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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Dans un petit texte de 26 pages Efim Etkind nous raconte l'étonnante histoire d'une traductrice, Tatiana Gnéditch, passionnée de poésie, qui arrêtée par la NKVD en 1945, traduisit dans sa cellule, en compagnie des rats, le Don Juan de Byron. Dix sept mille vers en huitains classiques, presque entièrement de mémoire, un travail monstrueux. le pouvoir de la traduction , exprimer par sa propre voix l'écriture et la pensée d'un autre, surtout dans une langue qui n'est pas la sienne, une passion qui lui permettra de faire abstraction de toute l'horreur du système. Une obsession, une passion qui parviendra à contaminer ceux-là même qui l'emprisonnent, jusqu'à la …….

L'auteur lui-même, entre autre traducteur de poésie européenne, témoigna en faveur du poète Iossif Brodski lors de son procès en 1964, soutint Soljenitsyne, entretint une correspondance avec Andreï Sakharov et publia des articles et des traductions en samizdat et fut finalement condamné à l'exil. Ce petit texte en faites fait écho à sa vie. Il adopte la même attitude que Tatiana Gnéditch. Plongé dans la tourmente de l'exil, il se consacre corps et âme à la littérature, faisant abstraction de sa situation douloureuse.

Ce petit livre est un hommage à tous les écrivains et poètes, qui même au fond de la fange, grâce à leurs entêtements obsessionnels seront capable de générer énergie et lumière, soutenant la fameuse et surprenante affirmation du Prince Mychkine de l'Idiot de Dostoievski , «  La beauté sauvera le monde. »



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Commande librairie Caractères / Issy
2 avril 2022

En tout premier chef, un immense Merci aux éditions Interférences qui font un travail admirable dans le domaine des littératures slaves... je leur suis encore reconnaissante d'avoir découvert grâce à eux "Mes Bibliothèques " de Chalamov...

Dans ce très petit récit, Efim Etkind,un ami de Soljenitsyne et de Iossif Bridsky,nous offre l'incroyable et singulière histoire vraie d'une traductrice russe passionné de poésie anglaise,Tatiana Gneditch ,qui traduisit le Don Juan de Byron dans une cellule du NKVD.
Tatiana Gneditch, descendante du traducteur de l'Iliade en russe, montre combien la place de la poésie, de l'art,des livres est une force infinie contre les dictatures....
La beauté soutient les personnes,les victimes, les lecteurs....et espérons le un jour...ouvrira l'esprit des bourreaux ??

Un texte très fort en dépit de son extrême brièveté...par un auteur,lui-même dissident et défenseur des artistes persécutés tels Iossif Brodsky,Soljenitsyne, Andreï Sakharov....qu'il soutenait...

J'achèverai sur deux citations, dont une de Dostoïevski :

"La beauté sauvera le monde"

"Ariana Grigorievna Gneditch(...) travaillait sur la littérature anglaise du XVIIe siècle, et cela la passionnait tellement qu'elle ne voyait rien autour d'elle.Or, à l'époque, il y avait des purges,on chassait de l'université les "ennemis" hier les formalistes, aujourd'hui les vulgaires sociologues, et,toujours et de tout temps les nobles,les intellectuels bourgeois, les déviationnistes et des trotskistes imaginaires. Ariana Gneditch était plongée dans les oeuvres des poètes élisabéthains et ne s'intéressait à rien d'autre.(p.9)"
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J'ai donc suivi le fil, moi aussi, merci, et ai lu ce tout petit livre qui raconte l'histoire de cette femme extraordinaire, Tatiana Gnéditch , qui arrêtée en 1945, dans sa cellule avec rats, traduisit (de mémoire au début) le Don Juan de Byron. Dix sept mille vers.. Dans sa tête..
«  Elle m'a parlé de ces mois , et m'a dit qu'elle se répétait sans arrêt les vers que Pouchkine avait adressés à son lointain ancêtre, Nikolaï Gnéditch" qui bien avant avait consacré sa vie à la traduction d'Homère en hexamètres dactyliques.

"Longtemps seul avec Homère tu t'es entretenu,
Longtemps nous t'avons attendu en bas
Des mystérieux sommets te voilà descendu
Avec, dans la pierre, tes Tables de la Loi."

Il s'entretenait seul avec Homère, et elle avec Byron.

Après la prison, elle a été envoyée huit ans dans un camp , où elle ne se séparait jamais de son manuscrit " qui dégageait une odeur abominable "
«  T'as fini de nous emmerder avec tes papiers à la con? » braillaient ses voisines de châlit."
Jamais!!!

C'est vrai que j'ai aussi regretté que ce soit si court, j'aurais volontiers voulu savoir plus de choses sur ce personnage hors du commun .
L'auteur, Efim Grigorievitch Etkind était lui aussi , entre autres choses, un traducteur de poésie européenne qui
"témoigna en faveur du poète Iossif Brodski lors de son procès en 1964, soutint ouvertement Soljenitsyne, entretint une correspondance avec Andreï Sakharov et publia des articles et des traductions en samizdat" ( c'est à dire publié de façon clandestine, textes tapés à la machine et recopiés par les lecteurs eux-mêmes…!!)

Et bien sûr, moi aussi, j'ai repensé à ce magnifique film , La femme aux cinq éléphants , de Vadim Jendreyko.. Très beau portrait de femme au parcours peu ordinaire aussi.
Svetlana Geier est une traductrice allemande d'origine ukrainienne qui a entrepris depuis le début des années 90 de se confronter aux cinq éléphants que sont les cinq principaux romans de Dostoïevski.
Mais de l'oeuvre de Dostoïevski, on entend assez peu parler, finalement. C'est surtout son histoire à elle qui est passionnante.
Ce documentaire, est à la fois très beau sur le plan esthétique, et plein d'images métaphoriques sur la traduction bien sûr , exprimer par sa propre voix l'écriture et la pensée d'un autre ( et ici, dans une langue qui n'est pas la sienne) .Pour expliquer que rien n'est simple dans les nuances des traductions, elle évoque un peintre, Igor Grabar, qui peignait des paysages de neige en utilisant toutes les couleurs de sa palette, mais jamais une touche de blanc..
J'avais recopié un poème de Vladimir Soloviev, qu'elle récitait:

"Chère enfant, ne vois-tu pas
Que tout ce que nous voyons
N'est qu'un reflet, n'est qu'une ombre
De ce qui est invisible à nos yeux?

Chère enfant, n'entends-tu pas
Que le fracas de la vie quotidienne
N'est que l'écho déformé
Des harmonies triomphantes?

Chère enfant, ne sens-tu pas
Que seul importe sur terre
Ce qu'un coeur dit à un coeur
Dans un message silencieux?"

A voir, vraiment !

J'ai encore un peu mélangé, mais ces destins me fascinent, ce sont deux traductrices passionnées,que rien n'a arrêté, ni l'une ni l'autre dans leur amour de la littérature, et deux personnages à découvrir.







Lien : http://www.5elephants-lefilm..
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Tatiana Grigorievna Gnéditch est traductrice russe de poésie anglaise, dans les années 30. Elle a un don qu'elle tient d'un parent éloigné, traducteur du chef d'oeuvre en langue russe...l'Iliade d'Homère !!
Traduire les quelques 17 000 vers que compte le chef d'oeuvre de Lord Byron ne la rebute en aucun cas, au contraire elle en est transportée !
Ni les épreuves liées à la politique, ni celles plus personnelles n'émousseront sa passion. Et la reconnaissance? Elle viendra ou...ne viendra pas. Qu'importe ! Admirable Tatiana !!
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Ce très court récit (20pages) raconte les souvenirs du narrateur à propos de Tatiana Gnéditch, traductrice russe - et arrière-arrière petite nièce du traducteur de l'Iliade d'Homère , toujours inégalé à ce jour, rien que ça !

Le parcours de cette femme a quelque chose d'extraordinaire pou plusieurs raisons. La réalité dépasse parfois la fiction et ceci en est un bon exemple. J'ai parfois eu la sensation de lire la destinée toute tracée d'un personnage sorti tout droit d'un roman de Dostoïevski, mais que nenni ! il n'en est rien ! tout ceci est bien vrai.

Ce livre constitue un magnifique hommage à la littérature et au pouvoir salvateur qu'il peut avoir dans la vie de personne qui traverse des épreuves telles que la détention - Nelson Mandela et Primo Levi sont certes des exemples célèbres du XXème siècle, mais varions un peu les plaisirs. A travers le récit de la vie de la traductrice, on ne peut pas rester insensible à l'amour inconditionnel qu'elle a porté à la littérature et aux mots. Cet amour qui semble doté d'un pouvoir presque mystique, c'est-à-dire celui d'effacer ou plutôt transcender le réel et ses "imperfections" - détention, mari violent, etc.
Au-delà d'un hommage individuel rendu à Tatiana Gnéditch, La traductrice c'est aussi un hommage à la profession de traducteur. Pauvres diables souvent oubliés ou fustigés car la moindre de leur maladresse peut trahir ou dénaturer l'oeuvre de départ. Alors qu'il faut bien l'admettre, sans eux, le commun des lecteurs n'aurait pas eu accès à ces textes qu'ils ont aimé au point de vouloir le partager.

Un bien court texte à la gloire de toux ceux qui comme Tatiana Gnéditch aiment les mots avec passion.
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C'est un article de Sophie Benech traductrice sur le blog de Pierre Assouline qui m'a donné envie de parler de ce petit livre. Dans ce billet Sophie Benech y fait part de ses doutes, de ses difficultés pour traduire en particulier la poésie. Elle fait référence à un livre sur Anna Akhmatova qui vient de paraitre et dont je vous parlerai prochainement.

Ses remarques sur la traduction viennent parfaitement illustrer le livre dont je veux vous parler aujourd'hui.
Un récit très court mais dont on regrette presque la concision tant cette étonnante histoire nous bouleverse.

On assiste à la représentation de Don Juan de Byron et à la fin de la pièce le public debout réclame l'auteur. Une femme gênée, voutée, est montée sur scène et là s'est écroulée. Cette femme c'est Tatiana Grigorievna Gnéditch.
Elle est une intellectuelle issue d'une famille d'aristocrate ce qui en Union Soviétique était déjà comme une épée de Damoclès. Tatiana Gnéditch est passionnée de littérature anglaise et attirée en particulier par Byron. Elle a de qui tenir, un de ses ancêtres fut le traducteur de l'Iliade, traduction jamais dépassée depuis.
La politique n'intéresse pas Tatiana mais la politique va la rattraper et soupçonnée puis emprisonnée pour ses origines, elle est condamnée à dix ans de camp en 1945.

Bizarrement elle ne part pas immédiatement au Goulag et elle va alors profiter de ce répit pour obtenir avec l'aide d'un de ses geôliers, papier et crayon et va s'attaquer à la traduction de Byron et va au nez et à la barbe du NKVD traduire les 17000 vers de Don Juan.
Le parcours de cette traduction est un exemple de solidarité et de prise de risques pour que ne se perdent pas les paroles des écrivains.
Une femme de la trempe d'un Soljénitsyne qui enterra ses manuscrits ou de Nadejda Mandelstam qui mémorisa l'oeuvre de son mari pour qu'elle ne s'efface pas.
Bien sûr on pense en lisant ce petit livre au « Proust contre la déchéance » de Joseph Czapski . J'ai fait également le rapprochement avec le superbe film La femme aux cinq éléphants qui, bien que dans un tout autre contexte, met parfaitement en valeur le travail de la traduction.


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Ainsi spécialisée en cours récits cette maison d'édition semble superbe ! Beaucoup d'odes aux livres dans leurs éditions. Tout comme la Traductrice qui me parait bien biographique, bien réelle.
Avec un coeur en or, depuis la prison ou les camps de Sibérie, Tatiana Grigorievna Gnéditch traduit, c'est un peu de famille, mais elle le fait de tête, et la meilleure traduction jamais faîte.

Ça n'a l'air de rien, mais c'est si bien écrit, si sensible, et si bien traduit aussi ! Qu'on se laisse emporter, émouvoir, 30 pages de délices et de belles rencontres… Avec l'Histoire de la Russie, un fabuleux petit éditeur, et une grande dame mine de rien.
Lien : https://barauxlettres.wordpr..
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Coercition et poésie, bel antagonisme de choix et de coeur.

De la Loubianka à la place Maïakovsky, la passion du verbe et de l'écriture se fait plus forte que le transport des Stolypine et de la petite fenêtre.

Parcours à lire et suivre de pages en chapitres........
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