Parmi les écrivains qui ont le plus contribué au rapprochement et à la réconciliation, plus ou moins volontaire, de la philosophie et des sciences, nous devons citer au premier rang M. Cournot. Savant lui-même, et mathématicien distingué, il est naturellement plus versé que la plupart des savants dans les questions philosophiques. Il a même en philosophie plus de connaissances précises et de compétence que n'en avait Auguste Comte. Il lui a manqué, pour exercer une certaine influence, d'avoir su condenser sa doctrine dans quelques formules brèves et larges, faciles à retenir et qui dispensent de penser : ce qui a été l'un des grands mérites de l'inventeur du positivisme. M. Coumot est un esprit fin et subtil ; il se plaît dans l'analyse plus que dans la synthèse ; il a des vues flexibles et onduleuses qui ne laissent pas facilement résumer ni dans un sens, ni dans l'autre.
Tandis que les philosophes s'éloignaient des sciences, les savants, de leur côté, acceptaient sans trop de déplaisir et encourageaient eux-mêmes cette séparation. Ils avaient leurs raisons, comme les philosophes avaient les leurs. C'était le souvenir de Descartes qui les tenait en garde.
28 mars 1875
Le mouvement philosophie en France, depuis une vingtaine d'années, présente un spectacle intéressant, mais complexe et confus. Les anciennes écoles se sont brisées et plus au moins mêlées, sans qu'il se soit encore formé de leurs débris des écoles nouvelles.