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Marcelino Truong (Autre)Emmanuel Poisson (Traducteur)
EAN : 9782360135820
243 pages
Riveneuve éditions (01/07/2021)
3.64/5   7 notes
Résumé :
Le récit autobiographique d'un jeune lieutenant sud-vietnamien qui connaîtra la débâcle, les camps de rééducation communiste et l'exil aux Etats-Unis. Ce texte cru et sans complaisance n'est pas sans rappeler Henri Barbusse ou Ersnt Junger. Il fera scandale auprès des réfugiés sud-vietnamiens. Il est la voix déchirante et rare d'un "vaincu".

- Un récit de la retraite et l'annihilation d'une des meilleures unités sud-vietnamiennes, la division de fusi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Attention ! Cette critique est trop longue mais je ne suis pas parvenue à faire autrement. @En mars, fusils brisés aura été pour moi une véritable déflagration !

Je voulais tellement le lire, ce livre. Il m'intéressait parce qu'il y était question de la guerre du Viêt Nam et parce que c'était le récit d'un combattant, celui qui est sur le terrain, vit la guerre, la connaît, la ressent dans ses tripes ; c'est-à-dire une voix rare et a fortiori de ce côté là.

J'en connaissais bien peu sur la guerre du Viêt Nam ; ce que j'en savais venait uniquement du regard des Américains et @En mars, fusils brisés me donnait là l'occasion d'en avoir une autre idée, à travers le prisme d'un soldat de l'armée vietnamienne du Sud.

Et voilà ! @En mars, fusils brisés m'a explosé en pleine figure. 1975, @Cao Xuân Huy, jeune lieutenant du corps d'élite des Marines, combat dans une des plus violentes zones du conflit après la retraite des Américains et très peu de temps avant la prise de Saïgon par l'armée Viêt Cong. Les conditions sont terribles, trop de morts, pas assez de munitions, des supérieurs trahissant leurs hommes, une position totalement impossible à tenir, la défaite, la déroute, le sauve-qui-peut... Ce qui reste de la division des Marines dont @Cao Xuân Huy rejoint la route des civils. L'armée communiste du Nord Viêt Nam a vaincu. @Cao Xuân Huy aura la chance de ne pas être exécuté. Il sera fait prisonnier et rejoindra un camp de « rééducation ».

@Cao Xuân Huy, à travers ses souvenirs – et peu importe si parfois, il y a des failles – nous fait ressentir au plus près possible l'atrocité de la guerre. Je dis « la » guerre sciemment. Ce récit représente son universalité. Les époques, les lieux, les moyens peuvent changer, il n'en reste pas moins qu'une guerre reste une guerre. Toujours un échec. Toujours les pires atrocités commises par les hommes.

Les jeunes futurs combattants, comme l'a été @Cao Xuân Huy, (et quand ils ont réussi à intégrer un corps d'élite, ils sont persuadés et fiers d'avoir fait « leurs preuves »), veulent vivre dans l'action, sont avides de sensations fortes, ont la fougue et la détermination de la jeunesse, le goût de la vie militaire avec son esprit de camaraderie et les coudes toujours serrés avec leur frères d'armes.
Mais quand le combattant, aussi bien préparé soit-il, entre dans le « dur » de la guerre, il s'agit de tout autre chose. La guerre est inhumaine, dantesque, inimaginable.
Le récit de @Cao Xuân Huy est âpre, direct, franc. Rien ne nous est épargné et c'est très bien. Nous ne devons jamais oublier de quelles ignominies l'homme est capable. @En mars, fusils brisés nous fait approcher la réalité parfois insoutenable de ces horreurs : la mer devenue rouge du sang versé, le chaos, les crânes éclatés, l'éparpillement de bouts de chair, des soldats écrasés sous les chenilles de véhicules militaires, des corps découpés par les hélices d'un bateau de secours, des os brisés, des noyades, des hommes abattus sommairement, les bombes, le chacun pour soi au moment où les officiers supérieurs ont pris la fuite, la lâcheté... et nous ressentons (autant que faire se peut), avec @Cao Xuân Huy, son dégoût vis-à-vis de ces trahisons, la haine de ces militaires qui les ont abandonnés en sachant que les survivants, sous peu, seraient aux mains des militaires Viêtcong. ET ce « trop plein » de morts, d'atrocités, d'absurdité, de sang...

@Cao Xuân Huy ne tait rien de ce qui le traverse ; il nous raconte cette défaite, cette déroute avec son franc-parler et nous narre même comment, au milieu d'exactions, de souffrance, de peur, de détestation, il a cherché à se frotter à une femme... Aucune exaction n'est exclue dans une guerre, tous les abus sont permis.

@En mars, fusils brisés est définitivement une grosse claque. Cette expérience terrible que l'auteur partage avec nous a cette légitimité incontestable du fait que c'est SON expérience personnelle, une expérience du pire.
Et après l'avoir lu, il me semble que l'objectif de l'écrivain est atteint. Nous avons pataugé avec lui jusqu'à écoeurement dans l'abomination qu'est toute guerre.

La présentation du livre par Emmanuel Poisson, le traducteur (bravo à lui!) également professeur d'histoire du Viêt Nam à l'université de Paris et François Guillemot, historien à l'Institut d'Asie orientale est passionnante et quand je l'ai relue une deuxième fois, je me suis dit que dans ce texte, « Une guerre sans fard », tout était déjà dit. Les très belles et touchantes pages de l'écrivain Bao Ninh sur sa rencontre avec @Cao Xuân Huy à Hanoï, après les années 2000, sont essentielles, elles aussi. Elles nous aident à mieux comprendre... l'incompréhensible. Et également à concevoir le processus d'écriture de @Cao Xuân Huy. Et aussi : comment est-il possible de vivre après ÇA ? Comment peut-on s'en sortir ?
La post-face de Do Kh., journaliste, essayiste et écrivain du « courant novateur » des lettres vietnamiennes est importante – comme tout dans cet ouvrage ! - et nous permet de mieux nous saisir du contexte de cette guerre fratricide si complexe du Viêt Nam. Tous les spécialistes ayant contribué à l'ouvrage nous en donnent des éclairages cruciaux.

J'ai refermé @En mars, fusils brisés complètement sonnée, le coeur serré, les tripes nouées.

« La guerre est le fruit de la dépravation des hommes. C'est une maladie convulsive et violente du corps politique. » est-il écrit dans la première Encyclopédie française de 1751. Et depuis la nuit des temps, ici ou ailleurs, elle n'a jamais cessé d'être présente.

Je remercie infiniment les éditions RIVENEUVE et BABELIO de m'avoir permis de découvrir cet ouvrage rare et précieux (la superbe couverture est illustrée par @Marcelino Truong, auteur de bandes dessinées dont @Une si jolie petite guerre (autobiographie de @Marcelino Truong – mère malouine et père vietnamien – qui raconte sa République du Viêt Nam du Sud lorsqu'il était enfant, au début des années 60...)).
Et mille fois merci, bien entendu, à l'auteur @Cao Xuân Huy et aussi aussi aux historiens et écrivains, spécialistes du Viet Nâm pour leur contribution si importante à @En mars, fusils brisés.
Ce livre précieux restera dans ma bibliothèque, bien sûr mais surtout dans ma mémoire.
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Nous sommes au milieu des années 1970, la guerre du Viet Nam est sur sa fin, les derniers américains quittent le territoire après plus de 15 ans de guerre. Une guerre perdue militairement sur le terrain comme dans l'opinion.

L'auteur Cao Xuân Huy est alors lieutenant dans un bataillon de Marines du Sud Viet Nam. Il nous relate ici ses souvenirs de cette période avant sa capture avec les siens, enfin ce qui ont la chance d'être encore en vie. Sans romance, l'auteur nous prévient que tout ce qui est écrit dans ce livre est réel, les noms, les lieux et dates.

Cao Xuân Huy nous indique également qu'il n'est pas écrivain. C'est un mémoire de guerre. On ne lui en voudra pas alors et ceci explique en partie cela : malgré une lecture qui se fait toute seule et sans difficultés, je me suis parfois un peu perdu dans ce sac d'infos (noms et/ou surnoms, lieux, 4e bataillon de telle compagnie, telle escouade de telle… arrrf).

Les deux premiers tiers du livre sont un peu brouillons mais le dernier tiers, quelle claque ! Nous sommes embarqués dans cette débandade totale lorsqu'ils sont dos au mur face à l'ennemi communiste, les Viêt-Cong. Débandade également d'une partie de leur hiérarchie. Aussi horrible soit-il, sont décrites ici des scènes atroces où nous parlerons plutôt dans ce contexte de guerre d'instinct de survie des individus que qu'individualisme.

Vous ne ressortirez pas de cette lecture indifférent.
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Merci à Babelio et aux éditions Riveneuve de m'avoir permis de découvrir cet auteur.

Les propos liminaires du traducteur nous préviennent, ce récit n'a pas d'ambition littéraire. Il s'agit juste des souvenirs de l'auteur jetés sur le papier pour témoigner et pour exorciser l'horreur de la guerre. de fait, le texte est très cru. L'auteur ne s'embarrasse pas de fioritures et jettent à la face du monde son incroyable dégoût. Il y a dans sa posture un certain déni de la défaite. Ce texte est troublant et j'en suis sorti assez mal à l'aise. J'en réserverai la lecture à un public expérimenté.

Les deux étoiles s'expliquent par ma déception quant au livre lui-même. La traduction n'est pas toujours fluide, il n'y a pas de carte qui permette de situer l'action et malheureusement, il y a de nombreuses coquilles dans le texte. Tous ces petits accroc à la la lecture, ajoutés à des notes de bas de page pas très bien traitées ne m'ont pas aidé à trouver un quelconque plaisir à cette lecture dont je ressort déçu.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
- Pourquoi toi et lui, vous n'avez pas embarqué ?
Si a éclaté de rire à la manière d'un comédien de l'opéra classique :
- Ha... ha... ha... et toi, pourquoi tu n'as pas embarqué ?
Je riais tout en agitant la tête :
- J'ai failli me noyer.
- Pauvre fils, tu as failli te noyer. Moi je préfère picoler avec pour spectacle des mecs comme toi.
Je hochais la tête en signe de satisfaction.
- Tu as foutrement raison.
Je me suis assis pour picoler. Avec détachement, je contemplais le monde.
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Page 28 et 29, avant le récit de l'auteur, dans le texte de l'écrivain Bao Ninh, Je me souviens de Cao Xuân Hui (2011)

Qui étaient-ils, ces sous-lieutenants et lieutenants ? En lisant Cao Xuân Hui, j'ai découvert le destin si dramatique de ces jeunes. D'une manière ou d'une autre, ils ont grandi entre deux guerres et ont été condamnés à s'engager. […] Pourquoi ? Ce n'était pas par haine de l'ennemi. "Ils étaient mon père, mes frères, ma famille et mes compatriotes", disait-il. Ce n'était pas non plus pour l'amour d'un régime pour lequel il était pourtant prêt à sacrifier sa vie. […] Alors, pourquoi Huy s'était-il battu ?

Une œuvre littéraire n'est jamais une explication de la réalité. […] J le roman de Cao Xuân Huy […] ne m'explique rien, mais il est pour moi un ferment de réflexion sur une guerre à laquelle je n'ai jamais cessé de penser.

Après notre rencontre au bord du Lac, je n'ai plus revu Cao Xuân Huy. Mais j'ai lu bien d'autres de ses livres. Dans un texte […] où il parlait du nouvel an 1973 suite aux accords de paix, j'avais l'impression de revivre notre rencontre.

"...Alors qu'ils venaient de s'entretuer, le cessez-le-feu entra en vigueur et les soldats adverses se jetèrent dans les bras les uns des autres en s'époumonant :

C'est la fin des combats ! C'est la fin de la guerre !
Toan avait beau contenir ses larmes, il ne pouvait les retenir. Mais à quoi bon les retenir ! Il laissa les larmes inonder son visage. Une voix étranglée par l'émotion éclata à ses côtés : "Tu pleures ?"

Toan se retourna et vit un soldat de l'armée du Nord également en larmes. Incapable de parler, ils se serrèrent dans les bras l'un de l'autre."
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- Les mains en l'air, tous !
Une voix a répondu :
- Allez-y, capturez-nous mais nous ne lèverons pas les mains.
- Ces gars-là s'obstinent. S'ils refusent de se rendre, on les flingue.
De nombreuses voix parmi nous se sont élevées.
- Si on est capturés, on sera considérés comme prisonniers. Si on lève les bras, on sera considérés comme redditionnaires. Ne levons donc pas les bras.
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Nous nous sommes précipités ensemble dans le bistrot situé à proximité de la base pour continuer à picoler. Picoler encore et encore, même si nous n'avions plus qu'une cartouche de cigarettes Capstan à échanger contre de l'alcool. Dans le bistrot, j'ai rencontré quelques soldats de Lôi Ho alors en garnison à Da Nang. Ils m'ont appris qu'à minuit, ils devraient sauter sur Ban Mê Thuôt. En mon for intérieur, je trouvais vraiment débile d'envoyer sciemment à l'abattoir ces quelques gars. J'espérais que cela ne cadrait pas avec la vérité. Qu'un commandant décide de sacrifier ses soldats alors qu'ils étaient déjà sur place, ou de commettre involontairement une erreur qui pouvait conduire à l'anéantissement de plusieurs grandes unités, n'était pas en soit répréhensible. Mais la décision d'envoyer un groupe de combattants sur une position que plusieurs divisions étaient incapables de tenir, entraînant dans leur retraite un corps d'armée, était véritablement absurde. Qui portait la responsabilité de ces morts d'une inutilité absolue ? Ces militaires étaient pourtant des hommes et non des jouets aux mains des grands chefs !
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L'intelligence faisait déjà défaut aux dignitaires, le courage leur a aussi manqué. Il ne leur restait qu'un demi-talent qui a consisté à gaspiller la bravoure de leurs hommes au point d'abandonner le pays pour s'enfuir, tromper et livrer à leur propre sort des millions de gars qui avaient osé se battre jusqu'au bout avant d'être jetés dans les camps des rouges. Pourtant, toute honte bue, ils ont continué à parader, et prétendu rester "père et mère du peuple", ce qui est vraiment insupportable. Ce passé ignoble que les contemporains peuvent oublier, l'Histoire ne saurait le pardonner. L'anticommunisme reste légitime mais le discours de ces messieurs les grands chefs d'autrefois est devenu inacceptable. […] Seuls les sans grades, qui jadis ont dû courber l'échine sous les ordres, et les jeunes ont aujourd'hui le droit de parler et la légitimité pour agir.
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