Je dessine : La jeunesse dessine pour Charlie Hebdo après le 7 janvier

C'est parti comme un défi, un appel plus sérieux que ces fanfaronnades que se lancent les enfants d'un défiant : « Cap ou pas cap ? ». Luz, le 16 janvier 2015, lance un cri du coeur « Je suis Charlie, prouvez-le ! Prenez vos crayons, vos papiers, un scan, un ordi, exprimez-vous... En texte, en dessin, en vidéo, que sais-je... ». Ils se sont exprimés, enfants, adolescents, jeunes gens. Les réponses sont arrivées, par sacs postaux entiers. Certains n'avaient que 6 ou 7 ans, d'autres étaient à peine majeurs, tous ont pris leurs crayons ou leur plume, leur logiciel ou leur papier et ils se sont exprimés. 10 000 dessins ont été reçus, triés et archivés. 10 000 cris du coeur, dix mille coups de crayon. 150 ont été choisis, 150 dessins répartis en huit rubriques : pour soutenir, pour la liberté d'expression, pour les symboles et les valeurs de la République, pour la liberté de conscience, pour se rassembler, pour tous égaux, pour non au terrorisme, pour créer. Mais l'engagement dont ils font preuve, ça ne s'organise pas, ça vous emporte. Ils se nomment Olga, Clara, Peio ou Andy. D'autres n'ont pas signé ou juste d'une initiale, certains étaient un groupe. Là, vous avez Laura, 12 ans : une main, autant de crayons que de doigts, au bout de chacun, des noms qui ne se tairont pas, elle a pris le relais. Tous dénoncent, soutiennent, affirment, revendiquent et tous épatent par leur conscience de l'enjeu et par la créativité dont ils font preuve. Pour se souvenir que l'indignation n'a pas d'âge.

Le 7 janvier 2015 ne fut malheureusement que le début d'une série d'attaques commises par des "gens" qui n'aiment pas que l'on pense différemment qu'eux, que l'on baise différemment qu'eux (si tant est qu'eux le fassent), que l'on croit à un autre dieu qu'eux (si tant est qu'ils croient même en un dieu), que l'on prenne du plaisir à la vie, tout simplement. Cependant, cette date restera à jamais gravée dans nos mémoires, tel le 11 septembre 2001, par la violence de l'attentat et les personnes touchées, des dessinateurs, des artistes, qui pouvaient choquer certes, mais qui créaient selon un droit cher à notre pays : la liberté d'expression. Si les adultes ont été bouleversés par les attentats contre Charlie Hebdo, c'est parce que ces dessinateurs, ils les connaissaient depuis l'enfance (pour ma génération, j'ai appris à connaître Cabu via "Récré A2"). Mais nos enfants aussi ont été touchés, par nos réactions d'abord, puis par les images retransmises par les chaînes d'information. Il a fallu expliquer, rassurer, défendre... Et les enfants, s'ils ne peuvent parfois exprimer leurs sentiments par des mots, savent très bien le faire par le dessin. Ce très bel ouvrage regroupe des dessins d'enfants reçus à Charlie Hebdo après les attentats. Témoignages d'émotions, de révolte, de tolérance, ils sont regroupés en 8 thèmes, chacun étant éclairé par les explications pleines de sagesse de Boris Cyrulnik, spécialiste du fameux concept de "résilience" ou comment se reconstruire après des événements tragiques. Car même si près d'un an et demi a passé, les attentats du Bataclan en novembre dernier et la tuerie d'Orlando avant-hier montrent que malheureusement, le thème reste brûlant d'actualité.

Ce livre est un hommage sous forme de dessins de la jeunesse française aux victimes de Charlie Hebdo. Les dessins sont entrecoupés par quelques textes de Boris Cyrulnik sur la liberté d'expression, les symboles et valeurs de la république, la liberté de conscience, etc.
Les propos du psychiatre forment des blocs d'une page, ce qui a certainement permis de structurer plus facilement l'ouvrage mais qui ne facilitera pas la compréhension des plus jeunes.
Dommage aussi qu'aucun dessin ne soit questionné : on a l'impression d'une accumulation de réalisations sans mise en perspective évidente, sans réelle problématisation.