AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782377560738
160 pages
L'Ogre (17/09/2020)
3.42/5   12 notes
Résumé :
Deux hommes dans un entrepôt isolé. Deux mercenaires ayant apparemment trouvé un sens à leur vie en adhérant à une grande cause se voient confier la garde d’un otage. Le silence de leur commanditaire et le délitement de leur engagement les poussent à quitter progressivement l’entrepôt. Que se passe-t-il quand on nous prive de notre rôle, quand nous nous retrouvons sans but dans un monde ouvert ?

Que faire de cette liberté quand on est un peu paranoïaq... >Voir plus
Que lire après Monde ouvertVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
« Monde Ouvert » (2020, Editions de l'Ogre, 160 p.) est un roman quasi d'initiation sur fond politique ultra-radical. Sauf que (pour les peu-lecteurs un peu pressés qui auraient par hasard découvert la cause et son otage). « Il était formellement interdit d'introduire qui que ce soit auprès de l'otage ». Comme si les bonnes vieilles pratiques avaient encore cours, maintenant la cause est structurée et ses causeurs éduqués. Tellement bien qu'ils ne causent pas, surtout à l'otage. (Le singulier employé ici est une marque de petite production, avant un marché plus ouvert et mondialisé).

Donc sans contexte idéologique précis (dont le lecteur se fiche, bien entendu), et sans scène dégradante de marchandage de l'otage en pièces recyclables (ce dont la morale réprouve), les à-côtés gores du roman deviennent de la littérature de gare. Les « peu-lecteurs » vont encore hurler à un « Monde ouvert » qui ne débouche ni sur une idéologie pratique (liée à une secte, parti politique, défilés et autodafés), ni sur un management rationnel de l'otage (« La Découpe pour les Nuls »).
Il ne restera que ces deux losers Sven et Dale (heureusement ils ont des prénoms non répertoriés au Calendrier des Saints et Prénoms). Seul détail pour Dale « Dale avait un tatouage sur la nuque. Il représentait un triangle traversé par trois ronds. Seul le triangle était en couleur ». Reste l'otage dont on ne saur rien, ni même s'il est encore en vie (en continu ou par morceaux, diraient des mathématiciens), et la cause qui ne cause plus. Et si cette dernière était comme l'Arlésienne ou mieux Godot et les deux protagonistes parents de Vladimir et d'Estragon. En plus de l'otage qui disparait petit à petit (abandonné et mort de faim et de soif ? La cause aussi se fait la valise. « le silence de la cause s'expliquait par le mauvais temps. La cause était là pour éclairer leur chemin. Tout était trop fragile ».

Un otage improbable, deux gardiens tout autant impossibles de savoir de quoi ils vivent, mangent, ont de l'essence pour leur Xantia (même si cette dernière parait être hors d'âge) « Les phares de la Xantia étaient d'un autre âge. Jaunes. Un jaune d'oeuf dur, un jaune pétant ». Pas de cartes (interdites par la cause), mais des chemins (de traverse, cela va de soi), « Ah, la cambrousse, quand même », pas de frontières (si ce n'est une cahute inhabitée), des chemins de montagne avec des lacs et rivières (et même un salmonidé, tout étonné de se trouver là).
Heureusement, un grand moment d'humanité dans ce désert « ils découvrirent deux ânes qui auraient mutilés les coeurs les plus endurcis. Au-delà de la tristesse séculaire qui habitait le fond de leurs yeux, les voir ainsi, sabots prisonniers de la neige, faisait venir les larmes ».

A tout prendre, à la fin de ce livre, ayant pesé le poids de l'otage, de la cause, de la pas si longue captivité, des recherches qui n'ont pas eu lieu, du tam-tam médiatique resté en grande sourdine, des élans quasi patriotiques des deux ex-braqueurs entrés dans l'administration pénitentiaire, on se demande si les deux ânes n'ont pas tout compris, pratiquement depuis le début du livre (chap 5, p. 31).
Commenter  J’apprécie          00
Un monde ouvert, ça parle d'un entrepôt, perdu sous une épaisse couche de neige, au coeur d'un paysage désolé, et des deux hommes - des mercenaires - qui s'y retrouvent pour surveiller un otage à qui il ne faut pas adresser un mot et dont l'issue sera déterminée par la "cause". La cause à laquelle adhèrent nos deux « anti-héros », la cause en laquelle ils ont toute confiance, la cause dont, *spoiler*

Sauf que la cause a cessé de leur envoyer des messages, de répondre, elle les laisse là, dans cet entrepôt glacé, sans donner d'ordre, sans soutien, et alors, qu'advient de deux fidèles privés de leur messie ?

Voici le ciment du récit, ce qui promettait une réflexion intéressante, une histoire entraînante, dont on aurait envie de savoir la finalité. Mais non, je n'ai pas été entraînée. Les protagonistes subissent le silence, puis se laissent aller en roue libre, sans qu'on ne comprenne jamais vraiment leurs décisions, leurs actes. C'est lent, un peu creux ; la 4ème de couverture fait mention "d'aventures Becketienne" et c'est la juste comparaison puisqu'il ne se passe rien – du moins, les personnages bougent, se parlent (brièvement), mais il n'y a pas de substance, pas d'émotions, ni ressenti particulier. Et encore moins d'histoire - ne cherchez pas de réponses à vos questions (qui est l'otage ? qui est la société secrète ? où sont-ils ? que se passe-t-il ?) il n'y en aura pas.

Je pense que le livre est fait pour être une sorte d'allégorie de la société, des rôles qu'elle impose et de ce qui advient quand nous en sommes privés, mais je n'ai pas vraiment apprécié, je me suis un peu ennuyée pour tout dire. Après, ce type de récit n'est sans doute pas fait pour moi, j'en conviens, mais je suis sûre qu'il plaira à d'autres qui en apprécieront l'absurde à sa juste valeur.
Commenter  J’apprécie          00
Je ne connaissais pas Adrien Girault. Livre dans les nouveautés de la médiathèque. J'ai tout de suite été saisie par la qualité de l'écriture, où j'ai retrouvé un je ne sais quoi d'Hubert Mingarelli, influence ? Rythmée top, style qui tient la route. Justement, La Route. Quelque chose de McCarthy aussi. Ça commence à faire beaucoup. Beaucoup de poncifs, stéréotypes virilistes, les cowboys solitaires etc., on est dans du dur. Dommage. J'ai tout lu mais j'ai commencé à m'ennuyer vers la page 80. J'espérais une chute, un virage, une surprise. Quelque chose qui me nourrisse. Les deux types sont affamés mais c'est pas une raison. Hélas, ils continuent à ériger crosse d'acier et autre bazooka jusqu'au bout. Regret qu'une si belle forme (5 *) ait servi un genre somme toute couru (1/2*). Hé, l'auteur, tu vas explorer d'autres thématiques, pour voir ?
Commenter  J’apprécie          00
Un livre ouvert comme son titre : on suit la trajectoire quasi-silencieuse et plutôt sinueuse de deux pinpins perdus dans notre monde actuel.
Qui sont-ils ? D'où viennent-ils ? On le saura peu. Que veulent-ils ? Eux-mêmes n'en sont pas sûrs... Chargés de veiller sur un otage politique, l'ennui les emportera au large, dans les replis d'une campagne montagneuse.

Un roman très immersif, qui vous plonge dans la psychologie d'hommes à la marge de la société et qui s'en écartent de plus en plus, jusqu'à dissolution de leur être.
Un récit inhabituel qui m'a agréablement surprise.
Commenter  J’apprécie          00
De nos inquiétudes à nos absences de missions, de la paranoïa à nos fuites absconses. Dans un endroit inconnu, toujours dans un délicieux décalage, deux hommes se cloîtrent dans un hangar, prétendument pour garder un otage. Monde ouvert ou le délitement de la conscience quand tout semble possible et rien véritablement souhaitable. Sous sa plume alerte - toujours chassée par une inquiétude qui la dépasse - mais aussi ludique - comme si elle décrivait l'évolution de personnage de jeux vidéos - Adrien Girault signe un conte sans solution sur la perte de sens.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
Commenter  J’apprécie          40

Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
La route était mauvaise, tournoyait et, surtout, était couverte d’une fine couche de gravier. Le moteur de la Xantia surchauffait, et parfois même rugissait, indiquant sans doute un passage de rapport mal maîtrisé? La voiture atteignait péniblement les cinquante à l’heure. L’air était froid et cassant? Des restes de givre embuaient les côtés du pare-brise. Le ciel était d’un gris presque laiteux, tirant sur le blanc? Au volant, Dale gesticulait, ses bras moulinaient dangereusement lorsqu’il négociait les virages en épingle, et, parfois, il empoignait brutalement le levier de vitesse, par exemple quand il fallait rétrograder en côte pour récupérer de la puissance. La nuit n’allait pas tarder à tomber. Pourtant c’était encore le milieu de l’après-midi. Les phares étaient déjà allumés et éclairaient les fossés profonds, les ravins, et le museau hargneux des chiens qui jappaient. Les demeures étaient sombres et intimidantes, et les bêtes avaient l’air particulièrement agressives. Il y avait parfois une loupiote vacillante à la porte d’entrée, mais la grille des portails était systématiquement fermée. Dale roulait depuis six heures. Un seul arrêt pour pisser, en vitesse, dans la boue, et il était revenu sur son siège avec des chaussures à talons. De la terre s’était éparpillée sur le tapis. Dale se foutait complètement de la propreté, voire, il trouvait ça louche. Avant de repartir, il mit ses mains en bénitier, les porta à sa bouche et souffla, et puis les frotta avec énergie contre sa cuisse pour fluidifier le sang. Dale avait roulé presque d’une traite mais regrettait de ne pouvoir s’arrêter dans un drugstore ou une station, quelque chose qui aurait égayé l’imagination. Au lieu de ça, il terminait laborieusement le parcours, une crampe lui tirant la jambe en remontant jusqu’aux fesses.
« Ah, la cambrousse, quand même », se disait-il, plutôt négativement du fait de ces routes compliquées. Il voyait bien que les paysages avaient un truc, sûrement pas de la beauté mais quelque chose tenant du caractère et de la franchise. Il y avait des cabanes en pierre avec des trous noirs en guise de fenêtres, des silos à grains, des sentiers qui s’enfonçaient, de grands panneaux à l’effigie de magasins de bricolage dont les inscriptions s’effritaient. La radio captait mal. Dale l’éteignit car les nasillements lui tapaient sur le système. La route s’allongea enfin et Dale sortit de son pantalon un bonbon à la menthe fraîche qu’il suçota. Ce qui était bien avec son pantalon, c’était le nombre de poches. C’était un pantalon de baroudeur. Il pouvait ainsi avoir à portée de main son couteau et toutes sortes de gadgets, du fil, une boussole, un carnet. C’était un pantalon qu’on achetait dans les surplus ou dans les magasins d’occasion. Il avait emporté un sac laid et pratique qui traînait sur la banquette arrière.
Dale s’orientait avec une carte fripée qu’il avait étalée sur le tableau de bord et coincée avec une pierre afin de la consulter en roulant. Avant de partir, il avait surligné le trajet d’un grand trait jaune qui s’était délayé au contact de l’encre imprimée. Il avait noté l’adresse sur un Post-It qu’il gardait dans la poche arrière de son pantalon. Il avait pour consigne de faire disparaître la carte dès son arrivée. Il avait quitté l’autoroute avec dans un coin de sa tête l’idée que c’était la dernière fois qu’il l’empruntait, et cela l’avait empli d’une joie simple, gratuite et illusoire.
L’obscurité était sur le point d’engloutir le décor. Les jambes engourdies, les épaules lourdes, maintenant que l’entrepôt approchait Dale restait pied au plancher. Les phares de la Xantia étaient d’un autre âge. Jaunes. Un jaune d’œuf dur, un jaune pétant. Il débarrasserait son coffre plus tard. Il ne savait pas si l’entrepôt était grand. Son barda pouvait bien rester sous la couverture. Dale n’avait prévenu personne de son départ. Il verrait bien. Il se persuadait qu’il venait ici pour les autres, pour plus grand que lui, pour la cause.
Commenter  J’apprécie          00
Puisqu’ils n’avaient décidément rien d’autre à faire, Dale et Sven prirent le large. De l’autre côté de la route, le long d’un chemin de terre, ils découvrirent deux ânes qui auraient mutilé les cœurs les plus endurcis. Au-delà de la tristesse séculaire qui habitait le fond de leurs yeux, les voir ainsi, sabots prisonniers de la neige, faisait venir les larmes. Sven rit grassement d’abord. Dale le foudroya du regard. Il savait que l’autre jouait au dur. Il n’y a rien de pire qu’un homme qui ne respecte pas les bêtes. Dale les appela en agitant une main par-dessus la clôture. Les ânes, malgré le froid et l’épaisse couche de neige, piétinèrent jusqu’à eux depuis le fond de l’enclos. Dale arracha une grosse quantité d’herbe. Sven l’imita. Quand les ânes furent tout près, ils avaient de quoi nourrir un régiment. On alterna caresses et poignées d’herbe. Dale se refusait à croiser leur regard. Sven était finalement excité, on aurait dit qu’il n’avait jamais vu une bête de sa vie. Il redoubla de surnoms affectueux, et rechigna presque à les quitter. Dale promit de revenir. Le chemin était bordé alternativement de petites portions de forêt et de champs. Ils avançaient capuche sur la tête. Sven sifflotait. Dale se concentrait sur ses pas, et il estimait l’usure de ses chaussures en rêvassant. Il demanda à Sven si la compagnie de la société ne lui manquait pas. Il ne s’étendit pas plus que ça. Parvenus aux abords d’une grande forêt, dans laquelle on aurait dit qu’ils hésitaient à pénétrer, ils firent demi-tour. Essoufflés et les mains et les joues rougies, ils secouèrent un mélange d’eau croupie et de boue glacée accroché à leurs bottes avant de s’avachir à l’intérieur de l’entrepôt.
Commenter  J’apprécie          10
Douze jours maintenant qu’ils occupaient l’entrepôt. On ne leur avait pas donné signe de vie. Dale et Sven n’étaient pas du genre à se plaindre. Tant qu’on leur foutait la paix, ils étaient capables de ne pas s’exciter, et de respecter le plan. Et ils aimaient profondément la cause. Au café froid stagnant dans la cafetière, Dale comprit que Sven s’était levé aux aurores. Il n’était pas huit heures. Dale s’approcha du calendrier. C’était le jour du ravitaillement. Effectivement, les clés de la Xantia avaient disparu de la corbeille. Son ventre se serra en imaginant Sven au volant. Il n’était jamais bien confiant en la prêtant. Il n’eut pas le temps de couvrir ses jambes maigrichonnes que le téléphone sonna. Stridente, démodée, on imagine ce que la sonnerie pouvait produire sur l’humeur d’un homme tout juste sorti du lit. Il conquit l’espace le séparant de la tablette en noisetier sur laquelle l’objet reposait en insultant le sang des morts. Dale n’était qu’un exécutant, aussi il masqua ce qu’il pensait de cet appel, et se montra plutôt coulant. De dos, ses mollets laissaient voir des croûtes tirant sur le marron, sortes de corn flakes caramélisés. Dale acquiesça à plusieurs reprises. Puis, après avoir raccroché, il fit volte-face brutalement, comme pour impressionner une partenaire de danse. Il gonfla ses joues, qui bougèrent à droite et à gauche. Puis, il fut enfin temps de rentrer ces vilaines jambes dans un pantalon. Sven fut rapidement de retour. Le claquement des portières alerta Dale, qui avait fait sa toilette et rêvassait, presque dans le silence, concentré. Ils rangèrent les courses. Toujours les mêmes produits. Le coffre se remplissait de moins en moins. Trois bouches étaient à nourrir, et par ce froid, les organismes brûlaient une quantité importante de calories.
Commenter  J’apprécie          00
Il faisait beaucoup trop froid pour se branler, son sexe était honteusement recroquevillé et, de toute façon, avec l’otage à côté, la cohabitation avec Sven, toute envie était coupée. Il enfilait alors ses vêtements sur son grand corps. Dale était feignant le matin. Quand il émergeait, les tâches ménagères étaient assurées, les coups de marteau résonnaient, les clous s’enfonçaient, les points de colle s’enfilaient. Il n’y avait pas de fenêtre dans la chambre, aussi le noir de la nuit était semblable au noir du matin. Il avait besoin de temps pour se réhabituer au monde. Il détestait la sensation de son corps rouillé. Dale n’était pas habile de ses mains. Il tournait en rond, à force. Il goûtait l’écriture mais pas plus que ça, pour l’amour éventuellement et les cartes postales.
Commenter  J’apprécie          10
L’alcool et le feu chauffaient le front, Sven se désinhiba un peu, il parla de l’armée et de braquages parce qu’il était aux confins de l’ivresse. Cela dit, étant donné sa constitution, le vin n’était pas assez fort pour qu’il puisse y basculer totalement. Dale écouta, il avait ôté ses chaussettes et se tenait allongé sur une couverture, la tête relevée vers le feu. Les flammes léchaient par le côté l’énorme tronçon de bois qui durerait jusqu’au milieu de la nuit. Les morceaux d’écorce prirent en premier et s’embrasèrent comme de la pinède, puis le feu s’apaisa et travailla lentement.
Commenter  J’apprécie          00

Video de Adrien Girault (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Adrien Girault
OGRE (L') (G) - "Monde Ouvert" d'Adrien GIRAULT
autres livres classés : masculinitéVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus

Autres livres de Adrien Girault (2) Voir plus

Lecteurs (26) Voir plus



Quiz Voir plus

Compléter les titres

Orgueil et ..., de Jane Austen ?

Modestie
Vantardise
Innocence
Préjugé

10 questions
20258 lecteurs ont répondu
Thèmes : humourCréer un quiz sur ce livre

{* *}