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sur 1188 notes
Il y a des romans, et il y a des oeuvres : « le ravissement de Lol V. Stein » appartient certainement à cette dernière catégorie. Particulier, dans le travail de la langue et dans le style, il ne se laisse pas facilement approcher. Il a fait l'objet de mémoires et de thèses que je me suis amusée à survoler, espérant y trouver quelques éclairages, car il fascine, et déconcerte. Bien qu'elle tienne une place centrale dans le roman, Lol V. Stein se dérobe sans cesse, échappant à la réalité. On ne sait pas qui est vraiment cette femme, dans la mesure où c'est le narrateur, Jacques Hold, qui la construit, de ses interprétations, teintées de la fascination et de l'attirance qu'il a pour elle; il la construit également à travers les perceptions de Tatiana Karl, son amante, qui a été amie avec Lol au collège, sans qu'on en sache beaucoup cependant sur la qualité de leur relation. Ainsi, la folie de Lol est doublement donnée à voir, à travers les yeux de ces deux narrateurs peu fiables. Est-elle restée fixée à cette expérience traumatique non mentalisée de l'abandon telle qu'elle semble l'être, et comme ils semblent le penser ? Première lecture pour moi, il en nécessitera sûrement une autre pour se laisser mieux appréhender.
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~ le ravissement ~

Lors du bal de T.Beach Lol V. Stein, tel un rapt, voit son fiancé, Richardson, tomber amoureux d'Anne-Marie Stretter. Lol dans ce ravissement, est ivre dans ce vacillement, jusqu'à s'oublier, jusqu'à frôler la folie. Elle appartient déjà au silence.

Peu après, elle épouse Bedford et disparaît dans une autre ville, dix ans & trois mômes plus tard, la famille s'installe à nouveau à S.Tahla, sa ville natale, Lol retrouve son amie Tatiana Karl, renoue avec son passé, ce passé pas si lointain mais déjà flou, si flou que je ne trouve les mots pour en parler sans le trahir par euphémisme ou exagération. Il est trop tard, elle sait qu'une partie d'elle qui ne reviendra jamais est restée dans ce trop tard !

Relativement complexe à lire, l'histoire est racontée par Jacques Hold, l'amant de Tatiana, qui a pour but de posséder Lol. Par vengeance ou par envie, Lol réinvente le passé, inverse les rôles & passe de l'autre côté du miroir, pour ravir à son tour l'amour à son amie.

Il est difficile de suivre & de donner un sens concret au roman, très psychologique, ambiguë. Lol est vaporeuse, évanescente, insaisissable, énigmatique, rythmée par la folie, le non-dit & le suggéré.

Mais avec Duras, faut-il au fond se soucier tant de l'origine des choses ? Duras, c'est une histoire d'amour, parce que toujours après avoir refermé l'un de ses romans, longtemps après il n'y a qu'elle !
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Un roman prodigieux, magique. Il y a eu dans Babelio des commentaires absolument remarquables et pertinents, donc je ne voudrais pas me risquer à une critique de fond de cet ouvrage, d'autres que moi l'ont très bien fait.
Simplement, je voudrais livrer, à propos de ce livre que le considère comme un des sommets de l'oeuvre de Duras, une réflexion sur son approche du roman, ou plutôt de l'écriture romanesque. de tous les auteurs que j'ai lus, je trouve qu'elle est, avec Virginia Woolf, (mais celle-ci d'une autre manière, tournée vers la sensation) celle qui a donné le plus au roman une vraie dimension poétique, c'est-à-dire, s'attachant, comme l'écrit Rimbaud, à "trouver une langue qui soit de l'âme pour l'âme".
Ou encore, comme l'écrit Andrée Chedid de la poésie:
"Disant sans vraiment dire,
Elle ravive le désir.
Multipliant les signes
Elle demeure à l'avant".
Oui, chez Duras, ce "dire sans vraiment dire", cette langue nouvelle qui est "de l'âme pour l'âme", avec cette syntaxe, ces mots qui se répondent, qui entrent en résonance, ces possibilités ouvertes et multiples du sens, cette sensualité, cette fragilité suggérées, cela relève pour moi de la magie du langage poétique.
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En quelques mots.....

Écriture : ellipse, simplicité du vocabulaire, non-dit, truchement d'un narrateur ( Jacques Hold)

Lol V Stein: abandon, perte, délire , mort, sommeil, conformisme, folie, inachèvement

Atmosphère: identité incertaine, flou entre réel et fantasme, illusion, apparence, divagation
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"Le ravissement de Lol V. Stein" est le premier roman du "cycle indien" de Marguerite Duras, qui comprend notamment "Le vice-consul" et "L'amour" où nous retrouverons, sans forcément en avoir conscience car les romans se lisent très bien indépendamment les uns des autres, les mêmes personnages, les mêmes lieux et certains thèmes communs.

C'est donc un roman des origines que nous propose ici Duras, origines de l'amour, origines du drame, origines de la mort... Car tout cela viendra dans les prochains romans, et tout cela sera indéniablement lié au ravissement de Mlle Lola V. Stein...

Tout commence donc ici... Avec un bal... le fameux bal de S. Thala, lieu fictif ô combien poignant et évocateur... Lors de ce bal, la jeune Lol V. Stein est quittée par son fiancé Michael Richardson pour Anne-Marie Stretter, la femme de l'ambassadeur de Calcutta. Pendant toute la nuit, Lol, cachée derrière les plantes vertes du bar avec son amie Tatiana Karl, observera le nouveau couple... Et de cet abandon, de cette rupture de lien et de la révélation voyeuriste du désamour naîtra la folie... Quelle folie, de quel ordre, de quelle forme, nous n'en auront qu'une vague idée mais nous savons que ce bal a déclenché la folie de Lol V. Stein. Nous le savons, car Jacques Hold, le narrateur de l'histoire, nous le confie à demi-mot dans son récit...

Le roman nous envoie ensuite dix ans après cet épisode, alors que Lol revient pour la première fois à S. Thala. C'est à ce moment là qu'elle rencontre notre narrateur qui n'est autre que l'amant de Tatiana Karl, qu'elle a retrouvé et avec qui elle a renoué une amitié. Entre nostalgie et errance, rêve et folie, Lol se promène dans S. Thala et se rappelle le bal, le drame... Puis, elle commence à suivre Jacques Hold... Et après l'épisode fondateur de sa vie où elle s'est vue ravir un homme, c'est elle, cette-fois-ci, qui ravit l'homme d'une autre...

Déroutant, dérangeant, fou et puissant... Ce magnifique roman est du Duras à l'état pur, un style sec et fort, des phrases qui résonnent, un décor qui submerge et des personnages qui troublent... "Le ravissement de Lol V. Stein" fut un vrai plaisir pour l'inconditionnelle que je suis, même si je dois dire que je lui ai préféré "L'amour" qui lui fait suite avec encore moins d'explications, plus de folie, de non-dits, et donc d'espace pour le lecteur, pour imaginer S. Thala et le monde comme il l'entend et comme il veut le sentir...
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Captée par le style si particulier de Marguerite Duras, je n'ai pas pu lâcher l'histoire de Lola Valerie Stein avec toutes ses incertitudes , ses non-dits, ses faux semblants et je me suis trouvée face à une sorte de pièce théâtrale avec ses scènes et plans qui se succèdent. Je crois que Duras voulait au départ écrire un texte pouvant être adapté au cinéma.
Ce texte, écrit en 1964, paraît étonnamment moderne aujourd'hui. Ce sont les différents points de vue qui provoquent un sentiment d'irréalité, le narrateur rapportant les propos d'une amie de Lol V. Stein et édifiant des hypothèses tout au long du récit. Et c'est cette atmosphère envoûtante qui prédomine et nous tient jusqu'au bout.
A découvrir absolument!
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Lola Valérie Stein, amoureuse de Michael Richardson se voit supplantée au cours d'un bal au casino municipal de T.Beach. Peu après, elle épouse Jean Bedford et disparaît dans une autre ville, U.Bridge pendant une dizaine d'années, le temps d'avoir 3 enfants. Son retour dans sa ville natale S.Tahla lui fait retrouver son amie Tatiana Karl, renouer avec son passé et s'incruster dans son présent. Personnage insaisissable, évanescent dont on a du mal à cerner la personnalité, Lol interroge le lecteur. Il est difficile de suivre et de donner un sens concret à cette narration ambiguë pourtant servie par la plume sensible et poétique de l'auteur.
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Le début du roman nous présente des personnages qui sont volontairement des clichés : Lola Valérie Stein, à T. Beach, se promène avec le beau Michael Richardson.
Les phrases de Duras sont courtes, le décor aussi sommaire que dans Dogville de Lars von Trier. On se croirait dans "Alerte à Malibu". Michael Richardson tombe amoureux d'une femme rousse, plus âgée, Anne-Marie Stretter : "avec sa grâce abandonnée, ployante, d'oiseau mort".
On s'attendrait à ce que Lol soit désespérée par l'abandon de son petit ami, mais elle observe le nouveau couple, en train de se former, derrière les plantes vertes, toute la nuit, fascinée. Elle souffre, à la fin de la nuit, de ne plus les voir. La meilleure amie de Lol, Tatiana Karl, assiste à la scène. Lol V. Stein est "ravie" par la vision du couple, sombre dans la folie. La scène du bal reste un souvenir si obsédant qu'elle reste bloquée sur l'image. Elle rencontrera plus tard le narrateur, Jacques Hold, qui tente de l'aider à recréer cette situation initiale, triangulaire, avec Lol et Tatiana à la place de Lol et d'Anne-Marie Stretter.
Etrange roman sur l'impossibilité de retenir l'instant, de le capter, de l'écrire sans le trahir. La romancière paraît tout aussi fascinée, ravie que son héroïne. Elle reprend d'ailleurs le même couple, Anne-Marie Stretter / Michael Richardson dans deux autres romans, "India Song" (dans le film, le rôle-titre est interprété par Delphine Seyrig et la musique, obsédante) et "le Vice-Consul". Mais peut-on vraiment capter la profondeur de l'instant à travers l'amour ou l'écriture ?
Le Ravissement de Lol V. Stein reste une expérience pour tout lecteur : on est ravi ou on passe à côté. Il ne s'agit pas de transposer la réalité, comme dans les romans réalistes, mais de l'effleurer, de l'esquisser : "J'invente", "je crois ceci". Une histoire, une fable est créée, sans cesse rappelée, répétée, dans une sorte de poésie obsédante et monotone.

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A moins d'aimer vous perdre , d'accepter le jeu sans en connaitre les règles et d'être un admirateur sans réserves pour Duras fuyez .
Mais si les trois conditions sont réunies , il est fort probable que cette oeuvre vous laisse entrevoir une partie de vous-même, occulte , sagement policée par la raison et les balises normatives nécessaires à une vie normale .
Bien mystérieux tout ça ? Qu'est-ce à dire donc ?
Traduire l'intraduisible n'a jamais été une chose aisée , les plus grands s'y sont essayés sans succès .
C'est peut-être donc ce qu'elle a essayé de faire , la Duras .
Mais là encore ces errements , hésitations , affirmations démenties par la suite ne donnent pas l'assurance de quelque certitude .
.............
L'histoire est simple : Lol Valérie Stein , jeune fille fiancée à Michael Richardson, assistera à une" scène fracture" qui la conduira à "la folie " . Sous ses yeux , avec une précision implacable , son amoureux se fera ravir justement par : Anne-Marie Stretter lors d'un bal .
On serait en droit d'imaginer que la douleur insoutenable la conduit dans le tourment psychotique . Mais non , si psychose il y a , elle n'est en rien associée à une souffrance mais à contrario à une absence de souffrance .
Le temps passera et Lol V Stein , mutilée intérieurement (D'où probablement le choix de ce diminutif ) le vivra mécaniquement , ritualisé , ordonné , nettoyé , classé et aseptisé au sein d'un mariage sans relief . le rituel garde-fou ?
Dix ans d'engourdissement salvateur pour le mental fragile de Lol .
Jusqu'au jour où les circonstances de la vie la mèneront à rouvrir la faille .
Lol se réveillera , revivra par projection son histoire .
C'est celui qui deviendra son dernier amant probablement qui raconte .
Jacques Hold, l'amant de Tatiana Karl, son amie de jeunesse qui était là aussi lors de ce bal , qui a tout vu aussi .
Lol V Stein s'immisce dans l'intimité de ce couple adultère (Tatiana est mariée ) par la petite fenêtre , celle de l'hôtel où les amants se rejoignent régulièrement pour s'unir ....Allongée dans un champ de seigle , Lol V Stein attend , capture , et trouve son bonheur à voir , aimer sûrement . Aimer par procuration alors ? Pas vraiment . Aimer dans l'absence . A soi . A l'autre . Au réel .Jusqu'à se perdre .
On n'en saura pas plus . le narrateur , Jacques Hold dans l'hésitation , le doute , l'affabulation assumée " (« je crois » et « je ne crois plus » ,mais aussi « j'invente », « je mens »), nous maintiendra dans cette obscurité , témoignant ainsi d'une impossibilité de mettre du sens , de la raison par les mots ....N'est-ce pas invitation à lâcher les outils habituels pour accéder à la connaissance et se saisir du ravissement de Lol V Stein pour entrer en résonnance avec celui-ci et enfin comprendre autrement ?
Marguerite Duras semble avoir percé des portes pour accéder à l'inconscient , l'infini , la création , la "dépersonne" .
La forme narrative se destructure , vole en éclats : magnifique kaléidoscope littéraire , miroir du moi : celui de Lol certes . Mais le nôtre aussi dans ce ravissement proche de l'extase , et ce ravissement à soi-même en tant que lecteur (double sens du mot ravissement sur lequel joue l'auteur ) , ce roman exceptionnel , unique , échappant même à la volonté de l'auteur , nous offre une expérience de la rencontre avec nous-même singulière dont on peut dire très justement que l'on n'en sort pas indemne .
J'ai adoré me faire ravir . L'absence à soi lorsque elle est provoquée par une oeuvre de cette puissance , est une expérience de vie des plus marquantes .
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Jacques Hold, le narrateur (le lecteur n'apprend son nom que très tard dans le roman comme il découvre que celui-ci est secrètement amoureux de Lol V. Stein) nous conte ici la vie parsemée d'embûches qu'a été celle de Lol Valérie Stein. Cette jeune femme avait tout pour elle puisqu'elle était fiancée à un jeune homme qu'elle aimait et était ainsi promis à un brillant avenir. Cependant, tout bascule lors d'une fatidique soirée de bal durant laquelle elle vit son fiancé s'éprendre éperdument d'une autre.
Afin d'oublier sa peine, Lol V. Stein décidera alors de se réfugier dans le chagrin, la frustration et dans son refus de s'ouvrir au monde et aux autres. Cependant, d'une façon plus ou moins inattendue, elle fera la rencontre d'un homme du nom de Jean Bedford qu'elle acceptera d'épouser. Ce dernier l'emmènera alors loin de S. Tahla et ensemble, ils auront 3 enfants. S'agissait-il plus d'un mariage de raison que d'un mariage fondé sur l'amour ? Lol . Stein l'apprendra à ses dépends lorsqu'elle reviendra habiter S. Tahla et où elle retrouvera Tatiana, son amie d'enfance, qui était elle aussi présente lors de ce fameux bal qui a bouleversé et changé la destinée de notre héroïne.
Marguerite Duras nous ravit dans cet ouvrage en nous parlant notamment d'un amour, enfin plutôt d'une passion dévastatrice qui laisse des traces indélébiles sur la personne qui en a été la victime, de trahison et de solitude. Un magnifique roman à découvrir !
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