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EAN : 9782020822732
949 pages
Seuil (05/10/2006)
4.43/5   7 notes
Résumé :

Ce dictionnaire concerne toutes les formes de bouddhisme existant dans le monde asiatique et ailleurs. Il répond à l’intérêt religieux et intellectuel porté au bouddhisme, et il a été conçu comme un outil de consultation, d’information, de travail et de recherche à destination non seulement des étudiants en bouddhisme, en philosophie, en anthropologie et en sciences des religions, mais également d’un large public intéressé par les divers aspects du boudd... >Voir plus
Que lire après Dictionnaire encyclopédique du bouddhismeVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Cadeau que j'ai reçu, il y a quelques années dans le cadre de mon anniversaire. Un très beau cadeau qui vaut son pesant d'or.

Il s'agit de l'ouvrage le plus complet (950 pages) en français à propos des concepts, les termes, les notions, les références bouddhiques que cela soit au niveau de la roue du Dharma en passant par des notions plus méconnues du grand public, cet ouvrage classifie, explique, tel un dictionnaire ce qu'il y a à savoir.

Une véritable encyclopédie qui devrait trouver sa place chez les chevronnés, experts et connaisseurs du bouddhisme d'ailleurs ou bien d'ici.
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INDISPENSABLE À TOUT ÉTUDIANT DU BOUDDHADHARMA !



Il était temps que j'en parle !
Car voilà une pierre angulaire du bouddhisme francophone.
Non pas qu'elle fut mise au rebut et que l'on en a fait une pierre servant, finalement, à bâtir tout l'édifice – mais ce Dictionnaire encyclopédique, pour qui est curieux, avide de connaissances, de savoirs, voulant étudier LES bouddhismes dans ses multiples langues et dialectes, lui sera absolument indispensable. C'est un énorme pavé certes, mais qui reste raisonnable au poids, malgré ses dimensions et son épaisse couverture. Ne passez pas à côté de cet ouvrage de référence, rangé dans mon TOP 20 Bouddhisme. Il vaut son prix, largement.

Cependant, c'est une vraie mine d'or. Ce Dictionnaire encyclopédique du Bouddhisme rassemble, sous forme d'articles de fond, un nombre impressionnant de données : tant des concepts philosophiques, historiques et doctrinaux des divers bouddhismes, que des lignées de maîtres et leurs biographies, des index inestimables, etc. Je ne vais pas vous faire un dessin (il y en a plein dedans) : il porte très bien son nom ! Et lisez sa quatrième de couverture.

D'abord publié en 2001, cette Nouvelle édition augmentée (NEA) s'est enrichie en 2006. Voici 10 ans que je l'ai désormais, et je pense que cette édition est encore tout à fait valable. Vous pouvez l'acheter sans problème.

Que vous soyez novice, et ce dictionnaire vous apprendra des tonnes d'informations sur « le bouddhisme », et éclairera tout ce que vous lirez : je m'en suis beaucoup servi lors de mes débuts. Il est plein d'annotations et de marque-page !

Et si vous êtes un méditant aguerri, mais guère un étudiant… alors il est temps de vous mettre à l'étude, et donc, là aussi, d'acquérir ce gros bébé de papier. de plus, l'on y trouvera de tout, des bases jusqu'aux premiers éléments des branches ésotériques à initiation : le reste à savoir qui suit ceux-ci, je le déduis : vous irez vous former auprès d'un « maître », car le bouddhisme, c'est une histoire de transmissions.

Toutefois j'ai tellement et tellement lu de livres bouddhistes et des bouddhismes depuis, que je pense qu'il serait fort bien venu qu'une deuxième « NEA » soit éditée, et que Philippe Cornu et ses confrères – chacun et toujours dans leur bouddhisme respectif – révise donc et augmente ce dictionnaire, surtout dans notre époque numérique interconnectée où l'on peut lire surtout des idioties. Et vu notre retard éditorial national, notamment en langue anglo-américaine, pour ne citer qu'elle (la France est toujours la dernière roue du carrosse en matière de traductions), nous avons bien du chemin à rattraper. Heureusement que nous avons ce dictionnaire encyclopédique pour nous débrouiller !

Voilà, vous n'avez plus qu'à le trouver ! Personnellement, je rachèterai la troisième version… si elle paraît un jour !

Je vous souhaite une excellente lecture !

ZUIHÔ
Lien : https://livresbouddhistes.co..
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Excellent ouvrage de références. Tous les principaux termes, toutes les notions s'y trouvent très détaillés.Cependant, cet ouvrage n'est sans doute pas celui par lequel on commencera sa recherche sur le bouddhisme.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
samaya : (sk.), TIB. dam-tshig, JAP. sammaya "Lien sacré", "promesse solennelle", terme qui désigne la promesse solennelle d'engagement envers le maître de vajra et la voie du Vajrayâna, promesse adamantine que le pratiquant veille à ne pas transgresser ni rompre.
Les vœux de samaya sont des vœux propres au tantra, que l'on prend lors de l'abhiseka ou transmission de pouvoir. Il s'agit d'un certain nombre de règles et de principes qui constituent le cadre d'une pratique du Vajrayâna authentique et efficace. Consistant non pas à renoncer aux passions mais à les utiliser sur la voie pour les transmuer en sagesse, les moyens habiles du Vajrayâna ne sont pas dénués de danger pour celui qui les utiliserait à mauvais escient ou les détournerait de leur noble but.
C'est pourquoi on dit que préserver ses vœux de samaya est semblable à un joyau qui exauce tous les souhaits, le respect du samaya étant la racine de tous les accomplissements spirituels : « Le lien sacré du Vajrayâna est à l'exemple de la terre : comme il est à l'origine de tous [les accomplissements], il devient le meilleur des terreaux », déclare le rDo-rje sems-dpa' snying-gi me-long (trad. de l'auteur).
À l'inverse, les négliger, les endommager ou bien les briser peut entraîner la ruine du pratiquant ainsi que celle du maître qui lui a conféré les transmissions : « Au maître de vajra qui a dévoilé le sens du Mantrayàna secret, on peut bien avoir offert des pierres précieuses, de l'or et même son propre corps, si le lien sacré devient confus, il consumera maître et disciple », déclare sans ambages le même texte.
Le transgresseur ou briseur de samaya, à moins de s'amender par une purification, se ferme lui-même la porte d'accès à la libération et se destine, selon l'expression consacrée, à chuter en Avici, le terrible enfer de vajra (TIB. rdo-rje myal-ba). Le Yon-tan mdzod le confirme : « Dans les mantra secrets, il n' y a que deux issues, les inondes inférieurs ou la bouddhéité. » "La punition des dàkini" (TIB. mkha'-'gro'i chad-pa) n'est pas une punition extérieure mais le résultat d'un karma personnel, celui qui résulte de la perversion des énergies d'Éveil de l'individu. Celui-ci 'détruit ainsi ses chances de libération pour long-temps en chutant dans de mauvaises renaissances. On craint tant les briseurs de samaya dans le vajrayâna qu'il est conseillé aux pratiquants de rompre tout lien avec de telles personnes, à cause d'un risque de contamination spirituelle pouvant affecter leur pratique.
MANQUEMENTS, CORRUPTIONS, BRISURES ET RÉPARATION DU SAMAYA. Nombreux et subtils sont les vœux du samaya, qui varient d'un tantra à l'autre, et il est bien souvent difficile de n'en transgresser aucun. La mauvaise compréhension, l'oubli, la négligence, la divulgation des ...
p. 476/77
… méthodes secrètes, l'irrespect du maître et des "frères et sœurs de vajra" (ceux qui ont reçu les mêmes engagements du même maître) sont autant d'occasions d'endommager ses vœux. Le degré suivant étant le détournement de la pratique vers des buts égoïstes, la mauvaise foi et, pis encore, la rupture délibérée des vœux.
Mais, qu'il s'agisse d'erreurs ou de méprises (TIB. 'gal-'khrul), d'endommagement ou de corruption (TIB. nyams-pa), de violation délibérée ou de brisure réelle (Tm. chags-pa), le pratiquant peut réparer ses vœux, le plus rapidement étant le mieux (après trois ans, certaines brisures ne sont plus considérées comme réparables). Il est donc important pour le yogi du Vajrayâna d'étudier le sens des vœux, de comprendre clairement la Vue du Vajrayàna afin de pouvoir mieux respecter le samaya.
Il doit aussi se vérifier pour reconnaître et confesser (TIB. thol-lo bshags) régulièrement ses manquements afin de les purifier. Pour cela, il dispose de diverses pratiques comme la récitation du mantra des cent syllabes de Vajrasattva ou l'un des nombreux textes de confession tantrique du type Narag dong-sprugs, dont le nom signifie "Ce qui ébranle les tréfonds de l'enfer". Accomplies avec sérieux, vingt et une récitations quotidiennes du mantra de Vajrasattva ont la réputation d'empêcher tout accroissement des chutes. Cent récitations quotidiennes purifient celles du jour. La récitation de 100 000 mantra purifie complètement l'individu des fautes présentes et passées. Très essentiellement, préserver le samaya, c'est respecter la nature de bouddha qui réside en soi, servir et respecter le maître qui a révélé les méthodes permettant d'actualiser cette nature et, du même coup, respecter la lignée de transmission. Ainsi seront préservées la force et la vitalité des enseignements des tantra pour les générations futures de pratiquants.
LES DIFFÉRENTS TYPES DE SAMAYA. On distingue trois grands types de samaya :
I. Les samaya généraux, qui incluent les vœux de libération individuelle (sic. pratimoksa, TIB. so-sor thar-pa) et les voeux de bodhisattva (sic. pranidhâna, TIB. byang-sems-kyi sdom), prélimi-naires indispensables à tout engagement dans le Vajrayâna. Ce sont les seuls requis pour les deux premières classes de tantra (Kriyatantra et Càrya-tantra).
II. Les samaya spécifiques au Vajrayâna. Il s'agit du samaya du Yogatantra et des tantra supérieurs, divisé en samaya principaux (sic. infilasamaya, TIB. rtsa-ba'i dam-tshig) et samaya secondaires (sic. afigasamaya, TIB. yan-lag-gi dam-tshig). Leur liste n'est pas toujours la même,
mais ils ont pour fondement constant les promesses relatives aux cinq familles de bouddhas.
III. Les samaya occasionnels, liés au contexte d'une pratique particulière, pour un temps limité. On distingue par ailleurs les samaya du corps qui ont trait au comportement physique, les samaya de la parole qui ont trait aux actes de la parole et aux mantra, et les samaya de l'esprit qui concernent la Vue et l'intention.
LES SAMAYA SPÉCIFIQUES. On distinguera dans le bouddhisme tibétain les samaya des tantra anciens de ceux des tantra dits "nouveaux".
A. Les tantra anciens de l'école Nyingmapa ont pour principe de base les samaya du Guhya-garbhatantra. Dans celui-ci, on mentionne cinq samaya principaux et dix samaya secondaires.
I. Les samaya principaux
1. Ne pas abandonner l'insurpassable : c'est le vœu de ne jamais abandonner les deux aspects de la bodhicitta, relative et absolue, au cours de la pratique du Vajrayàna. Cet engagement apparaît dès lors comme l'application pratique du principe de compassion (bodhicitta relative) à travers les moyens habiles (sx. upàya), en prenant soin de maintenir la Vue de la vacuité et de la pureté originelle de tous les phénomènes (bodhicitta absolue appelée prajnà dans les tantra). Le débutant aspire à développer la Vue de l'égalité et de la pureté de tous les phénomènes et développe la confiance en cette Vue tout en cultivant la com-passion. Peu à peu. sa réalisation croît et, avec elle, le maintien du principe de l'insurpassable dans toutes ses activités. La faute serait de perdre la confiance en la Vue et la motivation altruiste, ou bien de cultiver la Vue dans la pratique et de l'oublier dans la vie quotidienne, ce qui revient à se comporter comme un être ordinaire.
2. Honorer son maître : c'est au maître que le disciple doit de pouvoir développer les qualités de la pratique. Sans lui, rien n'est possible dans le Vajrayàna. En conséquence, le disciple doit s'efforcer de l'honorer par le corps (le service rendu au maître), la parole (ne pas médire du maître mais toujours en parler avec respect) et l'esprit (ne pas se fâcher contre le maître, entretenir des vues pures à son égard). Cela vaut pour tous les maîtres dont l'étudiant reçoit des instructions du Vajrayâna à divers degrés, mais importe encore plus pour le maître-racine ou principal (sic. mùlaguru, TIB. rtsa-ba'i bla-ma).
3. Utiliser sans cesse mantra et mudrà : c'est le maintien quotidien de la récitation du mantra et de la visualisation de soi-même comme la déité. Le principe de ce vœu est le maintien d'une pratique régulière.
p.477
4. Être bienveillant à l'égard de ceux qui sont engagés sur la voie authentique : ce vœu concerne tous ceux qui suivent le Mahàyàna ou le Vajrayâna, et plus spécialement les frères et sœurs de vajra (TIB. rdo-rje spun-grogs) qui suivent le même maître de vajra. Ils sont engagés les uns envers les autres dans un lien d'amitié et de soutien spirituel jusqu'à l'Éveil. Quelle que soit la nature de leurs relations mondaines (amis, amants, mari et femme, etc.), ils ne doivent jamais abandonner l'amour et la bienveillance entre eux.
5. Ne pas divulguer les secrets : un pratiquant du Vajrayâna ne doit jamais révéler les méthodes secrètes du tantra à des non-initiés, pour éviter toute interprétation erronée de leur part. Il s'agit essentiellement de ne pas parler de la Vue des tantra, de ne pas parler des détails de sa pratique personnelle, de ne pas faire montre de ses accomplissements, de ne pas se conduire de manière spéciale ou excentrique.
II. Les samaya secondaires. Cinq concernent les cinq poisons à ne pas abandonner mais à utiliser habilement sur la voie pour développer les cinq sagesses, et les cinq autres concernent les "cinq nectars" à ne pas abandonner. Autrement dit, il s'agit de dépasser la vue du pur et de l'impur dans la pratique. A cela, on peut ajouter les fautes qui endommagent (TIB. nyams-pa'i skyon) les samaya, comme l'inattention dans la pratique, ne pas faire d'offrandes aux dates prévues, la paresse, la distraction, l'avarice dans les offrandes, manger la première part d'offrande destinée au mandala, l'insouciance et la grossièreté de comportement.
B. Dans les tantra des écoles nouvelles (Sakyapa, Kagyüpa, Guélougpa), on distingue d'abord les promesses liées aux cinq familles de bouddhas, puis on énumère généralement quatorze chutes concernant le samaya-racine et huit concernant les samaya secondaires.
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abhiseka (sk.), tib. dbang, ch. guanding, jap. kanjô ¶ Litt. "ablution qui rend manifeste" en sanskrit, et "transmission de pouvoir" selon le tibétain. Le terme "initiation" a été vulgarisé en Occident, mais "transmission de pouvoir" est plus juste. On parle de "conférer la transmission de pouvoir" (sic. abhisirica, tib. dbang-bskur-ba).
L'abhiseka est l'un des dix sujets des tantra et la porte d'entrée qui autorise la pratique du Vajrayàna. Elle est indispensable à quiconque souhaite entrer dans une telle voie. Seul un maître qualifié, le vajrâcàrya (tib. rdo-rje slob-dpon), est habilité à la conférer.
Les qualités requises sont les suivantes : il doit prendre soin de ses vœux, être motivé par la compassion, avoir la connaissance des tantra et avoir accompli lui-même une retraite et maîtrisé les signes d'accomplissement de la pratique correspondante au niveau du tantra qu'il confère. Le disciple lui-même doit être un pur réceptacle, animé par la motivation de la bodhicitta et la dévotion, et doit s'engager à préserver les vœux spécifiques à la transmission de pouvoir (sk. samaya, tib. dam-tshig). Traditionnellement, maître et disciple doivent s'examiner avant de s'engager l'un envers l'autre.
La transmission de pouvoir consiste à révéler au disciple ses potentialités cachées, à dénouer ses blocages et à purifier ses obscurcissements. Elle crée en lui les conditions qui l'autorisent à pratiquer la voie du Vajrayàna. C'est "la transmission de pouvoir qui fait mûrir" (nu. smin-byed-kyi dbang), comparée à une graine plantée dans l'esprit du disciple. Pour la conférer, le maître entre dans le samâdhi de la déité et utilise différents objets rituels porteurs d'un sens symbolique, ainsi que des substances spécifiques (tib. rdzas) préparées à cet usage. S'il est habituel, de nos jours, dans le bouddhisme tibétain, de conférer des transmissions de pouvoir dans un environnement rituel sophistiqué avec un mandala de sable ou une "maison du mandala", de nombreux objets précieux et à une assemblée de disciples parfois importante, il faut toutefois se rappeler que la transmission de pouvoir est avant tout individuelle, qu'elle engage le maître envers chaque disciple et chaque disciple envers le maître. Dans les temps anciens, les mahàsiddha la conféraient à une seule personne à la fois ou à un petit groupe à l'aide de quelques objets rudimentaires. De fait, quand un maître confère une transmission de pouvoir en grande assemblée, il ne demande pas aux participants non préparés de s'engager dans les visualisations ni de prendre des vœux spécifiques de samaya. C'est alors une transmission que tout un chacun peut prendre en guise de simple bénédiction, comme une graine plantée pour l'avenir. Pour les disciples engagés, la transmission de pouvoir doit être suivie d'une "lecture orale d'autorisation" (tib. bka'-lung, lung) des textes de sàdhana à pratiquer et d'instructions (tib. khrid) expliquant comment pratiquer précisément. Au Japon, dans le Shingon et le Tendai, l'abhiseka n'est conférée qu'individuellement ou à de petits groupes de disciples choisis, dans le plus grand secret.
■ LES DIFFÉRENTES SORTES D'ABHISEKA.
Selon la classe de tantra envisagée, différentes transmissions de pouvoir sont exigées.
I. Dans les tantra extérieurs ou inférieurs, que l'on trouve tant dans le bouddhisme tibétain que dans le bouddhisme ésotérique japonais (écoles Shingon et Tendai), l'accent est mis sur la purification et la visualisation. L'abhiseka aura pour pivot la transmission de pouvoir de l'eau d'ablution purificatrice. Mais, pour chaque type de tantra, elle s'accompagnera d'autres initiations.
1/. Le Kriyàtantra comprend :
a) La transmission de pouvoir préliminaire de la guirlande de fleurs (tib. me-tog-'phreng dbang) qui permet au disciple d'entrer dans le mandala.
b) La transmission de pouvoir de l'eau ou du vase (sk. udakàbhiseka, tib. chu'i dbang) qui est la principale, où le maître consacre l'eau de l'aiguière (sk. kalasa, tib. bum-pa) par le samâdhi et la récitation de mantra, considérant que la déité du mandala est à l'intérieur du récipient, indissociable de l'eau d'initiation. Le disciple est touché en différents points du corps par l'aiguière et boit de son eau, ce qui purifie son corps des obscurcissements et l'autorise à visualiser la déité.
c) La transmission de la couronne (sk. muku-tàbhiseka, tib. cod-pan-gi dbang), semblable au couronnement d'un roi, où le disciple reçoit la couronne qui le consacre fils des vainqueurs.
Elles sont suivies de la permission de pratiquer.
2/. Le Caryatantra comprend ces trois premières transmissions de pouvoir, suivies de :
d) La transmission de pouvoir du vajra (sic vajràbhiseka, tib. rdo-rje'i dbang), qui est la transmission de pouvoir de l'esprit de tous les bouddhas, lequel est considéré comme l'essence de la félicité et de la vacuité indissociables.
e) Parfois la transmission de pouvoir de la clochette ou ghanta (sic ghantâbhiseka, tib. dril-bu'i dbang), plus souvent réservée à la classe suivante de tantra. f)
f) La transmission de pouvoir du nom (sk. nâmàbhiseka, tib. ming-gi dbang) où le disciple reçoit un nom d'initiation lié à Vairocana. Puis vient la permission de pratiquer.
3/. Le Yogatantra comprend les cinq sortes de transmissions, chacune étant reliée à l'une des cinq familles de bouddhas :
a) La transmission du vase liée à Aksobhya, le bouddha du corps.
b) La transmission de la couronne liée à Rama-sambhava, le bouddha des qualités.
c) La transmission de pouvoir du vajra liée à Amitâbha, le bouddha de la parole.
d) La transmission de pouvoir de la clochette liée à Amoghasiddhi, le bouddha des activités.
e) La transmission du nom liée à Vairocana, où le disciple reçoit un nom secret, le vajra et la clochette.
On y ajoute une sixième transmission de pouvoir :
f) La transmission de pouvoir du maître, qui comprend trois éléments de promesse : se rappeler l'ainsité (sk. tathatà) du vajra uni à la clochette, pratiquer le grand symbole ou Mahàmudrà qui consiste à se visualiser comme la déité, et enfin le souhait de développer la sagesse non duelle de la vacuité/luminosité, l'union indivisible des moyens et de la connaissance.
II. Dans les tantra intérieurs ou supérieurs, qui ne sont actuellement présents que dans le bouddhisme tibétain, il existe quatre grandes transmissions de pouvoir, la première d'entre elles rassemblant tous les éléments des transmissions de pouvoir des tantra externes et les autres étant spécifiques aux méthodes de l'Anuttara-yogatantra ou du Mahâyoga, de l'Anuyoga et du Dzogchen selon les cas. Autrefois, on ne donnait qu'une transmission à la fois, la suivante n'étant accordée qu'après la maîtrise du niveau précédent. Mais, de nos jours, on les reçoit les unes après les autres dans une même initiation.
1/. La transmission de pouvoir du vase (sk. kalagehiseka, tib. bum-pa'i dbang) nécessite l'édification d'un mandala, qu'il s'agisse d'une maison du mandala contenant tous les objets symboliques de l'initiation (torna, aiguières,substances, images de la déité) ou bien d'un mandala de sable coloré quand c'est possible. Elle comporte sept (Kàlacakra), neuf, dix (Guhyagarbha) ou même onze phases selon le degré d'élaboration du rite et le tantra envisagé. Le support d'initiation est l'eau de l'aiguière consacrée contenant le corps de la déité et ceux des déités du mandala. Touché par l'aiguière (ou les aiguières successives) et buvant l'eau d'initiation, le disciple reçoit la bénédiction des cinq familles de bouddhas, et simultanément les obscurcissements du corps sont purifiés. Il reçoit l'autorisation de pratiquer la phase de développement de la déité (la visualisation) et peut ainsi développer la potentialité du nirmânakàya.
2/. La transmission de pouvoir secrète (sic guhyâbhiseka, tib. gsang-ba'i dbang) a pour support le corps du maître de vajra lui-même qui assume dans sa visualisation la forme de la déité d'où s'écoule un nectar de bodhicitta qui vient s'unir à l'ambroisie (sk amrta, tib. bdud-rtsi) contenue dans une coupe crânienne. En recevant l'ambroisie, le disciple obtient la bénédiction de la parole de la déité et ses obscurcissements verbaux sont purifiés, tandis qu'il fait l'expérience de la félicité. Il reçoit l'autorisation de réciter le mantra de la déité et gagne la capacité d'actualiser le sambhogakàya.
3/. La transmission de la sagesse-connaissance suprême (sk. prajMenâbhiseka, tib. shes-rab ye-shes-kyi dbang) a pour support la félicité de l'épouse mystique de la déité. Du cœur des déités en union jaillit une lumière qui touche le disciple, purifie les obscurcissements de son esprit et lui transmet la bénédiction de l'esprit de tous les bouddhas. Il en éprouve une expérience béatifique qu'il pourra ensuite développer dans le samàdhi de félicité/vacuité, réalisant ainsi la sagesse co-émergente. Il reçoit aussi l'autorisation de pratiquer la phase d'achèvement qui comprend la pratique du yoga de la Candalï avec une karmamudrà et gagne la capacité d'actualiser le dharmakâya.
4/. La transmission de pouvoir du mot (us. tshig-gi dbang) prend pour support la sagesse primordiale et consiste à montrer, à l'aide de symboles (cristal, miroir, etc.) expliqués en peu de mots, la nature ultime de l'esprit. Elle purifie l'ensemble des obscurcissements du corps, de la parole et de l'esprit combinés et confère l'expérience de la sagesse innée. Dans le système Nyingmapa, cette dernière transmission correspond au Dzogchen et consiste en une présentation de rigpa, l'état naturel.
p. 29 à 31
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■ LES GRANDES TRANSMISSIONS DE POUVOIR.
La manière de présenter ces quatre initiations, l'accent plus ou moins grand mis sur les unes ou les autres et le nombre des subdivisions dans la présentation de la transmission de pouvoir varient d'un tantra à l'autre. Ainsi, dans les tantra anciens, la grande transmission de pouvoir du Guhyagarbha qui introduit au mandala des cent déités paisibles et courroucées comporte dix-huit phases en tout : dix initiations externes ou "bénéfiques", préparation correspondant à la transmission de pouvoir du vase, cinq initiations internes ou "donnant l'énergie" (initiation autorisant l'écoute de tous les tantra secrets, initiation pour pratiquer le samàdhi des phases de développement et d'achèvement, deux initiations concernant les quatre activités, et initiation du roi adamantin sans limites destinée à faire mûrir le potentiel contenu dans l'esprit des êtres), et trois initiations secrètes ou profondes destinées aux yoga internes de la phase d'achèvement.
La grande transmission de pouvoir du Tsok-chen dupa (tib. tshogs-chen 'dus-pa) de l'Anuyoga comprend trente-six phases (dix initiations extérieures semblables à celle du vase, onze initiations intérieures correspondant aux cinq secrètes précédentes, treize initiations correspondant aux trois secrètes et deux initiations secrètes de la phase d'achèvement).
Dans le Dzogchen men ngak dé du cycle secret insurpassable (tib. yang-gsang bla-na-med-pa'i skor), il existe un système de transmissions de pouvoir qui revêt partiellement les formes et dénominations de celles qui sont dispensées dans les tantra supérieurs. Parmi les grandes transmissions de pouvoir du sNying-thig ya-bzhi, citons celle du Bla-ma yang-tig. Elle comporte :
1/. La transmission de pouvoir élaborée (ris. spros-bcas-kyi dbang), elle-même subdivisée en initiation du vase, initiation secrète, initiation de la sagesse/connaissance suprême et initiation du mot, la dernière concernant plus spécifiquement la pratique dzogchen de thôgal (tib. thod-rgal).
2/. La transmission de pouvoir sans élaboration (tib. spros-med-kyi dbang), qui comprend l'initiation de la roue des lettres (en trois parties) et l'initiation du sens de la dharmatâ (en quatre parties).
3/. La transmission de pouvoir complètement dénuée d'élaborations (tib. shin-tu spros-med-kyi dbang), qui comporte une seule initiation.
4. La transmission de pouvoir absolument dénuée d'élaborations (tib. rab-tu spros-med-kyi dbang), également en une seule initiation.
Les trois dernières transmissions ont un caractère nettement moins tantrique que la première.
Parmi les tantra nouveaux, lors de la grande transmission de pouvoir du Kàlacakra, qui dure trois à quatre jours (une dizaine si l'on compte les phases préparatoires), on dénombre les sept initiations de "l'entrée à la manière d'un enfant" données le premier jour comme préliminaire :
p. 31

initiations de l'eau, de la couronne, du ruban de soie, du vajra et de la cloche, de la conduite, du nom et de permission.
Les jours suivants sont conférées les quatre initiations élevées et les quatre très élevées, regroupées ainsi : les deux initiations du vase (élevée et très élevée), les deux initiations secrètes (élevée et très élevée), les deux initiations de sagesse/connaissance suprême (élevée et très élevée) avec la première initiation du mot dite "provisoire" et enfin l'initiation du mot définitive. L'ensemble est suivi d'une initiation finale dite du "Seigneur maître de vajra".
■ LE RITUEL D'UNE TRANSMISSION DE POUVOIR. Bien qu'originellement la transmission de pouvoir pouvait être conférée très essentielle-ment, il existe un rituel codifié qui met en scène la cérémonie de transmission de pouvoir visant à créer des conditions favorables dans l'esprit du disciple. Dans le cadre tibétain d'une transmission de pouvoir d'un tantra supérieur, on peut dénombrer plusieurs phases classiques :
1/. La préparation de la transmission de pouvoir : elle consiste à déterminer le moment propice, à purifier le lieu d'initiation et l'emplacement où l'on va créer le mandala en demandant aux déités locales l'autorisation d'accomplir le rituel et à la déité d'élection l'autorisation de conférer sa transmission de pouvoir. Une fois le mandala préparé, le maître s'apprête à conférer l'initiation. Seul, il accomplit le rituel de la déité, effectue cent mille récitations du mantra de la déité, dix mille pour les déités secondaires du mandala, dix autres mille pour recevoir la pluie des bénédictions, et prend l'auto-initiation qui le rend identique à la déité. Puis il prépare les objets et substances nécessaires à la cérémonie : il bénit l'eau de l'aiguière, l'amrita, les torma, etc. Après quoi les disciples sont autorisés à entrer dans l'enceinte en se rinçant la bouche avec de l'eau de purification de Vajrasattva.
Quand ils sont installés face au maître, celui-ci offre une torma (us. gegs-gtor) aux forces créatrices d'obstacles, pour les apaiser et les expulser, et visualise la tente de vajra ou cercle de protection (tib. rdo-rje'i gur, bsrung-ba'i 'khor-lo). Il explique ensuite l'histoire de la transmission. Les disciples font l'offrande d'un mandala pour demander l'initiation et répètent une formule de requête qui est acceptée. Le maître confère alors systématiquement les préceptes du refuge et de la bodhicitta, préliminaires indispensables. Puis les disciples offrent une prière en sept branches, reçoivent les préceptes généraux et, plaçant le bandeau rouge de l'ignorance sur leurs yeux, présentent au maître la requête d'ouvrir les portes du mandala. Le maître explique alors aux disciples comment ils doivent se visualiser sous la forme de la déité et les disciples jettent une fleur sur un mandala de bois pour déterminer à quelle famille de bouddhas ils appartiennent. À l'aide d'un stylet de vajra, le maître fait le geste symbolique de dissiper l'ignorance et les étudiants ôtent le bandeau de leurs yeux.
2/. La partie principale : le maître révèle le mandala et invoque les bouddhas afin de pouvoir conférer l'initiation. II procède alors à la transmission de pouvoir du vase (eau, couronne, vajra, clochette, nom, maître) et souvent à une transmission de pouvoir du vase des vainqueurs qui condense l'ensemble. Puis il procède à l'initiation secrète, prononçant par trois fois le mantra de la déité, que les disciples répètent avant de poursuivre avec la troisième initiation, puis la quatrième. Enfin, il autorise les disciples à accomplir la pratique en plaçant le texte sur leur tête.
3/. La conclusion : il explique les préceptes du samaya qui engage les disciples envers le maître et la pratique, puis les disciples offrent un mandala en guise de remerciement avant de dédier les mérites qui viennent d'être accumulés à tous les êtres. Habituellement, la transmission de pouvoir se conclut par un festin d'offrandes ou ganacakrapùja (tib. tshogs-kyi 'khor-lo).
❑ Sur les transmissions de pouvoir, on peut lire Dilgo Khyentsé Rinpoché, « Pure apparence » (chap. I, p. 1-32), Vajravairochana, Halifax, 1992. — Tenzin Gyatso, the Dalai Lama et J. Hopkins, « The Kalachakra Tantra. Rite of Initiation », Wisdom, Londres, 1985.
Voir tantra, Vajrayâna, pùja
p. 31 et 32
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maître spirituel, sk. “guru” , àcàrya, tib. bla-ma, slob-dpon, cil. et jap. shi ¶ Dans le bouddhisme, la notion de, maître spirituel et la façon de s'y relier diffèrent selon le véhicule considéré.
■ LE MAÎTRE SELON LE HINAYANA. Dans le Hinayàna et actuellement dans le Theravâda, le maître est le bouddha Gotama (Sâkyamuni), dont l'influence spirituelle demeure vivante au travers du Tipitaka. Les moines les plus expérimentés et les plus érudits sont des "anciens" (pal. thera) ou vénérables, considérés par les laïcs et les autres moines comme des conseillers spirituels et les garants de l'enseignement du Dharma. La communauté theravâdin de Sri Lanka est dirigée par un groupe de mahâthera, des moines respectés pour leur sagesse et leur connaissance du Canon pâli. Mais il est stipulé que même les arhat (pal. arahant) des sràvaka et des pratyekabuddha n'ont pas le pouvoir d'enseigner par eux-mêmes la vérité à des disciples, pouvoir que seul un bouddha parfait a développé. Les moines se réfèrent donc exclusivement aux paroles du Bouddha.
■ LE MAÎTRE DANS LE MAHAYANA. Dans le Mahâyâna, le maître spirituel est assimilé au bodhisattva éclairé qui aide ses semblables sur la voie. Beaucoup de grands érudits du Mahâyâna enseignaient dans les universités bouddhistes de l'Inde comme Nâlandà. Ils étaient respectés comme des maîtres spirituels importants. Leur parole faisait autorité autant que leurs écrits (sic. gâstra) et l'on sait à quel point il était important pour eux de remporter les débats philosophiques, le vaincu ainsi que ses disciples devant embrasser le point de vue du vainqueur. Cependant, la notion de maître correspondait encore essentiellement à celle d'ami et de conseiller spirituel (sic. kalyânamitra, tib. dge-ba'i bshes-gnyen), "le maître qui montre la voie de la vertu".
Plus tard, dans le bouddhisme chinois et notamment dans le Chan, le maître spirituel devient le maillon incontournable de la transmission vivante de l'enseignement et de la pratique. C'est ainsi que, soucieux de valider la lignée spirituelle, les adeptes du Chan ont légitimé une lignée de patriarches chinois et même indiens qui remonte à Mahàkâgyapa, le successeur du Bouddha. Dans le Chan/Zen, ne devenait maître que le disciple confirmé dans sa compréhension par son propre maître. Ce dernier lui remettait alors symboliquement la robe et le bol, faisant ainsi de lui son successeur. Les écoles devaient beaucoup à la renommée de leurs maîtres du moment. En honorant les maîtres des écoles bouddhistes chinoises de titres tels que celui de "maître de la robe pourpre" ou de "maître de la nation" (cil. guo-shi), et en nommant certains d'entre eux précepteurs impériaux, les empereurs chinois des Tang et des Song ont fréquemment contribué à cela.
Au Japon, l'importance des maîtres s'est vue confirmée et les grandes figures d'écoles se sont vu attribuer le titre posthume de Daishi ("grand maître", cil. dashi) ou de Kokushi ("maître de la nation", cil. guoshi). Il en fut ainsi de Kùkai, vénéré sous le titre de Kôbô Daishi. Par ailleurs, on appelle du titre honorifique de Zenji Chanshi), "maître en dhyâna", les maîtres principaux du Zen comme Dôgen. Si le titre de sensei ("professeur") convient à n'importe quel enseignant, celui de rôshi, "vieux maître", n'est donné qu'aux maîtres zen confirmés et âgés.
p. 344
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■ LE MAÎTRE DANS LE VAJRAYANA. C'est incontestablement dans le Vajrayâna que le maître occupe une place centrale. En Inde, on considéra les "grands accomplis" ou mahâsiddha tels que Saraha ou Tilopa comme des maîtres parfaits. Bientôt, des Népalais et des Tibétains vinrent auprès d'eux recevoir la transmission des tantra pour la diffuser dans leur pays, et des maîtres tantriques indiens partirent aussi pour la Chine, la péninsule indochinoise et l'Indonésie afin d'y implanter le Vajrayâna. Partout considérés par leurs disciples comme le Bouddha lui-même, on leur accordait la confiance la plus grande.
Quand, au VIIIe et au XIe s., le Vajrayàna se développa au Tibet, les maîtres, appelés lama (tib. bla-ma), en furent naturellement la clé. Certains voyageurs et spécialistes occidentaux du XIXe s., frappés par l'importance donnée au lama dans la culture tibétaine, nommèrent le bouddhisme tibétain "lamaïsme". Mais cette insistance sur le rôle du maître n'est pas spécifiquement tibétaine, elle reflète l'esprit même du Vajrayâna. Parmi les lama, il faut d'ailleurs distinguer plusieurs sortes d'enseignants religieux. Par politesse et convention, on appelle souvent lama un simple enseignant religieux ayant des connaissances générales, qui n'est pas habilité à enseigner les tantra ni à conférer une transmission de pouvoir, dont le rôle est plutôt semblable à celui de l'ami spirituel dans le Mahàyàna. Ce type de lama ne doit pas être confondu avec le véritable "maître de vajra" (sic vajrâcârya, tib. rdo-rje slob-dpon), maître qualifié pour transmettre le Vajrayàna et véritable autorité spirituelle. Les Occidentaux s'y sont souvent trompés. Quelques précisions ne sont pas inutiles :
1/. Dans l'aire culturelle tibétaine, il existe deux types de religieux, les moines qui ont reçu l'ordination selon le Vinaya, le "sangha rouge", et les yogi ou mantrika laïcs (tib. sngags-pa, rnal-'byor-pa) qui poursuivent des lignées familiales (filiales ou d'oncle à neveu), le " sangha blanc". Un lama maître de vajra peut appartenir à l'une ou l'autre des communautés, être moine ou bien laïc.
2/. Un lama n'est qualifié de maître de vajra que s'il remplit les conditions suivantes : avoir une grande compassion, avoir la connaissance théorique et pratique des tantra, avoir accompli une ou plusieurs retraites jusqu'aux signes de réalisation de la déité, préserver un samaya pur avec ses maîtres.
3/. Un maître de vajra peut entretenir plusieurs types de relations avec ses étudiants : a) Dans un cercle large, il enseignera le Dharma général comme le refuge et le Mahàyàna. Pour ces disciples, il sera peut-être le "maître de refuge", mais l'engagement du refuge n'est pas l'engagement du Vajrayâna et ils n'auront pas à le considérer comme leur maître de vajra.
b) Dans un cercle restreint de disciples choisis, il enseignera le Vajrayàna ou bien le Dzog-chen après avoir conféré les transmissions de pouvoir adéquates. Ces disciples doivent alors considérer le maître comme leur maître de vajra et respecter le sacré ou samaya (tib. dam-tshig) avec lui.
Là encore, un distinguo doit être fait : le maître-source ou "lama-racine" (sk. mùlaguru, tib. rtsa-ba'i bla-ma) est le maître avec lequel le disciple noue une relation spirituelle intime et profonde, quand il y a rencontre véritable des deux esprits. L'étudiant s'engage à servir le maître et à suivre ses instructions quoi qu'il arrive, et le maître prend l'engagement de ne pas l'abandonner jusqu'à l'Éveil final. Le samaya consiste essentiellement à respecter le corps, la parole et l'esprit du maître, mais celui-ci a son propre samaya à maintenir avec ses disciples. La relation entre maître et disciple est puissante, le maître travaillant à dépister les faiblesses, les incompréhensions et les erreurs du disciple qui font obstacle à sa progression. Elle se fonde sur une confiance totale. Mais le lama-racine invite parfois certains de ses propres maîtres à conférer une transmission de pouvoir à ses disciples. Un lien profond est également créé avec ces maîtres, mais sous la responsabilité du lama-racine qui donne ensuite toutes les instructions pratiques nécessaires à la pratique.
4/. Le lama-racine est le dépositaire vivant de la sagesse véhiculée par la lignée spirituelle des maîtres qui l'ont précédé. Les maîtres de la lignée (sk. paramparâ guru, TIB. brgyud-pa'i bla-ma) sont la source d'inspiration des disciples, le lien d'appartenance à la tradition spirituelle qui est la leur. Quelle que soit l'école, la lignée spirituelle remonte jusqu'à un bouddha originel et fait preuve d'authenticité dans la transmission. Les pratiquants l'invoquent fréquemment par des prières (tib. brgyud-gsol-'debs). Mais la lignée vit au travers du lama-racine, qui seul la transmet à ses disciples proches.
5/. Dans la pratique, le maître est considéré comme un "joyau qui exauce tous les souhaits" (tib. yid-bzhin nor-bu). Il est la source des bénédictions de la lignée et condense à lui seul les trois racines du refuge intérieur. Pour renforcer le lien du cœur/esprit avec le maître-racine, le disciple pratique le guruyoga (TIB. bla-ma'i rnal-byor) pour recevoir quotidiennement son influence spirituelle et/ou le sàdhana de la déité, considérant que le yidam est indifférencié du maître. Peu à peu, il va découvrir, grâce à l'ouverture du cœur suscitée par la dévotion, que son propre esprit n'est pas différent dans sa nature essentielle de l'esprit de sagesse du maître : « Puisque la conscience claire de l'instant présent est le véritable bouddha, par l'ouverture et le contentement, je trouve le lama dans mon cœur. Quand je réalise que cet esprit naturel est la nature même du lama, il n'est plus besoin de prières avides et tenaces, ni de complaintes artificielles », déclare Düdjom Rinpoché dans un chant de réalisation (trad. Rigpa).
Le rôle du lama extérieur est donc de révéler au disciple, grâce aux enseignements et à la pratique, le lama intérieur qui n'est autre que la nature de bouddha en lui. Dès lors qu'il l'a réalisé, le disciple n'est plus jamais séparé du maître et toutes les circonstances deviennent des rappels du maître intérieur. Plus encore que les moyens habiles, la dévotion au maître est le point crucial du Vajrayâna et du Dzogchen, sans laquelle tout demeure stérile. Loin d'être un esclavage, la relation au maître est libératrice, ce dernier étant le catalyseur de la transformation spirituelle.
Lire « Les Cinquante Stances de dévotion au guru d'Advaghaya », en seconde partie dans « Le Mahionudrà qui dissipe les ténèbres de l'ignorance », Yiga Tcheu Dzinn, Toulon-sur-Arroux, 1980.
Voir Chan, trois racines, Vajrayana
p. 344 à 346
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La religion .Philippe Gaudin,Philippe Cornu,Sophie Nordmann,Lucien Scubla CC-BY-NC-ND 2.0 le mot « religion » désigne des réalités d?une diversité déconcertante... Quoi de commun entre une technique de méditation du bouddhisme tibétain, une confrérie soufie et une synagogue ? Autour du vocabulaire religieux, en partant de ce mot « religion », les intervenants de la table ronde débattront de ce qui définit une religion, entre le penser et le faire, entre l?ici et l?ailleurs, le passé le plus lointain et l?actualité la plus brûlante... Avec : Philippe Cornu, anthropologue, président de L'Institut d'Études Bouddhiques ; Sophie Nordmann, philosophe spécialiste de la philosophie juive, EPHE ; Lucien Scubla, philosophe et anthropologue, chercheur associé à l'Institut Marcel Mauss, EHESS. Animée par de Philippe Gaudin, philosophe, Institut européen en sciences des religions, EPHE. Et l'intervention filmée de Bernard Cerquiglini, linguiste, qui ouvrira la soirée.
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