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EAN : 9782924924327
216 pages
M éditeur (01/09/2021)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Ce livre est un acte, un acte politique

dont la révolution est l’objectif. Il n’a pas d’autre fonction.

Andrea Dworkin

En temps de pandémie, une épidémie d’agressions sexuelles et d’actes violents d’hommes sur leurs compagnes ou ex-compagnes déferle sur les sociétés. Pourquoi ? Quelles sont les racines de cette violence masculine ? Les fémi­nicides d’aujourd’hui ne renvoient-ils pas aux gynocides d’hier, comme... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Je commence par présumer que je suis libre

« Ce livre est un acte, un acte politique dont la révolution est l'objectif. Il n'a pas d'autre fonction. Ce n'est pas une quelconque sagesse cérébrale ou une foutaise universitaire, ou des idées gravées dans le granit ou destinées à l'immortalité. Il fait partie d'un processus et son contexte est le changement. Il fait partie d'un mouvement planétaire visant à refondre les us communautaires et la conscience humaine pour que les gens acquièrent le pouvoir sur leurs vies, participent entièrement à la communauté et vivent dans la dignité et la liberté ».

Dans sa présentation du livre, presentation-par-andrea-dworkin-de-son-livre-la-haine-des-femmes/, publiée avec l'aimable autorisation de M éditeur, Andrea Dworkin aborde, entre autres, la domination masculine, les luttes pour l'abolition de l'esclavage, l'émergence d'un mouvement radical de libération des femmes, les violences faites aux femmes, les luttes et les tactiques de désobéissance civique, le droit de vote, les lois discriminatoires, le droit au travail salarié ou à la liberté sexuelle, le servage du contrat matrimonial, lescomportements sexuels ritualisés, la survie dans un monde sexiste, « nous nous sommes maquillées, avons souri, exposé nos jambes et nos fesses, avons eu des enfants, et entretenu la maison, comme autant d'accommodements à la réalité politique du pouvoir », l'imbrication étroite des oppressions, la structure de classe raciste « de l'Amérike », la cécité de la majorité du mouvement des femmes, le sexisme, « Notre analyse du sexisme définit clairement ce qu'est l'oppression des femmes, comment elle fonctionne, comment elle est ancrée dans la psyché et la culture. Or, cette analyse est sans valeur si elle n'est pas liée à une conscience et à un engagement politique qui redéfiniront totalement la communauté », les relations de pouvoir et les institutions, la vie des femmes avec leurs oppresseurs, « les femmes vivent avec ceux qui les oppriment, couchent avec eux, ont leurs enfants : nous sommes empêtrées, désespérément, semble-t-il, dans les rouages du système et du mode de vie qui nous ruinent », les voies tortueuses de la libération, l'engagement et le travail « littéraire », l'écriture avec « un outil brisé »…

« Plus précisément, La haine des femmes a trait aux femmes et aux hommes, les rôles qu'ils jouent et la violence exercée entre elleux. Nous commençons par les contes de fées, les premiers scénarios de femmes et d'hommes qui façonnent notre psychisme, et qui nous sont enseignés avant que nous puissions apprendre autre chose. Nous passons ensuite à la pornographie, où nous trouvons les mêmes scénarios, explicitement sexuels et maintenant plus reconnaissables puisqu'ils nous décrivent – femmes charnelles et hommes héroïques. Nous passons à l'hystoire des femmes – pieds bandés en Chine, sorcières brûlées en Europe et en Amérike. On y voit le fonctionnement dans la réalité des contes de fées et des définitions pornographiques des femmes : l'anéantissement réel de vraies femmes – la réduction à néant de leur liberté, de leur volonté, de leurs les vies – la façon dont elles ont été contraintes de vivre et forcées de mourir. Nous voyons les dimensions du crime, les dimensions de l'oppression, de l'angoisse et de la misère – conséquence directe des définitions antagonistes des rôles qui situent les femmes comme charnelles, maléfiques et autres. Nous reconnaissons que c'est la structure sociale qui engendre la mort, les viols, la violence, et nous cherchons des alternatives, des moyens de détruire la société telle que nous la connaissons, de la reconstruire comme nous pouvons l'imaginer ».

Première partie : Les contes de fées. Les lignes de partage entre la légende et l'histoire, « Nous avons apporté les contes de fées de l'enfance avec nous jusqu'à la maturité, mastiqués, mais encore couchés dans l'estomac, comme une véritable identité », les rôle enseignés que nous jouons. Les effets profonds de la socialisation ne s'effacent pas par une simple volonté.

L'autrice aborde, l'adhésion aux rôles sexuels « comme conséquence directe des impératifs de ces rôles », le happy end des contes de fées, la mère comme « figure de la terreur », la beauté et l'admiration masculine, la construction de la maternité comme véritable fonction, la catatonie de la « femme bien », le « prince-charmant », les représentations explicites de la famille nucléaire, la « morale de l'histoire », les leçons simples que nous apprenons bien, la différence entre les hommes et les femmes, les deux définitions de la femme, « Il y a la femme bien. Elle est une victime. Il y a la femme toxique. Elle doit être détruite. La femme bien doit être possédée. La femme toxique doit être tuée, ou punie. Les deux doivent être annulées ».

Il est possible d'avoir une lecture plus contradictoire de ces contes. Pour autant, l'éclairage porté par Andrea Dworkin ne saurait être minimisé.

Deuxième partie : La pornographie. le scénario culturel du rapport homme/femme, le passage « du paysage des contes de fées aux châteaux du désir érotique », Histoire d'O, « La femme se manifeste sous sa forme adulte – le con », O comme 0, « zéro, le vide, dit tout à son sujet », la femme réduite à une chatte, victimisation et pouvoir, possession et prostitution, le cannibalisme psychique, l'Image de Jean de Berg, maître et esclave, le symbolisme chrétien, le culte de la virginité, les journaux dits de « sexe de la contre-culture », l'usage de stupéfiants, le temps écoulé, « Nous sommes plus âgé·es que nous n'avions jamais pensé le devenir », le renforcement des modèles sexistes des rôles duels, les effets constructifs du sexe oral enfin abordé, le viol et ses apologistes, les sacro-saints fantasmes masculins, l'« objet éternel » comme objet à nouveau. Andrea Dworkin refuse, à juste titre, la vision masculiniste de ce qui fut appelé « révolution sexuelle » et replace les comportements et les images dans le concret des rapports sociaux de pouvoir…

Troisième partie : L'hystoire. Les fictions qui documentent le paysage tortueux des souhaits masculins, l'extermination des Amérindien·nes et des Juif·ves, « Par contre, les actes de génocide commis contre les femmes ont à peine été remarqués, et ils n'ont jamais évoqué la rage, l'horreur ou la désolation », le crime de guerre spécifique perpétré contre les femmes – « celui du viol », le bandage des pieds des Chinoises comme institution (je souligne « les sept directives avant la lecture du chapitre ») et comme marqueur visible, l'esthétique sexuelle masculiniste, les femmes comme ornements et jouets sexuels, l'« art » de rendre « la matière vivante insensible, inanimé ».

L'autrice souligne l'ampleur du crime, « Des millions de femmes ont été, sur une période de mille ans, brutalement handicapées, mutilées, au nom de l'érotisme. / Des millions d'humaines ont été, sur une période de mill ans, brutalement estropiées, mutilées au nom de la beauté. / Des millions d'hommes se sont vautrés, sur une période de mille ans, dans des rapports sexuels dédiés au culte du pied bandé. / Des millions d'hommes ont, sur une période de mille ans, vénéré et adoré le pied bandé. / Des millions de mères ont, sur une période de mille ans, brutalement estropié et mutilé leurs filles au nom d'un bon mariage. / Des millions de mères ont, sur une période de mille ans, brutalement estropié et mutilé leurs filles au nom de la beauté. »

Elle poursuit cette hystoire avec ce curieux « amour » des hommes pour les femmes construit sur leur négation, les fondements de l'éthique romantique, la mutilation physique et la lobotomie psychologique des femmes, la beauté comme cristallisation de la valeur sociale, la relation des femmes à leurs corps prescrits, le temps et l'argent sans oublier l'énergie pour « se corseter, s'épiler, se colorer et se désodoriser », la place de la douleur dans le procès d'« embellissement », la construction d'« un sexe de moindre réalisation, plus faible, aussi sous-développé que tout pays arriéré ». L'autrice trace des pistes d'émancipation : « le corps doit être affranchi, libéré, au sens propre du terme : du maquillage, des gaines et de toutes sortes d'âneries. Les femmes doivent cesser de mutiler leur corps et commencer à l'habiter »…

Des mutilations au gynécide, le monde de l'Eglise catholique, l'inquisition et la persécution des sorcières, l'invention du diable, la construction d'une mythologie religieuse, « l'Église s'est livrée à une sorte de jeu de roulette, envoyant certains de ces dieux au ciel (en les canonisant) et d'autres en enfer (en les damnant) », le clergé lubrique et corrompu, ce que nous nommerions aujourd'hui « crimes contre l'humanité » de l'inquisition nommée Sainte Inquisition, le châtiment des hérétiques, la femme comme objet de rêve et le supplice au bucher, Eve dans l'oubli de Lilith, les « sciences des femmes » et l'expropriation violente de leurs savoirs, l'effacement des femmes jusque dans l'hystoire…

Les appréciations actuelles du « moyen-âge » s'écartent de ce qui fut nommé « Age des ténèbres » (lire, par exemple, les travaux de George Duby ou de Jacques Legoff).

« Notre étude de la pornographie, notre vécu réel, nous apprend que le mythe de la perversité féminine, incarné si résolument par les chrétiens du haut Moyen-Âge, demeure bien en vie ici et maintenant. Notre étude de la pornographie, notre vécu réel, nous apprend que bien que les sorcières soient mortes, brûlées vives au bûcher, la croyance en la perversité féminine demeure vivante, tout comme la haine du caractère charnel des femmes. L'Église n'a pas modifié ses prémisses ; la culture n'a pas réfuté ces prémisses. Il nous est laissé, à nous, comme héritières de ce mythe, de le détruire ainsi que les institutions basées sur lui ».

Quatrième partie. L'androgynie.

L'éditeur avait prévenu, « Oeuvre de jeunesse, le premier essai d'Andrea Dworkin, La haine des femmes, a été publié en 1973. Il reflète certaines hypothèses initiales et certains partis pris du milieu libertaire dans lequel elle baignait alors, en particulier sur l'inceste et la sexualité des enfants ainsi que sur les animaux. Par la suite, Dworkin corrigera certains aspects de sa pensée tandis qu'elle en approfondira d'autres. Comme l'a souligné l'autrice dans son deuxième livre, Notre sang : « La haine des femmes a été écrit par une écrivaine plus jeune, ayant plus de témérité et d'espoir ».

Au delà de connaissances aujourd'hui plus approfondies sur certaines périodes historiques, il convient de s'interroger sur la construction de positions que nous jugerions aujourd'hui délirantes ou criminelles. Comment à partir de la critique nécessaire de normes sociales, certain·es ont perdu tout sens critique ? Si l'androgynie peut-être un puissant fantasme, il n'en est pas de même des relations avec les enfants ou avec les animaux. La volonté de bousculer des « rôles fictifs » ne peut s'effectuer que dans le respect de l'intégrité physique et psychique des autres êtres humains. La juste critique de l'hétéro-normativité ne peut anéantir certaines barrières entre adultes et enfants, entre êtres humains et animaux. La remise en cause de la famille nucléaire ouvre de multiples horizons pour autant que soient prises en compte les conditions matérielles dessinant des asymétries et donc des rapports de pouvoir. Tout n'est pas souhaitable. L'espérance et l'émancipation sont incompatibles avec la prédation, la subversion de normes avec l'oubli des conditions matérielles d'existence.

Heureusement les autres livres de l'autrice montrent une compréhension féministe et émancipatrice des relations sociales, la force de la subversion des idées d'égalité et de liberté…

Je souligne la postface, le grand combat de la typographie de ponctuation, l'altération du texte, la volonté de dépouillement, les forces de l'ordre, pourquoi « je ne suis pas libre et ce que je peux faire pour le devenir ».
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Plus précisément, La haine des femmes a trait aux femmes et aux hommes, les rôles qu’ils jouent et la violence exercée entre elleux. Nous commençons par les contes de fées, les premiers scénarios de femmes et d’hommes qui façonnent notre psychisme, et qui nous sont enseignés avant que nous puissions apprendre autre chose. Nous passons ensuite à la pornographie, où nous trouvons les mêmes scénarios, explicitement sexuels et maintenant plus reconnaissables puisqu’ils nous décrivent – femmes charnelles et hommes héroïques. Nous passons à l’hystoire des femmes – pieds bandés en Chine, sorcières brûlées en Europe et en Amérike. On y voit le fonctionnement dans la réalité des contes de fées et des définitions pornographiques des femmes : l’anéantissement réel de vraies femmes – la réduction à néant de leur liberté, de leur volonté, de leurs les vies – la façon dont elles ont été contraintes de vivre et forcées de mourir. Nous voyons les dimensions du crime, les dimensions de l’oppression, de l’angoisse et de la misère – conséquence directe des définitions antagonistes des rôles qui situent les femmes comme charnelles, maléfiques et autres. Nous reconnaissons que c’est la structure sociale qui engendre la mort, les viols, la violence, et nous cherchons des alternatives, des moyens de détruire la société telle que nous la connaissons, de la reconstruire comme nous pouvons l’imaginer
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Des millions de femmes ont été, sur une période de mille ans, brutalement handicapées, mutilées, au nom de l’érotisme. / Des millions d’humaines ont été, sur une période de mill ans, brutalement estropiées, mutilées au nom de la beauté. / Des millions d’hommes se sont vautrés, sur une période de mille ans, dans des rapports sexuels dédiés au culte du pied bandé. / Des millions d’hommes ont, sur une période de mille ans, vénéré et adoré le pied bandé. / Des millions de mères ont, sur une période de mille ans, brutalement estropié et mutilé leurs filles au nom d’un bon mariage. / Des millions de mères ont, sur une période de mille ans, brutalement estropié et mutilé leurs filles au nom de la beauté.
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Notre étude de la pornographie, notre vécu réel, nous apprend que le mythe de la perversité féminine, incarné si résolument par les chrétiens du haut Moyen-Âge, demeure bien en vie ici et maintenant. Notre étude de la pornographie, notre vécu réel, nous apprend que bien que les sorcières soient mortes, brûlées vives au bûcher, la croyance en la perversité féminine demeure vivante, tout comme la haine du caractère charnel des femmes. L’Église n’a pas modifié ses prémisses ; la culture n’a pas réfuté ces prémisses. Il nous est laissé, à nous, comme héritières de ce mythe, de le détruire ainsi que les institutions basées sur lui
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Ce livre est un acte, un acte politique dont la révolution est l’objectif. Il n’a pas d’autre fonction. Ce n’est pas une quelconque sagesse cérébrale ou une foutaise universitaire, ou des idées gravées dans le granit ou destinées à l’immortalité. Il fait partie d’un processus et son contexte est le changement. Il fait partie d’un mouvement planétaire visant à refondre les us communautaires et la conscience humaine pour que les gens acquièrent le pouvoir sur leurs vies, participent entièrement à la communauté et vivent dans la dignité et la liberté
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Notre analyse du sexisme définit clairement ce qu’est l’oppression des femmes, comment elle fonctionne, comment elle est ancrée dans la psyché et la culture. Or, cette analyse est sans valeur si elle n’est pas liée à une conscience et à un engagement politique qui redéfiniront totalement la communauté
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Vidéo de Andrea Dworkin
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