POÈME
EN L'HONNEUR
D'HENRI MICHAUX
Au cœur de tous ses problèmes une mèche
brasille qui soudain met le feu aux poudres.
Est-ce précisément sa quête lumineuse de
la réalité intérieure qui nous interroge ? Les
mots révèlent son étrange pouvoir. Incapa-
bles d'« évoquer », dans le sens banal du
terme, ils cognent, d'autorité, à la fenêtre,
télégrammes reçus de Mars !
La vie n'est pas que pittoresque. Le monde
de Michaux grouille de faits comiques. Rien
de prétentieux, rien de précieux, dans son
travail. Il ne supporte pas l'ennui, cette
habituelle maladie de la poésie, ni le noir
désespoir de Valéry. Non, toujours quelque
part en lui un enfant timide joue avec sa
boîte de couleurs !
Impossible de ne pas sentir qu'il s'est
engagé, pour une interminable quête, dans
l'ordre de la prélogique humaine, dans l'or-
dre de ce qui a précédé la logique et le lan-
gage. Cette sorte de poésie fait penser à
l'homme des cavernes broutant autour de
ses bivouacs. Et sa peinture dispense un peu
de la même magie. Essaims de points faran-
dolant depuis les tribus du « verbe ».
Comment nous, sur cette terre, ne pas
clamer, témoigner, éclater de rire et crier :
« Ah, Michaux ! Quel diable de poète vous
êtes ! ».
p.23-24