais moyennement apprécié). La trame de
Vengeance est riche, travaillée, pleine de rebondissements et très agréable à suivre. L'auteur a cherché les détails qui la rendraient particulière, et l'écriture est fluide et très imagée. La seule chose qui m'a déplue est la longueur des chapitres. J'ai horreur des chapitres interminables. Et les 306 pages qui constituent le bouquin sont coupés en seulement… quatre parties, elles-mêmes réparties sur deux livres. J'ai eu des sueurs froides en voyant cela. Sérieusement.
Dans ce livre, les intrigues de cour sont au premier plan. Tirius sacrifie son honneur (et presque sa vie) pour que la réputation de son maître (frère du roi) reste sans tâche. Revenant demander réparation quelques années plus tard, il est promu général des armées pour lutter contre les Senthaïs (race maudite à la force extraordinaire qui pose de sacrés problèmes aux hommes en conquérant leurs villes). Mais ceci n'est qu'une feinte pour se débarrasser d'un pion gênant… Les hommes se manipulent, se trahissent, les honnêtes gens se battent pour des causes qu'ils croient justes et sont souvent punis de leurs erreurs.
Les personnages secondaires sont très crédibles. Ils doutent, ils ont peur, ils prennent parfois des décisions illogiques… Bref, ils sont humains. Par contre, Tirius et Orion sont trop bons pour être honnêtes. Orion, par exemple, a été élevé à la cour et garde pourtant une âme incorruptible. Un soupçon d'obscurité l'aurait rendu plus authentique (et encore plus attrayant, aussi^^ C'est mon personnage chouchou).
En revanche, Polonius est vil sans raison valable. Ce n'est pas non plus un méchant pure souche (c'est plutôt une chiffe molle égoïste), mais il faut toujours une raison à la méchanceté, sans cela, les personnages ne sont plus crédibles (qui, dans la vraie vie, est méchant sans raison ? Il y a souvent une origine : une enfance violente, un traumatisme, une maladie mentale, que sais-je encore ? le méchant de l'histoire, cela doit pouvoir être nous si nous avions eu une vie différente).
Un des points forts de ce livre est son suspens. Colin tourne autour du pot et ne nous révèle pas tout de suite tous les détails qui constituent son oeuvre. de temps en temps, quelques personnages parlent avec horreur des villes conquises par les Senthaïs, et évoquaient notamment ce qu'ils y faisaient. Et pendant les trois quarts du livre, j'ai pas arrêté de me demander : mais ils font quoi dans les villes capturées ? Qu'est-ce qu'il se passe ? Un très bon dosage des informations, qui sont livrées au compte-goutte.
Il y a aussi quelques passages un peu gore (qu'est-ce que vous voulez, c'est la guerre…), mais c'est justement ceux qui m'ont le plus captivée (par exemple, le prologue sur l'enfance de Tirius, ou le sacrifice des jeunes filles).
Dernier détail : à première vue, on dirait un récit à la troisième personne. Mais en fait non, Mesdames et Messieurs, c'est une feinte ! À certains moments, quand on s'y attend le moins, la narration passe brusquement à la première personne. Laissez-moi vous dire que c'est extrêmement perturbant. Tout le long du bouquin, je n'aspirai qu'à une chose : savoir qui était le bon Dieu de personnage qui raconte l'histoire ! C'est juste à la fin qu'on le découvre (révélation qui m'a un peu déçue, au final. Je m'attendais à une découverte un peu plus croustillante). J'admire ce stratagème, c'est un bon moyen de mettre la pression au lecteur en rajoutant un mystère. Je n'avais jamais vu ça ailleurs et je dois dire que c'est frais et innovant, très agréable (pour ceux qui aiment le suspens, en tout cas).
Bref, un bon livre, pas très long à lire, et qui m'a fait passer un bon moment !