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4,08

sur 509 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Depuis mon inscription sur Babélio, je considère le chemin parcouru et je me souviens de mes premiers chers ami (es), qui se reconnaitront et m'incitaient à ouvrir mon champ de lecture….et de la haute résistance que j'opérai, notamment avec Nastasia B qui pourtant n'était pas à court d'arguments… même si c'était que son humble avis….comme elle aime à le dire… !

Cela a continué à germer et de tous vos encouragements et incitations, nait ici le fruit d'une lecture que je n'aurai jamais imaginé faire…il y a un peu plus d'un an….qui ne correspond pourtant pas à mes « affinités littéraires ».

J'avais encore hésité à acheter pourtant dans son édition originale chez Albin Michel dans une foire aux livres…c'est le titre poétique plus que le thème qui m'a irrésistiblement incité, il fallait que j'évolue… un roman de surcroit américain sous forme d'enquête….pourquoi pas….un bon compromis !

Voilà Fleur contre toute attente, arrivée en Dakota du Nord dans une réserve amérindienne…pour 460 pages afin de découvrir ce qui se cache derrière cet auteur, ce titre…

Dans le silence du vent, Louise Endrich fait parler Joe 13 ans : fils d'un juge fédéral et d'une mère spécialiste des appartenances tribales. Ils vivent sur un territoire bien délimité qui n'appartient pas à la réserve, la loi ne peut donc s'appliquer aussi improbable que cela puisse paraître, quand bien même sa mère vient d'être violée….

Joe comprend très vite que c'est « l'injustice » des hommes vis-à-vis des indiens qui fait force de loi et que rien d'autre n'aboutira.

Alors avec Angus, Cappy, Zack, ses frères de coeurs, sur leurs vélos, j'ai suivi leurs péripéties d'adolescents, parce qu'ils décident de mener l'enquête. Ils sont bourrés de tendresse, de complicités, d'espiègleries, cette bande de copains. Ils profitent du regard bienveillant des habitants de la réserve, parfois de leur complicité, vivent leurs premiers émois, écoutent et participent aux histoires rituelles de cette communauté…

Joe est un fin stratège avec ses colistiers… l'air de rien, il avance et chemine avec détermination et pugnacité, gravité…pour comprendre ce qui s'est passé et protéger ses parents.

Jusqu'où va-t-il aller ?

C'est la force de Louise Endrich dans ce roman d'avoir écrit de telle sorte, qu'on est dans la peau de ce gosse de 13 ans et c'est juste captivant, sublime, émouvant, attachant. Je ne m'attendais pas à cette « chute »...
Cela m'a soufflé….

«Dans le silence du vent», à travers ces pages, j'ai entendu un cri…silencieux s'exprimer…celui de Joe…..
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Ce roman fort intéressant traite trois thèmes majeurs ; je ne sais pas dans quel ordre d'importance les classer. Disons que c'est un roman d'apprentissage (le narrateur a treize ans et nous raconte un été qui a changé sa vie) dont l'action se déroule dans une réserve indienne des Etats-Unis et est centrée autour du viol de la mère du héros, Joe. L'auteure mêle avec beaucoup d'adresse les trois axes de son récit.
1988. Les Autochtones américains (il y a de nombreux termes pour désigner les Indiens, qui font polémiques, je ne m'y retrouve pas trop, d'autant plus que les Canadiens, les Américains du nord du centre et du sud ne sont pas d'accord...Je vais essayer de tous les employer.) vivent pour la majorité dans des réserves qui sont des Etats dans l'Etat. Ils ont leurs propres lois, qui s'appliquent exclusivement sur leur territoire, et selon la tribu. le père de Joe est juge, sa mère travaille sur la généalogie des familles Natives dispersées et ravagées. Un après-midi, elle rentre choquée, terrorisée : elle a été violée. Où ? Comment ? Par qui ? Pourquoi ? Autant de questions qui seraient compliquées sur le territoire fédéral (j'espère que je ne me trompe pas dans les termes) et qui deviennent quasi ingérables sur la réserve. Si le viol a eu lieu hors du territoire, c'est la loi de l'état concerné qui s'applique. Si c'est à l'intérieur, c'est le droit indien. La mère de Joe ne sait pas où elle a été violée, on lui a bandé les yeux. Ajoutez à cela le racisme des "Blancs" (terme générique pour désigner les descendants de colons européens) qui s'entraident à harceler les Indiens, et vous aurez un cocktail propre à enflammer chez Joe la flamme de la vengeance.
Un roman d'apprentissage sur l'adolescence : face à l'injustice flagrante, à l'impuissance juridique de son père, à la dépression de sa mère, qu'il ne reconnaît plus, Joe doit changer, réagir, agir. Avec ses copains. C'est l'amitié à la vie à la mort, l'aventure, le courage, la transgression, la maturité.
Une description de la réserve, ce monde hybride né des persécutions des colons européens puis de leurs descendants américains, où le catholicisme se mêle à la religion originelle, où le mode de vie occidental s'insinue partout dans les traditions tribales. Contes anciens et Alien, plumes et vélos, cheveux longs, nattés et baskets mode, alcool et trucs bizarres qui se fument, fantômes, esprits, et rationalité grecque, présages, animaux totem, sodas sucrés caféinés, rêves prémonitoires et armes à feu...Un mélange assez extraordinaire pour une civilisation que l'on a presque détruite...J'ai songé souvent en lisant à Heydrich et la solution finale, où l'historien Edouard Husson explique qu'Hitler voulait faire aux Juifs ce que les Américains ont fait aux peuples autochtones : prendre toutes leurs biens et les laisser dans des réserves (en Sibérie pour Hitler, ou à Madagascar...), les affamer...Les colons ont massacré tous les bisons, comme le rappelle un conte dans le roman...Eh oui, il ne reste pas grand chose aux Indiens d'Amérique, et même ce petit reste, il faut qu'ils se battent chaque jour pour le conserver...
Cependant Joe est la preuve que la vie est plus forte. Il mène un combat politique, mais aussi pour lui-même, en tant qu'être humain réclamant justice. Un combat cruel et dangereux, où la Nature, la Providence, qui sait quoi, se moque bien de l'histoire des peuples et rejoue tout à chaque instant, sans pitié.
Très belle réussite.
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Imaginez que vous subissez une agression, un viol, qu’un meurtre se produit. La police enquêtera et mettra tout en œuvre pour retrouver l’agresseur et à la justice de le juger.

Maintenant, imaginez que vous êtes dans une réserve d’Indien. Un viol vient d’être commis sur une amérindienne, sur un bout de territoire qui ne fait pas partie de la réserve. Et bien, croyez-le ou non, mais il y a de fortes chances pour que l’agresseur ne soit pas poursuivi parce que le délit a eu lieu en-dehors de la réserve, et que la justice par les indiens ne peut s’exercer au-delà de celle-ci. Les indiens n’ont aucun pouvoir. Ceci est une loi édictée par les Blancs vis-à-vis des Indiens.

Alors, lorsque Géraldine est agressée, son fils, Joe, âgé de 13 ans, ne cessera de chercher le coupable avec ses amis. Mais Joe et ses amis arriveront-ils à découvrir l’assassin et que feront-ils s'ils le découvrent ?

C’est aussi l’histoire de cette réserve en Dakota du Nord, où l’on découvre les méandres de la justice vis-à-vis des indiens, la vie mais aussi la solidarité et la fraternité qui unissent toutes les familles de cette réserve.

Edifiante cette histoire !
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Récit douloureux de la sortie de l'enfance de Joe, qui deviendra un homme en découvrant la violence, l'injustice, la mort.
Quand sa mère subit une brutale agression sexuelle et rentre traumatisée à la maison, Joe découvre tout aussi brutalement la fragilité de son univers : sa mère lumineuse n'est plus que l'ombre d'elle-même, et Joe se retrouve dans l'obligation de la materner. Son père, juge solide et reconnu dont Joe n'aurait jamais soupçonné qu'il puisse faillir, parait hésiter à prendre le dossier en main. Joe ne comprend pas: pourquoi la police traîne? pourquoi la justice n'est -elle pas rendue?
La réponse lui viendra peu à peu, à mesure que les voiles de l'innocence tombent de ses yeux, des secrets de la vieille postière, des esprits de la maison qui tremble, du regard de ses copains qui eux ont déjà vu: Joe est un indien ojibwe, vivant dans une réserve du North Dakota, et la loi qu'on applique aux Indiens n'est pas celle qu'on applique aux Blancs. Alors Joe décide d'agir.
Dans ce roman intimiste, Louise Erdrich fait le choix judicieux d'aborder l'injustice organisée du système légal indien à travers le regard d'un pré-adolescent, qu'elle fait parler avec une grande justesse : le lecteur se retrouvant en même temps que lui "dépucelé de l'horreur" comme le Bardamu de Celine.
S'il est évident que le sujet lui tient fortement à coeur et que sa démonstration est implacable, je suis malheureusement encore une fois restée un peu à distance de cette histoire, pourtant plus construite et circonscrite que La chorale des maîtres bouchers. C'est frustrant, d'autant que je ne sais pas expliquer pourquoi je n'arrive pas à entrer pleinement dans l'univers de cette grande auteure.
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À l'âge où on découvre son corps, où les adolescents fantasment sur le corps des femmes mûres, où l'insouciance devrait être le moteur de sa vie, Joe, tout juste 13 ans voit son monde éclater en morceaux de drame et de larmes, de silence et de non-dits, de peur et d'angoisse. L'agression, d'une rare violence, subie par sa mère, et ses conséquences sur la vie familiale, sonnent la fin de l'enfance et le vieillissement prématuré de son âme.

Il y a un peu plus d'un an je découvrais la plume de Louise Erdrich et en étais tellement tombée amoureuse que je ne voulais pas me replonger trop vite dans son oeuvre de peur d'être déçue. J'ai retrouvé dans cette deuxième incursion dans son univers tout ce que j'avais aimé : ses formidables qualités de conteuse, sa manière de nous plonger dans l'intimité d'une communauté, sa force à faire naitre des personnages admirablement dessinés, qu'il s'agisse des personnages principaux comme les secondaires, sa capacité à suscité une émotion sincère.

Autour de Joe il y a famille : son père et sa mère, fracassés par le drame et qui vont faire preuve d'un amour familial immense. Il y a ses amis Cappy, Angus et Zack, les inséparables, ceux avec qui on partage les bons coups, les galères, les premiers émois amoureux, les bêtises d'adolescents. Il y a la famille au sens large, les oncles, tantes, cousins, cousines, tous ceux liés par le sang et par les traditions. Et il y a une communauté, celle des indiens Ojibwés, dans une réserve du Dakota du Nord, soudée, qui maintient ses croyances et ses traditions tout en intégrant certains aspects du mode de vie de l'Amérique des années 1980, et qui fait vivre au quotidien ses valeurs dont la solidarité, l'esprit de famille et de clan, le respect des autres, de l'environnement et du droit.

À travers l'histoire de Joe, de sa mère Géraldine et de son père, Louise Erdrich nous parle du viol qui touche une amérindienne sur trois au cours de sa vie (statistique certainement sous-estimée), la plupart du temps oeuvre d'un non amérindien. Elle nous parle de la complexité du millefeuille de loi qui s'applique au sein des réserves indienne, pour ne pas dire de l'injustice flagrante qui en découle. Si le propos est éminemment politique l'auteure n'en fait ni un manifeste féministe, ni un texte militant, grâce à ses qualités évoquées ci-dessus. Comme elle le souligne dans la postface, ces règles énoncées dans ce récit situé en 1988, étaient toujours en vigueur en 2012 lorsque le livre est publié aux États-Unis.

En faisant porter le récit par la voix d'un adolescent de 13 ans elle met d'autant plus l'accent sur l'incompréhension que l'on peut ressentir face à cette justice à deux vitesses. Joe n'aura de cesse d'essayer de comprendre tout en réussissant à sauvegarder des moments de pur plaisir avec ses 3 amis, mènera son enquête, parallèlement à celle des adultes (dont son père, juge du tribunal tribal), fera tout pour que sa mère redevienne celle qu'elle était avant l'agression, et comprendra que rien ne pourra totalement redevenir comme avant.

Une lecture très réjouissante, par la qualité du propos et par la délicatesse, la poésie, la force de l'écriture de Louise Erdrich.
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En 1980, dans une réserve indienne du Dakota, une femme est agressée et violée.
Son fils âgé de 13 ans, bouleversé, mène son enquête pour découvrir le coupable.
Une belle fresque qui nous fait découvrir la vie dans les réserves indiennes.
A travers l'histoire de cet adolescent traumatisé, c'est une recherche de vérité et de justice
C'est riche en personnages, en caractères. J'ai ri devant les comportements outranciers de certaines grands-mères vraiment désopilantes. J'ai apprécié les histoires des anciens.
Bref, c'est un roman fourni et copieux que j'ai bien apprécié.
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C'est à l'âge de 13 ans que la vie de Joe, d'origine amérindienne, bascule. L'année où sa mère subit un viol. La justice tribale ayant ses limites et le procureur fédéral refusant d'amener l'affaire devant les tribunaux, le violeur reste impuni. Impensable, inconcevable, invivable pour Joe d'accepter une telle injustice ou plutôt une telle non-justice. Lui et ses trois amis Cappy, Zack et Angus mènent leur propre enquête et face à sa colère et sa douleur, ils agiront sans en mesurer les conséquences.

C'est avec la voix de cet adolescent que Louise Erdrich énonce les injustices que subit, encore aujourd'hui, le peuple indien. Pour les mettre en perspective, elle campe son roman dans une réserve indienne du Dakota du Nord où Joe y vit avec sa famille. Les professions de son père en tant que juge du tribunal tribal et de sa mère comme avocate au Bureau des Affaires indiennes amènent une dimension sévère dans l'inégalité des juridictions.
Il est aussi question de ce passage brutal du bonheur au malheur lorsqu'un drame arrive. le mutisme de la mère, l'énergie déployée par le père, les recherches incessantes de Joe et leur douleur nous électrisent. C'est très réussi, impossible de ne pas le ressentir. Un autre passage pour Joe est très bien traité, tout aussi perturbant, celui de l'adolescence à l'âge adulte.
L'histoire est dramatique et pourtant l'auteur, avec les thèmes de l'amour et de la fraternité apporte du réconfort et de la lumière. L'amitié est très présente, elle parcourt tout le roman. Joe peut compter sur Cappy, Zack et Angus, c'est une amitié indéfectible.

Louise Erdrich est d'origine amérindienne par sa mère, c'est dire si elle maîtrise son sujet. Elle propose aussi une postface très intéressante. Les commentaires tels que les statistiques de viols des femmes amérindiennes sont effrayantes.
C'est une vraie déclaration d'amour pour son peuple et une réelle envie de crier la malveillance et la cruauté de l'homme blanc. C'est déchirant et sans appel.
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Le récit est avant tout l'apprentissage de la vie d'un jeune garçon, Joe surnommé Oups par son grand-père Mooshum, confronté à la brutalité, la violence et l'injustice mais aussi la vie de la communauté amérindienne parquée dans une réserve où leurs droits sont restreints, dont les terres ont été confisquées, volées et où les non-amérindiens ont tout pouvoir, où règne l'injustice envers cette communauté qui, ne l'oublions pas, était présente lors de la découverte du continent. 

De la même façon que Joe arrache des pousses d'arbres autour de sa maison, il va s'investir d'une mission : celle de sauver sa famille, touchée par un dramatique événement, qui transforme la douceur familiale en cahot.

Des petits arbres avaient attaqué les fondations de notre maison. Ce n'étaient que de jeunes plants piqués d'une ou deux feuilles raides et saines. Les tiges avaient tout de même réussi à s'insinuer dans de menues fissures parcourant les bardeaux bruns qui recouvraient les parpaings. Elles avaient poussé dans le mur invisible et il était difficile de les extirper.

Joe découvrira que son père, qu'il admire n'est qu'un juge de petite affaires se résumant à des conflits dans la communauté, que sa mère si vivante se transformera en fantôme silencieux, que le couple uni qu'ils formaient est au bord de la désintégration et que tout l'équilibre de sa vie est compromis.

Il aurait mieux valu n'importe quoi plutôt qu'elle prenne l'escalier dans cette suspension glacée des sentiments. Elle portait une robe bleue toute simple, ce soir-là. Pas de bas. Une paire de mocassins noirs Minnetonka. Tout en montant marche après marche, elle regardait droit devant elle et sa main tenait fermement la rampe. Ses pas étaient silencieux. Elle semblait flotter. Mon père et moi l'avons suivie jusqu'à la porte de la chambre, et je crois qu'en la regardant nous avons tous les deux eu l'impression qu'elle s'élevait vers un lieu d'extrême solitude dont on risquait de ne jamais la ramener.

Trouver le coupable va devenir son obsession et  va mettre à jour des dossiers sombres, des trafics , des non-dits, des révélations dans lesquelles celle que l'on a répudiée car différente va sauver celui qui va se transformer en monstre, où la justice ne sera pas rendue à la hauteur du crime, où la trahison peut survenir de personne que l'on aimait....

Je devais faire ce que je devais faire. Cet acte était devant moi. Dans l'étrange lumière, une sensation d'affolement m'a à ce point submergé que les larmes me sont montées aux yeux et qu'un seul son étranglé, un sanglot peut-être, un déchirement de souffrance, a jailli de ma poitrine. J'ai croisé les poings dans les mailles du tricot et les ai pressées contre mon coeur. Je ne voulais pas laisser échapper le son. Je ne voulais pas donner une voix à ce bouillonnement de sensations. Mais j'étais nu et tout petit face à sa puissance. Je n'avais pas le choix. J'ai étouffé les sons que je produisais de sorte que je sois seul à les entendre sortir de mon corps, répugnants et étrangers. Je me suis allongé par terre, j'ai laissé la peur me recouvrir, et essayé de continuer à respirer pendant qu'elle me secouait comme un chien secoue un rat.

L'auteure porte un regard sans complaisance  mais aussi avec tristesse sur une communauté qu'elle connaît parfaitement puisqu'elle en fait partie (mère amérindienne et père germano-américain) et s'inspire, je pense, de ses propres souvenirs pour construire ce roman. Elle relate les traditions et croyances de son peuple en intégrant entre autre des petits contes, légendes, racontées  par Mooshum, des cérémonies de purification, mais en intégrant également la présence d'un personnage blanc, le père Travis, qui lui aussi a ses souffrances, ses blessures.

La narration est faite par Joe lui-même, adulte, qui porte un regard à la fois bienveillant? indulgent sur l'enfant qu'il était, sur sa famille avec les figures marquantes de Clémence et Edward, sa tante et son oncle, Sonja et Whitey qui tiennent la station-service, elle, objet de tous ses fantasmes d'adolescent et lui, jaloux et alcoolique élève des chevaux et surtout Mooshum, le grand-père, passeur de légendes, d'histoires et mémoire de la famille.

Durant ma lecture j'ai beaucoup pensé aux deux romans de Harper Lee :  Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur , Va et poste une sentinelle,ou le coeur est un chasseur solitaire  et Frankie Addams de Carson Mc Cullers qui sont aussi des romans d'apprentissage dans la littérature américaine, à travers un événement familial ou douloureux, le jeune adolescent passe de l'enfant à l'âge adulte.

C'est une écriture limpide, pleine d'émotions, de sensations, tendre envers ce jeune garçon brutalement confronté au désarroi de ses parents, au silence qui entoure le drame, on sent la tension montée, l'intrigue est bien construite, le regard lucide sur la perte de repères de certains : alcool, violence, désoeuvrement dûs pour la plupart à la perte de leurs terres, traditions, dignités mais aussi à la perte des immensités, de la nature et de ses habitants, à son respect.

J'ai aimé l'ambiance de cette communauté, des réunions chamaniques, où tout le monde se connaît, s'entraide ou pas, le respect des ancêtres, l'écoute des jeunes pour perpétuer les souvenirs qui risquent de disparaître.

Parler d'un peuple, son peuple à travers une fresque romanesque est une façon de continuer à exister, à perpétuer leur savoir et leur rendre justice dans leurs luttes. Ils restent des voix que portent les livres et que ces voix entendent dans le souffle du vent.
Lien : http://mumudanslebocage.word..
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C'est le plus abouti des romans de Louise Erdrich que j'aie lu; presque un roman policier avec son lot d'infractions de délits et de meurtres, de coupables, d'enquêtes, et d'ambiance lourde d'angoisses. Rien ne manque au genre et pourtant s'en dégage en même temps une fraîcheur juvénile: celle de Joe, le protagoniste et narrateur, un caractère finement analysé et tellement bien dépeint par la romancière qu'on croirait le côtoyer dans le quotidien de sa vie d'ado sur sa réserve indienne. "Dans le silence du vent" 'est un roman que j'ai lu rapidement tant il est facile d'y entrer, de se laisser porter puis de tomber sous le charme de l'écriture dans l'envoûtement de son univers qui nous fait passer avec Joe le seuil tourmenté de la puberté, en allers-retours entre le cocon de l'enfance protégée et l'angoisse de la vie adulte responsable.
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Dés les premières pages, on est persuadé qu'on tient un très bon roman, l'histoire est rapidement captivante.
Dakota du Nord, dans une réserve indienne. Géraldine, une employée à l'administration tribale, est sauvagement violée. Elle en gardera de graves séquelles physiques et psychiques.
Les soupçons sont vite orientés vers des blancs.
Son mari, juge à l'administration tribale, ne peut que se résigner devant une situation inique : l'impuissance de la loi tribale face aux crimes commis par les non-Indiens sur la terre des Indiens.
Ce viol sera-t-il impuni ? Confortera-t-il le rapport 2009 d'Amnesty International : ‘une femme amérindienne sur trois sera violée au cours de sa vie ; 86% des viols et des violences sexuelles dont sont victimes les femmes amérindiennes sont commis par des hommes non-amérindiens ; peu d'entre eux sont poursuivis en justice'.
Joe, son fils âgé de 13 ans, refuse cette fatalité. Dans sa quête de justice et de vengeance, il ira jusqu'à demander au curé : ‘C'est quoi les Péchés qui Réclament Vengeance devant Dieu ? le meurtre, la sodomie, escroquer un ouvrier, opprimer les pauvres, lui répond-t-il'. Joe conclura que la sodomie incluait le viol.
Cette histoire très inspirée de la réalité, m'a énormément appris sur l'univers des tribus indiennes, l'obsolescence et l'iniquité des lois américaines qui les régissent.
Ce roman qui a reçu le National Book Award en 2021, m'a fait découvrir une talentueuse écrivaine : Louise Erdrich.
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