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4,14

sur 6062 notes
Une grande joie de parcourir les ressentis positifs et enthousiastes des uns et des autres, je vais tenter d'ajouter un signe de ma propre émotion.

Le destin tragique de Charlotte, son talent, sa douleur de vivre… m'ont habitée fortement grâce à l'auteur. Ce qui m'a troublé et passionnée parallèlement c'est la narration de David Foenkinos concernant la maturation très longue de ce texte qui habitait « notre auteur » depuis de longues années…ses doutes, son obsession persistante concernant Charlotte Salomon, sont de très beaux passages sur les étapes complexes de la création …

En plus de l'émotion ressentie grâce à M. Foenkinos, je lui suis reconnaissante de « m'avoir découvrir » cet artiste, ainsi que la rencontre fortuite , secondaire de Aby Warburg , en parallèle.


Je suis encore sous le choc de l'émotion et de la beauté du texte, entre poésie et prose. Ces courtes phrases, ponctuées chaque fois d'un point… qui induit un rythme sont une formidable idée. Très belle idée d'inciter le lecteur à une lenteur dans la lecture, en optant pour une certaine respiration.En réalité l'auteur nous explicite ce besoin régulier de point à chaque phrase, pour reprendre sa propre respiration...

Il ne me semble pas nécessaire de rentrer dans l'histoire et le détail du parcours de cette jeune femme talentueuse, silencieuse, et totalement habitée par son art…Son art qui lui fait combattre le désespoir, la barbarie de son époque.

J'ajoute deux extraits de David Foenkinos, qui me touchent infiniment, signifiant si fort, combien la symbiose, la fusion avec cette femme, son art, et tout ce qu'elle peut représenter ont submergé, nourri l'écrivain, l'ont habité si longtemps

« le sentiment d'avoir enfin trouvé ce que je cherchais.
Le dénouement inattendu de mes attirances.
Mes errances m'avaient conduit au bon endroit.
Je le sus dès l'instant où je découvris -Vie ? ou Théâtre ?
Tout ce que j'aimais.
Tout ce qui me troublait depuis des années.
Warburg et la peinture.
Les écrivains allemands.
La musique et la fantaisie.
Le désespoir et la folie.
Tout était là.
Dans un éclat de couleurs vives.
La connivence immédiate avec quelqu'un.
La sensation étrange d'être déjà venu dans un lieu.
J'avais tout cela avec l'oeuvre de Charlotte.
Je connaissais ce que je découvrais. (p.70) »

Très attentive , bien évidemment à la trop brève et dramatique existence de Charlotte narrée par Foenkinos, mais également aux notations de l'écrivain quant à la genèse de ce livre délicat….

‘« Pendant des années, j'ai pris des notes.
J'ai parcouru son oeuvre sans cesse.
J'ai cité ou évoqué Charlotte dans plusieurs de mes romans.
J'ai tenté d'écrire ce livre tant de fois.
Mais comment?
Devais-je être présent?
Devais-je romancer son histoire?
Quelle forme mon obsession devait-elle prendre?
Je commençais, j'essayais,puis j'abandonnais.
Je n'arrivais pas à écrire deux phrases de suite.
Je me sentais à l'arrêt à chaque point.
Impossible d'avancer.
C'était une obsession physique, une oppression.
J'éprouvais la nécessité d'aller à la ligne pour respirer
Alors j'ai compris qu'il fallait l'écrire ainsi »


Toute ma reconnaissance et mes remerciements à l'auteur pour ce moment unique d'émotion et de rencontre. Lecture importante que je ne désirais pas quitter , c'est-à-dire laisser ainsi « sans façons », « Charlotte », aussitôt le livre refermé… J'ai poursuivi avec la rédaction de cette chronique », et une liste de références que j'ai dénichées, pour prolonger la découverte émue de cette « belle artiste »…et poursuivre d'autres lectures !

© Soazic Boucard- Tous droits réservés- 12 octobre 2014
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Comment ne pas être ému, touché, bouleversé par ce récit?
Il retrace la vie de Charlotte Salomon, née en1917 dans une famille juive de Berlin, réfugiée dans le sud de la France peu après la nuit de cristal fin 1938.

Charlotte, hantée par les suicides de sa famille, devient une artiste totale, chantant, peignant, écrivant.
Réalisée entre 1940 et 1942 la trilogie de huit cent gouaches accompagnées de textes et de partitions musicales appelée "Vie"?ou "Théâtre"?est son oeuvre, sa trace ultime, une oeuvre picturale fascinante, "un tourbillon de puissance et d'inventivité"!

En 1943, elle fut dénoncée, arrêtée,déportée à l'âge de 26 ans, enceinte de quatre mois....
Avant de partir, elle confia ses toiles à son médecin en lui disant :"c'est toute ma vie", elles sont conservées aujourd'hui à Amsterdam.
Ce trés bel ouvrage expose le destin de la jeune fille surdouée, de la renfermée,
de l'artiste hantée, de l'amoureuse...
David Foenkinos lui rend un magnifique hommage comme si elle avait été sa soeur, son amour, sa mère...une obsession..une identification...
Ce qui m'a le plus frappée dans ce témoignage- hommage- c'est la forme, une structure parfaitement maîtrisée,une sorte de long poéme en prose,humain,authentique,empreint d'humilité, d'une subtile élégance, d'une gravité mesurée, le point fixe de l'imaginaire de David Foenkinos, sa quête et sa hantise de cette artiste, sa recherche, - les étapes de celle -ci s'immiscent dans le récit-, l'émotion, l'audace, un aboutissement pour lui, une souffrance maîtrisée à l'évocation du portrait saisissant de cette femme exceptionnelle au destin tragique!
Une belle oeuvre Extrêmement forte aboutie!
Une émotion indicible!
Rien à voir avec les autres livres de cet auteur, à mon avis!
Commenter  J’apprécie          19910
C'est un très beau texte, un long poème en prose pour parler d'une jeune femme dont la peinture et les dessins ont subjugué l'auteur. David Foenkinos nous fait une très belle description de la tragédie familiale, une famille de bipolaires avec des suicides multiples et un lourd secret pour Charlotte.
Il s'agit, ici aussi d'une exo fiction, l'auteur se mettant en scène lui-même, ce qui semble être à la mode pour cette rentrée littéraire 2014 (Cf. Patrick Deville et Eric Reinhardt). L'auteur intervient ici pour expliquer son attachement à Charlotte Salomon, son art mais aussi son histoire puisqu'il suit ses traces, revient sur les lieux où elle a vécu, rencontre des témoins qui l'ont côtoyée, ou leurs descendants il met ses pas dans les siens. Il y a donc un gros travail de recherche.
L'écriture est belle, il a choisi d'aller à la ligne à la fin de chaque phrase pour se laisser et nous laisser respirer, ce qui permet de ne pas se laisser submerger par l'émotion parfois. Dans les périodes difficiles, les phrases deviennent très courtes, parfois un ou deux mots, et il est même obligé de sauter des lignes tellement c'est dur : par exemple dans la scène immonde où le grand-père de Charlotte, fier de sa propre famille, vomit sa haine de la dépression mélancolique et du suicide ; en gros, c'est lui seul qui souffre, il n'a rien compris à cette maladie et il est tellement hors de lui qu'il crache la vérité sur le secret.
On s'attache à Charlotte, on sent qu'elle ne s'en sortira pas, l'auteur n'en fait jamais mystère, donc on vit chaque instant de la vie de cette artiste secrète, taiseuse, à Berlin puis en exil, probablement atteinte de la maladie elle-aussi.
David Foenkinos décrit bien les droits bafoués, l'antisémitisme, l'exclusion : Charlotte se voit peu à peu exclue de tout, surtout des Beaux Arts, où elle avait réussi à rentrer quand-même, désignée pour le premier prix, mais ne pouvant pas le recevoir car elle est juive.
Ici, il est envoûté par la jeune femme, dont il est tombé amoureux, au travers de la peinture ; il trouve ce qu'il a toujours cherché, c'est une reconnaissance, comme s'il avait déjà vu et vécu tout cela ; et la façon de l'écrire s'impose à lui d'elle-même. Mais doit-il chercher à tout savoir sur elle ? Il a su mettre une limite à son investigation.
J'ai beaucoup aimé et ce livre rejoint les quelques élus du coup de coeur de la rentrée 2014. Encore un livre qui fait réfléchir, sur la souffrance de la maladie, de l'exil, du rejet de la haine. L'enfermement dans la maladie mentale alors qu'une Maladie bien plus grave avance, le Nazisme.
Il a reçu le prix Renaudot et le Goncourt des lycéens
Note : 8,4/10

Lien : http://eveyeshe.canalblog.co..
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" On peut tout quitter sauf ses obsessions. "
Tout est là ou presque, essentiel.
Ce récit pourrait presque se résumer à cette phrase, simple, évidente.
Elle m'a sautée aux yeux en cours de lecture.
Pour finir par prendre tout son sens.

Le dessin, la peinture, l'amour, mais aussi l'absence, insondable.
Les nombreux suicides au sein de la famille de Charlotte, tournoyant comme une sarabande infernale au-dessus de sa tête en permanence.
L'obsession de l'auteur aussi pour la vie de cette jeune femme.
Sa longue quête pour découvrir " les lieux et les couleurs, en rêve et dans la réalité."
Deux vies donc, Charlotte, David.
La peinture de Charlotte qui crée un choc, obsède David, l'écrivain.
Puis les recherches, les tâtonnements, l'écriture épurée, comme sous tension permanente.
Accéder à un formidable hommage posthume.
Trouver comment appréhender les contours de la vie et du talent de l'artiste.
Au-delà des années et du malheur de cette jeune existence brisée par la guerre.


Je referme doucement ce testament littéraire, émue c'est assez rare, en ayant eu le privilège d'assister à une belle rencontre entre deux artistes. David a pris son temps, c'est palpable, pour approcher l'oeuvre et la sensibilité de Charlotte.
Tout est évident dans ce livre, l'expression simple et juste, la forme, particulière et si adaptée finalement - une succession de phrases courtes, enchaînées au rythme d'un long poème d'amour et d'admiration.
La marque des livres rares, inspirés.
Non seulement ce récit m'a permis de découvrir Charlotte Salomon et son oeuvre, mais aussi la double illustration de la définition de Kandinsky :
" Créer une oeuvre, c'est créer un monde. "
Le monde de Charlotte grâce aux mots de David.

Une lecture marquante sous le signe de l'amitié, je remercie chaleureusement fanfanouche sans qui je n'aurais probablement pas lu ce roman.
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Ce roman (quel roman !) est d'une beauté magistrale, tant tout est précis et abouti avec force dans ce portrait de femme qu'est Charlotte Salomon.
Une femme suspendue aux fils de sa vie, de l'héritage familial où flottent les fantômes des morts, maudits par la vie et pendus au cou du désespoir et de la mélancolie.
Charlotte, femme absente, femme mystérieuse, n'aura d'autre soif que celle d'extérioriser ses émotions dans la peinture. Les mots que Charlotte ne dira jamais sont palpables dans la plume de David Foenkinos.
Le destin tragique d'une femme happée une première fois dans cette mélancolie familiale, happée une seconde et dernière fois dans la haine des nazis.

Quel roman ! Oui il m'a bouleversée et émue, quelques mots seulement qui semblent vouloir s'unir, s'embrasser, s'embraser pour la naissance d'une émotion, d'un état d'âme, d'un destin, celui de Charlotte. Splendide.
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A nouveau je tente un Foenkinos. L'intention déjà mérite le respect si l'on sait mes réserves quant à certaines productions du monsieur.

Tout a priori mis à part donc, je découvre Charlotte. Un roman qui ne prend pas la tête mais qui parle au coeur. Bien sûr. Pouvait-il en être autrement ? Entre une ahurissante lignée familiale à fâcheuse tradition suicidaire et les effroyables bouleversements de ces années de guerre, comment ne pas compatir au destin de Charlotte ? Comment ne pas comprendre que l'auteur ait pu être interpellé par cette jeune femme, par son histoire, par la prodigieuse richesse de ses oeuvres ? (dont l'esprit n'est pas sans évoquer celles d'une certaine Saint Phalle tout aussi entière et sensible, mais ça ce n'est que mon ressenti perso).

Un récit émouvant, concis, c'est le moins que l'on puisse dire, mais également très factuel, et bien léger sur le traitement historique ou la psychologie des personnages mais sans doute n'était-ce pas non plus le but de la manoeuvre.

Alors les fulgurances poétiques succèdent aux réflexions simplistes, tandis que le fameux parti pris de retour à la ligne systématique, un chouïa surfait à mon humble avis,
laisse décidément de cet ouvrage
une image
aussi fugitive
que la fragile et trop brève existence
de son héroïne.

Rien que de très cohérent finalement.


Lien : http://minimalyks.tumblr.com/
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Charlotte Salomon a 9 ans quand sa mère meurt, emportée par une mauvaise grippe, lui dit-on. Mais Franziska s'est suicidée, respectant une sorte de ''tradition familiale''. On se suicide dans la famille maternelle de Charlotte. On vit avec une sorte de tristesse grisâtre qui peu à peu devient d'un noir très sombre et conduit à se jeter dans l'eau glacée ou par une fenêtre. Charlotte ne sait rien de tout cela. Ses grands-parents veulent garder le secret, son père aussi. Sa belle-mère Paula, cantatrice célèbre, voudrait tout lui révéler mais elle n'a pas voix au chapitre sur cette question. Alors Charlotte grandit dans l'ignorance. On essaie de la préserver de la folie familiale mais la mélancolie est bien là. Et puis la folie a gagné toute la nation. Charlotte est juive et l'Allemagne de 1933 la rejette, elle et les siens. Obligée de quitter le lycée à une année de son diplôme, elle intègre, par miracle, l'Académie des Beaux-arts de Berlin. Mais elle doit rester discrète, céder son prix, toujours faire profil bas. le coeur en miettes, elle se décide à s'exiler en France où ses grands-parents insistent pour l'accueillir. Là-bas, au soleil, elle peint et surtout elle apprend la vérité familiale : la première Charlotte, sa tante, morte à 18 ans, sa mère Franziska, morte 13 ans plus tard. Charlotte calcule qu'elle devrait mourir en 1953, 13 ans après sa mère. Les nazis ne lui en laisseront pas le temps.


Maniéré et ridicule dans La délicatesse, David FOENKINOS se révèle enfin délicat dans cette biographie de l'artiste Charlotte Salomon. Transporté par son oeuvre majeure ''Vie ? Ou théâtre ?'', il s'est mis dans les pas de la jeune juive allemande, visitant les lieux où elle a vécu de Berlin à Villefranche-sur-Mer. Mais il n'en fait pas trop, évite de se mettre en scène, sait rester en retrait au profit de son héroïne et de sa vie trop brève. Son long poème en prose, aux phrases courtes, au ton saccadé, convient parfaitement pour écrire une vie entre folie et art. Une phrase par ligne, comme une fuite en avant, comme le chemin de Charlotte. La famille, l'amour, la mort, l'antisémitisme se mêlent au temps qui joue contre elle, elle qui veut finir son oeuvre, elle qui sait la mort proche. La grand-mère, dans sa folie, prophétise la mort de tous les juifs, partout. Alors Charlotte se terre, pour peindre, pour échapper à son destin. Son art lui permet d'échapper à la malédiction familiale mais les barbares nazis se substitueront à cette destinée toute tracée.
Un livre émouvant mais sobre qui met la lumière sur une artiste méconnue au destin tragique. Une belle réussite pour le parfois trop superficiel David FOENKINOS.
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Portrait émouvant et saisissant d'une jeune artiste peintre: Charlotte Salomon.

Fille d'un chirurgien renommé, elle doit faire face à la disparition de sa mère qui s'est suicidée alors qu'elle n'est qu'une enfant. Elle n'apprendra la vérité que bien plus tard.

Charlotte grandit, son père se remarie avec une célèbre cantatrice.
Elle réussit à entrer à l'école des Beaux-Arts grâce au 1% de "juifs tolérés" à l'époque où la montée du nazisme est de plus en plus forte.

Obligée de fuir ce régime totalitaire qui accentue chaque jour un peu plus sa domination, elle rejoint ses grands-parents dans le sud de la France.
Mais elle quitte à contre coeur un amour passionnel avec un homme dont elle n'aura de cesse de dessiner son portrait de mémoire par la suite.

Elle débute alors une intense période créatrice, encouragée par ses amis, elle peint, dessine, écrit sa vie, ses souvenirs.

Ce roman a une telle force d'attraction qu'il est difficile de le quitter. D'une écriture poétique empreint d'émotions, David Foenkinos a su peindre un portrait sensible, vrai d'une jeune femme talentueuse et courageuse.
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Dans l'arbre généalogique de la mère de Charlotte Salomon, le suicide n'épargne aucune branche, la plupart des fruits tombent avant d'avoir mûri, les autres flétrissent ou pourrissent à leur contact.
De fait, Charlotte fait penser à une fleur qui pousse au milieu des ruines. Sa vie s'inscrit entre les deux grandes guerres du XXe siècle : Berlin, 1917 - Auschwitz, 1943. Pas de place pour elle dans la société allemande : Charlotte a des origines juives. Une place difficile à trouver dans sa famille parmi tous les fantômes des suicidés.

Il arrive qu'on aime une chanson sans parvenir à la chanter : impossible de placer sa voix sur l'air au-delà de quelques mots. Il arrive qu'on ait envie de danser sur une musique sans y parvenir : vos pas ne s'accordent pas au tempo, ou seulement quelques secondes, et puis ils se décalent. J'ai éprouvé une frustration identique en lisant cet ouvrage. Ce récit a la forme d'un chant, d'un long poème en prose. Cette présentation m'évoque celle des albums pour enfants. Je cherchais malgré moi et en vain un rythme, des rimes.

Je n'ai pas apprécié ce texte à sa juste valeur, mais j'ai quand même été touchée par des formules sobres, percutantes, émouvantes. Dans ce bel hommage à l'artiste-peintre Charlotte Salomon, l'auteur trouve les mots justes pour parler de l'héritage familial, du poids d'un simple prénom, du deuil, de la guerre...
... et de la Vie :
« Elle ne pensait pas que cela puisse arriver.
Elle a souvent comparé son corps à un rempart.
Sa seule arme pour se protéger.
Il faut croire pourtant que la vie vient de s'infiltrer.
Oui, elle est enceinte. » (p. 195)
... et de la Shoah :
« Sur le bâtiment, on peut lire qu'on va prendre une douche.
Avant de pénétrer dans les bains, chacune se déshabille.
Il faut mettre ses vêtements sur un crochet.
Une gardienne s'époumone.
Surtout, retenez bien le numéro de votre porte-manteau.
Les femmes mémorisent ce chiffre ultime. » (p. 211)
Ces deux passages, et d'autres aussi forts, me convainquent de relire cet ouvrage, de prendre le temps d'apprivoiser la narration choisie par l'auteur, pour ne rien laisser échapper.
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David Foenkinos, écrivain connu et reconnu, est obsédé par Charlotte, peintre unique, chantre des couleurs, transcendante de la réalité.
Il est habité par elle, et ne sait pas pourquoi. Depuis des années, elle le hante. Il part à sa recherche. Il trouve des vestiges du passé. Qui le hantent.
Et puis survient la magie : il se met à écrire, à écrire, à écrire. Par petites phrases hachées. Tendres. Poétiques. Empathiques. Impossible d'écrire autrement.
« Je commençais, j'essayais, puis j'abandonnais.
Je n'arrivais pas à écrire deux phrases de suite.
Je me sentais à l'arrêt à chaque point.
Impossible d'avancer.
J'éprouvais la nécessité d'aller à la ligne pour respirer.
Alors, j'ai compris qu'il fallait l'écrire ainsi. »

Charlotte nait dans une famille juive et allemande marquée par le malheur. Des suicides pèsent sur son destin, y compris, et surtout, celui de sa mère. Son père, médecin renommé, s'abrutit dans le travail.
« Il faut se méfier d'un homme qui travaille trop.
Que cherche-t-il à fuir ? »

L'Art la sauve, pour peu de temps. Elle est admise aux Beaux-Arts malgré la pression nazie.
« On autorise ici ou là des respirations dans la déchéance. »
Elle tombe amoureuse. Follement. Eperdument. Mais l'ogre nazi la rattrape et elle est obligée de fuir en France, pour rejoindre ses grands-parents à la Côte d'Azur, où elle plonge dans une atmosphère morbide.
« La grand-mère et la petite-fille se comprennent.
Leur coeur bat de la même façon
Comme s'il était enroulé dans une étoffe.
Il se débat en sourdine, sans faire de bruit dans le corps.
A la manière coupable dont les survivants respirent. »

Elle peint. Elle peint comme elle respire. Elle se jette dans la peinture. Elle couvre de couleurs et de mots ses toiles.
C'est alors que survient le 2e amour. Et grâce à lui, la Vie.
Et puis la Mort.

« Charlotte » : roman biographique émouvant, trouble, saisissant.
Difficile de parler autrement.
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