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Résumé :
Ce siècle est grand et fort. Un noble instinct le mène.Partout on voit marcher l’idée en mission ;Et le bruit du travail, plein de parole humaine,Se mêle au bruit divin de la créationPartout, dans les cités et dans les solitudes,L’homme est fidèle au lait dont nous le nourrissions ;Et dans l’informe bloc des sombres multitudesLa pensée en rêvant sculpte des nations.L’échafaud vieilli croule, et la Grève se lave.L’émeute se rendort. De meilleurs jours sont prêts.Le p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
La voie intérieure de la poésie lyrique cède ici aux Voix intérieures, celles mêlées du poète, de la foule et de l'Histoire. Dans sa préface, Victor Hugo précise son projet poétique :


« le poète a une fonction sérieuse. Sans parler même ici de son influence civilisatrice, c'est à lui qu'il appartient d'élever, lorsqu'ils le méritent, les événements politiques à la dignité d'événements historiques. II faut, pour cela, qu'il jette sur ses contemporains ce tranquille regard que l'histoire jette sur le passé; il faut que, sans se laisser tromper aux illusions d'optique, aux mirages menteurs, aux voisinages momentanés, il mette dès à présent tout en perspective, diminuant ceci, grandissant cela. »

Concrètement, l'évolution des Chants du crépuscule à ce recueil est seulement subtile. Aux engagements parfois passionnés de l'auteur pour certaines situations historiques marquantes se découvre un regard plus détaché et critique. le rôle de pédagogue s'affirme et l'événement ponctuel devient prétexte au sermon du guide, par exemple dans « Sunt lacrymæ rerum », une ode de 400 vers dédiée à Charles X :


« A ce bruit qui jadis vous eût fait rugir tous
— le roi de France est mort ! – d'où vient qu'aucun de vous,
Comme un lion captif qui secouerait sa chaîne,
Aucun n'a tressailli sur sa base de chêne,
Et n'a, se réveillant par un subit effort,
Dit à son noir voisin : — le roi de France est mort ! –
D'où vient qu'il s'est fermé sans vos salves funèbres,
Ce cercueil qu'on clouait là-bas dans les ténèbres ? »


Et le poète de corriger les torts :


« Vous vous taisez. – Mais moi, moi dont parfois le chant
Se refuse à l'aurore et jamais au couchant,
Moi que jadis à Reims Charles admit comme un hôte,
Moi qui plaignis ses maux, moi, qui blâmai sa faute,
Je ne me tairai pas. Je descendrai, courbé,
Jusqu'au caveau profond où dort ce roi tombé ;
Je suspendrai ma lampe à cette voûte noire ;
Et sans cesse, à côté de sa triste mémoire,
Mon esprit, dans ces temps d'oubli contagieux,
Fera veiller dans l'ombre un vers religieux ! »


On comprend que les critiques contemporains de Victor Hugo lui aient souvent reproché la prétention revendiquée de ses ambitions. Sans doute également ne trouvaient-ils pas de satisfaction poétique à lire ses poèmes –ce qui est également mon cas. Les poèmes sont souvent longs, parfois musicaux dans leur écriture formelle mais provoquant rarement la secousse véritable du rythme cardiaque. Lorsqu'ils sont courts, ils empruntent souvent aux lieux communs de la poésie lyrique, oubliant au passage de les densifier à nouveau. et ne transmettent pas de véritable émotion.


Les Voix intérieures méritent quand même lecture pour qui souhaiterait connaître l'évolution de la conception poétique de Victor Hugo entre les Chants du crépuscule et les Rayons et les ombres. On y présent également la relative nouveauté d'une poésie aux strates temporelles ajoutées : entre l'antiquité virgilienne et le fantasme de siècles apocalyptiques, les événements de l'actualité contemporaine au poète se muent parfois presque en prophéties.
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Contrairement aux deux recueils précédents (« Les Feuilles d'automne » - 1831 ; « Les Chants du Crépuscule » - 1835), la composition des « Voix intérieures » est plus ramassée dans les temps, puisque les poèmes qui y figurent ont tous été écrits entre 1835 et 1837. Mieux, 23 des 32 poèmes du recueil ont été écrits dans la seule année 1837.
Contrairement, également, aux recueils précédents, ce recueil comporte une dédicace :
« A Joseph-Léopold-Sigisbert, Comte Hugo, Lieutenant-général des armées du Roi…. Son fils respectueux, V. H. »
Cet hommage du fils au père est assorti d'une notation dans le panégyrique du général Hugo : « Non inscrit sur l'Arc de l'Etoile ». Dans sa préface, le poète « signale une omission, et, en attendant qu'elle soit réparée où elle doit l'être, il la répare ici autant qu'il est en lui ».
D'autres grands thèmes signalent ce recueil, moins importants que ceux qui le précèdent ou que ceux qui vont suivre, mais tout aussi intéressants : la politique, en fait est assez peu présente, hormis dans les premiers poèmes (en particulier l'imposant – à plus d'un titre – « Arc de triomphe »), mais l'inspiration amoureuse est permanente (ici Juliette a bel et bien supplanté Adèle), l'injustice sociale (une des obsessions de Victor Hugo) lui donne une fois de plus l'occasion de se pencher sur les pauvres et les malheureux, et toujours c'est la célébration de la Nature qui constitue la trame principale du roman. Relisez le poème « A un riche », on y trouve quelques vers admirables :
« Que fais-tu donc ici ? Jamais on ne te voit,
Quand le matin blanchit l'angle ardoisé du toit,
Sortir, songer, cueillir la fleur, coupe irisée
Que la plante à l'oiseau tend pleine de rosée,
Et parfois t'arrêter, laissant pendre à ta main
Un livre interrompu, debout sur le chemin,
Quand le bruit du vent coupe en strophes incertaines
Cette longue chanson qui coule des fontaines ».

La plupart des poèmes sont en alexandrins et en rimes classiques, mais parfois le poète se laisse aller – comme il en a pris l'habitude depuis les « Odes et ballades » - à utiliser d'autres formes comme cette belle chanson, écrite en pentamètre (vers de cinq pieds) :

« Une nuit qu'on entendait la mer sans la voir »

« Quels sont ces bruits sourds ?
Ecoutez vers l'onde
Cette voix profonde
Qui pleure toujours
Et qui toujours gronde,
Quoiqu'un son plus clair
Parfois l'interrompe…
Le vent de la mer
Souffle dans sa trompe ».

« Les Voix intérieures » n'est pas le recueil le plus connu de Hugo, ni le plus riche, ni le plus représentatif, sans doute, de son auteur, mais il nous fait entendre sa voix – qui n'est pas qu'intérieure -, profonde et généreuse, sensible et mélancolique, et toujours intensément humaine.
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Par Dieu et ces instants de joies et de larmes, nos montagnes s'érigent et s'effondrent.

Nos pas tracent ses chemins qui font notre vie, les ombres s'effacent puis, de nouvelles pages s'écrivent.

Les rimes se construisent et se mettent à résonner de chapitres en chapitres à découvrir.
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Citations et extraits (38) Voir plus Ajouter une citation
A l'Arc de triomphe

Oh ! Paris est la cité mère !
Paris est le lieu solennel
Où le tourbillon éphémère
Tourne sur un centre éternel !
Paris ! feu sombre ou pure étoile !
Morne Isis couverte d'un voile !
Araignée à l'immense toile
Où se prennent les nations !
Fontaine d'urnes obsédée !
Mamelle sans cesse inondée
Où pour se nourrir de l'idée
Viennent les générations !

Quand Paris se met à l'ouvrage
Dans sa forge aux mille clameurs,
A tout peuple, heureux, brave ou sage,
Il prend ses lois, ses dieux, ses moeurs.
Dans sa fournaise, pêle-mêle,
Il fond, transforme et renouvelle
Cette science universelle
Qu'il emprunte à tous les humains ;
Puis il rejette aux peuples blêmes
Leurs sceptres et leurs diadèmes,
Leurs préjugés et leurs systèmes,
Tout tordus par ses fortes mains !

Paris, qui garde, sans y croire,
Les faisceaux et les encensoirs,
Tous les matins dresse une gloire,
Eteint un soleil tous les soirs ;
Avec l'idée, avec le glaive,
Avec la chose, avec le rêve,
Il refait, recloue et relève
L'échelle de la terre aux cieux ;
Frère des Memphis et des Romes,
Il bâtit au siècle où nous sommes
Une Babel pour tous les hommes,
Un Panthéon pour tous les dieux !

Ville qu'un orage enveloppe !
C'est elle, hélas ! qui, nuit et jour,
Réveille le géant Europe
Avec sa cloche et son tambour !
Sans cesse, qu'il veille ou qu'il dorme,
Il entend la cité difforme
Bourdonner sur sa tête énorme
Comme un essaim dans la forêt.
Toujours Paris s'écrie et gronde.
Nul ne sait, question profonde !
Ce que perdrait le bruit du monde
Le jour où Paris se tairait !
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A ce bruit qui jadis vous eût fait rugir tous
— Le roi de France est mort ! – d’où vient qu’aucun de vous,
Comme un lion captif qui secouerait sa chaîne,
Aucun n’a tressailli sur sa base de chêne,
Et n’a, se réveillant par un subit effort,
Dit à son noir voisin : — Le roi de France est mort ! –
D’où vient qu’il s’est fermé sans vos salves funèbres,
Ce cercueil qu’on clouait là-bas dans les ténèbres ?

[...]

Vous restez là, pensifs, et, tristes, vous rêvez
Aux hommes, froids esprits, cœurs bas, âmes douteuses,
Qui font faire à l’airain tant de choses honteuses !

[...]

Vous vous taisez. – Mais moi, moi dont parfois le chant
Se refuse à l’aurore et jamais au couchant,
Moi que jadis à Reims Charles admit comme un hôte,
Moi qui plaignis ses maux, moi, qui blâmai sa faute,
Je ne me tairai pas. Je descendrai, courbé,
Jusqu’au caveau profond où dort ce roi tombé ;
Je suspendrai ma lampe à cette voûte noire ;
Et sans cesse, à côté de sa triste mémoire,
Mon esprit, dans ces temps d’oubli contagieux,
Fera veiller dans l’ombre un vers religieux !

[...]

Peuple, armée, et la France, et l’Europe vassale,
Par cette vaste main depuis quinze ans pétris,
Demandaient un grand règne, et, pour remplir Paris
Ainsi qu’après César Auguste remplit Rome,
Après Napoléon il fallait plus qu’un homme.

Charles ne fut qu’un homme. A ce faîte il eut peur.

[...]

Tout ce qui souffre est plein de haine.
Tout ce qui vit traîne un remords.
Les morts seuls ont rompu leur chaîne.
Tout est méchant, hormis les morts !
Aussi, voyant partout la vie
Palpiter de rage et d’envie,
Et que parmi nous rien n’est beau,
Si parfois, oiseau solitaire,
Tu redescends sur cette terre,
Tu te poses sur un tombeau !

-Sunt lacrymæ rerum -
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[…] Le poète a une fonction sérieuse. Sans parler même ici de son influence civilisatrice, c'est à lui qu'il appartient d'élever, lorsqu'ils le méritent, les événements politiques à la dignité d'événements historiques. II faut, pour cela, qu'il jette sur ses contemporains ce tranquille regard que l'histoire jette sur le passé; il faut que, sans se laisser tromper aux illusions d'optique, aux mirages menteurs, aux voisinages momentanés, il mette dès à présent tout en perspective, diminuant ceci, grandissant cela. […] II faut qu'il sache se maintenir au-dessus du tumulte, inébranlable, austère et bienveillant; indulgent quelquefois, chose difficile, impartial toujours, chose plus difficile encore […]. Il faut qu'il soit attentif à tout, sincère en tout, désintéressé sur tout, et que, nous l'avons déjà dit ailleurs, il ne dépende de rien, pas même de ses propres ressentiments, pas même de ses griefs personnels; sachant être, dans l'occasion, tout à la fois irrité comme homme et calme comme poète. Il faut enfin que, dans ces temps livrés à la lutte furieuse des opinions, au milieu des attractions violentes que sa raison devra subir sans dévier, il ait sans cesse présent à l'esprit ce but sévère : être de tous les partis par leur côté généreux, n'être d'aucun par leur côté mauvais. La puissance du poète est faite d'indépendance.
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Elle allait et passait comme un oiseau de flamme,
Mettant sans le savoir le feu dans plus d’une âme,
Et dans les yeux fixés sur tous ses pas charmants
Jetant de toutes parts des éblouissements !

Toi, tu la contemplais n’osant approcher d’elle,
Car le baril de poudre a peur de l’étincelle.
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UNE NUIT QU'ON ENTENDAIT LA MER SANS LA VOIR


Quels sont ces bruits sourds ?
Ecoutez vers l'onde
Cette voix profonde
Qui pleure toujours
Et qui toujours gronde,
Quoiqu'un son plus clair
Parfois l'interrompe... -
Le vent de la mer
Souffle dans sa trompe.

Comme il pleut ce soir !
N'est-ce pas, mon hôte ?
Là-bas, à la côte,
Le ciel est bien noir,
La mer est bien haute !
On dirait l'hiver ;
Parfois on s'y trompe... -
Le vent de la mer
Souffle dans sa trompe.

Oh ! marins perdus !
Au loin, dans cette ombre
Sur la nef qui sombre,
Que de bras tendus
Vers la terre sombre !
Pas d'ancre de fer
Que le flot ne rompe. -
Le vent de la mer
Souffle dans sa trompe.

Nochers imprudents !
Le vent dans la voile
Déchire la toile
Comme avec les dents !
Là-haut pas d'étoile !
L'un lutte avec l'air,
L'autre est à la pompe. -
Le vent de la mer
Souffle dans sa trompe.

C'est toi, c'est ton feu
Que le nocher rêve,
Quand le flot s'élève,
Chandelier que Dieu
Pose sur la grève,
Phare au rouge éclair
Que la brume estompe ! -
Le vent de la mer
Souffle dans sa trompe.
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