Trois nouvelles pour un recueil, schéma courant largement usité par
Jim Harrison entre ses romans.
Julip, l'Homme aux deux cents grammes et le Dolorosa beige composent ce bouquin, trois univers dans lesquels l'auteur aime à couler sa prose inlassablement.
Julip tout d'abord, figure féminine, sorte de réplique à
Dalva - quelle héroïne d'Harrison réussira dorénavant à ne pas se confronter à son idéal modèle ? - , jeune femme dans la vingtaine, confrontée aux tourments de son frère cadet, Robert, victime innocente de la cruauté d'un monde pour lequel il n'aura reçu aucun des codes de décryptage. Une mère absente, un père "suicidé" alcoolique : tout concorde à faire des deux enfants des poulains idéaaux pour la psychanalyse.
Harrison trouve le ton juste pur aborder
Julip. Elle est vivante, vive et donc ultra sensuelle, sexuelle même, quand elle s'oublie. Elle figure la femme rêvée : volontaire, indépendante, droite, faussement naïve, paumée parce qu'on l'est tous, éprise de justice, éphémére comme sait l'être la jeunesse, bref,
Julip est une femme selon Big Jim.
L'Homme aux deux cents grammes nous reconduit dans la compagnie de Chien Brun, héros foutraque et récurrent des nouvelles d'Harrison. Ici, il est question de loi, d'interdits et bien entendu de folie, laquelle préside évidemment à toutes les aventures de Chien Brun.
Une fois encore Harrison réussit à nous captiver pour des aventures plus abracadabrantes les unes que les autres, mais tel est le monde selon Chien Brun, lecteur, tu te dois de t'y comformer si par bonheur, ta vie sclérosée de lecteur devait croiser la voie royale tracée par ce clochard céleste.
La troisième et denrière nouvelle nous entraine dans un territoire une nouvelle fois ultra jalonné par l'auteur : la dépression, et son pendant, la renaissance. Habituellement moins client de son propos, c'est sans surprise que le Dolorosa Beige figure pour moi le moins bon du recueil, mais sans doute ne suis-je pas fortement passionné par le monde universitaire et ses scléroses en forme de ricochets sous psychotropes. Une belle histoire indéniablement, mais tout comme David Burkett me touchait moins que
Dalva, les errements post "crise de la cinquantaine" de Philip Caulkins me chamboulent moins que ceux de
Julip. Je suis un homme que voulez-vous, un Philip Caulkins de moins équivaut bien entendu à un concurrent de plus au tapis.