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sur 678 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
William Faulkner n'est pas un grand sentimental. Il contamine chacun de ses personnages de son mal-être qu'il noie dans des litres de whisky. La boisson alcoolisée lui ouvre les portes de sa psyché, fait sauter les cadenas du coffre qui renferme toutes ses angoisses et toutes ses frustrations, et lui permet de déverser dans un flot illusoirement non maîtrisé de mots toute l'horreur banale que lui inspire la vie, sa vie.
Dans « Tandis que j'agonise », Addie Bundren est en train de mourir. Elle est la mère de cinq enfants qu'elle a élevés dans une petite ferme du comté de Yoknapatawpha dans le Mississippi. Son mari, Anse, a fait la promesse de ramener sa dépouille à Jefferson, à plus de 40 miles de leur maison. Il aurait préféré consacré l'argent des obsèques à l'achat d'un dentier, mais il y a parole donnée et il s'y tiendra. Elle n'a pas expiré son dernier souffle que l'on entend le rabot de Cash, son fils aîné, polir les planches de son cercueil… alors le cercueil prit la route…
Faulkner décrit parfaitement l'égoïsme de ses personnages, écartelés entre leurs aspirations personnelles et le respect de la morte, la sécheresse de leurs sentiments justifiée par un contexte de précarité, à la limite d'une grande pauvreté et par la rudesse d'une vie envahie par le travail manuel.
Faulkner n'est pas quelqu'un d'agréable à vivre. Il dira à sa fille que personne ne se souvient du prénom des enfants de Shakespeare. On ne peut pas dire que dans la famille Falkner, car le « u » n'est venu que plus tard, que l'on déborde d'attention vis-à-vis de ses enfants. D'ailleurs il déteste son père. Lors d'un séjour à Paris, Faulkner qui a loué une chambre près du jardin du Luxembourg, est surpris de voir les français parler à leurs enfants comme s'ils étaient leurs égaux, leur témoigner de l'intérêt.
Il recopie cette relation dénuée de sentiment, à la limite de l'humanité qu'il a connu pour l'appliquer à Anse et à sa progéniture, une relation fonctionnelle où chacun se sert des autres pour avancer vers son propre but.
L'auteur a sûrement fait les frais dans sa jeunesse de ce manque d'affection de la part de sa famille et peut être y trouve-t-on là le début d'une explication quant à l'absence d'émotions de ses personnages, leur insensiblerie et son choix d'aller les pêcher dans les couches sociales les plus basses de l'Amérique, parmi les « nègres blancs » du Sud, les « white trash », traduisez : les salauds de pauvres, afin d'illustrer la bestialité de ce type de rapport.
Faulkner écrit « Tandis que j'agonise » en quelques semaines, en même temps qu'il rédige la seconde version de « Sanctuaire ». Une diversion qui est une excellente entrée en matière sur l'ensemble de l'oeuvre de cet auteur et qui permet de se familiariser avec l'hermétisme de son écriture et la folie aliénante de ses histoires, tant dans le fond que dans la forme.
Ce serait certainement le premier roman de Faulkner à lire avant de s'attaquer au reste.
Traduction de Maurice Edgar Coindreau.
Préface de Valery Larbaud, postface de Michel Gresset.
Editions Gallimard, Folio, 246 pages.
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Comment expliquer simplement tout ce que j'ai ressenti à la lecture de ce livre, Prix Nobel de littérature en 1949, monument de la littérature Américaine, histoire ô combien noire mais qui pourrait être drôle, si l'humour noir de ce roman pouvait être considéré comme drôle.

J'apprécie l'humour noir et trash, mais là, j'ai ri jaune.

J'ai vu une famille pauvre assister au déclin de leur mère (et épouse pour le père), j'ai vu un fils aîné fabriquer un cercueil sous les yeux de sa mère agonisante qui a tout supervisé, j'ai vu deux fils louper le grand voyage de leur mère car ils étaient sur la route pour gagner encore quelques dollars.

J'ai assisté, impuissante, au voyage totalement fou d'un veuf et de ses 5 enfants, le corps de la décédée reposant dans le cercueil à l'arrière de la charrette, pour aller l'enterrer dans un autre comté, répétant à tous que c'était sa décision à elle.

Un périple qui n'était pas de tout repos, qui fut dangereux, aux multiples périls dont la montée des eaux et des ponts emportés, plus la chaleur qui amènera des odeurs pestilentielles et des charognards. Un voyage qui causera l'explosion de la famille.

Nous sommes face à un roman bourré de noirceur, qui a de l'humour, car la farce est grotesque mais noir, car rien ne prête à rire dans ces pages.

Le style de Faulkner est particulier. Déjà, il nous propose un roman choral et je pense qu'en 1930, ce n'étais pas aussi courant que maintenant. Chaque membre de la famille prendra la parole, dans un monologue, une introspection qui lui sera particulier, puisque chaque personnage a ses tics de langage, ses manies, ses obsessions, ses mots bien à lui.

Au départ, j'ai eu un peu de mal, ayant l'impression que le récit était une cacophonie sans nom et puis, en persévérant un peu (c'était Faulkner, que diable), j'ai trouvé mon rythme de lecture et j'ai eu du mal à en sortir à la moitié du récit, mais bon, fallait bien aller au turbin.

Véritable roman de moeurs rurales, Tandis que j'agonise met en scène une famille du Sud Profond, dans le même genre qu'Erskine Caldwell, car le père Anse Bundren a la mauvaise foi chevillée au corps comme l'avait Jeeter Lester (La route au tabac), mais moins prononcée que ce dernier, bien que les références à "Dieu m'est témoin" parsèment aussi ses dialogues, mais de chrétien, Bundren n'en a que le nom.

Toute sa vie, Anse Bundren l'a passée à gémir, n'a jamais été un grand travailleur, ni un homme de parole et on se demande avec suspicion pourquoi diable il tient tant à respecter les dernières volontés de son épouse sur son lit de mort. C'est louche… Surtout que dès le début du roman, la principale intéressée ne pourra pas nous le confirmer, vu qu'elle a cessé de parler.

En plus, ce crétin est parti sans pelle pour creuser une tombe ! Mais il nous rabâche sans cesse qu'il doit acheter un dentier pour arriver à manger les aliments que Dieu a fait pour lui… Je pense que de tous les personnages de la famille, il est le plus égoïste.

Pour les décors, Steinbeck a dû passer par-là car ils sont magnifiques, épurés, décrit avec peu de mots et pourtant, tout le poids de la Nature est dans ces pages, toute sa force, toute sa magnificence et toute sa perfidie.

Un portrait au vitriol d'une famille rurale, des introspections qui nous placent au plus près des pensées des personnages, une voyage semé d'embûches et une fois arrivés, les enfants n'en seront pas au bout de leur surprises, et nous non plus.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Un roman singulier et qui désarçonne en début de lecture.
Une mère vient de mourir et elle a fait promettre à son époux de l'enterrer près des siens. Il va honorer cette promesse en chargeant le cercueil dans une vieille charrette ; ses enfants vont le suivre dans cette galère.
Il faut se concentrer ; l'histoire alterne entre plusieurs narrateurs, des monologues, des chapitres plus ou moins courts et des personnages qui, parfois, se mettent à parler d'eux à la troisième personne.
Il y a beaucoup d'évènements abordés de manière sibylline.
Ce périple est une farce noire avec une famille que nous qualifierions aujourd'hui de dysfonctionnelle. Il y a un père profondément égoïste, des secrets, de l'adultère et des trahisons.
L'histoire est sombre et, Faulkner, précurseur, aborde des sujets comme ceux de la mort, la pauvreté, l'avortement, l'amour, la peur et le narcissisme.
Il est surtout question de survie.
Un plume puissante au service d'une lecture profonde et complexe.
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Il y a dans Faulkner une manière de regarder le monde qui fait penser à Céline, avec une restitution froide et sans concession des travers les plus sordides de la condition humaine et de notre humanité. Ce lien là m'a sauté aux yeux en lisant Tandis que j'agonise.
Le roman nous raconte le décès d'une mère de famille pauvre dans les sud des Etats-Unis. L'agonie pendant que le fils ainé scie les planches du cercueil (j'entends encore le travail de la scie), puis le périple hasardeux du père avec ses enfants pour aller l'enterrer en ville, périple qui s'apparente à une descente aux enfers. La consolation finale du veuf, dans les deux dernières pages du roman, est un sommet d'horreur!
La construction du récit, qui place chaque personnage comme narrateur successif de l'histoire est intéressante et permet d'avancer dans ce roman, qui pourrait se révéler plutôt ennuyant sans cela.
Faulkner est un auteur difficile et sombre. Ce titre là colle bien à sa réputation. Ceux qui s'y aventurent la bouche en coeur, risquent bien de trouver la pilule amère. D'autres retrouveront avec un plaisir de khâgneux le génie littéraire de l'auteur qui l'a mené jusqu'au Nobel.
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J'ai eu un peu de mal au début du livre, il faut un petit temps d'adaptation. L'écriture y est très particulière, peu ou trop de ponctuation, les mêmes phrases répétées, pour donner l'impression d'être au milieu de cette famille qui veille la mère mourante. On suit le travail de deuil de chaque membre de la famille, narrateur à tour de rôle et ensuite le trajet vers le lieu d'inhumation choisi, à travers les fleuves en crue, les détours et la puanteur du corps pendant plus d'une semaine. Je n'avais pas lu Faulkner depuis plus de 15 ans et ce roman me semble plutôt différent des autres, mais très intéressant aussi à sa façon, envoûtant même.
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L'histoire consiste en un voyage funéraire entreprit par Anse Bundren et ses enfants. Addie Bundren a demandé d'être enterré à Jefferson avec sa famille. Plusieurs jours seront nécessaires pour amener le cercueil à destination. Les mésaventures seront au rendez-vous tout au long du périple tout comme l'odeur du cadavre qui se décompose...

Une belle découverte que cet auteur américain du début du siècle. J'avais quelques appréhensions, car les classiques ne sont pas mon genre de prédilection, mais j'ai été touché par cette histoire étrange et dérangeante d'une famille misérable. Tout au long du récit règne une ambiance des plus morbide. Ce n'est pas ce que j'appelle une lecture agréable, mais c'est un récit d'une grande puissance qui m'a secoué.

Le livre est présenté sous forme de monologues intérieurs, les personnages se succèdent d'un chapitre à l'autre. J'aime bien ce procédé qui nous montre ce que chacun pense de cette situation. L'écriture de Faulkner est très belle, j'ai bien apprécié découvrir le langage particulier de l'époque. Il décrit d'une façon remarquable la folie, la pauvreté, la misère qui habitent ses personnages.

Un auteur de grand talent!
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Anse Bundren veut respecter la promesse faite à sa femme : la transporter morte près des siens. S'en suit un incroyable voyage auquel participent Cash, le charpentier boiteux, Darl, le fils qui semble habité par un esprit mauvais, Jewel, dont on apprend qu'il est un fils adultérin, Vardaman, le plus jeune des fils d'Anse et Addie et Dewey Dell, l'unique fille.
Je n'ai pas lu ce livre pour en savoir plus sur les pauvres du sud américain dans les années trente mais pour renouer avec Faulkner. Ombre et lumière, vérités et mensonges, calculs et vilenies, instants de vérité, tout est là dans ces monologues où apparaissent tour à tour la cruauté ou la solitude des protagonistes. La Bible est une référence permanente dans ce texte dont l'audacieuse construction est un tour de force. le passage centrale où Addie, la mère, parle de son mariage, de la tentation amoureuse et de l'abandon progressif qui l'a animée est prodigieux...
Je reste très impressionnée par ce grand livre et la capacité qu'a Faulkner de sonder l'âme humaine pour en débusquer tant la laideur que la beauté...
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La mère agonise pendant q'un de ses fils construit son cercueil, puis décède. le père lui a promis de la faire enterrer à Jefferson d'où elle vient. Une crue survient qui entraîne le pont: la famille au grand complet, le père les 3 fils et la fille amènent le cercueil par des voies longues et détournées, suivis progressivement par un nombre croissant de vautours et chassés par les gens à cause de l'odeur du cadavre.

Le livre est constitué de monologues intérieurs des membres de la famille et des gens qu'ils ont l'occasion d'approcher. C'est une équipée tragi-comique, on plonge dans le sordide et dans sublime, on vit cette histoire de l'intérieur des personnages. D'une construction brillante, d'une fine drôlerie, de l'absurde parfois j'ai trouvé ce roman moins bouleversant que d'autres livres de Faulkner, qui l'a qualifié d'ailleurs de"tour de force".
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Principalement des drames psychologiques, les romans de William Faulkner mettent l'accent sur les émotions des personnages, via le procédé du monologue intérieur, à l'instar de James Joyce ou encore de Virginia Woolf. « Tandis que j'agonise » illustre cet aspect là, mais aussi et surtout, la vie tragique et désespérée dans les états du sud Américain.

L'intrigue se déroule dans le Mississipi où, Addie Bundren, doit être enterrée auprès des siens à Jefferson. Son mari, Anse, et ses cinq enfants s'apprêtent à se rendre dans la ville d'origine de son épouse défunte.
Des scènes incongrues et loufoques encadrent la trame évènementielle des Bundren. Cash, charpentier de formation et fils aîné de cette famille de fermiers, ne se préoccupe que de ses outils (il a, par ailleurs, la charge de fabriquer le cercueil de sa mère) et la jeune fille des Bundren, Dewey Dell, ne pense qu'à sa grossesse.
Quant à Vardaman, le dernier des enfants, confond sa mère avec un poisson (« Ma mère est un poisson »).
Et le père, en dehors de sa promesse (enterrer sa femme auprès de sa famille), il ne pense qu'à l'achat d'un dentier, etc.
Dans ce convoi funéraire, W.Faulkner nous dessine un tableau comico-tragique (des scènes théâtrales qui ressemblent par moments à du Beckett), où il souligne tout le côté primitif et absurde que la vie est capable de nous offrir (mais en aucun cas, le récit se voudrait misérabiliste, loin de là).

Dans un style d'écriture baroque et une prose tortueuse (mais subtile). W.Faulkner, avec l'usage de la narration multiple (il n'y a pas qu'un seul narrateur dans ce roman) et par l'utilisation du courant de conscience, (Absalon, Absalon!, du même auteur, illustre très bien cette technique d'écriture…) sait parfaitement bien dans ce récit transcrire, avec une grande ironie, les pensées désordonnées de ses personnages pour mieux traduire, en fin de compte, leur état intérieur.

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Tandis que j'agonise n'est peut-être pas le roman le plus indiqué pour commencer à découvrir Faulkner, ni le plus facile d'abord, mais on comprend assez vite pourquoi il a marqué son époque.
Au premier abord on a l'impression d'une famille de pieds nickelés qui va enterrer la mère, Addie, un peu à distance selon son voeu et selon la promesse que lui a faite Anse, son mari, par ailleurs bête à manger du foin. Les cinq enfants d'Addie ont tous leur personnalité avec leurs qualités, leurs défauts et leurs préoccupations. La parole, ou plutôt la pensée intérieure, circule entre tout ce monde et ceux rencontrés, puisque l'on trouve quinze locuteurs différents (y compris, à un moment donné, la mère) exprimant, à des fréquences inégales, leurs pensées durant ce périple, dans une langue qui se veut celle des campagnes profondes.
Mais à travers les facettes de ce kaléidoscope apparemment détraqué, actionné par des personnages largement demeurés, au sens propre du terme, on perçoit, en filigrane, la misère morale, sociale, affective, matérielle, culturelle de ces populations des campagnes profondes du Sud américain entre les deux guerres, et, bien sûr, cela ne cadrait pas avec la propagande yankee qui ne montrait (et ne montre encore) que les côtés aguichants du mode de vie américain et de la réussite à tout prix. Cela détonnait déjà, et détonne encore car cette misère existe de nos jours sans doute autant. C'est cela que Faulkner a voulu faire comprendre en le suggérant et non pas en le montrant directement, ce qui est beaucoup plus efficace, à travers un mécanisme qui au final relève d'ailleurs davantage du Rubik's cube ou de l'horlogerie de précision que d'une polyphonie désordonnée.
À l'époque (1930) Faulkner a donc pu surprendre et choquer en nous montant ces personnages si imparfaits mais, pour cette raison, si humains : qui d'entre nous, même au XXIème siècle n'a jamais partagé une des attitudes, préoccupations ou pensées des membres de cette famille ? Peut-être est-ce là ce qui fait la grandeur de Faulkner : il montre la condition humaine et cette dernière est universelle et intemporelle.
La traduction Maurice Edgar Coindreau n'en facilite pas la lecture, mais peut-il en être autrement ?
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