1650 - Boston, dans une société puritaine, Hester Prynne, se voit marquer non pas au fer rouge mais à pire finalement. Elle devra porter la lettre A en rouge, bien visible sur ses vêtements, car elle a mis au monde une enfant Perle, alors que son mari a disparu et ne veut révéler le nom du géniteur.
A travers cette histoire, l'auteur dénonce l'hypocrisie et le puritanisme d'une certaine société, soi-disant bien pensante, réglant peut être ses comptes avec sa propre famille, son grand-père ayant été un des juges assesseurs du célèbre procès des Sorcières de Salem (si vous ne connaissez pas je vous mets le lien ICI).
Hester va faire de cette marque d'infamie un objet artistique : elle va la broder de façon remarquable, elle la portera comme on porte un emblème, en faisant une sorte de force. Sa fille, Perle, jolie, vive deviendra sa seule richesse et au lieu de se cacher ou de vivre dans la honte, elle décide de rester au sein de la communauté qui l'a condamnée.
Depuis des années, elle considérait de ce point de vue spécial les institutions humaines et tout ce que les prêtres et les législateurs avaient établi, exerçant sa critique sans plus de respect que l'Indien n'en ressentait à l'égard du rabat du prêtre, de la robe du juge, du pilori, de la potence ou de l'église. le sort qu'on lui avait imposé l'avait libérée.
La lettre écarlate était un passeport pour les régions où les autres femmes n'osaient pas s'aventurer. le honte, le désespoir, la solitude, tels avaient été ses instructeurs, rébarbatifs et sévères ; et ils l'avaient faite forte, mais sans discernement. (p160)
Dans une introduction assez longue, le Directeur du Bureau des Douanes (mais on peut penser que
Nathaniel Hawthorne s'est glissé dans la peau de ce personnage), plante le décor, les mentalités, les circonstances de la découverte d'un manuscrit relatant les faits dont il se fait le porteur ainsi que d'un morceau d'étoffe rouge portant la lettre A.....
Hester est une femme d'une immense force morale, n'évitant aucun regard ni affront. Elle assume totalement ses actes, ne regrette rien et reste silencieuse sur sa liaison. Elle est une héroïne intemporelle, son histoire peut s'appliquer à toute société à oeillères, mal pensante et repliée sur elle-même, associant tout acte au satanisme, omniprésent. Les personnages masculins sont plus ambigus, faibles et troubles. L'un, le révérend Arthur Dimmesdale, apparaît comme fragile, tourmenté et faible et le médecin Roger Chillingworth, est lui un être fourbe et manipulateur.
Certain ne porte pas l'infamie visible mais l'endure comme un fardeau invisible. Est-il plus facile de vivre au grand jour en assumant ses fautes (si faute il y a) que de vivre libre mais portant le poids de la culpabilité ?
Tu ne peux pas te rendre compte, Hester, du soulagement que j'éprouve (...) à regarder des yeux qui me voient tel que je suis. Si j'avais un seul ami - serait-ce même un ennemi cruel - vers qui je puisse me tourner chaque jour, lorsque je suis écoeuré des louanges qu'on me donne, et qui me reconnaisse comme le plus méprisable des pêcheurs, il me semble que mon âme en serait revivifiée. Ce peu de vérité me sauverait. Mais, hélas ! il n'y a autour de moi que fausseté, vide et mort ! (p153)
Pamphlet sur une société puritaine, intégriste qui juge, condamne, hypocrite n'hésitant pas à bénéficier du don d'Hester pour la couture et la broderie, faisant appel à elle même au plus haut degré mais lui rappelant à tout moment, comme
la lettre écarlate, son "crime".
Ce roman connut un grand succès dès sa sortie, l'auteur réglant peut-être lui-même ses comptes avec le passé de sa famille et l'on y trouve les thèmes de la vengeance et des remords qui en font un récit à multiples tiroirs, avec des secrets, des révélations et des rebondissements.
J'ai pris du plaisir à cette lecture qui peut encore malheureusement trouver un écho dans nos sociétés modernes, malgré une écriture un peu datée, belle mais parfois ampoulée, pompeuse. L'auteur en fait une réflexion sur le comportement humain, sur l'amour et la haine.
N'est-il pas curieux qu'on puisse se demander, lorsqu'on se donne la peine de réfléchir, si la haine et l'amour ne sont pas la même chose au fond ? L'un et l'autre sentiment supposent un degré avancé d'intimité et de connaissance du coeur. L'un et l'autre font dépendre n individu d'une autre personne pour sa vie émotive. L'un et l'autre laissent dans la désolation celui qui aime ou hait ardemment lorsqu'il perd l'objet de son amour ou de sa haine. (p213)
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