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J'ai eu la sensation de m'être fait broyer les os en refermant ce livre. Je ne sais pas comment l'expliquer, je ne sais pas comment cela se fait mais lors du dernier paragraphe, j'ai eu la chaire de poule, les jambes coupées et le souffle court. Pourtant c'est un essai et non un polar gore !

Alors pourquoi ? Pourquoi j'ai pris un uppercut ? Pourquoi j'ai eu cette impression ? Tout simplement parce que je ne conçois pas qu'un homme puisse prendre un tel ascendant sur des millions d'autres, à son seul profit !

Ce qui m'a le plus épaté dans la démonstration de l'auteur sur le sujet de la dictature, c'est sa capacité à disséquer son sujet comme un véritable cadavre. En effet, Alaa El Aswany n'hésite pas à décortiquer chaque aspect, chaque recoin, chaque circonstance, chaque complication de la dictature. A la manière d'un médecin légiste, il nous livre ici une brillante autopsie de la dictature.

Bien que ce livre soit une critique de la dictature égyptienne, on brosse toute la carte du monde avec des exemples que nous ne connaissons pas… Par exemple, vous saviez que Bokassa admirait tellement Napoléon qu'il s'est fait sacrer empereur avec l'aide des français – grassement payés – pour avoir un sacre du même acabit que celui de Bonaparte ?

Ce que l'on apprend dans ce livre fait peur… Car certes la dictature est une maladie mais pour qu'elle s'installe, il faut que le peuple l'accepte et renonce à ses droits et à la liberté ! L'auteur maitrise tellement son sujet qu'il n'hésite pas à réemployer les thèses de la Boétie et à venir appuyer le fait que les peuples se sentent en danger et attendent donc un héros pour se protéger – le dictateur.

C'est captivant mais flippant, c'est simple à lire mais en même temps nos neurones chauffent. Bref c'est un essai qu'il faut absolument lire car c'est un cri d'alerte mais également d'espoir que l'on ouvre tous les yeux…

Si jamais je t'ai perdu en route, ami lecteur, et que tu n'es pas convaincu par ma chronique, peut-être seras tu davantage sensible à Monsieur Gérard Collard, alors regarde donc ceci : https://youtu.be/sUdNnWkOmLs !
Lien : https://ogrimoire.com/2020/0..
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Alaa El Aswany est selon moi le plus grand écrivain égyptien contemporain. le succès de "l'immeuble Yacoubian" qui dénonce les travers d'une société égyptienne corrompue est à l'origine de sa notoriété. Mais ce roman publié en 2002 avait posé pas mal de désagréments à l'auteur. Ce dernier avait néanmoins pu rester vivre en Égypte. le printemps arabe de 2011 puis l'arrivée des islamistes au pouvoir, détrônés rapidement par une dictature militaire ont changé la donne et l'auteur a dû comme de nombreux intellectuels intègres prendre le chemin de l'exil.
Son dernier essai s'avère être un parfait manuel pour décrypter les syndromes et les pathologies des dictateurs. Les dictatures sont par ailleurs pérennes grâce à l'émergence des "bons citoyens", qui sont ces personnes qui refusent de mettre en danger leur avenir professionnel et de risquer la prison et la torture pour des concepts de démocratie et de liberté.
Bravo monsieur El Asswany pour cet essai limpide.
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Dans cet ouvrage, Alaa El Aswany nous présente les mécanismes de mise en place d'une dictature et les moyens de la maintenir. Prenez un chef charismatique, parfois une idéologie (Mao, Hitler, Khomeiny), un pays qui va mal, et le peuple va donner sa confiance à celui qui le protégera de l'ennemi extérieur. Car une dictature a besoin d'ennemis, c'est la théorie du complot, et ceux-ci ont toujours des relais à l'intérieur du pays qu'il faut démasquer. On ouvre ainsi la porte à la répression qui est nécessaire à toute dictature pour se maintenir au pouvoir.

Le discours n'a pas besoin d'être cohérent, car il vise l'émotion, pas l'intelligence. Hitler n'avait pas besoin de démontrer ses théories, l'Allemagne allait mal et il a capitalisé sur l'antisémitisme pour trouver le coupable et gagner le support des Allemands. Nasser déclarait "“Liberté pour le peuple, pas de liberté pour les ennemis du peuple”. Rien qu'avec cette phrase, il promet la liberté mais pas pour ses opposants. Quand à Khomeiny, il forma un gouvernement dont il déclara clairement "qu'il était le gouvernement de Dieu et que quiconque lui désobéirait s'opposerait à Dieu". Et bien voyons, cet homme se met carrément au niveau de Dieu et justifie d'avance la répression terrible qu'il va exercer.

Une fois installée, la dictature doit prendre le contrôle des médias pour semer la bonne parole et surtout éviter tout discours contestataire. Naturellement elle doit également s'assurer le concours des organes de répression. L'auteur dit : "Des officiers de police, libéralement dotés d'argent et de privilèges, défendent le pays en torturant et en tuant, sachant qu'ils jouissent d'une complète immunité et n'ont pas de comptes à rendre. Des généraux de l'armée appartenant eux-mêmes à la classe aisée sont prêts à tuer autant de gens qu'il le faut pour préserver leurs privilèges. Des juges corrompus sont dirigés par des officiers de la sécurité qui leur dictent les décisions à prendre. Des membres du parti au pouvoir sont formés à l'hypocrisie et à l'opportunisme de façon à saisir chaque occasion d'enrichissement personnel grâce à leur militantisme."

Alaa El Aswany nous parle aussi du rôle des intellectuels. On ne peut pas reprocher à quelqu'un de ne pas risquer sa vie pour dénoncer une ignominie, mais on peut reprocher de soutenir un régime brutal. L'auteur dénonce quelques écrivains, comme Garcia Marquez ou pire, Pablo Neruda qui fût jusqu'au bout un admirateur de Staline. Parmi les intellectuels de gauche français, on a trouvé des supporters inconditionnels du système soviétique, ainsi Sartre soit-disant défenseur de la liberté qui a longtemps soutenu les purges staliniennes.

Une des théories de l'auteur est "qu'une dictature n'a pas été établie par la seule volonté du tyran. Elle est une relation humaine dans laquelle deux parties sont nécessaires : le tyran qui décide d'imposer son joug et le peuple qui a accepté ce joug". Et là on atteint les limites de cet ouvrage, dont l'exemple principal est l'Égypte mais qui prétend s'appliquer partout alors que ce n'est pas le cas. Autant certains peuples ont accepté le joug d'un dictateur comme le dit l'auteur, autant d'autres n'ont rien accepté du tout et ont dû se taire pour rester vivants. Les citoyens de Idi Amin Dada n'ont rien choisi, ils se sont tus pour éviter de servir de déjeuner aux crocodiles. Les Cambodgiens ont obéi aux Khmers Rouges car la moindre désobéissance signifiait la mort. Toute l'Europe de l'Est se taisait pour ne pas finir dans les geôles de la Stasi ou de la Securitate ou autre.

Dans cet ouvrage l'auteur émet quelques affirmations très contestables : "les animaux naissent libres et que leur propension naturelle les pousse à défendre leur liberté avec toute la force dont ils disposent". Ce n'est pas vrai pour les animaux grégaires chez lesquels règne une hiérarchie. Les loups naissent dans une meute où règne le couple dominant, les autres n'ont même pas la liberté de se reproduire. Les fourmis naissent soldats ou ouvrières, et chacune accepte son rôle. Même un troupeau de vaches a une hiérarchie et les plus faibles doivent se soumettre.
Il dit également : "Une révolution, pour l'essentiel, n'est rien d'autre qu'une tentative de trouver un remède au syndrome de la dictature". Robespierre, fruit de la révolution française, était-t-il un démocrate ou lui-même un peu dictateur ? Quid de la révolution iranienne ? le but était franchement de remplacer une dictature par une autre.
Dernier exemple : "Pour prévenir la dictature, nous devons avoir à l'esprit que, aussi couronné de succès que soit un dictateur au début, la fin sera catastrophique." Staline est mort dans son lit, après 30 ans de pouvoir sans jamais être contesté. Mao a fait régner la terreur et est mort tranquillement lui aussi, et la Chine s'est relevée après son décès. On a même vu des dictateurs éclairés, qui favorisaient le développement de leur pays pour avoir plus de richesses à piller.

En résumé je dirais que le syndrome de la dictature est une étude bien menée et assez complète, mais qui ne s'applique pas à tous les pays.
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Un court et efficace essai du célèbre écrivain égyptien qui questionne la dictature et tente de dévoiler ses principes, ce qui la soutient et les risques qui lui sont associés (dont le plus important peut-être : ce n'est pas un régime pérenne, tout le monde est donc forcément amené à trinquer lors de la chute du dictateur).

A grand renfort d'exemples (Égypte bien sûr, mais aussi Irak, Libye, URSS...), Alaa El Aswany étrille les "bons citoyens", tout aussi responsables que le dictateur du régime en place, les intellectuels et leur différent positionnement (du contestataire à l'intellectuel "à temps partiel"), ou encore la religion comme arme bien efficace pour asseoir son joug.

170 pages décortiquant les dictatures avec un mordant dont il serait bien dommage de se priver pour quiconque s'intéresse aux régimes totalitaires, à la politique, ou à l'Égypte !
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Petit livre d'explication sur les ressorts d'une dictature fardée de religiosité. Et d'échecs économiques en échecs politiques qui conduisent un pays à se renfermer sur lui-même.

Ce roman s'applique hélas à de nombreux pays bien que l'auteur parle principalement de sa patrie.

Cette lecture prolonge la vision du film noir Cairo Confidential.
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Si le syndrome de la dictature est un concept nouveau, les éléments qui le composent se retrouvent pour la plupart déjà dans les ouvrages sur le thème qui ont précédé ce livre. On en apprend un peu plus sur le régime de Nasser et dorénavant de Sissi, mais l'analyse des mécanismes et ressorts d'un système autoritaire reste un peu trop plane.
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Il faut des livres pour rappeler à ceux qui comme nous, en France, vivent en démocratie, n'en déplaise à certains, que la dictature existe. Malgré que le livre soit écrit par un Egyptien, elle ne touche pas que les pays musulmans. La plus part des dictateurs du 20ème et 21ème siècle figurent dans le livre à un moment où à un autre qu'ils se réclament d'une religion, d'une idéologie politique, où qu'ils soient militaires . Alaa El Aswany démontre avec brio, les mécanismes, ce qu'il appelle le syndrome. Après une préface dans laquelle il rappelle comment est né ce livre, lui qui a dû s'exilé de son pays à cause des menaces qui pèsent sur lui. Il explique ce que signifie l'expression syndrome de la dictature, quels sont les symptômes, les différences de comportements entre un dictateur et un dirigeant en démocratie en prenant en exemple Nasser et Churchill. Il montre comment la dictature corrompt la société, la presse, les arts, le milieu médical, judiciaire et politique. La violence dans une dictature a pour but de créer une barrière de la peur, qui fait que le bon citoyen craint le régime, accepte son sort et s'oppose à ceux qui veulent renverser le dictateur. Il accorde un long chapitre à la théorie du complot dont use et abuse le dictateur, l'exemple du « Protocole des Sages de Sion » est très intéressant . Par sa démonstration on comprend parfaitement le comportement de certains dirigeants actuels, où en devenir, et de ceux qui soutiennent cette néfaste théorie du complot. L'esprit fasciste se propage par la manipulation de la presse, des médias qui ne diffusent plus de l'information mais de la propagande sur le rôle du dictateur pour tenir tête aux ennemis supposés du pays. le chapitre sur les intellectuels face aux dictatures est passionnant, partagés entre ceux qui résistent, ceux qui apportent leur soutien, ceux qui s'accommodent. On y croise sans révéler dans quelles catégories ils sont : Thomas Mann, Gabriel Garcia Marquez, Alexandre Soljenitsyne, Pablo Neruda, Frédérico Garcia Lorca, Naguib Mahfouz, Boris Pasternak... Puis, il en vient à démontrer combien les extrémismes religieux servent les dictatures. Ensuite il aborde le développement du syndrome, décrit depuis l'enfance jusqu'à sa chute, pourquoi, comment résonne et agit le dictateur. En conclusion l'auteur revient sur le rôle des religions, sur la différence entre patriotisme et chauvinisme et surtout il appuie sur le théorie du complot dont il rappelle combien il faut s'en méfier.
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Un essai, on ne peut plus précis, sur ce syndrome qui ne cesse de nous menacer.
Personnellement, à tout prendre, je préfère ses romans.
Moins rébarbatifs, et finalement plus jubilatoires que ces discours théoriques, ils n'en sont pas moins instructifs
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