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EAN : 9791095772859
96 pages
Anamosa (06/02/2020)
4.27/5   15 notes
Résumé :
À quoi sert le mot démocratie – ou plutôt à qui sert-il ? Dans cet essai incisif, il s'agit de redonner toute sa force au mot, en mettant en lumière les différents plans sur lesquels se joue le combat autour de la démocratie entre les puissants et le peuple, afin d'éclairer ce qui fait démocratie.

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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Un petit livre qui propose une réflexion très éclairante sur le sens du mot « démocratie » en mettant en lumière des interprétations paradoxales liées à la difficulté de la mise en oeuvre de la démocratie. J'en recommande la lecture à tous, tout en suggérant de la compléter par celle d'un autre petit ouvrage fort accessible, « Dis, c'est quoi la démocratie ? » de Vincent de Coorebyter.

Voici un genre de livre que j'affectionne tout particulièrement: celui où l'auteur prend le temps de faire le tour d'un mot courant, pour aider le lecteur à réfléchir à sa signification en confrontant des interprétations différentes qui peuvent s'avérer contradictoire (je ne résiste pas à l'envie de mentionner l'un de mes préférés du genre : « Le sexe ni la mort. Trois essais sur l'amour et la sexualité » d'André Comte-Sponvile, qui disserte plus longuement sur le mot « amour »).

Donc, la démocratie, c'est le pouvoir du peuple. Mais quel pouvoir ? Et aussi, quel peuple ?

Parce que l'auteur commence par attirer notre attention que nos démocraties libérales sont en fait des oligarchies où ce n'est pas le peuple qui gouverne, mais bien ses représentants. Dans ce cas, le mot démocratie devient synonyme d'épreuve électorale. Dans une démocratie réelle, le peuple devrait idéalement pouvoir participer à toutes les étapes de la prise de décision. Mais en pratique, comment cela pourrait-il être mis en oeuvre ? D'autant plus, que le concept de souveraineté populaire s'appuie sur une universalité des citoyens, ce qui pose le problème des minorités. Qui est « le » peuple ? Quand on commence à y réfléchir sérieusement, la mise en oeuvre de la souveraineté populaire semble vite inextricable et on comprend mieux l'apparition des démocraties représentatives.

L'auteur disserte assez longuement des partis politiques. Sa discussion est générale, elle ne vise pas à comparer les différents partis. le début de son propos a des connotations négatives: le parti y est présenté comme un « outil de dépossession du pouvoir du peuple au profit d'une élite politique ». Il met en avant les luttes de pouvoir et les intérêts particuliers de ceux qui entrent en politique. « Le membre d'un parti ne plus à l'intérêt général mais pense en termes de pour et de contre. Il prend parti. »

Néanmoins, dans les chapitres suivants, l'auteur donne aux groupements citoyens un place fondamentalement positive. En effet, même si nos démocraties sont, dans les faits, des oligarchies, le caractère démocratique de ces régimes réside dans le fait que le pouvoir est contestable. « Les rapports de pouvoir séparent et distinguent, mais par là ils constituent des sujets collectifs, qui peuvent se découvrir pareillement soumis aux mêmes dispositifs, et peuvent choisir, ensemble, de les refuser. La démocratie, en ce sens a la fois politique et social, est le pouvoir des gouvernés qui se découvrent collectivement gouvernés, et qui dans cette découverte refusent ensemble l'assujettissement. » Et l'auteur termine son propos en lançant un appel au rôle fondamental que devraient avoir les partis politiques: « Tout l'enjeu d'une démocratie réelle, fondée sur la souveraineté du peuple, serait de garder des partis leur capacité à donner de la visibilité et du pouvoir aux dominés, tout en en éliminant le caractère oligarchique, leur soumission aux élites politiques. »

Je vous laisse découvrir les autres réflexions fort intéressantes de livre dont le petit format ne laisserait pas le lecteur s'attendre à une telle richesse. Je pense en particulier aux paragraphes qui concernent les critères de choix des électeurs.

Voilà un livre à lire et à relire. Je remercie vivement les éditions Anamosa de m'avoir fait découvrir ce volume de leur collection « Le mot est faible », dans le cadre d'une opération Masse critique de Babelio.

Dans une prochaine critique, je vous recommanderai de compléter la lecture du livre de Samuel Hayat par celle d'un autre petit livre tout aussi accessible (si pas plus) de mon éminent compatriote Vincent de Coorebyter, « Dis, c'est quoi la démocratie ? », qui ajoute quelques réflexions sur les difficultés pratiques de l'organisation d'un régime démocratique représentatif, par exemple en comparant les scrutins proportionnels et les scrutins majoritaires.
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Merci à Babelio pour l'octroi de ce petit ouvrage dans le cadre de Masse critique. Ainsi qu'aux éditions anamosa pour l'envoi et le petit texte d'accompagnement.
Cette collection que je découvre a pour but de questionner les mots détournés par la propagande des dominants. « Réforme » dans la bouche de nos maîtres signifie aujourd'hui régression sociale, ou casse d'un acquis social. Cette collection qui met en exergue cette phrase de Georges Orwell : « La pire chose que l'on puisse faire avec les mots, c'est de capituler devant eux » décline quelques grandes notions comme : « école », « peuple », « révolution » . . .
L'ambition : des ouvrages courts, incisifs, s'emparant d'un mot dévoyé par la langue au pouvoir, l'arracher à l'idéologie qu'il sert et le rendre à ce qu'il veut dire.
Samuel Hayat, chercheur en sciences politiques, s'attaque donc à la démocratie.
L'ouvrage est court, condensé. Je dois l'avoir lu trois fois en tout tellement certains passages méritent une relecture assidue pour qu'un esprit comme le mien soit certain d'en avoir saisi le sens. S'il y a un point faible à cet ouvrage c'est cela, cette difficulté intrinsèque. Car on peut se demander quel est public visé ? Si ce sont des lecteurs avertis, on peut imaginer qu'ils sont au fait de ces problématiques modernes, si ce sont des plus jeunes, dont le souhait serait de s'informer, de se confronter à une pensée sortant des sentiers battus médiatiquement, c'est peut-être un peu ardu. En même temps (langage djeune) était-ce possible de faire plus simple sur une problématique aussi complexe ? pas sûr . . .
Le gros point fort est la puissance des idées déployées au fil des pages. Quelques citations bibliographiques mais pas trop, des exemples très limités, un rouleau compresseur conceptuel . . .
Le tout coupé de pages imprimées en gros caractères noir sur fond blanc ou l'inverse, qui reprennent des phrases importantes de la démonstration, permettant une assimilation des idées avancées.
Je m'en vais donc à partir d'ici le résumer modestement, en m'appuyant sur les grands découpages en chapitres de cet essai. Si vous souhaitez plus de rigueur, cessez donc de lire et procurez-vous le livre (et ses petits frères éventuellement).
Tout commence avec le pouvoir du mot « démocratie » : Mot ambigu, regroupant deux catégories l'une à consonance politique et l'autre sociale, rarement pensées ensemble. Mot qui met en tension la diversité des conditions et l'unité des citoyens, l'unanimité de la volonté populaire et la conflictualité inhérente aux distinctions de classe, de races, de genre.
L'auteur interroge ensuite l'opposition entre oligarchie et démocratie : l'existence d'une classe de politiciens professionnels, quand bien même ils seraient élus, pose un problème démocratique car ils tendent à fonctionner comme une caste et à servir leurs propres intérêts.
Il semble donc qu'il soit nécessaire d'instaurer une souveraineté populaire et de poser la question de ses limites. C'est essentiellement le problème de la majorité qui doit tenir compte de la minorité. Donc se pose le problème de l'organisation, de l'expression des divisions du peuple.
Le gouvernement du peuple entraîne une réflexion sur l'application concrète de la loi : plusieurs pistes existent : surveillance des autorités (ce que Pierre Rosenvallon appelle la contre démocratie), attribution de pouvoirs aux citoyens intéressés par telle ou telle loi, tirage au sort etc . . .
Le règne de l'opinion : tout gouvernement est intrinsèquement oligarchique. Mais le titre selon lequel il est désigné : plus grande sagesse, plus grande richesse, meilleure naissance revient finalement au peuple via l'élection. Il y a nécessité pour les gouvernants de fonder leur pouvoir sur les opinions changeantes et antagonistes des masses.
Le pouvoir de la plèbe : Les pauvres sont de fait structurellement mis dans l'impossibilité d'agir, d'entrer en compétition politique (il suffit d'ailleurs de regarder nos « représentants » dans les deux assemblées . . .). La démocratie peut être alors considérée comme un danger car le peuple, le « demos » dans son sens social (la plèbe), a intérêt au changement alors que les riches, que les élections de représentants désignent ont intérêt à préserver la société inégalitaire.
Politiser les divisions sociales : Un parti qui est censé représenter une minorité peut être, dans une démocratie, traversé par des fractures internes. La démocratie, en ce sens permet de révéler les relations de pouvoir à l'intérieur des groupes sociaux, de les exposer et de les contester.
Refuser collectivement d'être gouvernés : de même que dans la sphère de l'état la démocratie consiste à donner un pouvoir égal à n'importe qui, dans les relations sociales cela revient à faire en sorte que personne ne soit soumis à personne. le refus d'être soumis à un rapport de pouvoir peut mener à l'anarchie. Aussi doit-il être collectif, refuser ensemble l'assujettissement peut prendre des aspects divers : manifestations, rebellions, soulèvement . . . ou s'il s'agit de populations subalternes, se réfugier dans des cultures populaires, illisibles par les dominants. En bout de course, la possibilité de faire sécession d'avec le système instauré par les dominants.
Pour une démocratie réelle, reprendre parti : Les gouvernements représentatifs se sont construits contre la démocratie et craignent de ce fait l'expression directe de la volonté du peuple. Il n'existe en effet actuellement aucune démocratie réelle au sens ou le peuple participe à l'élaboration des lois, contrôle les instances de régulation que sont la police et la justice.

Voilà, ce petit tour d'horizon effectué, il reste à continuer à débattre, comme le font les êtres humains depuis fort longtemps, et à espérer en un avenir meilleur pour nos enfants, avec plus de démocratie dans les deux sens évoqués par Samuel Hayat, avec des outils nouveaux et des objectifs nouveaux, à définir collectivement.
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La décennie commencée avec les révolutions du Printemps arabe, s'achève « par un embrasement à la géographie éclatée », touchant tous les régimes politiques, autour d'une demande de justice sociale et d'une contestation des élites dirigeante dénoncées comme une oligarchie ne servant pas les intérêts des citoyens. Partout, les manifestants réclament la démocratie, une démocratie réelle, contestent le modèle de la démocratie libérale. Samuel Hayat, chercheur en science politique au CNRS, interroge le bien fondé de l'utilisation du terme démocratie par les régimes qui le monopolisent pour légitimer leur pouvoir, les puissances européennes qui se livraient à l'horreur de l'entreprise coloniale et les États-Unis qui pratiquaient l'esclavage puis la ségrégation raciale. Une partie des élites politiques considèrent préférable de continuer à décider seules au prétexte de la technicité supposée trop grande des questions politiques. À l'opposé, le « principe démocratie » correspond aux revendications d'autonomie des citoyens et à la capacité collective à s'organiser, à prendre directement les décisions. Ainsi, un profond sentiment de trahison des classes populaires par l'État justifie leur révolte au nom d'une conception sociale de la démocratie.
(...)
Essai bref mais percutant. En allant à l'essentiel, après une exploration des termes dont le sens ne cesse de se dédoubler et de s'entremêler, dans une démarche à la fois historique et philosophique, Samuel Hayat, parvient à dégager l'essence de la démocratie réelle.

Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Jeune collection très intéressante, dont le principe est de s'intéresser à un mot et de lui redonner son vrai sens. La présentation annonce d'emblée la « couleur » : « il s'agit de s'emparer d'un mot dévoyé par la langue au pouvoir, de l'arracher à l'idéologie qu'il sert et à la soumission qu'il commande pour le rendre à ce qu'il veut dire. ».
En l'occurrence, on pourrait parlait de ses vrais sens, au pluriel, tant le mot « démocratie » peut désigner des idées différentes. L'auteur distingue en particulier son sens politique, c'est-à-dire les élections et l'élaboration des lois, de son sens social (la défense des intérêts des plus démunis). Idéal à atteindre (et inatteignable) dans le monde actuel, la démocratie, en tant que pouvoir du peuple, de la plèbe, était pourtant redoutée par beaucoup de penseurs avant le XXe siècle. D'après l'auteur, elle permet aussi aux groupes sociaux dominés de se constituer et s'exprimer, et est finalement un refus collectif d'être dominé.
Livre court et très clair, particulièrement bien construit, il est complété par une bibliographie qui permet au lecteur qui le souhaite d'approfondir le sujet. Cet ouvrage a le mérite de faire le lien avec l'actualité des soulèvements en cours dans le monde et en France, notamment les Gilets jaunes.
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Une collection dirigée par Christophe Granger

« La pire chose que l'on puisse faire avec les mots, c'est de capituler devant eux »
George Orwell

C'est avec cette phrase que l'éditeur définit la collection avant de la présenter plus amplement.

Ces petits indispensables, m'étaient inconnus, je les ai découverts dans une rencontre en ligne avec les éditions Anamosa (VLEEL)

Belle surprise pour moi qui pense que: qui contrôle les mots contrôle l'univers (ou l'épice si nous vivons sur Dune).

Trembler, avoir peur ou être heureux sont des sentiments, des états d'esprit qui peuvent être générées avec des « simples mots »

Le consensus ou le rejet sont le fruit des actions mais aussi, parfois plus, des mots.

Que faire alors si notre armoire à mots et à moitié vide ? si nous ne pouvons pas définir notre univers.

Fuir les mots est certainement la pire des stratégies, et pourtant la plus fréquente…

Le mots incompris génèrent un un état d'infériorité ressenti. J'ai parfois envie de crier « merde » (c'est aussi un mot) « arrête de dire » « est-ce que je vais comprendre ce livre » les politiciens..tu le comprends toi ? » ( oh que oui, pour certains, bien trop à mon goût).

Les mots sont nos amis ils définissent tout avec froide précision ou romantique lyrisme.

Cette belle collection est une sorte de mini étude thématique sur les mots qui créent nos interactions avec, les instituts, la société. L'Histoire, La démocratie, L'Universalisme …Anamosa les liste et présente tous sur son site.

Moi j'ai été frappée par la « collectionite-livresque » (pas un mot existant, pour le moment). En plus l'esthétique épurée qui caractérise cette série de livres me plaît beaucoup.

Piochez au hasard, choisissez l'ordre, faite une liste ( même de baptême ou autre cérémonie enfantine, il faut commencer tôt !) mais ne passez pas à côté des mots. Si vous les connaissez tous car vous apprenez tous les jours une partie d'un dictionnaire, vous avez les livres parfaits pour une analyse approfondie. Anamosa a créé une lecture agréable à transformer, si nécessaire, en outil formidable !
Lien : https://blog.lhorizonetlinfi..
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Une deuxième nécessité, pour une démocratie réelle, est d'organiser démocratiquement la division du peuple, contre les fantasmes d'un peuple unifié.
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Il n'a jamais existé de véritable Démocratie, et il n'en existera jamais.
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Même les mots semblent devoir perdre leur sens. La révolution est devenue l’étendard des conservateurs, la régression se présente sous les atours du progrès, les progressistes sont les nouveaux réactionnaires, le salaire est un coût, le salariat une entrave, la justice une négociation et le marché une morale.
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Là est le problème constant que posent les partis à tous ceux qui veulent le règne des plus sages, des plus compétents, des plus vertueux, ou du peuple conçu comme une entité unifiée : les citoyens qui entrent en politique le font avec des intérêts particuliers et des opinions arrêtées, et s’ils s’associent avec des personnes partageant leurs intérêts et leurs opinions, ils sont censés perdre nécessairement de vue l’intérêt général.
[...]
Les partis, en affaiblissant l’idée d’un peuple uni par une seule volonté, voire une seule culture, confèrent aux régimes démocratiques un pluralisme profondément désirable, mais constituent aussi d des outils de dépossession du pouvoir du peuple au profit d’une élite politique.
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Initialement pensés contre la démocratie, les gouvernements représentatifs en ont progressivement adopté le nom. Le mot démocratie devenant synonyme d’épreuve électorale, il s’est trouvé peu à peu inséré dans un système de significations et de pratiques centrées sur l’élection : les campagnes électorales, les débats entre candidats, les meetings, le vote. Ces multiples expériences politiques, grandes et petites, ont fait incorporer aux citoyens un certain sens du mot démocratie, centré sur la compétition électorale, alors même que celle-ci avait été initialement pensée par les du gouvernement représentatif comme distincte de la démocratie.
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Videos de Samuel Hayat (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Samuel Hayat
Rencontre avec Samuel Hayat autour de son ouvrage Démocratie, éditions Anamosa Collection Le mot est faible. Samuel Hayat- Salon du livre d'Arras 2020
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