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3,45

sur 237 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
J'avais gardé un souvenir mitigé de "Mort d'un parfait bilingue". J'avais trouvé cette histoire de mercenaire amnésique passablement compliquée. J'avais dès lors tenu son auteur, jeune Belge talentueux, comme un écrivain de la Nouvelle vague, un peu trop poseur pour être tout à fait honnête.
Ces préventions sont levées avec ce "Manuel de survie à l'usage des incapables", titre étrange et assez mal choisi pour introduire un roman à la croisée des genres : polar, SF, romance, essai sociologique.
On dirait du Maurice Dantec (pour l'anticipation parfois trash) mâtiné de Houellebecq (pour la vulgarisation génétique) saupoudré d'un zest de Echenoz (pour l'ironie triste).
On y croise Jacques Chirac, Blanche de Castille et les frères Eichmann dans une intrigue qui se noue dans l'arrière salle d'un supermarché : un vigile y tue par erreur une caissière déclenchant le désir paroxystique de vengeance de ses quatre orphelins, un poil loup-bars, le départ de sa femme serpentine et la rencontre d'une loutre très spéciale. Car cette histoire policière banale se déroule dans un futur proche où la reproduction humaine a été améliorée par le croisement de gènes animaux sélectionnés.
Thomas Gunzig écrit au scalpel de courts chapitres découpés comme des plans de cinéma. Son Manuel ferait d'ailleurs un excellent film avec François Damiens dans le rôle principal, Laure Atika dans celui de sa femme et Mélanie Thierry dans celui de Blanche de Castille.
A lire en attendant de le voir !
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"Pendant que tu te lamentes, les autres s'entraînent."
Arnold Schwarzenegger, Pumping Iron

Cette citation d'Arnold introduit l'esprit "zen" du manuel de survie

Pour la petite histoire :
Sous les ordres de ses supérieurs hiérarchiques, Jean Jean, responsable de la sécurité dans un supermarché va épier et aider à obtenir le licenciement d'une caissière, Martine Leverdure, jugée non rentable pour l'entreprise. Sa nonchalance lors des pistages des CB n'étant pas un motif de renvoi, sa liaison avec Jacques Chirac Oussomo, assistant du chef du rayon primeur sera retenue car non conforme avec le règlement intérieur et la culture de rentablité du magasin. Accidentellement, Jean jean tue Martine Leverdure. Ses quatre fils à l'ADN de loups, caïds de la cité jurent de tuer le coupable. Une folle course poursuite s'ensuit....

Thomas Gunzig nous brosse un portrait apocalyptique de ce qui pourrait advenir de notre mode de distribution dans un avenir proche. C'est un livre qui pose des questions sur la philosophie de ces grandes entreprises basées uniquement sur le profit. L'humain n'y a sa place que comme producteur. Il devient une marchandise génétiquement modifiable. Les rapports sociaux sont hiérarchisés et (en)codés. La sexualité et la trivialité y sont bannies. les plus faibles sont rejetés (Martine et Jacques Chirac!) tandis que d'autres plus sauvages incarnés par des hommes loups dominent l'économie parallèle des cités. Quant à la masse des travailleurs, meublés d'Ikéa, épuisés par des cadences infernales, une fois rentré chez eux, ils ne peuvent qu'avaler du surgelé et finissent par s'endormir devant le petit écran. le maintient de la paix social est à ce "juste" prix. Moralité de la grande entreprise : une seule loi domine : l'hyper-productivité, mesurée en euros par heure travaillée.

C'est un bon roman noir cynique, à la fois fable visionnaire (manipulation génétique, ADN sous copyright...) et un thriller rocambolesque qui ne manque pas d'humour.

Soyez sur qu'après avoir lu ce polar, vous ne passerez plus les portes de votre supermarché avec la même assurance!
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Normalement, avec un titre pareil, je n'aurais jamais dû lui prêter une quelconque attention, relégué avec la série des "pour les nuls". Et j'aurai bien eu tort !
Sujet bateau (une femme meurt accidentellement et déclenche la vengeance de ses enfants), mais traitement inventif et surprenant.

Les premières pages nous entrainent sur un baleinier ; la vie y est plus que rude. Wolf, l'un des marins, s'apprête à prendre son poste quand le capitaine prend en chasse une baleine ; sa capture et sa vente laissent entrevoir un mirage, celui de tous les paradis financiers possibles et imaginables. Et déjà, dans ces quelques pages, des références titillent l'esprit de "Moby Dick" au "Vieil homme et la mer". Sauf que, la baleine porte un numéro de série et que cette baleine appartient à Nike. Elle sera tuée pour rien ! Dans ce court chapitre tout le ton du livre est donné : des références littéraires et cinématographiques, et UNE réalité de notre monde contemporain qui pourrait advenir. Et, ce basculement si particulier entre 'un récit bien tourné et une réflexion sur les codes de notre monde.

Le lieu est une cité glauque, réserve de petites mains pour le supermarche, seul pourvoyeur de travail. Toute une population épuisée, sans horizon d'où n'émergent que les battants : celles est ceux qui ont une énergie hors du commun pour s'en sortir.
Soit, qu'elles ont bénéficié d'une formation genre guerilléros pour tailler de nouvelles parts de marché et défendre le capital de leur employeur, soit qu'ils ont appris à faire corps et griffes et crocs pour se tailler une tanière.

Est-ce que cette banlieue est une banlieue ou est-ce que le monde entier n'est plus qu'une banlieue autour de grands groupes ? Et les routes, ne conduisent-elles qu'à des forêts "tchernobylisées" ?

Les humains semblent épuisés, à bout de soufle, mais grâce à la génétique, ils sont "boostés" avec des gènes d'animaux. La reproduction humaine est sous contrôle, et selon que l'embyon recevra des gènes de loup, de loutre ou de mamba, sa vie, ses caractéristiques, ses motivations en seront déterminés. Les brevets sur le vivant se sont étendu du monde végétal au monde animal, sur tout le monde animal.

L'éducation dans ce monde est unifocale (le commerce) ou n'est pas ! Et pour accéder à ces écoles prestigieuses, il faudra passer des tests quelque peu pervers. L'érudition, dans quelques livres ramassés par quelques marginaux en mal de découvertes. L'informatique se résume à un outil de gestion et à des jeux vidéos, dont un retraité devient le super champion.

Voilà la petite musique qui a bercé la lecture de ce fabuleux roman, plein de bruit et de fureur et d'éclats de rire. Avec délectation, j'ai retrouvé un humour noir, parfois très noir. Comment ne pas jubiler devant la sottise de la super-business-woman qui va se faire violer par quatre loup-bards et pense à l'après, d'une part en terme de nettoyage avec liste de savons et cosmétiques et en terme de carrière !!!

Des passages flamboyants de causticité depuis la création du monde jusqu'au réaménagement du paradis.

L'auteur manie la caricature en maître, force le trait avec brio et dresse les portraits d'humains auxquels on croit, avec leurs difficultés et leurs chagrins et leurs petites victoires. Et un même événement est vu, décliné selon la personnalité de chacun. Ce qui apporte, une réelle "valeur ajoutée" au récit .

Les chapitres sont courts, cohérents, menés avec nervosité, l'écriture fluide et imagée nous fait tourner les pages à toute allure.

Le titre comme la couverture est une bonne représentation du texte.
Le titre, véritable pied de nez à tout un style de littérature, met en évidence la vacuité de ce type d'ouvrages (de mon point de vue) et la couverture une vue "design-née" de la froideur compartimentée de nos approvisionneurs en tous biens matériels si aliènisants ; pour preuve, le Diable y pousse un caddy (quelle âme vient-il acheter ?)

Sincèrement, un grand merci et à l'éditeur et à Babelio : si cet ouvrage n'avait pas été proposé dans la Masse Critique, je serais, sans aucun doute, passé à côte !











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-------Conférence (réponses aux questions) + Critique personnelle------

Thomas est Bruxellois, et est amis avec beaucoup de parents à élèves de Decroly (écoles uccloise où je me trouve) et ce mardi 9 juin, j'ai assisté à sa conférence.
On pouvait lui poser plus ou moins toutes les questions que l'ou voulait. Ma critique se trouve plus bas, mais je trouve que le plus intéressant à vous exposer serait les réponses aux meilleures questions. Je ferais au mieux pour dévier au moins ce qu'a dit Thomas.
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Durant cette rédaction de questions/réponses, je dirais simplement "Thomas", je sais que chez certains cela parait étonnant donc je précise, mais à Decroly, on préfère la solidarité et l'ouverture, donc tout le monde (sans exception) se tutoie. même de Directeur à élève.


Tout d'abords nous lui avons demandé : pourquoi le premier chapitre ? (la baleine Nike)
En fait, Thomas a lu Moby Dick ainsi qu'une chasse de baleine, et, comme à son habitude il n'écrit que des petites nouvelles, là il voulait écrire une scène grandiose. Il l'a donc écrite, puis après s'est arrangé pour lui trouver un lien avec le reste du livre. Lien que lui-même qualifie de pseudo-lien.
Tout comme l'histoire de l'après mort rachetée par Ikea, il a un peu construit son livre autour de ce concept, voulant à tout prix lui trouver une place dans son livre.
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Pourquoi ces animaux ? Ce n'est pas une "métaphore subtile", c'est simplement pour apporter quelque chose d'efficace. Ces quatre loups ne sont jamais décrit avec beaucoup de détails, flou posé consciemment, pour laisser sa conscience imager.
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Ce livre est t-il une dystopie ? Pas vraiment. Si oui, c'est involontaire. C'est plutôt une caricature du présent, une exagération. Un constat d'un état de la société. Donc pas réellement de la science-fiction ni une dystopie pure et dure.
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Thomas, pour écrire ce roman, s'est beaucoup documenté, il est allé jusqu'à se promener sur des forums de caissières (d'où cette histoire de traumatisme dut au "bip" de scan d'article, ou du flicage) qu'il a, d'ailleurs, qualifié de très intéressant.
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Pourquoi ce titre ? Thomas a de l'humour, et c'est non sans faire usage de son talent qu'il nous a raconté l'histoire du titre. (C'est donc a prendre avec subtilité). Quand Thomas sort un roman, il espère toujours que ce sera la grande richesse (car il veut vivre au maximum de l'écriture) il lui fallait donc un titre accrocheur, qui se vend. Ce n'est qu'après qu'il s'est rendu compte que le titre ne se liait pas spécialement avec l'histoire. Au final, il regrette ce choix car c'est encore une confusion, encore un mauvais titre... (courage à lui !)
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Pourquoi ces noms ? C'est un art à choisir, des noms. Les savant porteurs d'images, Thomas ne voulait pas opter pour des noms classique. En Belgique, facilement 1 personne /50 a une Isabelle dans sa famille, ou un Nathan. D'où ces noms. 
Par exemple : Jacques Chirac Oussomo, c'est marrant car le rapport est inexistant, donc une image se trouvera naissante dans notre imagination.
Jean-Jean, c'est un peu couillon, comme le personnage. Blanche de Castille, c'est chic, c'est élégant, ça fait presque princesse de Disney.
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D'où sortent les Frères Eichman? Ils sont inspirés des frères Albrecht, fondateurs d'Aldi.
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Pourquoi cette négligence de la police ? (que je trouve justifiée, en passant) Elle est présente tout a fait car tout est fait exprès dans ce livre. L'idée de fond était cette société équilibrée qui s'auto-gère.
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Pourquoi autant de scènes aussi crues, autant de sexe ? Car c'est un élément important de la vie, c'est toujours présent. (là il cita "mon oncle d'amérique", un film démontrant, entre autre, que les comportements humains avaient pour but de perpétrer l'espèce) Et qu'aussi à l'époque pubère que nous traversons (nous, jeunes et viles adolescents) bah c'est aussi omniprésent. (comment contredire..) Et c'est là aussi qu'il déclara, provoquant une vague de rire, que "en plus ça ne se calme pas avec l'âge, bien au contraire".
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Quand un élève a demandé pourquoi ce n'étaient pas tous des animaux, Thomas a repéré une erreur à lui. Il trouve qu'il aurait du expliquer qu'en fait TOUT le vivant est sous copyright, même les ADN. Et comme les OGM sont stériles (Monsanto, graîne exterminator, allez voir le "Datagueule à ce sujet car il en vaut la peine d'en être informé) et bien les femmes le sont aussi. Donc les enfants-loups sont des enfants "buggés".
Pour lui ce n'était pas assez clair, il qualifie cette erreur de point faible du livre.
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"Quand tu écris, c'est pour toi ou pour les autres ?"
Pour Thomas, là où réside le grand plaisir de l'écriture, ce n'est pas dans l'écriture (c'est marrant 5 minutes mais chiant après..) mais dans le sentiment que Thomas a quand il a enfin finit son livre, ce sentiment de "l'avoir fait". Il aime l'écriture pour la liberté, le challenge et l'émotion qu'elle offre.
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Pourquoi une telle fin ? (Attention spoilers)
La fin n'est pas bâclée, elle est idiote, et c'est voulu. Il ne savait pas précisément s'il en avait marre d'écrire ou si c'était le but précis.
Le lien avec l'histoire de l'autiste qui parle avec les vaches, Temple Grandin, qui fut la designer de centaines d'abris pour vaches car elle les comprenait très bien, c'est simplement qu'il aimait beaucoup l'histoire. D'où ce lien assez hasardeux avec l'histoire.
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Et pour finir, en combien de temps a-t'il écrit ce livre ? 3 ans et demi. L'écriture, Thomas souhaite en vivre, et il ne touche que peu, jusqu'ici (j'espère ces donnés non secrètes car il les a quand même scandées publiquement sans problème ni avertissement) il a vendu 15.000 exemplaire ( de 2013 à juin 2015 ), ce qui lui rapporta 15.000 € net. Ce n'est clairement pas assez sur 3 ans et demi, donc il doit faire d'autre boulots à côté. D'où ce temps si long à écrire un roman tel que celui-ci.
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Voilà, le résultat d'une heure de conférence entre Thomas Gunzig et 100 élèves de 10ème (15-16 ans pour la plupart) decrolyenne. J'aime donner le contexte après, comme ça ça n'influe pas le préavis que quiconque aurait, ou non, raison d'avoir sur ces réponses questions que j'ai fournis. 
J'espère vous avoir aidé à comprendre certaines choses, vous avoir intéressé, vous avoir été utile.
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Personnellement j'aime bien Thomas, et j'avais comme objectif posé par mon frère de le faire rire, et j'ai réussi avec une blague salace, mais ça, c'est ma réussite personnelle.. (si cela intéresse quiconque je suis apte à la raconter dans les commentaires :) )
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Maintenant ma critique du livre, écrite avant cette conférence.
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Ce livre s'observe de plusieurs façons. Je n'ai pas peur de commettre un faux pas, j'ai juste peur d'observer ce livre d'une façon le négligeant, en comparaison à l'intérêt qu'il mérite. 
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Thomas Gunzig touche à beaucoup de thèmes, il n'hésite pas à aller dans le détail, il caractérise très fort ses personnages. Il touche à beaucoup de sujets, passe d'une chose à l'autre sans négliger d'enrichir la culture générale ainsi que notre partie du cerveau traitant les informations à propos de la société dégueulasse dans laquelle nous vivons. 
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Par exemple, Marianne, pur produit de notre société actuelle, se voit tomber amoureuse à petit feu. Elle se sent tellement perdue qu'elle se voit se comparer au Lygomme Tach Optimum, je cite "une espèce de produit merdique inventé par les laboratoires agroalimentaires Cargill dans le Minnesota qui, mélange d'amidon, de gélifiants et d'arômes, imitait à la perfection la mozzarella." 
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De un, notre culture générale se voit d'agrandie, étant donné que maintenant on sait ce qu'il se cache derrière ces pizzas low cost. De deux, on voit que Marianne n'obéit par simplement au système, elle le connait dans le moindre recoin, agit en tant que telle, et adore ce qu'elle fait.
On peut dire qu'il ne fait pas les choses à moitié, car ce livre nous offre autant une histoire riche et intéressante qu'une vision profonde sur les choses, plus complète.
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Mais Thomas étant belge, l'humour est, bien sûr, au rendez-vous, avec des métaphores drôles comme "Il leva les yeux, l'engin était toujours là, en vol stationnaire, aussi inutile qu'un fer à repasser dans un canot de sauvetage." 
L'histoire est agréable à lire, le rythme est bon, et pour moi, la lecture se fut difficile pour les 100 premières pages. Mais une fois lancé, j'ai tout dévoré sans m'arrêter jusqu'à la quatre-centième page. 
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L'humour est présent mais qu'en petite quantité, le livre se quantifie plutôt avec ses scènes de sexe qui font surface de temps à autre, de quoi maintenir le lecteur à l’affût, j'imagine, ses scènes d'action et de violence, qui elles aussi ont leur rythme d'apparition, et qui sont toujours bien entraînantes. Ce roman n'a pas de style unique, il en confronte plusieurs et c'est un cocktail plutôt réussit. (On le qualifie d'ailleurs de littérature Belge, comme quoi, un Belge, ça se distingue.)
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Ma seule déception fut la fin, m'étant incompréhensible au premier abord. Avec un ami, on en a discuté, étant tous deux outrés par ce "bon allez, bouffez moi cette fin". Pour faire relativiser mon dégoût, c'est comme savourer un saumon aux poireaux, et tomber sur un grain de poivre gros et dur, te gâchant l'euphorie gustative d'un coup sec et net, et t'empêchant de savourer l'avant et l'après de ce fâcheux incident.
Et l'on a conclut ça : l'objectif ne serait-t-il pas simplement de dégoûter ? De cette dystopie, flagrant le nerf de notre bien chérie société de consommation ? De nous transcender vers l'atmosphère d'un monde comme celui décrit dans le livre : un ramassis de merde dégoûtant, nous faisant relativiser, conscientiser, nous donnant un avant-goût ? Ce genre de raison expliquerait assez bien l'utilisation d'une fin pareille, car je ne crois pas à l'incapacité de l'auteur, mais à son intention délibérée d'avoir écrit la fin de cette façon.
Bien sûr tout reste mon avis, l'avis d'un jeune de 16 ans aimant les livres, et déjà dégoûté des gens et de leurs manière de fonctionner, de vivre, d'être. 
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Pour conclure j'ai bien aimé ce livre et je le conseille à quiconque voulant lire une aventure, une histoire, un manuel, une véritable convergence des pires faits sur notre société, ou encore un enchâssement de plusieurs vies improbables aussi bordélique et mal foutues qu'un tableau excel fait avec les pieds. (les plus pointus reconnaîtront la référence.)
à bon entendeur, et bonne lecture à tous.
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Quelle belle surprise que ce Manuel de survie à l'usage des incapables de Thomas Gunzing!

Dans un futur extrêmement marketé, où toute possibilité de coup du hasard est pratiquement réduite à néant, où le capitalisme est devenu religion, nous suivons les aventures de Jean-Jean et des quatre frères loups, suite à la mort de Martine Laverdure, caissière d'un grand supermarché.
Cynisme brillant, humour, folie sont les ingrédients magiques de ce formidable ouvrage. Les personnages sont singuliers et le ryhtme est travaillé comme dans un scénario, si bien qu'on se laisse aisément emporté par ce fleuve burlesque que l'on ne peut quitter.
En bref, je conseille vivement cette pépite à tous ceux qui recherchent la surprise et l'originalité.
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Cette rencontre avec l'écrivain belgeThomas Gunzig (1970 - ) permet à une trentaine de personne de se retrouver au premier étage de ma librairie favorite (la seule de Wavre). Chouette ! Carine est là avec son lumineux sourire. Et nous voilà, bien installés, chacun sur sa chaise noire, serrés comme les troènes d'une haie, au milieu des collections de livre de poche. Tiens, j'ai les « Espaces Nord » à ma droite. Georges Rodenbach veille sur moi. Les conversations vont bon train : Wavre, son bourgmestre, son jardin urbain sur la place de l'Eglise, Mel Gibson, le Japon, le mariage de raison …
Et lorsque l'écrivain paraît, le monde applaudit. le cheveu sombre et bouclé, l'oeil brun et pétillant, la lèvre légèrement ourlée de rose, le sourire franc. le premier trait d'humour fait mouche. Il nous conquiert une seconde fois.
Venu pour parler de son nouveau roman, il laisse à Sylvie Roland le soin de résumer succinctement l'intrigue : Jean-Jean, l'agent de surveillance d'un supermarché, tue, par un malheureux concours de circonstances, Martine la caissière. L'ami de celle-ci prévient ses quatre fils, quatre loups assassins, qui vont se lancer à la poursuite de Jean-Jean. Pour Sylvie, l'action se déroule dans un futur proche où le consumérisme règne en maître totalitaire, au mépris de tout humanisme. Très vite, Thomas Gunzig apporte la précision suivante : il n'y a pas plus contemporain ; cette époque, c'est la nôtre ! Et derrière les péripéties cocasses de l'intrigue, il y a la voracité du marketing, la logique implacable de la productivité, le tout teinté d'ironie et d'humour noir. Ce qui nous mène à une réflexion et, bien entendu, à une mise en garde vis-à-vis de notre société de consommation. Mais rien n'est caricatural, tout est vrai, tout est documenté. Un travail de deux années, soutenu par des lectures de théories de marketing, de technique de vente, de rencontres et d'interviews de gérants de grands magasins.
Mais l'impulsion vient de l'enfance (encore ? oui, encore). Une image d'un lieu où tout peut s'acheter, un grand magasin d'Auderghem, où il est venu en famille, au milieu des formes, de la lumière, des couleurs, des odeurs. Au coeur de cette dynamique de séduction. Puis sur ce souvenir, vient se greffer l'expérience du job d'étudiant : caissier. Et ainsi la prise de conscience du rapport des clients avec cette fonction (et avec la personne qui l'incarne). Ensuite, dix années comme libraire ont peaufiné cette approche de ce monde à la déontologie élastique, à la méthodologie implacable, au vocabulaire guerrier, à la hiérarchie mesquine et inique.
Ceci expliquant cela : peu de personnages du roman suscitent de l'empathie. À un moment ou l'autre, ils se révèlent tantôt lâches, tantôt violents. Mais très souvent bêtes et veules. Il n'y a donc pas de héros sur la continuité du roman. Si bien que chaque personnage a son moment de méchanceté, son étincelle de compassion, son morceau de bravoure …comme tout un chacun en ce bas monde (même Gandhi ? oui, même Gandhi). Et Thomas Gunzig d'avouer une réelle connivence avec tous ces personnages dont il a respecté la logique interne.
Son style relativement visuel est très probablement nourri par une enfance passée devant la télévision et la vision de nombreux films en DVD. Sans oublier que l'ennui pendant les études primaires l'a poussé vers la lecture, surtout la science-fiction (Isaac Asimov, Philip K. Dick, A.E. van Vogt, mais pas J.G. Ballard, m'a-t-il répondu !). Plus tard, Boris Vian et de nombreux auteurs américains, Charles Bukowski, Hubert Selby, John Fante, J.D. Salinger, pour leur humour, pour leur marginalité assumée, pour leur caractère sexué. Les classiques seront lus plus tard, après les études. Aujourd'hui, il lit aussi bien Guy de Maupassant que Fédor Dostoïevski, sans oublier Murakami (Haruki ET Ryo). Voilà ce qui a nourri l'homme et l'auteur dont l'humour, ce soir, a été souvent rapproché de celui de Pierre Desproges. Et, nous dit-il, sa lucidité face à notre monde occidental conduit naturellement à cette vision et à cette expression de celle-ci que beaucoup qualifieront de pessimiste. L'écrivain tente, humblement, tout doucement, de générer une part de bonheur aussi infime soit-elle pour le lecteur.
Le succès des ventes vient le cueillir. Mais le rassure, un peu …
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Il ne sera pas un coup de coeur mais un très bon moment de plaisir. Un roman qui part dans tous les sens, soit on n'aime soit on déteste, moi j'apprécie; C'est un roman qu'on ne peut mettre dans aucun genre et le mettre dans tous aussi. Policier, critique de notre société, SF, histoires de vie, tout s'emmêle mais tout s'imbrique fort bien aussi. L'histoire est fluide très rythmée. Je craque pour l'humour piquant, pour l'état des lieux de notre monde où Ikea et les modifications génétiques sont tout puissant.
Des personnages et des rencontrent très particulières bercent ce roman, nous donnant des situations des plus cocasses, voir même inattendue.
A lire si vous aimez ce genre de livre qui part dans tous les sens (pourtant avec un très bon fil rouge). Je pense réellement que c'est un livre qu'on aime ou que l'on déteste.
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Ma note : 4/5

Premier coup d'oeil à la couverture intriguante, mademoiselle curiosité palpite!
Format de livre sympathique, je préfère les livres épais mais dont le format dépasse légèrement du poche plutôt que les grands livres plus fins
Chouette couverture, dynamique et sobre à la fois, bien représentative du titre "manuel" de par la police choisie et la mise en scène graphique.
première impression très positive, avec avidité je commence la lecture ...

Pas de prologue, ici on va a l'essentiel. Je sens que le rythme de ce bouquin va être rapide, on ne s'embarrasse pas avec des information préalables ou mise
en condition littéraire, allons au vif du sujet!
Je n'apprécie pas trop le papier choisi, il est râpeux, comme de moindre qualité.

Jean-jean, agent de sécurité(?) chargé de monter une surveillance contre une caissière accusée de passer les articles trop lentement.
( remise en cause de la productivité, culture d'entreprise, tout le monde lié par l'argent doit faire le salaud car peur) etc ... Tous les grands clichés de la société actuelle sont mis en scène, SF vous avez dit ? actualité plutôt et malheureusement d'ailleurs ...
Il est témoin d'un meurtre accident en voulant piéger une caissière que la direction ne savait pas licencier par voie normale.
Non soutenu par sa femme qui ne voit que par elle, il subit le sentiment de frustration qu'elle exorcise dans la violence.

Il m'a fallu attendre la page 128 pour me rendre compte de l'espace temps. Avant cette page, je pensais que le roman était écrit à notre époque.
Le détail révélé ici m'a fait comprendre que l'auteur nous transporte dans un futur proche.
J'aime l'organisation des chapitres, courts, alternant les points de vue pour une même scène en se plaçant alternativement du coté de chacun des protagonistes, avec
un léger décalage de temps qui permet de continuer à avancer dans l'histoire tout en comprenant tous les points de vue. Très intéressante technique.
Sans vouloir dévoiler plus d'éléments de l'histoire, l'auteur présente la manière dont l'humain est mis de coté, je veux dire l'humanisation globale de chacun, au profit de la rentabilité patronale et de l'individualisme poussé à l'extrême et motivé par la progression professionnelle.
Ce sentiment est très présent dans notre société et brillament mis en mots dans ce roman.

Le rythme ralentit peu à peu, j'ai toujours autant de mal à arrêter ma lecture une fois que je m'y plonge mais les scènes sont plus statiques.

Je suis un peu déçue par la dernière partie du roman. La bombe littéraire qui m'était mise entre les mains en début d'ouvrage se transforme en roman beaucoup plus centré sur les histoires d'amour et de désamour de madame tout-le-monde avec juste une pointe de sexe pour se mêler à la tendance actuelle de la mode 50 nuances et consorts.
Dommage, j'aurais préféré continuer sur un éveil de ma conscience, et bien que friande du second degré et au delà, je suis restée sur ma faim ...
J'ai comme l'impression que l'auteur avait un sujet énorme entre les mains, bouillonnait de nous le faire partager ( ce qui expliquerait le rythme effréné des premiers chapitres ) mais que son inspiration s'étiolait petit à petit jusqu'à s'éteindre complètement lors du dernier chapitre.

J'ai néanmoins mis une note élevée car le talent de Thomas Gunzig ne manquait pas et que j'ai vraiment pris du plaisir à lire "Manuel de survie à l'usage des incapables". A mon sens c'est un réel bon livre.
Je l'ai d'ailleurs recommandé à plusieurs de mes connaissances!

Merci à Babelio et aux éditions Au Diable Vauvert pour ce bon moment de lecture et pour la confiance dans ma critique. J'espère avoir été à la hauteur de leurs espérances.
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Pour ne pas changer, le dernier bouquin de Thomas Gunzig ne plonge pas le lecteur dans un optimise débordant. En effet, Manuel de survie à l'usage des incapables se rapproche furieusement d'une dystopie, en cela que son histoire prend place dans un avenir proche et cauchemardesque, à moins que ce ne soit dans un présent parallèle complètement foireux. En effet, omniprésente course au profit et manipulations génétiques délirantes sont les ingrédients principaux de ce joyeux monde imaginé par l'auteur bruxellois.

C'est là-dedans que se débat Jean-Jean, terne agent de sécurité marié à une femme reptile envers qui il éprouve plus de crainte que d'amour. Sa vie bascule le jour où le supermarché pour lequel il travaille décide de remercier une caissière âgée et sans histoire pour cause de rentabilité défaillante. Pas de chance, non seulement le licenciement se passe mal mais en plus la brave caissière s'avère être la mère de quatre enfants. Ces derniers, des jeunes loups marginaux du genre dangereux sont soudain pris du besoin irrépressible de la venger. Un responsable est tout désigné : Jean-Jean. Et toute sa famille, tant qu'à faire. Nous avons donc affaire à une galerie de personnages pour le moins intéressante plongée dans une intrigue passablement sordide.

Manuel de survie à l'usage des incapables oscille en fait entre le thriller et la grosse blague. Rien ne paraît vraiment sérieux dans ce livre. Les peurs et dérives de notre époque y sont amplifiées et déformées à l'extrême, comme dans Kuru et Mort d'un parfait bilingue, pour ne citer qu'eux. Cela le rendrait presque un peu décevant, vu que ces ficelles ressemblent finalement à celles que l'auteur a déjà utilisées dans le passé et que j'ai, au final, lu ce à quoi je m'attendais. Cela dit, c'est aussi un compliment : ça signifie que j'ai passé un bon moment malgré tout. Aucune raison, donc, de cracher dans la soupe outre mesure : s'il pouvait y avoir plus d'auteurs francophones comme Thomas Gunzig, je serais vachement content.
Lien : http://nonivuniconnu.be/?p=1..
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Manuel de survie à l'usage des incapables de Thomas Gunzig est un roman à la fois drôle, triste et réaliste. On retrouve également une pointe de culture qui ne laisse pas indifférent. L'auteur passe facilement d'un personnage à l'autre, d'une séquence à l'autre mais il n'y a de rien de négatif là-dedans car justement tout est lié. On y évoque notre société de consommation. Une réalité bien omniprésente… le livre se lit facilement et rapidement.
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