J'ai acheté ce recueil en présence de son auteure, dans une librairie. Sympathique, un peu esseulée, un samedi matin assez tôt, moi, simplement curieuse. Et puis j'ai lu. C'est très joliment écrit. Il s'agit comme son titre l'indique de mythes et légendes, des contes pas toujours de fées. Ce petit recueil est une très belle ouverture sur une culture différente et pourtant pas si éloignée. Il y a de la magie, des personnages envoûtants, à lire avec des enfants, car c'est aussi empli de tendresse et d'amour. Cette lecture m'a placée hors du temps et c'était très agréable.
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Les femmes guettaient ce moment. L’envie de rejoindre les hommes dans l’énergie de la danse se lisait sur leurs visages. L’orchestre ressentait instinctivement chaque inclinaison de la foule et se pliait avec une empathie parfaitement synchronisée à leurs désirs. L’accordéon donna le signal. Comme un seul homme, les danseurs posèrent un genou par terre pendant que les femmes s’avancèrent, chacune derrière un partenaire. Ils exécutèrent ensemble des figures d’une grande virtuosité, avec une complicité qui, le temps d’une danse, fut palpable et enviée par les spectateurs.
L’homme tendait une main, la femme lui tournait autour, puis le danseur se relevait et ils dansaient à deux, il la faisait tourner, sa robe tourbillonnait autour de ses jambes. Leurs deux corps ne faisaient qu’un.
Rucsandra fixait intensément son partenaire au regard bleu azur, leurs yeux ne se quittant jamais, ils se transmettaient du regard, de la main, de la hanche les mouvements à faire. Le jeune homme la serrait dans ses bras, puis il la lançait en l’air, il la faisait tourner autour de sa tête, il la montrait au monde entier, fièrement, comme un trophée, pour revenir sur terre agenouillé devant elle comme s’il lui faisait une promesse et Rucsandra eut alors la certitude qu’il était son promis, qu’il lui était destiné.
Les yeux des femmes brillaient d’une ivresse sortie du tréfonds de leurs ventres, leurs joues étaient en feu, des mèches de leurs cheveux s’échappaient de leurs coiffures retenues par des petits foulards colorés, pour celles qui étaient mariées.
Si les contes n'existaient pas, comment vivrait-il, ce pauvre monde ?
(Proverbe roumain, épigraphe)