On mesure dans cette histoire l'influence de
Winsor McCay et son
Little Nemo sur l'oeuvre de Fred. C'est une voie de la bande dessinée qui s'était perdue et que Fred a sorti des oubliettes. L'influence de Fred mettra elle aussi pas mal de temps à se faire sentir, pourtant la bande dessinée contemporaine lui doit beaucoup. Son trait brut, privilégie l'imagination libre au dépens du travail minutieux et ne s'attache à aucun stéréotype, pas de fignolage, le graphisme est totalement indépendant, comme le scénario, tout cela tient de l'écriture automatique chère aux surréaliste, teinté d'onirisme, de poésie, d'humour à tous les degrés, de clins d'oeils disséminés. J'aime particulièrement ceux de cet album : on y trouve des images sorties de l'iconographie de mai 68, avec les CRS, quelques paroles détournées des chansons de
Georges Brassens, un jeu sur les expressions courantes qui sont prises au premier degré. Il s'émancipe aussi de la lecture classique, à une époque où la bande dessinée à posé ses bases, Fred nous emmène vers autre chose, il déconstruit l'usage du du phylactère qui devient un univers parallèle, dans le scénario, il joue avec des univers imbriqués, on évolue dans le rêve d'un autre. Cet album est aussi l'occasion de découvrir un monde luxuriant composé d'illustrations magnifiques, celles qui évoquent le monde des nuages ou la vallée des larmes. Cette histoire est une petite merveille qui donne la mesure du talent de Fred. Je regrette juste que ça soit si court, mais à l'époque, les bandes dessinées de plus de 64 pages n'existaient pas.