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3,9

sur 2127 notes
Á la hauteur des l'amour et des espérances, la chute et la déception n'en ont été pour moi que plus brutales.

Comme je l'attendais ce Damasio. Comme nous l'attendions religieusement, nous les conquis, ce nouveau livre de l'auteur de l'extraordinaire Horde du Contrevent.

Damasio, c'est Damasio.
Tautologie presque de rigueur pour un auteur non seulement très doué mais au style reconnaissable entre tous.
Car personne n'écrit comme Damasio.
Sans doute que personne ne le peut.
Alors oui, cent fois oui, la qualité de l'écriture, la grâce et la simplicité de l'enchevêtrement de ces phrases déployées -certainement fruits d'un immense travail- sont au rendez-vous dès les premières pages dans une séquence d'ouverture à la fois intrigante, nerveuse et lumineuse, sur les traces de ce furtif insaisissable.
On suit sans déplaisir le parcours des personnages, on découvre leur passé, leurs motivations, on est à l'affut, on renifle, on chasse avec eux, on s'apprête à être transportés, émus... jusqu'à….

Eh bien jusqu'à ce que Damasio se vautre à plat ventre dans un programme électoral d'extrême gauche qu'il semble appeler de tous ses voeux comme le seul mode de société possible, s'en faisant le porte-voix avec une soudaine poésie de comptoir d'une naïveté à la limite du cliché éleveurs de chèvres dans le Périgord et qui aurait presque réussie à me faire rire si je n'avais pas été littéralement scotché par ce soudain tract Trotskiste à la mode technologico/religioso/politico 21ème siècle.
Tout se termine dans une épiphanie qui dégouline du monde de demain qui sera meilleur si on voulait bien se donner la peine d'ouvrir nos yeux (et notre coeur bien sûr).

Je suis d'ailleurs particulièrement estomaqué des critiques dithyrambiques reçues par ce livre dans la presse qui en parle comme d'un brûlot politique.
Il est impossible de nier l'intérêt d'un livre (ou de quelque support que ce soit) à propos de nos résistances nécessaires à l'autoritarisme et la surveillance des individus par l'état mais fallait-il pour cela lâcher son grand talent au profit d'un demi pamphlet si niais que j'en suis presque venu à me dire que je ne trierai pas mes déchets cette semaine pour faire les pieds au donneur de leçons qu'est devenu ce cher Alain ?

Je suis réellement fatigué de ces oeuvres qui pensent mieux parler du monde parce que leurs créateurs ou créatrices désertent la fiction au profit de l'étalage de leurs idéologies.
Ce n'est pas "mode", c'est dommageable.
Ce n'est pas efficace, c'est rebutant.
Ce n'est pas de la littérature, c'est une opinion sur un réseau social, c'est-à-dire rien.

Par pitié, écrivez des livres, faites des films, et faites confiance à vos lecteurs et lectrices pour que cela fasse écho dans leurs vies.
Les fictions sont puissantes.
Nul besoin de les surligner.

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3, 2, 1, voici mon avis concis sur le dernier Damasio : je n'ai pas aimé (paf, voilà voilà). Paradoxalement, malgré de nombreux passages imbuvables, j'ai eu pas mal de plaisir à le parcourir et je l'ai même fini. Moi, contradictoire ? Vous l'aurez deviné, la chronique s'annonce délicate, alors je préfère préciser que je suis là pour donner mon petit avis personnel (pour ce qu'il vaut) sur la forme du roman et pas sur son fond. le niveau de philosophie là-dedans est trop grand pour que je discute les idées (que je partage d'ailleurs dans l'ensemble, à mon propre niveau de madame-tout-le-monde). Je suis là pour expliquer pourquoi il m'a fait pester, pourquoi j'ai failli l'abandonner dix fois, pourquoi je ne l'ai finalement pas fait et pourquoi ce genre d'écrit peut provoquer chez un lectorat l'exact opposé de son but initial : rendre hermétique le public à la cause de Damasio plutôt que de lui donner envie de la rejoindre. Et comme je reproche en premier lieu à l'auteur l'art d'écrire beaucoup pour ne pas dire grand chose, je vais essayer faire au plus court.

Ce serait quand même con que l'hôpital se foute de la charité.

Laissez-moi faire les présentations. Alain Damasio est un touche-à-tout inclassable, mais globalement on peut lui coller les étiquettes de penseur, philosophe et écrivain francophone. Il écrit peu, mais les rares roman qui sortent font souvent du bruit. J'ai lu de lui La Zone du Dehors, une dystopie futuriste engagée que j'ai absolument adorée, et La Horde du Contrevent qui assume une science-fiction musicale et atypique. Les Furtifs se situe au croisement de ses deux prédécesseurs : c'est une dystopie chantante profondément engagée (si si, ça veut dire quelque chose, on y reviendra) qui dépeint un futur techno-crasseux pour le citoyen devenu l'ultime marchandise à négocier au plus offrant. Les villes sont privatisées et le citoyen hyper-connecté pressé, stimulé pour générer du data que le Système digère ensuite pour lui resservir bien chaud, pour son plus grand ravissement. En bref Alain Damasio dépeint une servitude confortable et consentie basée sur l'ultra-surveillance et où l'invisibilité dérange. Or il existe des créatures de légende, les furtifs, aux incroyables facultés de dissimulation. le fantasme de l'invisible pour les résistants à Big Data, le cauchemar de l'invisible pour ses sympathisants. Lorca, le protagoniste principal, traque les furtifs qu'il soupçonne d'avoir enlevé sa fille Tishka.

On comprend tout de suite que le livre a deux niveaux de lecture : d'un côté le père qui cherche sa fille disparue en milieu furtif, et de l'autre la Grande Leçon anti-Système. Et quelle ironie, en fait, que les moments les plus touchants et les plus réussis du roman soient des moments simples d'une vie de famille en reconstruction.

Le premier niveau de lecture est ce qui m'a fait tenir bon dans la tempête désastreuse de la Grande Leçon morale du roman. Lorca est un personnage solaire qui dégage bonté et sympathie dès le début. Sa quête pour retrouver sa fille m'a touchée dans mon coeur de maman et Alain Damasio a trouvé les mots justes pour faire de la paternité le fer de lance du roman. La maternité est présente en second plan en la personne de Sahar, qui à l'inverse de son ex-compagnon a fait le deuil de sa fillette. Elle est distante, cartésienne et professorale (c'est par ailleurs son métier) et je ne l'ai pas particulièrement appréciée. Derrière ce couple anti-Système dont on suit la reconstruction laborieuse à mesure qu'il progresse sur la piste de Tishka, s'agglutine une troupe hétéroclite de marginaux. La plupart est sympathique (dont deux au moins aussi attachants que Lorca), mais d'autres hélas sont de vrais calvaires de lecture.

Les romans de Damasio demandent de l'attention - on n'en lit pas "juste" pas cinq pages en cuisant un gigot. Tout comme dans La Horde du Contrevent, Damasio attribue un symbole à chaque protagoniste majeur. Un récap est mis à disposition en début de livre, bien qu'on les retienne assez rapidement puisqu'il y en a six à tout péter. Ces marqueurs fluidifient les changements de narration et dynamisent le récit. On vit parfois une même scène simultanément à travers plusieurs regards, le roman est une sorte de collectivité à laquelle chacun participe à un degré différent (premier degré Lorca, évidemment). Dans tous ce fatras de protagonistes chacun s'exprime à sa façon très reconnaissable, mais l'idée a été poussée trop loin : si certains s'expriment de façon reader-friendly, d'autres le font par phrases argotées, néologismes et anglicismes djeuns-wesh démodés ou termes techniques incompréhensibles. Si déjà les personnages concernés ne vendaient pas du rêve (on est souvent à la limite de la caricature voire du recyclage de persos des romans précédents), leur illisibilité n'a pas arrangé leur cas. Ces passages indigestes là, qui ont sans doute demandé beaucoup de temps à la rédaction, je les ai sautés par dizaines sans que ça ne me handicape pour la suite.

Alors pourquoi cette manie de jouer avec les mots et de s'écouter parler au détriment d'une lecture sereine, si finalement ça n'apporte rien ?

Je pense que la réponse vient de l'amour de l'auteur pour sa langue et ses idées. Ses romans sont des exutoires où il s'écoute disserter et Les Furtifs ne fait pas exception. C'est flagrant dans le design écrit de ses personnages, dans leur narration propre, dans la forme du texte volontairement alambiquée et aussi dans les leçons anti-Système lourdes d'une dizaine de pages qui s'enchaînent à la pelle. J'ai le sentiment que plutôt que de penser au lecteur au bout de son clavier, Damasio a surtout pensé à se caresser lui et ses idées dans le sens du poil. J'incarne sans doute tout ce qu'il débecte en raisonnant ainsi, mais quand on dort Système, qu'on vit Système et qu'on travaille Système malgré soi, on n'a pas forcément l'énergie en fin de journée pour se lancer dans un plaidoyer qui va nous en rabâcher les oreilles encore une fois. J'ai fini par développer une réaction épidermique à l'approche de ses sermons, dont pourtant je partage les idées. le résultat, c'est un livre dont la lourdeur du message n'est contrebalancée que de justesse par la fibre paternelle de Lorca et le mystère des furtifs.

Il y a toutefois des passages bien dosés. L'importance du rythme, des vibrations et des schémas musicaux chez les furtifs (qui sont de vrais trésors d'inventivité) donne du sens à ces passages dont on pourrait croire qu'il s'agit de slam. Dans un roman futuriste à la technologie malveillante, la bulle musicale furtive fait beaucoup de bien. Ces passages aérés où on creuse leur mystère et leur biologie sont passionnants, même si à l'instar de la trame morale il y a beaucoup trop de répétitions, voire même beaucoup de trop de réponses. Mais il en faut, de l'air, pour oxygéner ce récit ! D'abord à cause des leçons de morale, et ensuite à cause de son côté hyper manichéen. Tout ce qui fait partie du Système est à chier, tout ce qui est marginal est encensé. Evidemment Damasio ne va pas prêcher pour une autre église que la sienne, mais de là à tenir un discours aussi unidirectionnel, c'est un peu fort de café. Toute technologie est mauvaise, tout est à jeter et rien n'est à sauver.

Mais moi ce que je ne sauverais pas, en l'occurence, c'est la vision rétro-gadget de la SF de Damasio. Son roman a l'air de sortir des années 90, la technologie fait cheap et on voit que son univers ne lui a servi qu'à nourrir son propos : il manque de travail et de profondeur. Je ne me le représente pas en dehors de ses villes. Il me semble avoir lu quelque part qu'Alain Damasio n'est pas un lecteur de SF, et si c'est vrai cela se voit : il n'a pas l'air d'être au courant qu'un message passe souvent mieux et rassemble plus d'adeptes en finesse qu'en force, quand il est phagocyté dans une intrigue qui n'a pas à souffrir de grands discours moralisateurs ~ c'est ce que fait la SF, man ! C'est vraiment dommage parce que ce genre de raisonnement (ce genre d'écrit) donne l'impression encore une fois que la SF(FF) vaut moins que les autres littératures. A cet égard Damasio aura au moins eu le mérite de faire lire un roman résolument classé SF à une élite philosophe qui en temps normal ne s'y serait jamais sali les mains.

Avec le recul, je me demande si le but initial des Furtifs, pour Alain Damasio, ce n'était pas de soulager sa pensée en la mettant par écrit, tout simplement.
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Roman d'anticipation, l'auteur nous plonge dans une France des années 2040 et sa société. Villes vendues à des opérateurs privées, avec circulation des personnes régulée selon son niveau de vie et où le numérique occupe toute la place. Et au centre du récit, Lorca, sociologue qui a perdu sa fille, mais pas la volonté de la retrouver. Il explore donc la piste des furtifs.
Alain Damasio explore cette société du tout-contrôle qu'il craint et nous propose d'autres voix, d'autres chemins à travers le parcours des personnages. On retrouve le style de l'auteur, sa passion pour la langue mais j'ai un peu moins accroché que les précédents romans. On y trouve des scènes d'action très réussies, des rencontres avec des groupes alter passionnantes mais... parfois des longueurs, un ou deux personnages principaux avec qui j'ai eu du mal à accrocher, alors que certains secondaires attirent mon attention. Avis mitigé au final.
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Il est des post plus intimidants que d'autres. J'ai quelque peu reculé devant l'immensité du défi, chroniquer et donner envie en quelques signes. Circonscrire en une politique de fonctionnement et des conditions générales, un monstre protéiforme tel que Les furtif, c'est comme dresser un crapaud buffle au saut à la perche... Ce n'est pas gagné.

Les furtifs est un livre monstre où Damasio se montre, comme toujours, d'une inventivité folle, presque flippante. Un cosmos. Créé non pas ex-nihilo, mais bel et bien du notre. Nos néo-libéraux, sourds à toutes critiques, tout léger doute qui affleurerait par lassitude, ne lisent pas Damasio. Ils n'en ont pas le temps, enfermés dans leurs certitudes. Si notre planète fonce dans le mur, il convient d'accélérer, déréguler plus et tant, accélérer merde ! Enlever sa ceinture et déconnecter l'airbag.

Les héros des Furtifs se meuvent dans une France capitalisée à l'extrême, une logique poussée dans ses ultimes retranchements. Certaines rues ne sont accessibles que sur abonnements, des quartiers entiers sont interdits à celles et ceux qui ne possèdent par le forfait idoine. Et surgissent les Furtifs, créatures qui échappent à cette captation marchande, qui se logent dans des interstices incontrôlés.

C'est à une quête épique, profondément émouvante que nous convie Alain Damasio. Emplie d'une révolte, de rêve d'enclaves, de communautés de biens utopistes. Et les définissant comme utopistes, je souscris à cette propagande ambiante, ce prémâché frappant quotidiennement nos tympans... Les furtifs est livre de réveil. Il ne provoque pas cet apaisement que l'on recherche parfois. Ce n'est pas un bouquin pour passer le temps alors qu'on ne le voit pas passer, un paradoxe...

Et quelle plume ! Déjà dans son Magnus Opus, La horde du Contrevent, il faisait preuve d'une fertilité, d'une virtuosité qui ne semblaient pas relever de cette dimension. du coup, je m'interroge. Est-on vraiment sûr que Damasio est de notre monde ?

Merci aux éditions La Volte, pour la mise en beauté. L'illustration musicale de Yan Pechin qui accompagne le livre est tout sauf un gadget : une tenue de plongée, un shoot immersif.
Lien : https://micmacbibliotheque.b..
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Damasio a le son chevillé au corps, la nature dans les plis de ses plumes et le sens et les gens, la culture, au fond de son coeur. Avec Les Furtifs il imprime et incarne littéralement cette image de l'écrivain, du récit et du vivant, dans une chimère utopique et fondatrice : les furtifs. Conte d'anticipation, fable politique et roman initiatique, il livre une oeuvre unique et poétique, écrite et musicale. On perçoit tous les traits de notre civilisation 2.0 comme des éclairs glacés. Mais aussi et surtout l'amour sous toutes ses formes. le mariage des deux dans un monde de 2041 où co-existent des villes-corporate et des iles-forteresses crée un univers unique. Un livre magique avec des personnages que l'on n'est pas prêt d'oublier.
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Ce roman de Damasio recouvre principalement ces trois thèmes : critique d'une société du futur où le numérique aura tout cloisonné, de même que les multinationales et l'État ; tentative d'échapper à la société, petites communautés qui repensent la vie en commun ; et enfin les furtifs, ces êtres mystérieux qui nous font repenser notre rapport à notre environnement. Plutôt dense, donc, beaucoup de revendications, une épopée à la fois digne de la Horde du contrevent mais plus ancrée dans le réel, tout en gardant une part de fantastique.

On sent ici l'influence énorme de la vie personnelle de Damasio, lui-même un peu échappé des réseaux, qui a pas mal cotoyé la ZAD de Notre-Dame-Des-Landes (entre autres). Il y a beaucoup l'idée de l'utopie, des zones à défendre / à reconstruire, des angles morts où tout est contrôlé / surveillé. Les furtifs, tout comme celles et ceux qui souhaitent changer le monde, sont ici mis en parallèle. Damasio brode dans le champ des possibles avec une très grande fantaisie dans les solutions alternatives proposées, et c'est parfois même un peu too much, ça ne laisse pas beaucoup d'espace pour qui ne sait pas voler dans les airs, construire des choses, hacker les ordinateurs ou torpiller la police, mais dans une époque où la révolte se fait sentir de toute part, c'est un doux rêve, un bel espoir à disposition pour repenser les choses. Dans ce décor, les furtifs tombent à pic, autant pour nourrir l'imagination de celles et ceux qui souhaitent un retour à la terre, au vivant, au mouvement, à la création, que pour dresser le portrait d'un nouvel ennemi, faire monter la peur, le besoin de sécurité. Je n'en dirai pas plus sur les furtifs, pour ne rien spoiler, mais je trouve que c'est vraiment un sujet hyper intéressant, bien amené, bien construit, riche et merveilleux, qui questionne sur la conscience, l'intelligence, l'adaptation, le langage, la réappropriation, le vivant...

Tout comme dans La Horde du Contrevent, l'auteur fait appel à une narration multiple, qui change au gré du roman et se signifie à l'aide de symboles attribués aux personnages principaux du livre. Là où c'était plus ardu pour le premier, ici nous avons beaucoup moins de personnages, ce qui rend plus facile à identifier. Il use de changements de style, de lexique, de langage, d'expressions, qui fait qu'on les reconnaît très bien, mais c'est parfois poussé un peu trop à l'extrême et les rend parfois moins crédibles, quand bien même ça rend les autres plus authentiques et sincères... de même que Damasio change de sujet et de point de mire régulièrement, passant de la dystopie à l'utopie, du concret au fantastique, en s'arrêtant sur la parentalité, le deuil, l'identité de genre, la spiritualité. le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il s'agit d'un récit passionné, poignant, plein d'émotions, de rebondissements, de réflexions sur le monde tel qu'il est et tel qu'il promet de devenir. L'auteur nous offre encore du singulier, le genre de livre qu'on n'oublie pas après l'avoir lu, qui en fait parfois beaucoup (trop) pour sortir du lot, et qui y arrive. Les enfants perdus contre le capitaine crochet, avec les fées, les pirates, et un enfant à retrouver... version 2.0.4.1 ! Avec, en prime, un album à écouter pour se mettre dans l'ambiance, en collaboration avec Yan Péchin.

(voir la critique intégrale sur le blog)
Lien : https://lecombatoculaire.blo..
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Abandon page 393... trop de mots inventés et incompréhensibles, l'histoire devient ennuyeuse. Dommage.
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Ce livre est un coup de poing qui réveille en nous une force, celle de croire qu'une autre façon d'habiter le monde est possible.
Car même s'il s'agit d'une oeuvre de science-fiction, d'imaginaire, la critique soulageante que fait Damasio de la société prend bien racine dans le réel et les solutions qui émergent sentent bien aussi le vécu de ces dernières années avec l'émergence d'une radicalité dans l'agir. L'engagement de nombreux citoyens dans la décroissance, le faire-ensemble, la contestation des modèles démocratriques actuels, la constitution de ZAD, d'habitats partagés, de soutien aux migrants etc...

Le récit choral démarre par celui de Lorca Varèse dont la fille a mystérieusement disparu il y a deux ans. Il passe un examen pour faire partie d'une troupe d'élite militaire - la meute - dont l'objectif est de traquer les furtifs afin de les rapporter vivant pour analyser leur ADN. Ces animaux invisibles qui sont présents sur notre planète depuis l'origine du monde, vivent dans les zones abandonnées, dans les interstices des villes, les angles morts. Ils se transforment pour ne pas être vu en absorbant les formes du vivant, ils assimilent les sons, les formes, les couleurs, les matières. Rapides, joyeux, musicaux, ils meurent dès qu'ils sont vus.
Dans la meute l'équipe est composée entre autre de Saskia qui est l'oreille et la musicienne du groupe, elle va communiquer avec les furtifs par le son. La musique, le son est presque un personnage a part entière du roman.
Dans un monde sous contrôle absolu des grands groupes économiques (Orange, Nestlé, LVMH...) qui ont racheté des villes et les ont rebaptisées à leur logo, l'humanité se soumet à la grande peur de l'autre, de la nouveauté, de l'inconnu.
Publicités incessantes surgissant d'un banc, d'un réverbère, des pavés dans la rue. Villes divisées en quartiers accessibles selon sont statut de citoyens : Privilège, Premium, Standard. Vidéo surveillance, réalité augmentée,... chacun vit dans sa bulle se méfiant de l'autre, de toute forme d'altérité.
L'émergence des furtifs va faire exploser la manipulation politique et souder les groupes radicaux de tous bords. Pour les uns, c'est l'extermination qu'il faut piloter, la compétition qu'il faut stimuler, le contrôle pour les autres c'est la vie qu'il faut protéger, le partage, la gratuité. Deux visions du monde l'une capitaliste, prédatrice, fondée sur le pouvoir l'autre faite d'entraide, de solidarité et fondée sur la puissance du faire et du partage.
Damasio avec talent expose, démontre tout en racontant une histoire captivante : la quête par Lorca et Sahar sa compagne de leur fille disparue sans doute hybridée en furtive. A travers cela, il décrit les furtifs ces êtres à l'origine même de la vie bondissante, vibrante, énergisante.

Damasio s'appuie sur tout pour fouetter notre imagination. Les mots sont transformés, inventés pour tenir compte du mode de communication des furtifs. Des signes diacritiques sont ajoutés aux lettres pour signifier que c'est telle ou telle personnes qui parle. Les personnages inventés semblent sortir de notre actualité quotidienne : Un libéralisme débridé qui juge utopique tout ce qui n'est pas lui.

Parfois, les fantaisies fantastiques de Damasio rendent la lecture ardue, on se perd un peu mais on se retrouve toujours au coeur d'un combat motivant, d'un discours euphorisant, d'une vision du monde apaisante.

En tant que marseillaise, je mets 5 étoiles à la prise de Marseille. Marseille libérée des Terrasses du Port, des croisiéristes, de la gentrification, des skyline anti-écolo, de Jean-Claude Dingau... on en rêve.

687 pages se lisent avec jubilation.

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Lorca vient d'intégrer la Meute du Récif afin de mieux comprendre ce que sont les furtifs. En effet, deux ans plus tôt, Tishka, sa fille de 4 ans a littéralement disparu de sa chambre sans laisser la moindre trace. Si Sahar, sa femme, brisée de douleur essaye de faire son deuil, lui, refuse d'accepter l'idée même de sa mort.
Que sont les furtifs ? Des êtres vivants en mouvement permanent, qui se métamorphosent continuellement en prenant des éléments de ce qui les entoure : animal, végétal, minéral... et dont la signature et donc l'identité est un son : le frisson.
Ils sont partout mais surtout dans les lieux abandonnés par les hommes. Ils sont parmi nous mais leur mobilité, leur vivacité nous empêchent de les voir.
D'ailleurs s'ils sont vus, ils se pétrifient.
Tishka serait avec eux, serait peut être devenue l'un d'eux...
La recherche des parents, profondément malheureux se déroule dans un avenir proche, très proche du nôtre puisque Damasio utilise le contexte du libéralisme sauvage actuel qu'il amplifie et déforme jusqu'à construire une société uniquement fondée sur la marchandisation. Chaque individu est bagué et donc tracé afin de connaitre ses goûts, ses envies pour lui proposer des biens, des services toujours plus proches de ses désirs, à condition bien sûr qu'il puisse payer.
Les villes, face à la faillite des pouvoirs publics, appartiennent à des firmes et ceux qui refuseraient le confort de ce monde aseptisé se retrouvent à la marge... Une conforteresse.
Damasio s'est servi des manisfestations, des modes d'occupations des Zadistes pour imaginer des groupes refusant cette traçabilité, ce repli sur soi et son IA (Intelligence Amie) et ayant suffisament d'ouverture d'esprit pour accepter l'idée de l'existence furtive.
La créativité du langage, que ce soit celle propre à chaque personnage : Aguerro, Toni, Varech mais aussi celle de Tishka et bientôt Lorca et Sahar m'a semblé (contrairement à ce que j'ai pu lire dans certaines critiques) convenir à ce monde en perpétruel mouvement, à ces êtres en incessantes mutations.
Si certains passages sont un peu tordus, difficiles à lire, je ne me suis pas formalisée plus que cela... Certains mots, expressions sont de vraies trouvailles "self- serf- vice", "anarchipel", "éthiquetage"...
Damasio imagine notre avenir proche de façon pessimiste mais il y apporte la poésie de ces êtres inssaisibles, les furtifs.
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Nous sommes dans le monde de nos enfants. Celui d'après-demain. Là où on peut déjà toucher la dystopie du doigt. C'est frappant à la lecture de ce presque roman d'anticipation, ça pourrait déjà être nous. Il y a un côté glaçant et un côté Cassandre à voir ce qui se profile, à le dénoncer même, mais, un bout à en être l'instigateur.
D'aucuns appelaient ça la servitude volontaire. Il y a fort longtemps La Boétie a exploré ce phénomène d'obéissance volontaire à un pouvoir oppressif. Dans les furtifs, un échelon a été franchi. Cela a été relevé dans certaines critiques du livre, le pouvoir est maintenu dans une trame horizontale, chacun voit tout le monde, tout le monde note chacun, en tous cas, la surveillance par la technologie atteint un point où chaque individu est le flic et le bourreau de son voisin.
C'est le coeur de l'intrigue. Dans un pays (la France) dans lequel les villes (devenues des conforteresses) ont été libérées (lire, libéralisées), évolue un petit groupe d'Etat appartenant à une section secrète de ce qui reste de l'armée afin de chasser les Furtifs. Les furtifs, ce sont des organismes tellement rapides qu'ils échappent à la vision humaine. Et bien leur en prend, car s'ils sont avués par un oeil humain, alors ils meurent en se figeant. Autour de ce pitch se tricote un questionnement philosophico-politique très bien construit et très intéressant, pour dire qu'il est un rejeton per- et post-COVID.
Le petit groupe que nous suivons tout au long du livre est très hétéroclite et chacun/chacune a ses particularités. Je ne veux pas détailler d'abord parce que d'autres l'ont fait et aussi parce que j'étais vierge de l'écriture de Damasio que je découvre ici : il a construit un monde incroyable où le signe se mue en son et le tout dans le silence de la voix qu'on a dans la tête en lisant. C'est superbe, tout à fait digne d'une gageure de l'Oulipo. Mais la création ne s'arrête pas là, et si au tout début était le Verbe, alors Damasio possède certainement quelques attributs divins dans sa manipulation du discours (je vous laisse découvrir les vendiants de cette société carcélibérale, le gang anarchitecte, les terraristes qui constituent la majorité des 1/g …)
Le roman est vraiment très riche de très nombreuses références, allusions et clins d'oeil que j'ai essayé de relever tout au long de ma lecture : Kaamelott (débarouler), Houellebecq (la possibilité d'une île), Nietzsche (humain trop humain), Debord (la société du spectacle), et encore d'autres qui m'ont sûrement échappé.
Un très beau moment de poésie au sens étymologique du terme.
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