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EAN : 9782841411542
352 pages
Editions L'Ancre de Marine (09/02/2004)
4/5   3 notes
Résumé :

A la fin du siècle dernier, Victor Lemétayer, jeune paysan breton de Trébédan, a choisi. Il ne s'échinera plus sur une terre aride et partira pour Terre-Neuve où, dit-on, la pêche à la morue rapporte gros. A Plouèr-sur-Rance il se rend à la " foire aux marins ", ces tristes enchères d'espoir et de misère, où des mères négocient avec les capitaines le départ de leurs enfants co... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« L'Ile aux Chiens » de Françoise Enguehard (2001, L'Ancre de Marine, 356 p.), republié sous le titre « Les Litanies de l'Ile aux Chiens » (2006, Editions d'Acadie, 435 p.) pour commencer. Cela tombe bien, l'auteur est née à Saint Pierre, mais s'installe à Terre Neuve et devient la présidente de la Société Nationale de l'Acadie. Son roman est même traduit en anglais sous « Tales from Dog Island ». Elle mène le combat pour la francophonie, avec la création du Conseil Scolaire Francophone de Terre-Neuve-et-Labrador. Deux autres romans, pour les plus jeunes, et un quatrième « L'Archipel du Docteur Thomas » (2009, Éditions Prise de Parole, 166 p.).
L'Ile aux Chiens est une petite île à l'Est de l'île De Saint Pierre. C'était l'endroit où les morutiers venaient faire sécher le poisson avant de rentrer en septembre de leur campagne de pêche qui débutait en mars. C'est l'histoire de Victor Lemétayer, un jeune breton de l'intérieur des terres, près de Plouër-sur-Rance, qui ne veut pas être paysan et part s'engager pour la pêche qui paye mieux. Mais comment expliquer que pour les Terre Neuvas, « l'odeur du fumier sur le plancher des vaches lui semble mille fois préférable à celle de la boëtte et de la morue sur un pont sanguinolent ». Donc il part, sans le dire à ses parents. On est en 1887, dans une Bretagne très traditionnelle. le découpage du livre se fait suivant trois litanies, comme cela se pratiquait le soir avec la prière avant de dormir. Une première campagne de pêche, où il découvre la vie à bord, dans le froid et les mains dans l'eau salée, à découper les poissons. Mais l'argent est au bout, et Victor est moderne, il le place non pas chez lui, mais dans une banque. Puis il revient au pays, et décide de repartir pour être son propre patron. C'est-à-dire de s'installer sur l'Ile aux Chiens, tout d'abord dans une cabane, puis d'acheter une maison, une vraie, où il pourra faire venir Marie-Joseph, du bourg voisin.
Un livre à la gloire de la pêche à la morue. Au temps héroïques où celle-ci servait à en extraire le foie et donc l'huile de fois de morue. Un régal pour les petits garnements, dont j'étais. Surtout qu'à l'époque, l'huile n'était pas encore désolidarisée de son odeur de gadiforme. Maintenant il n'y a plus que le cabillaud. On ne trouve plus la morue qu'accompagnée de son maquereau, mais c'est une autre histoire, à peine plus dessalée. Ah les omégas 3, 6, 12, 18 ou je ne sais quoi, invention moderne pour faire avaler la potion. Et dire que plus tard, au Brésil, j'ai découvert que la morue, la « bacalhau », était un plat de riches, réservée aux repas des dimanches et des jours de fêtes, bien plus que la « feijoada ». Mais tout cela ne valait pas ces poissons cuits au lait de coco, bien plus succulents. Ah les délices des tropiques.
Retour au livre, donc divisé en trois litanies. C'est très bien documenté, mais le récit reste assez linéaire et sans trop de fioritures. On y découvre la vie rude chez les paysans bretons, avec les traditions familiales de l'époque. La scène du mariage avec les demandes préliminaires et les accordailles est assez bien vue. On découvre aussi la vie, soit à bord des morutiers, puis des vapeurs où les hommes sont entassés dans la cale, 1500 au lieu de 500 prévus, mais le voyage précédent c'étaient des ânes venant d'Amérique du Sud. La vie aussi de Victor sur son doris, après être devenu son propre maître. La vie ensuite à terre, sur l'île, une vie entre femmes, car les hommes sont en mer. Les conditions sanitaires de l'époque. Je pense, en passant que « L'Archipel du Docteur Thomas » est centré sur les mêmes conditions, à partir de photos retrouvées un peu au hasard. On lie connaissance avec son prédécesseur, le révérend père Hamon, qui fait la traversée sur le vapeur pour « aider nos pauvres pêcheurs d'Islande et de Terre-Neuve ». Cependant le récit est plus actuel. Les conditions de vie ont changé. Les habitants De Saint-Pierre sont maintenant presque des canadiens. « Et on avait plusieurs choses en commun avec nos voisins: les mêmes rigueurs de l'hiver qui obligeaient à construire de la même manière et à s'acheter des chasse-neige, le hockey, les grosses voitures, les catalogues des grands magasins — Sears, Eaton's, Montgomery Ward — dans lesquels on commandait tout, des débarbouillettes aux draps Permapress, en passant par les meubles et les chaussures. Bref, les Saint-Pierrais partageaient le quotidien et la météo avec cet énorme continent. À Saint-Pierre et Miquelon, l'air sentait l'iode et le vent était tout aussi sauvage qu'à Terre-Neuve ou en Nouvelle-Écosse et les nuages d'hiver annonçaient le même poudrin que celui qui s'était abattu sur Montréal ou Québec ».
le tout se lit sans problème, avec cependant quelques mots techniques propres à la pêche. Quelques curiosités, comme celle d'habiter loin, « c'est-à-dire au diable vert ». Ou « ceux qui se présenteront à la porte de la ferme seront reçus avec la politesse qu'on réserve aux horvenus ». Mais cela reste très lisible, avec trois cartes, qui n'aident d'ailleurs pas beaucoup, en particulier sur Terre Neuve. On découvre aussi « les mocques de cidre » à Saint Malo, les ancêtres des mugs actuels. Il y a une chose tout de même qui me surprend. Les dialogues, surtout lorsque les personnages sont en Bretagne se font dans un patois francisé. Or, à cette époque, avant 1900, on ne parlait que peu français à Saint-Malo, et encore moins à l'intérieur des terres, ni breton d‘ailleurs. Plouër-sur-Rance est en plein pays gallo, ce qui est mentionné, donc on a peu de chance de trouver les expressions du récit. Ce n'est qu'après la fin de la guerre, en 1918, que le brassage des populations commence à se faire sentir dans le parler local.
le récit court sur plusieurs générations. Victor embarque pour la première fois en 1887 à 18 ans et se marie à 31 ans en février 1899. Sa femme Marie Joseph Ménard a alors 26 ans et sa première fille Victorine, nait en décembre1900. Onze ans plus tard c'est au tour d'Ange-Marie. Et tout s'accélère. Victor meurt au début de 1914 et ne verra donc pas la première guerre. Son gendre s'engage dans la marine et voyage. Finalement le livre s'achève une soixantaine d'années après le mariage de Marie-Joseph. « de quoi aurait-elle peur après une vie pareille ».
Au passage, mais ce n'est déjà plus dans le livre, on apprend toutefois qu'il y a eu un raz de marée qui a dévasté une partie de l'Ile aux Chiens. Ce qui est assez surprenant. Tout d'abord parce que les séismes dans cette région sont rares, et qu'ils induisent des tsunamis est encore moins fréquent. Mais recherche faite, cela a bien été le cas, en Novembre 1929. Séisme relativement important sur une faille active qui délimite le laurentian Channel qui sépare Terre Neuve du continent. Une énorme coulée de boue provoquée par le séisme sectionne plusieurs câbles transatlantiques, indispensables à l'époque. C'est le volume des boues déplacées qui induit le tsunami, lequel se manifeste tout de même par des vagues de plus de 7 mètres d'amplitude. C'est assez amusant de constater que cet évènement surgit alors qu'on découvre actuellement qu'il existe des sous-marins, de puissances étrangères naturellement, qui suivent les câbles transatlantiques, afin d'en intercepter les messages. Par quels moyens l'espionnage passe t'il de nos jours. Je vois déjà le prochain roman d'espionnage dans lequel on recherche les hommes d'un sous-marin, enfoui sous une coulée de boue déclenchée par le contre-espionnage. Et que penser de ce glissement de terrain au Sichuan, en Chine occidentale, où le volume du terrain déplacé est de 20*40 km, au pied du plateau du Tibet. La différence d'altitude existant entre le plateau du Tibet à plus de 4000 mètres et qui passe pratiquement le niveau de la mer (400 m) en une trentaine de kilomètres, facilite ce genre de glissement.
Retournant au livre, et surtout aux descriptions de la Bretagne des alentours de 1900, j'ai trouvé le livre assez plat et conventionnel. Certes, c'est très bien documenté, mais presque trop bien. Par moments, on s'attend aux réactions qui vont se produire. Ayant vécu à Rennes, il y a quelque temps, j'avais découvert un marchand de meubles et d'antiquités, enfin, c'est comme cela qu'il nommait son métier. Entre autres, il vidait des manoirs et maisons bourgeoises de la vieille noblesse bretonne, pratiquement ruinée. Et dans son fatras mobilier, il y avait quelques cartons de livres, brochés, ou reliés. Des objets donc sans grand intérêt, du moins pour lui, qu'il me laissait fouiller à ma guise. Il y avait des restes de bibliothèques de la fin du XIXème siècle. Des Paul Féval en pagaille, des Ponson du Terrail idem, dont des « Rocambole » divers, brochés, dans leur couverture couleur minium de chez Dentu des années 1870, un régal que je ramenais et lisais. de ces Paul Féval, je me souviens de « le Loup Blanc » ou de « L'Homme de Fer » qui se passent dans la campagne au Nord de Rennes, donc la même région que « L'Ile aux Chiens », sensiblement à la même période, sinon un peu plus tôt. J'avais toujours été frappé par ces descriptions du milieu paysan breton. Je dois reconnaître que je n'ai pas retrouvé un tel souffle, épique chez Françoise Enguehard. Ceci dit, je comprends que ces récits soient importants pour les acadiens. Ce sont leurs racines immédiates. D'ailleurs Françoise Enguehard indique dans son avant-propos que « le roman est basé sur des personnages ayant existé », en fait ce sont ses arrière-grands-parents.

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