Je n'ai vraiment pas été impressionnée par ce recueil de nouvelles littéraires, au contraire, j'ai trouvé les nouvelles d'ennuyantes à carrément dégueulasses à lire (déplaisantes, même - surtout - pour des ados). À éviter!
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Peur de rien
T’as vu ce qui est écrit derrière mon chandail?
Dans mon dos, c’est marqué IMPROVISATION.
Parce que je fais ça dans la vie: j’improvise. Mais pas n’importe quoi. Je fais partie de l’équipe de mon école. On a des entraînements, de la préparation. On en affronte d’autres dans une ligue, à travers tout le Québec. On est pas mal bons. Le truc en impro, c’est d’avoir des réflexes affûtés. Ton cerveau doit être plus rapide que toi. Dès qu’on te donne un sujet, tu sais ce que tu vas raconter et comment tu vas le jouer. Ça doit aller très vite. Quels que soient le type d’improvisation, le style et le nombre de joueurs, tu dois être capable de sauter sur la glace. Ton texte, c’est toi qui l’écris petit à petit, en réaction aux autres. J’adore ça. Tu ne peux pas tricher. C’est comme si t’étais tout nu sur scène, sans artifice.Ça, c’est quand je joue en équipe. Si je me plante, ce n’est pas si grave, mes copains peuvent rattraper mes moments de faiblesse.
Quand je suis seul, en mode YouTube, je change de partition. Mon public, je ne le vois pas, mais je sais qu’il me regarde de partout. Notre planète a des yeux tout autour de la terre. Les thèmes de mes performances, ce n’est plus un tirage au sort qui me les impose. C’est moi qui choisis le lieu, l’heure et le défi.
Mon défi.
Je n’ai peur de rien. Et je n’ai pas besoin de chandail pour le prouver. Sur YouTube, on peut voir toutes mes expériences. Je me filme et j’imagine aussitôt mes futurs spectateurs qui frémissent. Ils ont la chienne à ma place. Ils doivent mettre la main devant leur bouche en suppliant leur écran d’ordinateur: «Oh non, fais pas ça!» Ils ferment les yeux en pensant: «Je peux pas voir ce qui va se passer», «Je suis pas capable». Mais je sais qu’ils finissent par tout regarder entre leurs doigts, du début à la fin. Ou bien, ils demandent à leurs copains comment ça se termine. «Alors, il s’en sort ou pas?»
En tout cas, c’est ce que certains écrivent dans leurs commentaires. Les gens sont des voyeurs. Et moi, je suis si jeune. Je n’ai pas un physique de bûcheron. Je suis imberbe. J’ai l’air si vulnérable.
Mais je ne le suis pas.
La preuve: je suis encore là pour vous raconter mon histoire.
J’ai dix-sept ans et j’ai l’impression d’avoir expérimenté tout ce qui était à ma portée. Je tourne en rond, mais comment rompre ce cercle quand on ne veut pas fuir? Je ne veux pas me droguer bêtement. Je trouve ça trop facile. Je veux… Je veux quoi?
Au début, j’ai fait comme tout le monde. Pour me tester. J’ai essayé les défis à la mode, ceux dont on parle à la radio et sur Facebook, parce qu’ils sont devenus grand public. Ou à cause d’un imbécile qui est mort.
Mais c’est aussi pour cela qu’on joue à ce genre de jeu. Pour flirter avec le danger et l’accident. Pour tutoyer la mort.
Payot - Marque Page - André Marois - Irrécupérables