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EAN : 9782505007975
161 pages
Dargaud (21/01/2010)
3.54/5   88 notes
Résumé :
Les lois raciales de l'Italie fasciste ne prévoyaient pas de peines à l'encontre des homosexuels : cela était inutile, puisque, d'après Mussolini, tous les hommes italiens étaient mâles, actifs et virils.
Que lire après En Italie, il n'y a que des vrais hommesVoir plus
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Lorsque le gouvernement de Mussolini décide d'actualiser le code pénal, on prévoit de faire comme les voisins allemands : incorporer une loi discriminatoire contre les homosexuels. Que nenni ! rétorque Il Duce qui se justifie ainsi : " Nous n'avons pas besoin d'une loi pareille ! En Italie, il n'y a que des vrais hommes ! "

Pour cette bande dessinée, Luca de Santis met en scène un entretien qu'un journaliste avait eu avec un vieil homme sur son passé d'homosexuel dans l'Italie fasciste.
Deux histoires sont donc mis en scène : d'un côté celle de deux jeunes journalistes qui se rendent à Salerne pour rencontrer Antonio Angelicola, un septuagénaire aigri. Puis, il y a les souvenirs de l'homme, dans les années 1930, au moment où il vivait heureux, entouré par sa mère et son frère et travaillant comme tailleur dans la mercerie tenue par sa mère. Jusqu'au jour où … Ninella - comme on le surnomme à l'époque - se fait embarquer par l'OVRA, puis est condamné pour "crime contre la race" et part en "confinement" sur l'île de San Domino delle Tremiti. Officiellement, il est "déplacé" comme prisonnier politique.

En lisant cette Bd juste après " triangle rose ", je suis fascinée de voir à quel point la culture joue un rôle primordial dans le traitement d'un problème d'ordre "moral". Il y a bien sûr un dénominateur commun : le fait que l'homosexualité, dans les régimes fascistes, dérange la bonne société car dans un contexte où le sentiment (ultra) nationaliste est exacerbé, et bien ces individus manquent à leur devoir de faire grossir les rangs de la belle nation d'êtres supérieures ( ici, Italiens). Bien sûr, quand ils se font attraper ils se font tabasser - exercice de virilité oblige ! - et se font sermonner sur l'immoralité et la dangerosité de leurs pratiques.
Et côté italien, pour se débarrasser de ce problème gênant, on a la solution la plus simple du monde : on fait comme s'il n'existait pas ! Cela passe par la case : "on ne nomme pas" , puis "on les envoie loin" et enfin "on met une étiquette plus acceptable".

Le "séjour" sur l'île apparaît d'abord comme une espèce de colonie de vacances pour "tapettes", où se côtoient grandes follasses, travestis, tombeurs, prêtres, petits jeunes, etc avec de temps en temps des (vrais) prisonniers politiques qui demandent l'autorisation de venir pour se marrer un peu. Et petit à petit, on voit que les prisonniers sont soumis à un système de rationnement, qu'on leur donne un pseudo salaire (5 lires!) avec lequel ils doivent se laver, manger et s'habiller pour la saisons. le flirt est dans l'air, puis les tensions montent … et c'est le drame.

J'ai trouvé cette bande dessinée intéressante, dans la mesure où je ne connaissais pas le sujet, mais assez incomplète. L'objectif est de sensibiliser un large public à ce passage de l'histoire, et le côté trop "colonie de vacances" et Dolce Vitta entre amis ne m'a pas permis de saisir les enjeux de cette période. D'ailleurs, dans la conclusion (que ce soit celle de De Santis ou celle du "vrai" journaliste à la fin), il cite une phrase du vieil homme qui dit que beaucoup ont pleuré en quittant l'île car ils avaient été mis dans une sorte de cocon dans lequel ils étaient protégés des ragots, des regards, des médisances, de la culpabilité de mettre le "déshonneur" sur leur famille - car c'est ainsi qu'était considéré le fait d'avoir un fils homosexuel. Dans ce cas quelles conclusions tirées ? Qu'est-ce qui fait que ces hommes ont préféré oublié cette période de leur vie ? Je me doute qu'ils en ont souffert, mais la façon dont l'histoire est mise en scène met tellement plus en avant "l'insouciance" et le côté "festif" de ce confinement sur l'île que finalement, c'est ce qu'on retiens de mieux.

En ce sens, j'ai préféré triangle rose car cette bande dessinée faisait bien mieux la part des choses.
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Deux journalistes viennent à la rencontre d'Antonio Angelicola, dit Ninella, 75 ans, qu'ils ont réussi à convaincre de raconter son histoire : Sous le régime de Mussolini, Ninella a été arrêté pour homosexualité et envoyé en exil sur une île (interné serait plus juste) où il vient grossir le nombre d'hommes mis à l'écart des regards du peuple, sous surveillance policière, pour ne pas faillir à la célèbre phrase de Mussolini, « En Italie, il n'y a que de vrais hommes ».
Les condamner ou les tuer reviendrait à reconnaître que le peuple italien n'est pas « parfait » ; les isoler, les « nier », les « passer sous silence » est la solution qui sera choisie.
Ninella se retrouve donc confiné, à l'abri du regard des braves gens et sous surveillance comme un véritable criminel, avec un minimum de moyens de subsistance.
Il découvre une communauté qui s'est créée. Pour certains, malgré les difficultés d'existence, l'isolement et l'absence de liberté, c'est un havre où ils peuvent vivre sans se soucier du jugement des autres. Mais les conditions de vie sont difficiles et les rivalités sont exacerbées par le confinement.
Renvoyés chez eux, ils doivent faire face à la honte et au déshonneur subie par leur famille.

J'ai découvert un pan de l'histoire italienne que je ne connaissais pas ! C'est fou qu'il faille tant d'années pour qu'on puisse parler de ce sujet (et d'autres qui sont toujours ensevelis sous les pavés de la « bonne morale », celle des « braves gens » comme disait Brassens).
Comme il est dit en préambule : « Il y a ces histoires que l'on trouve partout dans les rayons des librairies et qui ont comme sujet récurrent les tueurs en série. Et puis il y a les autres... qui semblent se cantonner aux bibliothèques des universités. La persécution des homosexuels en Italie en fait partie. Ce pays a utilisé, contre les lesbiennes et ses gays, une arme souvent plus sournoise que la répression brutale : le silence. »

Ce roman graphique (et tant d'autres) contribue à ouvrir, et de plus en plus, les portes de ces bibliothèques et nous donne à connaître, à penser...
Les dessins sont sobres mais expressifs et j'ai aimé le ton sépia et les REC / PAUSE en noir et blanc pour l'enregistrement. J'ai aimé le regard caméra du Ninella de 75 ans...
Il ne sait plus s'il doit témoigner ou se taire, partir ou rester... Tout est tellement loin, tout est si vieux... A quoi sert de remuer tout cela, cinquante ans après les faits ? Toute cette misère, toute cette souffrance ?

« Je n'ai plus jamais eu de nouvelles des autres.
Après la guerre, il était difficile de les retrouver...
Et puis aussi, on voulait un peu oublier...
Mais on ne peut pas oublier, ni vivre sereinement...
Il faut vivre avec cette peine... »
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Ce roman graphique nous propose de découvrir un aspect souvent méconnu de la Seconde Guerre Mondiale. En Italie, aucune loi ne fut crée à l'encontre des homosexuels, puisqu'ils étaient censés ne pas exister. Ils furent donc confiner sur de petites îles du Sud.
Dans cet album, deux journalistes rencontrent Giuseppe B. surnommé Ninella, l'un des seuls survivants de cette époque. Ils entreprennent tous les trois un voyage vers l'île où fut isolé Ninella. Avec son témoignage, on comprend la vie que ces homosexuels menaient sur cette île, ils n'étaient pas autant maltraités que les juifs mais enfermés pour cause de "pédérastie", ce qui été un scandale à cette époque. La dynamique du récit trouve sa force dans l'alternance des planches du présent et du passé. L'utilisation des seules couleurs, noir, blanc et ocre apporte de la sobriété au propos et aux personnages. Un très bel album pour lutter contre l'oubli.
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Au détour des rayons de ma bibliothèque, j'ai trouvé cette bande dessinée. C'est d'abord le titre qui m'a interpellée et ensuite sa quatrième de couverture : « Les lois raciales de l'Italie fasciste ne prévoyaient pas de peines à l'encontre des homosexuels : cela était inutile, puisque, d'après Mussolini, tous les hommes italiens étaient mâles, actifs et virils.«

La bande dessinée commence par un prologue qui explique un pan de l'Histoire italienne à l'époque fasciste. Les homosexuels étaient « parqués » dans des lieux éloignés. Un de ces lieux était l'île de San Domino delle Tremiti. Quand la guerre éclata, ils purent retourner chez eux car ces îles allaient servir de prisons pour les détenus politiques. Leur retour « à la maison » signait leur déshonneur et tachait les familles d'un scandale difficile à cacher.

Le scénariste et la dessinatrice ont décidé de mener cette bd comme un reportage. Deux journalistes vont à la rencontre d'un rescapé d'une de ces îles, un certain « Ninella ». Celui-ci n'est pas des plus bavards et est assez avare en témoignage. Les deux journalistes vont avoir du pain sur la planche pour percer les souvenirs de ce vieillard.
Pour commencer, Ninella raconte quelques événements de sa vie avant son arrestation, sa mère était une couturière et il l'aidait à son atelier. Son frère l'a mis en garde contre ses agissements qu'il considérait inconscients mais Ninella n'en avait que faire.
Il est ensuite arrêté et envoyé sur une île où il retrouve plusieurs homosexuels. Il rencontre des hommes aux caractères bien trempés qui, même s'ils subissent le confinement, n'ont pas perdu espoir. Ils sont de tout âge et de tout horizon. On y rencontre des travestis, des jeunots, des grandes gueules.
Grâce à ses talents de couturier, Ninella peut avoir un travail, il se charge de raccommoder les uniformes des carabiniers. « Moi j'avais le meilleur boulot: j'étais le tailleur des carabiniers. Tous les matins, je les avais là, devant moi, à moitié nus… Il y en avait un qui s'appelait V. Qu'est-ce qu'il était beau! Même 50 ans après, je m'en souviens encore… »

Ninella le reconnaît: la vie sur cette île n'était pas des plus désagréables. le pire a été le retour chez eux. Quand ils ont dû subir les brimades et les insultes. Même après la fin de la guerre, ces prisonniers n'ont jamais été indemnisés. Cette bd n'aborde pas cette partie et j'ai quelques regrets là-dessus. J'aurais souhaité que d'autres histoires soient abordées, qu'il y ait quelques témoignages en plus. Cette bd aborde un thème très intrigant mais les planches qui évoquent la vie sur l'île sont trop peu importantes.

Pour ce qui est du dessin, je l'ai trouvé assez beau, les couleurs oscillent entre le jaune moutarde et le noir, ça confère un sentiment de nostalgie. Les traits sont assez carrés mais ce n'est pas pour me déplaire.

Finalement, une bd intéressante mais qui manquait de quelques planches…
Lien : https://pagesversicolores.wo..
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Le titre du roman vient d'une citation de Mussolini. le dirigeant fasciste ne voyait pas l'intérêt de légiférer sur l'homosexualité, comme ses alliés nazis, puisque en Italie "il n'y a que de vrais hommes". C'est donc dans son dos, dans une sorte de no mand's land légal, que va s'organiser l'exil forcé des gays (uniquement les hommes) dans les îles du Sud du pays.

Ce roman graphique alterne entre deux époques. D'une part on suit deux reporters qui viennent interviewer Antonio Angelicola, alias Ninella, ancien déporté. Et d'autre part on voit le quotidien de ce Ninella à l'époque du fascisme.

Cet exil, Ninella va le vivre d'une façon assez ambivalente. D'un coté il y a la violence. Quand il se fait arréter, il est sérieusement passé à tabac, amené de force, puis bloquer sur cette île dans des conditions de vie peu enviables. Peu de nourritures, pas de chauffage, vie dans des cabanes... Mais d'un autre coté, cette île, peuplée uniquement de gays, est une sorte de refuge, à l'abri de l'intolérance du reste de la société. Les déportés sont prisonniers sur leur île, mais là ils y trouvent une relative liberté...

Cette bédé est un joli travail. le découpage du scénario est parfois un peu maladroit, mais dans l'ensemble on se laisse prendre. Les dessins sont plutôt beaux, très pudiques. Et c'est une oeuvre qui parle d'un épisode de l'Italie qu'on ne connait pas beaucoup.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
C'est que... cinquante ans après les faits, on n'a plus envie de parler de certaines choses. Que veux-tu, mon p'tit gars, ça fait remonter à la surface des souffrances, des procès... Parce qu'il y a eu d'énormes scandales, des familles qui ont subi un terrible déshonneur. Même un grand délinquant n'aurait pas écopé d'une peine comme la nôtre. Ils nous ont exilés, mais pourquoi ? On n'avait rien fait de mal, ce n'était que des ragots, c'est tout. Il y a eu des scandales, et une immense douleur pour les familles, parce qu'à l'époque, c'était une honte indescriptible d'avoir un fils comme ça. A notre retour, après les deux ans de surveillance, nous avons tous demandé réparation à l’État : on voulait être réhabilités. Mais personne n'a obtenu quoi que ce soit.
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Vous avez l'air de prendre ça pour une fable, une histoire pour enfants. Mais je rappelle que c'est mon histoire ! Ce n'est pas une histoire drôle, ni des ragots… L'histoire n'est pas faite de ça, elle est pavée de douleur !
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Et si l'espoir venait à manquer ?
Alors la mort serait en toute chose.
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Nous sommes désespérés, brigadier. Et quand on est désespéré, on peut tout se permettre, même d'être méchant.
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Je rentre retrouver ma famille, mais elle a été déchirée par la douleur.

Et l’exil, loin de mon village, c’était aussi un exil des regards, des ragots, des mauvaises langues.
Je rentre mais tout a changé.
Oui, je rentre mais plus rien n’est comme avant.

Aujourd’hui, mon royaume, c’est ce bout de terre qui n’appartient à personne, et où on a oublié le sens des mots « chez nous ».

Je rentre, oui, mais où ?
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